Intervention de Olivier Véran

Réunion du mercredi 4 novembre 2020 à 16h30
Mission d'information sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de coronavirus-covid 19 en france

Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé :

Madame Taurine, j'imagine que vous faites allusion à la passation de pouvoir entre Mme Buzyn et moi-même, lorsque vous évoquez la date du 16 février – il s'agit peut-être du 17 février au matin. Nous avons abordé un certain nombre de dossiers relatifs au fonctionnement du ministère des solidarités et de la santé et ses grands enjeux. Nous avons évidemment abordé la question de l'épidémie de covid-19. Nous y avons tous deux fait allusion dans nos discours respectifs de passation de pouvoir.

Les discussions que nous avons eues portaient sur l'organisation des structures, à la fois nationale et décentralisée, pour lutter contre l'épidémie. Par ailleurs, je ne découvrais pas le virus, madame Taurine : non seulement je suivais la question de près, en tant que parlementaire médecin, mais aussi, comme député de Grenoble, j'étais, quelques jours avant d'être nommé ministre, et bien loin de savoir que j'allais l'être, au CHU de Grenoble pour accompagner Mme Buzyn. Nous nous sommes rendus dans un service de maladies infectieuses, où étaient hospitalisés un père anglais et ses deux enfants, contaminés à Contamines-Montjoie. J'avais rencontré les équipes médicales et m'étais intéressé à cette question aux enjeux essentiels. Nous n'avons pas évoqué les élections municipales ni le terme que vous avez employé. Néanmoins, nous avons accordé le plus grand sérieux à la question du risque épidémique, tant et si bien que mon premier déplacement, le soir même du jour de ma prise de fonction, a eu lieu à l'hôpital Bichat, à la rencontre du directeur de l'AP‑HP, du directeur de l'ARS, des équipes de médecins infectiologues et réanimateurs. J'ai rencontré la fille du premier patient décédé en France, le fameux patient chinois, qui était en phase de guérison. Cette préoccupation a été constante et immédiate, dès ma prise de fonction.

Concernant les stocks de masques, j'étais évidemment informé lors de ma prise de fonction de l'état des stocks, puisque les chiffres avaient été donnés à Agnès Buzyn avant son départ, à savoir 117 millions de masques adultes non périmés et une absence de stocks stratégiques de masques FFP2. J'ai communiqué très régulièrement sur l'état de ces stocks, notamment puisque nous déstockions des masques à destination des professionnels de santé. Chaque conférence de presse faisait l'objet d'un rappel des chiffres à date.

Sur la gestion des masques ces dix dernières années, je ne peux rien vous dire. Premièrement, je ne dispose pas de tous les éléments qui permettraient de répondre. Deuxièmement, il appartient à ceux qui étaient en charge sur la période de répondre et d'expliciter leurs choix et leurs décisions. La mission d'information a eu l'occasion d'entendre l'ensemble de mes prédécesseurs. En revanche, je partage votre souhait de faire la lumière sur les processus qui ont conduit à cette situation. Vous pouvez compter sur ma participation et sur celle de mes services ministériels.

Sur l'augmentation et la préparation des services de réanimation, je pense avoir longuement répondu, chiffres à l'appui, sur nos actions au cours de la première vague, et sur les dispositifs que nous mettons en place, jour après jour, dans les hôpitaux.

Monsieur Démoulin, vous souhaitez savoir pourquoi nous fermons les restaurants et laissons ouverts les transports en commun. Les différences sont nombreuses. Dans un restaurant, nous enlevons le masque lorsque nous mangeons, et nous retrouvons avec d'autres personnes, en milieu fermé, sans masque alors que dans les transports en commun, le port du masque est obligatoire tout le long du trajet. Des données et des études tendent à montrer que le risque de contamination n'est pas négligeable. Nous sommes dans une démarche empirique, puisque nous apprenons de l'expérience et de l'observation. J'ai cité hier soir, dans l'hémicycle, l'exemple québécois, où, grâce à la fermeture des bars et des cafés, une stabilisation de l'épidémie a été constatée. Cet argument s'ajoute aux nombreuses études publiées sur le sujet en Europe et aux États-Unis.

Les transports en commun sont fondamentaux pour le fonctionnement de notre pays. Si nous les supprimons en Île-de-France, comment pourrions‑nous permettre aux habitants des petite et grande couronnes de travailler à Paris, et vice‑versa ? Nous souhaitons préserver la dynamique de l'emploi et de l'éducation. Nous menons une politique de réduction des risques, tout en sachant que le risque zéro n'existe pas, sans paralyser le pays. Nous avons fait le choix de maintenir l'éducation pour les enfants, le travail pour les Français, les achats absolument indispensables au quotidien. Pour le reste, nous demandons aux Français de rester chez eux. Pour faire leurs achats, travailler et emmener leurs enfants à l'école, un grand nombre de Français utilisent les transports en commun, raison pour laquelle nous les maintenons. Nous ne constatons pas d'explosion de clusters dans les transports en commun. Les études en cours ne permettent pas d'identifier un risque plus élevé. Cependant, ce n'est pas parce que le risque n'est pas identifié qu'il n'existe pas. Par exemple, le président Mélenchon avait dit que la plupart des clusters étaient liés au travail : factuellement, cela est vrai, mais cela ne rend pas compte de la situation épidémique, puisque les clusters constituent une part infime des contaminations. Il existe un énorme biais dans la manière dont on peut déterminer l'origine de la contamination. Une étude très intéressante est actuellement menée par le professeur Fontanet, qui permet une analyse rétrospective assez fine des conditions de contamination dans un certain nombre de cas.

La coordination des résultats de la recherche est évidemment nécessaire, pour évaluer les solutions efficaces. La production industrielle devra aussi être coordonnée ; toutes les chaînes de production devront se concentrer sur les vaccins qui fonctionnent. Cependant, il nous faut aussi diversifier la recherche. Pour dix vaccins en cours d'étude, je ne sais pas combien seront efficaces et sûrs. Quatre grandes modalités de vaccination, très différentes, sont en cours d'étude. Le moment venu, toutes les forces devront être concentrées pour produire des vaccins en milliards d'exemplaires ! Le temps de production des vaccins sera forcément long.

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