Intervention de Olivier Véran

Réunion du mercredi 4 novembre 2020 à 16h30
Mission d'information sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de coronavirus-covid 19 en france

Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé :

Il ne me revient pas et il ne m'est jamais revenu d'émettre quelque prédiction que ce soit. Ainsi, vous ne m'avez jamais entendu nier la possibilité qu'il puisse y avoir une deuxième vague, ni l'affirmer avant l'heure. Mon rôle est d'anticiper et de prendre toujours les décisions les plus à même de protéger la population et de préparer notre système de santé.

Le Conseil scientifique, vous l'avez dit, avait évoqué la possibilité d'une deuxième vague. Nous la considérions nous aussi, dès la première vague, comme une hypothèse susceptible de se réaliser. Et je crois même m'être un jour emporté – moins qu'hier, monsieur le rapporteur – contre une prédiction d'un scientifique qui affirmait qu'il n'y aurait jamais de deuxième vague et que le virus mourrait sous l'effet de la chaleur de l'été. Vous pouvez m'accorder cela.

Quoi qu'il en soit, nous avons toujours envisagé la possibilité qu'il puisse y avoir une deuxième vague, d'autant plus qu'il y en a eu dans d'autres pays. L'Allemagne a ainsi appliqué des reconfinements partiels dans certains secteurs de son territoire alors même que nous venions d'achever notre propre déconfinement.

Je pourrais également vous parler des épisodes épidémiques qui ont émaillé la période en Guyane, où je me suis rendu avec Jean Castex, et que nous avons réussi à endiguer avec l'ensemble des professionnels de santé sur place. Je pourrais aussi vous entretenir de la Mayenne, où je me suis également rendu au début de l'été dans un contexte de reprise épidémique, notamment dans les abattoirs, ce qui nous a amenés à déclencher des tests massifs auprès de la population et à mettre en place des mesures d'isolement et de protection. Et nous avons réussi, là aussi, à endiguer ce départ potentiel de deuxième vague.

Dans nombre de mes interventions estivales, que vous pourrez retrouver aisément, j'ai expliqué qu'il y avait des signes de départs épidémiques dans certains territoires français, en lien avec certaines pratiques de convivialité telles que les événements organisés sur les rooftops, dont j'ai parlé à plusieurs reprises. Il y avait également des indicateurs de pilotage au quotidien, que nous n'avons pas cessé de suivre et de publier en toute transparence, et qui montraient que le virus commençait à repartir chez les jeunes dans certaines villes du Sud de la France, dont Marseille, mais pas seulement.

Forts de ce constat, nous avons tenu un Conseil de défense, non pas le 11 septembre, mais dès le mois d'août, qui a été dédié au moins en partie à la situation marseillaise et a donné lieu à des décisions telles que la fermeture anticipée des bars et restaurants à Marseille, à compter de 23 heures.

Nous étions bien avant le 11 septembre – j'y insiste, monsieur le rapporteur –, et d'ailleurs cela ne s'est pas fait sans douleur. Je me suis rendu le 26 août à Marseille, où j'ai rencontré des membres du secteur hospitalier et un grand nombre d'élus de la métropole pour leur expliquer ce qui était en train de se passer. Nous faisions alors face à des taux d'incidence, de l'ordre de 20 pour 100 000, qui nous paraîtraient bien faibles aujourd'hui mais où l'on décelait déjà une reprise épidémique, notamment chez les jeunes. Dans la mesure où ces derniers font moins de complications, il n'y avait pas d'impact sur les hospitalisations. De plus, comme il existe un décalage de quinze jours entre les diagnostics et le recours à l'hôpital, rien n'était visible.

À l'époque, nombre d'observateurs, dans le champ politique et au-delà, ont fait l'hypothèse que le virus aurait muté pour devenir moins dangereux, ou bien que seuls les jeunes seraient touchés, ou encore qu'une deuxième vague était impossible… « Circulez, il n'y a rien à voir ! » Le couvre-feu qui avait été fixé à 23 heures a ensuite été porté à minuit et demi. Il a fallu revenir sur la situation marseillaise lors d'un deuxième Conseil de défense.

Je crois m'être rendu à quatre reprises à Marseille entre août et octobre, mais je ne dis pas cela pour stigmatiser cette ville. Beaucoup trop d'encre a coulé à propos des difficultés que nous y aurions connues. J'ai partagé le diagnostic de la situation avec la maire de Marseille dès la mi-août, comme d'ailleurs avec l'ensemble des élus de la métropole. Il fallait des mesures qui soient comprises par la population, acceptables et efficaces.

Nous n'avons eu de cesse de tenir des conseils de défense et de sécurité nationale abordant la question de la reprise épidémique du virus et de prendre des décisions visant à enrayer sa diffusion sur l'ensemble du territoire, de façon d'abord territorialisée et différenciée, puis nationale avec le couvre-feu et, ensuite, le reconfinement.

J'aurais pu entendre le reproche d'avoir ignoré la possibilité d'une deuxième vague si nous étions restés les bras croisés à regarder le virus se développer et se multiplier. Ce n'est pas ce qui s'est passé. Je laisse chacun apprécier si nous avons fait suffisamment et agi suffisamment tôt, mais enfin, quelles que soient les décisions que nous ayons prises depuis le mois de mars, c'était soit trop tôt, soit trop tard, ou encore les deux à la fois ! Sachez toutefois que nous avons agi en conséquence des données qui nous étaient transmises, de manière à toujours garantir la protection de la population.

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