Intervention de François-Marie Bréon

Réunion du mardi 2 juillet 2019 à 17h15
Commission d'enquête sur l'impact économique, industriel et environnemental des énergies renouvelables, sur la transparence des financements et sur l'acceptabilité sociale des politiques de transition énergétique

François-Marie Bréon, chercheur au Laboratoire des sciences du climat et de l'environnement de l'Institut Pierre-Simon Laplace :

C'est effectivement quelque chose que je connais bien. Des membres du laboratoire dont je suis directeur-adjoint travaillent sur ces questions, je suis donc bien obligé de m'y intéresser, même si je n'y travaille pas directement moi-même.

Pomper directement le carbone de l'air, ce n'est pas du tout efficace, cela demande énormément d'énergie ; je n'y crois pas tellement.

En revanche, la végétation est extrêmement efficace pour pomper le carbone de l'air – la végétation avec le soleil, en fait. Les solutions de décarbonation passent, pour moi, par une exploitation, évidemment raisonnée, de la végétation. Ce qui est envisagé et qui me paraît assez crédible, c'est d'exploiter la forêt. Le carbone stocké par la forêt peut être laissé sur place, ce qui est déjà pas mal, ou bien on en fait du bois d'œuvre. On peut imaginer que les bâtiments pourraient comporter plus de bois qu'aujourd'hui. Le bois, ce n'est jamais que du carbone stocké. Si nous arrivons à le stocker sur le long terme, c'est une bonne chose.

Des solutions qui vont plus loin technologiquement sont aussi envisagées, comme le fait de brûler ce bois dans des centrales qui produisent de l'électricité et de récupérer le dioxyde de carbone produit par la combustion pour l'injecter dans le sous-sol. Des expériences pilotes sont déjà menées. Un certain nombre de personnes jugent que le potentiel est important. D'ailleurs, le stockage du carbone dans le sous-sol figure largement dans les scénarios du GIEC dans lesquels le climat est stabilisé. C'est techniquement possible, il n'y a pas de doute. Les sites favorables existent, mais il n'y en a pas partout, et cela requiert tout de même des investissements importants. Tout cela ne pourra donc se développer que si le carbone a un prix assez élevé, mais cela paraît faisable.

Ensuite, la question de l'acceptabilité sociale pourra être posée. Les gens seront-ils d'accord pour avoir du dioxyde de carbone sous pression sous leurs pieds ? Je suis certain qu'il y aura des oppositions ; on peut bien sûr y faire face. À titre personnel, je serais beaucoup plus à l'aise si des déchets nucléaires solides sont enfouis dans une couche d'argile à 500 mètres de profondeur que si du dioxyde de carbone se trouve sous pression au même endroit. Je crains bien plus un relargage de dioxyde de carbone qui tuera tout le monde – plus lourd que l'air, le dioxyde de carbone reste en surface et tout le monde suffoquera – que des déchets nucléaires, sous forme solide, dont la remontée prendra bien longtemps.

Pour ma part, j'aurais plus protesté contre la présence de CO2 sous pression dans mon sous-sol que contre des déchets nucléaires – je fais un peu de provocation.

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