Intervention de Laurent Nuñez

Réunion du mercredi 26 février 2020 à 14h05
Commission d'enquête chargée de faire la lumière sur les dysfonctionnements ayant conduit aux attaques commises à la préfecture de police de paris le jeudi 3 octobre

Laurent Nuñez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Intérieur, ancien directeur général de la sécurité intérieure :

Je ne vois pas de divergence. Pour commencer, je ne fais pas miens les propos de ceux qui vous ont dit qu'à la DRPP on ne s'occupe que de l'extérieur. Ce n'est pas vrai : je l'ai vécu pour d'autres cas, je vous l'ai dit. Je répète que lorsque j'ai quitté la préfecture de police de Paris, en mars 2015, les nouvelles procédures en étaient à leur début mais, malgré cela, des cas nous ont été signalés sur la foi de signalements oraux. La culture de l'écrit arrive peut-être en 2017 parce qu'une instruction est diffusée en vertu de laquelle quiconque détecte un comportement radicalisé doit produire un écrit ; pour ma part, j'ai eu à connaître de signalements oraux, je peux vous l'assurer. J'ai ainsi en tête le souvenir d'un certain fonctionnaire que nous avons désarmé puis radié après une procédure enclenchée sur la base d'un signalement oral de sa hiérarchie, signalement opportun puisque la radicalisation de l'individu a été avérée. Nous étions attentifs et nous le restons.

En l'espèce, le problème ne tient pas tant à l'absence de signalement écrit qu'au fait que certaines informations portées à la connaissance de la hiérarchie intermédiaire ne sont pas allées au-delà. Voilà ce qui est anormal. Mais l'on ne peut pas dire que la DRPP, même en 2015, ne s'occupait que de l'extérieur. Après les attentats commis en janvier cette année-là, nous pensions évidemment tous à des menaces endogènes, à des attaques projetées, mais nous étions aussi très attentifs à ce qui se passait à l'intérieur des services, d'autant que nous recevions alors du CIPD des circulaires nous invitant à former les agents à ce risque et à désigner des référents, et la sensibilisation se diffuse à tous les étages. Ensuite viennent ce à quoi vous faites allusion : des instructions demandant de formaliser plus précisément la nature d'un signalement. Á ma connaissance, c'est postérieur à 2015 ; à l'époque, les signalements remontaient par la voie hiérarchique, et je peux vous assurer que le préfet Bernard Boucault et moi-même avons eu à connaître et à traiter d'un certain nombre de cas. Je ne comprends donc pas pourquoi ces éléments ne sont pas remontés mais, évidemment, je ne conteste pas l'existence de signaux que j'ai qualifiés de « faibles » parce que l'on a malheureusement entendu beaucoup de phrases de ce type après les attentats contre Charlie Hebdo. Mais que quelqu'un tienne de tels propos dans un service de renseignement aurait évidemment dû être porté à connaissance, et ce n'est pas parce que la personne considérée s'en excuse ensuite que l'épisode doit être minimisé, d'autant qu'il était corroboré par d'autres signaux faibles. L'accumulation aurait dû conduire à ce que le signalement remonte, et je ne comprends pas que l'on ait pu vous dire que l'on ne s'occupait que des traitements extérieurs. Pour avoir été l'un des acteurs concernés, je peux vous dire que c'est faux.

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