Intervention de éric Morvan

Réunion du mercredi 29 janvier 2020 à 15h30
Commission d'enquête chargée de faire la lumière sur les dysfonctionnements ayant conduit aux attaques commises à la préfecture de police de paris le jeudi 3 octobre

éric Morvan, directeur général de la police nationale :

Je m'adresse à des législateurs : il est très difficile de légiférer sur la radicalisation au regard des normes supérieures qui sont opposables. Vous aurez un carcan, la Constitution au niveau national, mais également le droit européen. On parle de la radicalisation, comme on pourrait parler du communautarisme, qui est également un souci évoqué par le Président de la République. On a raison de s'en inquiéter quand on voit – nous sommes en période électorale – le risque de problèmes vis-à-vis des principes fondateurs de la République.

Pour revenir au cadre juridique, nous avons des exemples de fonctionnaires de police qui ont été révoqués sur la base de ces principes. De mémoire, au moins l'un d'eux est allé devant le tribunal administratif, la décision a été annulée et nous avons dû le réintégrer… Cela peut expliquer d'ailleurs – peut-être est-ce une difficulté supplémentaire – que l'administration « mette des patins », prennent des précautions, pour éviter d'être censurée par la juridiction administrative, dont il est arrivé qu'elle nous déjuge. Peut-être y a-t-il une sorte d'inhibition.

Après l'affaire Harpon, il y a eu une sorte de frénésie réactive. Nous avions un petit stock de fonctionnaires suivis, et tout à coup, on a franchi une marche avec une centaine de cas supplémentaires. Parmi les cas un peu emblématiques de la préfecture de police, il y a celui d'un officier dont le préfet de police demande la suspension pour des raisons dont je suis absolument persuadé qu'elles seront rejetées par le tribunal administratif.

Cette réaction après l'affaire Harpon, on la connait par ailleurs : lorsque, après l'attentat à Lyon, le préfet Comet a été démis de ses fonctions, tous les préfets de France, soucieux de se protéger, ont fait reconduire dans les centres de rétention administrative, les CRA, tous les étrangers en situation irrégulière qui leur tombaient sous la main. Cela a conduit d'abord à ce que les CRA soient surchargés ; ensuite à ce que le taux d'éloignement s'effondre, puisqu'on a mis tout le monde en CRA, y compris les personnes de nationalités non reconductibles. Nous sommes dans ce faisceau d'injonctions un peu contradictoires.

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