Intervention de Frédéric Rose

Réunion du mercredi 22 janvier 2020 à 16h30
Commission d'enquête chargée de faire la lumière sur les dysfonctionnements ayant conduit aux attaques commises à la préfecture de police de paris le jeudi 3 octobre

Frédéric Rose, secrétaire général du comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation :

Le suivi individuel des personnes ne relève pas du CIPDR. À titre d'exemple, nous n'avons pas accès au fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT). Nous n'assurons pas un suivi nominatif. Notre action de prévention fait essentiellement appel à de la formation, de l'animation et de la coordination de réseaux de référents.

La formation constitue le cœur de notre action, qui est aujourd'hui largement partagée et doit être menée sans relâche. La radicalisation a souvent fait l'objet d'une approche sinusoïdale : lors des pics de tension, consécutifs à des attentats, on se remobilise, on réactive les réseaux. Le Premier ministre et le ministre de l'Intérieur m'ont chargé de maintenir un niveau de vigilance permanent, grâce à un renforcement de la formation et à l'animation du réseau des référents.

Le programme de formation piloté par le SG-CIPDR remonte à 2014, année de la montée en puissance des différents dispositifs, notamment dans le cadre du plan de lutte antiterroriste. Il y a plusieurs niveaux de formations : elles peuvent être nationales, interministérielles ou locales. Nous organisons depuis 2014 des sessions nationales de deux jours, comprenant huit modules thématiques. Ce sont des formations globales qui permettent d'aborder l'ensemble des questions relatives à la radicalisation, des concepts clés de l'islam à la géopolitique en passant par les processus de radicalisation, l'état de la menace ou encore la réponse publique en matière de prévention. Depuis 2014, nous avons assuré 34 sessions de formation au plan national, auxquelles ont participé 3 250 personnes.

Nous avons également décidé de travailler au plus près du terrain, car nous avons constaté que les besoins étaient nombreux à ce niveau. Il n'est pas toujours évident, dans les préfectures, de bâtir des formations à la prévention de la radicalisation avec les ressources locales. Aussi avons-nous passé un marché national de la formation qui est principalement destiné aux préfectures. Trois thématiques ont été retenues dans ce cadre en 2018-2019 : les concepts clés de l'islam, la prise en charge des personnes en voie de radicalisation ou radicalisées et la prévention de la radicalisation dans le sport, domaine qui fait l'objet d'une vigilance renforcée. Ces formations sont assurées dans les préfectures et sont généralement suivies par des acteurs locaux – pas nécessairement des agents de l'État.

Nous sommes très attentifs à ces actions et nous encourageons les préfets à proposer des formations interservices, pluridisciplinaires, car il est intéressant de croiser les approches. Nous essayons, par exemple, de développer des formations rassemblant des agents des services de renseignement, des services préfectoraux, sociaux ou du ministère de la Justice. Cela permet d'avoir des formations partenariales, favorisant des échanges sur les pratiques. En 2018 et en 2019, ont été assurés dans ce cadre 69 actions de formation, dont près de 3 500 personnes ont bénéficié.

À côté des formations faisant l'objet d'un pilotage du SG-CIPDR, il en existe d'autres qui sont assurées par les ministères. Chacun d'eux organise et conduit son propre programme, même si, bien souvent, nous y sommes associés. Le ministère de l'Intérieur, par exemple, assure des formations très complètes qui sont destinées aussi bien à des policiers qu'à des gendarmes. Nous pourrons revenir sur ce sujet si vous le souhaitez.

Nous souhaitons renforcer l'activité de formation – qui, je l'ai dit, est le cœur de notre action –, notamment pour nous assurer que les acteurs de terrain en bénéficient. Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, il y a eu une évolution sinusoïdale. Les agents ont largement bénéficié de formations en 2017 et en 2018, puis la courbe est redescendue, en raison d'une retombée de la pression mais aussi du turnover des agents – ils restent, on le sait, deux ou trois ans dans la plupart des services. Il faut donc à chaque fois recommencer, reformer les agents, relancer un programme de formation. Avec le concours de l'ensemble des préfectures de France, de métropole et d'outre-mer, nous sommes en train de dresser un inventaire des formations qui ont déjà été menées, d'identifier les demandes de formation que les préfectures pourraient exprimer à l'avenir et de construire les outils les plus appropriés pour répondre aux besoins des acteurs de terrain. On sait bien, en effet, que c'est là que les choses se passent : les cadres doivent être formés à la prévention de la radicalisation, mais il faut que les agents de terrain – de contact, notamment – le soient aussi.

L'autre grand levier d'action, que j'ai déjà évoqué, est la création de référents – c'était d'ailleurs l'objet d'une des questions écrites que vous nous avez adressées. Dans le cadre du PNPR, les ministères ont institué des référents dans la plupart des services de l'État.

Au sein des préfectures, 101 « référents radicalisation » ont été désignés pour animer le travail réalisé en matière de prévention et en particulier pour organiser des formations.

Les agences régionales de santé se sont également mobilisées : elles disposent de 17 référents régionaux et de 101 référents départementaux.

Le réseau sportif s'est doté de 118 référents au sein des directions départementales de la cohésion sociale et des directions régionales de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale. Il en existe aussi dans les fédérations et les établissements de formation sportive – les centres de ressources, d'expertise et de performance sportive (CREPS) et l'Institut national du sport, de l'expertise et de la performance (INSEP). Au total, plus de 200 référents ont été désignés dans le réseau sportif.

Le ministère de la Justice n'est pas en reste. Tous les parquets disposent de référents en matière de radicalisation et d'assistants spécialisés. Les référents peuvent suivre des dossiers spécifiques et ils sont également en charge de la formation, en lien avec les magistrats délégués à cette question. S'agissant des services pénitentiaires, chaque direction interrégionale a un référent – il en existe donc neuf. Les services d'insertion et de probation peuvent aussi s'appuyer sur un réseau de référents.

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