Intervention de Nathalie Senikies

Réunion du mercredi 18 novembre 2020 à 14h00
Commission d'enquête pour mesurer et prévenir les effets de la crise du covid-19 sur les enfants et la jeunesse

Nathalie Senikies, de l'Association de solidarité avec les mineurs isolés étrangers (ASMIE) :

Ce jeune, Mamadou Saïdou Diallo, est pris en charge en tant que mineur mais il est toujours dans le premier hôtel dans lequel la Croix-Rouge place les jeunes. Il attend depuis huit mois qu'un éducateur le prenne en charge et pour pouvoir aller à l'école. Il est actuellement tout seul, livré à lui-même, à ne manger qu'une fois par jour des petits sandwichs. La vidéo montre bien la nourriture qui est proposée. Ce jeune ne sait pas ce qu'il attend puisque personne ne lui explique ce qui va se passer. La Croix-Rouge lui a simplement dit qu'elle le prenait mais il ne possède aucun document qui l'atteste et il est en attente de transfert. Ce jeune pourra alors être envoyé n'importe où en France selon la répartition nationale, à un endroit où il ne sera peut-être pas attendu, sans aucune place, où il devra de nouveau suivre tout le processus. Il pourrait tout aussi bien rester à Paris mais pour l'instant, il n'en sait rien. Depuis huit mois, à l'âge de 15 ans, où l'école est obligatoire en France, il n'est pas scolarisé. Comment, psychologiquement, ce jeune va-t-il pouvoir se construire ? Il n'est pas pris en charge, ni médicalement ni psychologiquement. Que deviendra-t-il ? Comment peut-il tenir moralement ?

Cette situation n'est pas du tout anecdotique. 600 jeunes sont passés par l'association, avec des situations quasiment similaires. De l'argent public est mobilisé, pour des hôteliers notamment. Certains sont des marchands de sommeil et sont abjects avec les jeunes. Ils sont payés pour leur faire à manger sans leur donner quoi que ce soit, comme nous avons pu le voir lors du premier confinement. Nous avons dû nous déplacer dans chaque hôtel de la région parisienne pour aller leur apporter à manger, grâce à la récupération alimentaire et aux ateliers cuisine que nous organisons à l'aide de bénévoles. Ce n'est pas à des bénévoles, qui ne sont pas payés et dont ce n'est pas le métier, de pallier tous les manquements de l'État, alors que de l'argent public est bien présent. Nous devrions juste avoir honte du traitement infligé à ces jeunes. Une Convention internationale des droits de l'enfant existe. La France est censée être le pays des Lumières et des droits de l'homme. Je suis en colère mais je crois que celle-ci est justifiée. Je trouve que ces jeunes se comportent très bien par rapport à ce qu'ils endurent au quotidien. Imaginez votre enfant de 14 ans à la rue, en proie à tous les trafics, y compris sexuels. Je pense qu'après, la teneur de la discussion sera différente.

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