Confiance dans l'institution judiciaire — Texte n° 4146

Amendement N° 589 (Irrecevable)

Publié le 14 mai 2021 par : M. Jolivet.

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Texte de loi N° 4146

Avant l'article 21

Rédiger ainsi l’article 11-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décem­bre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature :

« Art. 11-1. – Les magistrats du corps judiciaire ne sont responsables que de leurs fautes personnelles.

« La faute personnelle se rattachant au service public de la justice est une faute présentant un caractère inexcusable.

« La responsabilité des magistrats ayant commis une faute personnelle se rattachant au service public de la justice peut être engagée dans les mêmes conditions que la procédure de prise à partie prévue au chapitre III du titre X du livre Ier du code de procédure civile. »

Exposé sommaire :

Le principe démocratique veut que chaque pouvoir émanant du peuple soit corrélé à une responsabilité, toute personne qui en est le dépositaire devant pouvoir répondre de ses actes.

Dans le domaine de la Justice, il est ainsi nécessaire que les juges puissent être mis en cause lorsque, dans le cadre de leurs fonctions, ils causent un dommage ou transgressent leurs obligations.

Cependant, cette exigence rentre inévitablement en contradiction avec un autre principe démocratique : l’indépendance de l’institution judiciaire. L’État de droit doit garantir la liberté de jugement et l’autorité de la chose jugée, sous peine de saper l’impartialité de la Justice et d’en faire un instrument au service des intérêts particuliers.

Les démocraties doivent donc trouver un équilibre entre ces deux impératifs constitutifs de la légitimité de la Justice.

Aujourd’hui, force est de constater que cet équilibre est rompu. Alors que son influence s’accroit, la Justice n’en demeure pas moins toujours plus opaque. Elle fonctionne en autonomie dans sa bulle de complexité, et cette tendance est largement renforcée par sa professionnalisation. Les réformes et les changements y sont accueillis avec réticence, voire opposition. Sa séparation vis-à-vis du pouvoir politique est une des bases essentielles de la République, mais ce principe ne doit pas être un prétexte à une organisation autarcique. La Justice ne travaille pas à son propre compte, et doit rendre ses arrêts au nom du peuple français.

La montée en puissance des pouvoirs de la magistrature est un phénomène indéniable. Toutefois, cette montée en puissance doit impérativement aller de pair avec une responsabilité équivalente, sous peine d’entamer sérieusement la légitimité de l’institution.

L’ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature pose un principe général : « Les magistrats ne sont responsables que de leurs fautes personnelles ». Si la faute du magistrat est dénuée de tout lien avec l’exercice de ses fonctions, il est logiquement responsable dans le cadre du droit commun.

À l’inverse, lorsque cette faute personnelle se rattache au service public de la Justice, les citoyens s’estimant lésés ne peuvent intenter une action qu’à l’encontre de l’État. Cette solution est la conséquence de la loi organique du 18 janvier 1979. L’État peut ensuite se retourner contre le magistrat concerné, mais cela n’est encore jamais arrivé. De ce fait, les magistrats professionnels n’ont jamais à répondre de leurs fautes personnelles, contrairement aux autres juges qui peuvent être directement pris à partie par les justiciables.

Cet amendement propose de modifier l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décem­bre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, et plus précisément son article 11-1, qui crée ce régime d’impunité. Il instaure la possibilité d’une mise en cause directe de la responsabilité personnelle des magistrats du corps judiciaire dans le cas d’une faute inexcusable, qui est définie par la jurisprudence comme étant une faute résultant d’une grave négligence.

Si un justiciable s’estime lésé du fait d’une grave négligence d’un magistrat dans l’application de ses fonctions, il pourra engager la responsabilité de celui-ci dans les mêmes conditions que la procédure de prise à partie des juges non-membres du corps judiciaire prévue au chapitre III du titre X du livre Ier du Code de procédure civile.

Faire la transparence, pour rétablir la confiance, semble être la condition essentielle de la crédibilité de la Justice, qui conditionne pour partie celle de nos institutions républicaines. Ses ratés, ses dysfonctionnements, sa complaisance, alimentent la déconsidération de l’autorité républicaine et sape en retour l’attachement de nos concitoyens à la démocratie.

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