Commission des affaires sociales

Réunion du mercredi 14 février 2024 à 9h00

Résumé de la réunion

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La réunion

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La réunion commence à neuf heures cinq.

La commission examine la proposition de loi visant à reconnaître la responsabilité de l'État et à indemniser les victimes du chlordécone (n° 2061) (M. Elie Califer, rapporteur).

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92 % des Martiniquais et quatre-vingt-quinze pour cent des Guadeloupéens sont contaminés ; les enfants, qui sont l'avenir de notre pays, sont contaminés – et ce pour plusieurs générations. Le chlordécone est une véritable bombe sanitaire dans nos territoires : on n'en connaît pas encore toutes les conséquences. Ses liens avec plusieurs maladies et troubles qui prévalent chez nous ont déjà été établis. Si de nombreux champs restent à explorer, la recherche scientifique a d'ores et déjà mis en évidence le lien entre certains troubles du développement et l'exposition au chlordécone, qui est un perturbateur endocrinien. L'exposition à ce produit augmente le risque de survenue de plusieurs maladies : elle est significativement corrélée à une hausse du risque de déclarer un cancer de la prostate ou de le voir récidiver après avoir été traité chirurgicalement, comme le déclarent plusieurs chirurgiens, dont le professeur Blanchet.

Une étude de cohorte menée en Guadeloupe a par ailleurs mis en évidence un lien entre l'exposition des femmes enceintes à ce produit et la survenue de problèmes de santé chez les enfants ou encore l'accroissement du risque de prématurité. L'exposition postnatale des enfants s'avère quant à elle liée à des troubles du néodéveloppement, voire du développement staturo-pondéral : l'obésité infantile pourrait ainsi compter parmi les conséquences d'un contact précoce avec le chlordécone. Nos auditions nous ont confirmé que l'exposition à ce produit pouvait provoquer de nombreuses maladies hormono-induites.

Pour décrire cette situation, l'ONU parle de « territoires sacrifiés ». La Martinique et la Guadeloupe sont des terres sacrifiées. Classé dès 1979 comme cancérigène possible par l'Organisation mondiale de la santé (OMS), le chlordécone fut utilisé jusqu'en 1993 pour combattre le charançon dans les bananeraies de Martinique et de Guadeloupe. Pire encore, cette utilisation était autorisée. Dès les années 1970, les données toxicologiques avaient pourtant convaincu les autorités de nombreux pays – les États-Unis, la Suède, la République démocratique allemande, la République fédérale d'Allemagne, ou encore l'Espagne – d'en interdire l'usage ou la production. Les préjudices provoqués sur le site de production de Hopewell aux États-Unis avaient donné lieu à un processus d'indemnisation et de réparations.

L'État savait : sa responsabilité n'est plus à établir, elle est manifeste, incontestable. Comme l'ont montré les travaux de la commission d'enquête parlementaire de 2019, réunie à l'initiative du groupe Socialistes et apparentés et présidée par Serge Letchimy, la toxicité du chlordécone était connue et son utilisation prolongée résulte de décisions, très souvent dérogatoires, prises par l'État, auquel il revenait, aux termes de la loi du 2 novembre 1943 relative à l'organisation du contrôle des produits antiparasitaires à usage agricole, d'autoriser ou non son usage et la mise sur le marché des produits à usage agricole. La loi du 22 décembre 1972 relative à l'organisation du contrôle des produits antiparasitaires à usage agricole faisait quant à elle obligation à l'État, avant d'homologuer un produit phytosanitaire, d'en vérifier l'efficacité et l'innocuité à l'égard de la santé publique, des utilisateurs, des cultures et des animaux, puis d'en prescrire et d'en surveiller les conditions d'emploi.

Le scandale du chlordécone – car c'en est un – résulte de ces décisions de l'État, qui ont permis qu'un pesticide hautement toxique soit utilisé sans précautions particulières pendant deux décennies. Il résulte également du retard considérable avec lequel l'État a pris la mesure de la situation et reconnu l'immense préjudice environnemental, économique et sanitaire dont les territoires et les populations de Martinique et de Guadeloupe sont victimes. Ce n'est qu'en 1990 que le chlordécone sera interdit en France – mieux : une dérogation l'autorisera encore aux Antilles jusqu'en 1993 !

Il est temps que la représentation nationale reconnaisse la responsabilité de l'État dans le scandale du chlordécone. Toute autre décision enverrait un très mauvais signal à nos territoires déjà ravagés par tant de maux et si vulnérables.

La mobilisation des associations de défense, des collectifs et surtout les alertes lancées par les scientifiques ont conduit le Gouvernement à élaborer des plans Chlordécone. Mais ceux-ci sont largement insuffisants. Ils sont en outre fragiles, car ils dépendent et dépendront de la volonté politique des gouvernements. Le rapport de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) souligne leur indigence eu égard à l'ampleur des problèmes. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : le plan Chlordécone IV bénéficie d'un budget de 130 millions d'euros pour la période 2021-2027, alors même que le seul coût de la dépollution pour les 20 000 hectares de terres arables est évalué à 3,2 milliards. Sur les 700 250 Martiniquais et Guadeloupéens contaminés, seuls 1,78 % sont en droit d'être indemnisés par l'administration du fait de leur statut de victimes professionnelles et seuls 0,007 % l'ont effectivement été à ce jour.

Selon certains scientifiques, de nombreuses générations souffriront des graves effets du chlordécone à cause de la rémanence de ce produit, du caractère reprotoxique de la molécule et des modifications épigénétiques qu'elle est susceptible d'entraîner – les enfants y seraient particulièrement sensibles, ce qui est déjà un drame. À l'heure où je vous parle, l'eau, les nappes aquifères, les rivières, les terres sont chlordéconées. Nous sommes encore bien éloignés de l'objectif zéro chlordécone.

Le regard des Martiniquais et des Guadeloupéens est rivé sur notre commission. Sur un tel sujet, il nous faut dépasser les considérations partisanes, car cette proposition de loi ne vise pas à incriminer telle ou telle majorité, telle ou telle opposition. Il s'agit d'inscrire dans la loi la reconnaissance de la responsabilité de l'État et de poser la première pierre d'un édifice législatif qui a vocation à être étoffé dans le cadre d'un dialogue entre le parlement, le gouvernement et les territoires. Comme l'indiquait le professeur Multigner, le ressentiment de la population ne saurait s'éteindre avant que la question des réparations n'ait reçu une réponse claire et nette. Le 27 septembre 2018, en Martinique, le Président de la République déclarait lui-même que ce scandale était « le fruit d'un aveuglement collectif ». C'est pour cela, pour ce que représente ce texte, que je vous demande de le voter.

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Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

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Je veux remercier notre collègue Elie Califer pour son initiative et dire très clairement que nous devons continuer de tout mettre en œuvre pour réparer, c'est-à-dire indemniser les victimes et dépolluer, mais aussi prévenir les risques futurs.

Ce n'est cependant pas l'objet de cette proposition de loi, qui vise à établir la responsabilité de la République dans la pollution au chlordécone dans les Antilles. Or une telle responsabilité ne peut se décréter par la loi, elle s'établit par décision de justice. Mais nous ne sommes pas des juges. La parole officielle de l'État est donc la garantie la plus solide de la reconnaissance de sa responsabilité. À ce titre, les Antilles ont été entendues et reconnues par la République. Son premier représentant, le président Emanuel Macron, a fait en 2018, durant la première année de son premier quinquennat, ce qu'aucun de ses prédécesseurs n'avait fait jusqu'alors : reconnaître officiellement la part de responsabilité de l'État.

Les actes sont maintenant l'essentiel. C'est pourquoi l'État met en œuvre la stratégie chlordécone, investit dans la recherche et accompagne les populations. Le fonds d'indemnisation des victimes de pesticide (FIVP) a ainsi permis d'indemniser les travailleurs exposés à la chlordécone et leurs enfants. Faut-il aller plus loin ? Oui ! Comment ? En continuant d'agir concrètement. C'est pourquoi le groupe Renaissance déposera un amendement visant à dépasser le caractère symbolique de cette proposition de loi, à garantir le soutien aux populations antillaises face aux dégâts de la chlordécone et à l'amplifier.

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L'Assemblée nationale se saisit enfin de ce sujet ! Dès le début de sa production, le chlordécone a semé la désolation sur son passage. En 1976, les travailleurs américains chargés de sa fabrication ont rapidement manifesté des symptômes si alarmants que les autorités décidèrent de renoncer à son utilisation pour raisons sanitaires. La France a pourtant ignoré ces avertissements et permis l'usage de ce produit dans les Antilles françaises jusqu'en 1993. Cette négligence a entraîné des conséquences dévastatrices : des milliers d'hectares de sol sont contaminés ; les rivières, les mers, les poissons empoisonnés, les élevages ruinés, et avec eux toute une économie locale. Les répercussions sur la santé des habitants sont dramatiques : le taux de cancers de la prostate est trois fois supérieur chez les personnes exposées. Des générations entières ont été frappées et les suivantes le seront pendant des décennies encore, pour les plus optimistes, voire, pour ceux qui le sont moins, pendant des siècles.

La population locale attend la reconnaissance officielle de la responsabilité de l'État et la mise en œuvre d'une véritable politique de réparation pour les nombreuses victimes. Si le Président de la République avait ouvert la voie à une reconnaissance partielle en 2018, ses déclarations de 2019 ont semé le doute. Sur ce sujet comme sur bien d'autres, le Gouvernement n'assure qu'un service minimum, qui n'est pas à la hauteur des préoccupations urgentes de nos compatriotes ultramarins. Les autorités françaises ne peuvent plus ignorer l'évidence : le chlordécone est un scandale. Il nous faut agir pour dépolluer les sols et indemniser les populations touchées par ce pesticide tout en reconnaissant la responsabilité de l'État dans le préjudice qu'elles ont subi. L'abandon de nos outre-mer a assez duré. C'est pourquoi nous voterons cette proposition de loi.

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Notre République a failli. Elle doit reconnaître ses responsabilités dans les préjudices subis par les territoires de Guadeloupe et de Martinique du fait du maintien sur le marché des produits à base de chlordécone. Ne laissons pas la minorité présidentielle vider cette proposition de loi de son contenu. Dès 1976, la justice américaine reconnaissait les dangers du chlordécone, qui est alors interdit. En 1979, l'OMS qualifie le chlordécone de cancérigène possible. C'est à son principe fondamental d'unité et d'indivisibilité que notre République a manqué quand, en 1990, elle a interdit l'utilisation de ces produits en métropole tout en l'autorisant par voie dérogatoire sur les territoires de Guadeloupe et de Martinique, contribuant ainsi à créer deux régimes de droit différents. Notre République n'a donc pas seulement failli à protéger ses citoyennes et ses citoyens des effets de ce pesticide toxique : elle les a différenciés selon qu'ils habitaient en métropole ou aux Antilles.

Le constat est sans appel : la quasi-totalité des Antillais, 92 % en Martinique et 95 % en Guadeloupe, ont été contaminés. Pendant des décennies, ce produit toxique a pénétré les nappes phréatiques, les rivières, les mers, les poissons, les cheptels, les fruits et les légumes. Cette contamination affecte le biotope et la santé des individus : elle accroît le risque de cancer de la prostate, d'accouchement prématuré, perturbe le système hormonal et le développement de l'enfant.

Notre République a failli, les victimes doivent obtenir réparation. L'indemnisation existante, soumise à des critères complexes et restrictifs ne concerne que les travailleurs. Chaque individu ayant été exposé doit pouvoir obtenir réparation.

Reconnaître la responsabilité de notre République et permettre l'indemnisation des victimes constitue un premier pas. Je remercie le groupe Socialistes pour cette initiative. Nous pensons cependant qu'il faut aller plus loin. Nous souhaitons engager un plan d'urgence pour la dépollution et la décontamination rapides des régions durablement polluées, priorité étant donnée aux Antilles. Il faut aussi créer une autorité administrative indépendante chargée d'indemniser les victimes et une commission de suivi des politiques publiques de lutte contre les effets du chlordécone.

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Très toxique, le chlordécone a été massivement utilisé entre 1972 et 1993 dans les bananeraies de Guadeloupe et de Martinique afin de lutter contre les charançons. En conséquence, la quasi-totalité des Guadeloupéens et des Martiniquais ont été contaminés par ce pesticide, qui reste très présent dans les sols et certains captages d'eau. On soupçonne la contamination d'être un facteur de risque pour la santé, comme le suggère sa corrélation avec l'augmentation du nombre de cancers de la prostate.

C'est pourquoi les populations antillaises, qui vivent une situation unique au monde, demandent depuis des années d'être reconnues et indemnisées pour le préjudice sanitaire et environnemental qu'elles ont subi. L'économie de la Guadeloupe et celle de la Martinique ont, elles aussi, été touchées puisqu'il est désormais impossible de vendre sur les marchés des produits agricoles issus des zones contaminées. La prise de conscience de ce problème a conduit l'État à élaborer une série de plans Chlordécone. Mais les actions engagées ont été tardives et ne sont pas adaptées : l'ampleur des contaminations rend une stratégie de long terme nécessaire.

Il faut apporter des réponses à toutes les victimes du chlordécone et tirer les leçons de ce drame afin qu'il ne se reproduise jamais. C'est pourquoi, si cette proposition de loi s'apparente à un dispositif exclusivement déclaratif, notre groupe salue la démarche et soutient l'objectif d'un texte que nous discuterons avec vigilance.

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La question du chlordécone suscite émotions, incompréhension et colère chez nos compatriotes antillais. En effet ce pesticide aura été épandu sur les bananeraies de deux départements français d'outre-mer, la Martinique et la Guadeloupe, pendant plus de vingt années, dont trois après qu'il eut été interdit en raison de sa dangerosité. Du fait de sa rémanence, ce produit a continué de contaminer sols, eaux, flore, faune, et malheureusement aussi la population, à travers la chaîne alimentaire.

Associations et élus se battent depuis des années pour faire reconnaître ce scandale, aux multiples conséquences – sur la santé, l'environnement, l'agriculture et l'économie – et pour que les victimes obtiennent réparation et se voient prises en charge. La proposition de loi de M. le rapporteur Califer participe de cette mobilisation.

Ces demandes ont été entendues. En 2018, le Président de la République, Emmanuel Macron, a reconnu solennellement la part de responsabilité de l'État touchant l'usage du chlordécone aux Antilles et invité à avancer sur le chemin de la réparation et des projets. L'État a pris ses responsabilités. Les plans Chlordécone successifs, l'abondement d'un fonds d'indemnisation pour les victimes reconnues, le lancement de l'étude « Kannari 2 : exposition de la population antillaise au chlordécone et à d'autres polluants », la gratuité des prises de sang, la reconnaissance des cancers de la prostate comme maladies professionnelles, la compensation des dommages économiques, le financement de la recherche constituent autant de mesures concrètes ; s'y ajoutera, très prochainement je l'espère, la création d'une structure dotée de moyens permettant d'absorber le chlordécone encore présents dans les eaux et les sols antillais.

Notre groupe ne soutiendra donc pas cette proposition de loi, que nous estimons déclaratoire et essentiellement symbolique. Elle nous aura cependant permis de faire état des problèmes liés à l'utilisation de pesticides reconnus comme dangereux. Espérons que cela pourra servir de leçon pour la France entière.

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Le chlordécone est le symptôme de « l'habiter colonial ». Cette relation particulière à la terre que décrit le philosophe et ingénieur martiniquais Malcolm Ferdinand a enfermé les Antillais à l'intérieur d'un système de monoculture d'exportation et transformé leur monde en plantation, de sorte que tous, même ceux qui n'y travaillaient pas, ont été contaminés par le chlordécone.

Cette proposition de loi nous offre l'occasion de réparer, d'admettre des responsabilités, d'ouvrir la voie à la dépollution et à l'indemnisation, bref, de redonner aux populations des Antilles un sentiment de justice, effrité depuis si longtemps. Je salue l'opiniâtreté de notre collègue socialiste Serge Letchimy, qui aura fait adopté à l'unanimité les conclusions d'une commission d'enquête historique et permis que nous ayons ce débat.

Je veux rappeler l'histoire de ce scandale, qui détruit des vies et qui détruit l'environnement, celle du mouvement ouvrier qu'il a suscité, celle des grèves de 1974, dont la répression aura fait plusieurs blessés et deux morts.

L'égalité des droits ne peut pas être simplement théorique ; nous devons légiférer pour la mettre en pratique. Cette proposition de loi est donc importante, nous la devons à nos compatriotes. C'est pourquoi la réécriture suggérée par le groupe Renaissance m'inquiète, menaçant la construction juridique que ce texte tend à édifier. Réduire la portée de ce texte risque de nous empêcher de parler clair à nos compatriotes de Guadeloupe et de Martinique, d'autant plus que l'action de l'État contre ce fléau est insuffisante.

Le documentaire de Florence Lazar nous rappelle l'horreur de cet empoisonnement de masse. Son titre, Tu crois que la terre est chose morte, est extrait d'une pièce de Césaire ; la réplique continue ainsi : « C'est tellement plus commode ! Morte, alors on la piétine... »

Chers collègues, montrons-nous à la hauteur des enjeux.

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Le sujet que nous évoquons me tient particulièrement à cœur et je tiens à remercier le rapporteur de son engagement constant sur ce dossier. Coauteur d'un rapport sur le FIVP lors du Printemps social de l'évaluation 2023, j'ai conscience de notre retard sur cette question. Dispositif créé en 2020, le FIVP vise à faciliter la reconnaissance des pathologies liées à une exposition professionnelle à des pesticides faisant ou ayant fait l'objet d'une autorisation de mise sur le marché. Il a notamment permis d'étendre le périmètre des personnes couvertes, de centraliser les demandes et d'en homogénéiser l'instruction, ou encore d'améliorer le niveau de réparation des non-salariés agricoles. Malgré des débuts difficiles, ce fonds est de mieux en mieux connu. On observe une augmentation très nette du nombre de victimes obtenant une indemnisation : ce nombre a été multiplié par trois en trois ans, soit un peu plus de 1 000 dossiers en 2023. Le montant total des indemnisations a quant à lui été multiplié par six en un an, pour atteindre 6,7 millions d'euros en 2022. Ce dispositif reste trop peu connu aux Antilles, malgré les mesures du plan Chlordécone IV, qui visent à le faire connaître.

Rappelons que le scandale du chlordécone résulte d'un choix collectif, associant élus, État, acteurs économiques, confrontés aux menaces qui pesaient sur une partie des exploitations et des emplois aux Antilles. Il convient d'apprécier l'ensemble des responsabilités engagées et non seulement celles relevant de l'État.

Notre groupe partage l'idée que nous pouvons encore faire beaucoup. Nous espérons que l'examen de cette proposition de loi permettra de trouver une formulation sûre du point de vue juridique, de compléter les travaux menés depuis 2020 sur ces enjeux en reconnaissant l'ampleur des dommages causés en Martinique et en Guadeloupe et d'inscrire dans la loi les ambitions de la stratégie chlordécone.

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90 % de nos compatriotes martiniquais et guadeloupéens vivent avec du chlordécone dans le sang. Ce poison provoque des cancers et fait de la Martinique et de la Guadeloupe les territoires les plus touchés du monde par le cancer de la prostate ; il augmente les risques de naissance prématurée et la survenue de myélomes multiples ; il accélère l'évolution de l'endométriose vers ses stades les plus graves. Ce poison contaminera encore plusieurs siècles les sols, les fleuves, la mer, les plantes, les animaux, les aliments et les habitants de Guadeloupe et de Martinique.

Ce scandale sanitaire, écologique et social est aussi un scandale d'État. En effet, nous ne serions pas dans cette situation dramatique sans la complicité active de l'État. Pendant trente ans, malgré les rapports des scientifiques et les mises en garde de l'OMS, l'État a autorisé l'utilisation du chlordécone. Il a accordé des dérogations en Guadeloupe et en Martinique alors même que le chlordécone était interdit sur le sol hexagonal. L'État a également failli, pendant de nombreuses années, en matière de prévention et de gestion de cette pollution à grande échelle. Les négligences sont encore nombreuses. Malgré tout cela, sa responsabilité n'a jamais été reconnue par la justice. La proposition de loi de notre collègue Elie Califer permet d'avancer vers la reconnaissance de la responsabilité de l'État et de sortir d'une situation insoutenable, qui voit la vérité piétinée, les coupables absous, les victimes méprisées. Elle ouvre la voie à des politiques d'indemnisation et de réparation.

Notre groupe soutient ce texte et présentera plusieurs amendements visant à le préciser sans en altérer l'équilibre. J'appelle l'ensemble des groupes à le voter, car il est très attendu par nos concitoyens en Guadeloupe et en Martinique.

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Les députés de notre groupe accueillent avec grand plaisir cette proposition de loi. Notre collègue Marcellin Nadeau a d'ailleurs organisé, le 27 novembre dernier, au cours d'une semaine de contrôle, un débat sur le thème : « Le chlordécone en Martinique et en Guadeloupe, l'action de l'État face aux nécessaires réparations ». Dans le cadre du prochain Printemps de l'évaluation, Nicolas Sansu, rapporteur spécial du programme 162, Interventions territoriales de l'État, qui comporte notamment des actions budgétaires visant à lutter contre la prolifération des sargasses et à réduire l'exposition des populations à la chlordécone dans les Antilles, proposera un travail fourni sur ce thème. Marcellin Nadeau a également déposé une proposition de loi visant à la reconnaissance, l'étude et l'indemnisation des victimes de la chlordécone et à la création d'un établissement public indépendant chargé de cette mission. Notre groupe lui donnera une traduction législative lors de sa niche parlementaire. Notre proposition de loi n'entre ni en contradiction, ni en concurrence avec celle de notre collègue Califer, qui vise à ce que l'État reconnaisse sa responsabilité dans le scandale du chlordécone et s'engage à indemniser les victimes.

Il est temps de lancer un véritable plan de reconnaissance et d'indemnisation. Figurez-vous qu'en 1998, les importations de chlordécone en Martinique représentaient 7 kilogrammes par habitant et 120 par hectare cultivé. C'est délirant ! Comment s'étonner que le nombre de cancers ait explosé, bien au-delà des chiffres de l'Hexagone ?

Une réparation est donc urgente. L'établissement d'une cartographie complète des zones contaminées ne l'est pas moins, car des dégâts sanitaires s'y produisent encore. Il faut appréhender les conséquences dans leur totalité, que les victimes soient directes ou indirectes, sans négliger un seul des éléments contaminés. La contamination de l'eau, par exemple, a des répercussions sur la pêche aux écrevisses.

Bien que le scandale date de plus de cinquante ans, l'utilisation massive de chlordécone a perduré pendant au moins deux décennies et l'affaire n'est pas derrière nous. Les décisions prises par le Gouvernement font l'impasse sur deux conditions majeures. La première consisterait à créer une autorité indépendante – cela avait été fait à propos de l'amiante – qui n'aurait pas la tentation d'accepter sans réagir le rapport de force qui a longtemps prévalu ; la seconde, à reconnaître le rapport néocolonial de domination au principe d'un choix qu'inspirait – tous les chercheurs sérieux le montrent – la défense des grandes plantations : non pas les intérêts des bananes de la République, mais l'intérêt des békés en république bananière !

Un million d'Antillais ont été contaminés. Ce scandale doit être réparé. La proposition de loi de notre collègue Elie Califer pose la première pierre d'un édifice que notre groupe continuera d'ériger.

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Le groupe Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires compte de nombreux députés ultramarins. Avec eux et pour eux, il soutient pleinement ce texte important. Il s'agit en effet de reconnaître le scandale du chlordécone, dont l'État a validé l'utilisation aux Antilles pendant plusieurs années après l'avoir interdit dans l'Hexagone, alors même qu'il connaissait sa toxicité et son caractère cancérigène.

Le Président de la République a d'ailleurs reconnu en 2018 qu'il s'agissait d'un scandale environnemental, que l'État devait assumer sa part de responsabilité et avancer sur le chemin de la réparation. Cela suppose d'indemniser correctement toutes les victimes, donc d'évaluer le préjudice. Sur le plan sanitaire, Santé publique France et l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) ont publié en 2018 une synthèse de plusieurs études montrant que la quasi-totalité des Antillais sont contaminés. La pollution à la chlordécone affecte les populations ; les Antilles françaises connaissent notamment le plus haut taux d'incidence annuel de cancers de la prostate. Sur les plans environnemental et économique, un cinquième des sols de la Guadeloupe et deux cinquièmes de ceux de la Martinique sont pollués, soit un total de 20 000 hectares. Les zones de pêche, les fruits et légumes et les cheptels sont contaminés. Les dommages sont irréversibles et les conséquences lourdes.

Notre groupe appelle à aller plus loin que l'indemnisation, en instaurant un dépistage systématique du cancer de la prostate dès 45 ans, en assurant la transparence des données pour améliorer la communication et en accélérant la formation des professionnels de santé.

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Nous en venons aux questions des autres députés.

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Nous comprenons parfaitement votre démarche et partageons votre volonté de reconnaître les préjudices, d'aller plus loin ; cependant vous ne faites pas preuve ici de l'objectivité à laquelle vous nous avez accoutumés. Vous affirmez que vous ne désignez aucun gouvernement en particulier, mais certains sont plus responsables que d'autres, en particulier celui qui a précédé l'élection de notre majorité, comme un rapport de l'Inspection générale des affaires sociales l'a clairement établi. Notre Gouvernement veut aller plus loin ; il a déjà engagé des démarches et financé plusieurs actions. Vous pouvez les juger insuffisantes, mais elles sont réelles et inédites.

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Les Antillais sont-ils des sous-citoyens ? Voilà la question que pose le chlordécone, ce pesticide longtemps répandu dans la culture de la banane. Ce pesticide commence à être utilisé en 1972 et quasiment dès le départ, on sait. On sait qu'il pollue les sols et les eaux, qu'il est cancérigène. Dès 1976, la justice américaine condamne les industriels producteurs et protège les travailleurs : elle interdit le produit. En France, l'affaire traînera vingt ans de plus. Pourquoi ? Parce que l'intérêt des planteurs est passé avant celui des travailleurs, l'économie avant la vie. C'est arrivé aussi parce que c'était dans les îles – dans l'inconscient, d'anciennes colonies. Elles sont loin, leurs habitants peuvent être considérés comme des sous-citoyens. Du coup, les dégâts sont immenses. Plus de 90 % des populations sont contaminées ; d'après l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, le produit pourrait mettre cinq siècles à disparaître ; il provoque des cancers de la prostate.

La République a failli, sa justice a failli : en 2006, des associations guadeloupéennes et martiniquaises ont déposé une plainte, mais en quatorze ans la justice n'a rien fait, ou pas grand-chose, jusqu'à ce que le délai de prescription soit épuisé et la procédure éteinte.

Même s'il est tard, nous devons reconnaître que les Antillaises et les Antillais sont des citoyens ; la République française doit reconnaître sa responsabilité dans les préjudices sanitaires, écologique et économique subis et s'assigner les objectifs de dépolluer les terres et les eaux, ainsi que d'indemniser les victimes.

Il s'agit d'acter que les Antillais ne sont pas des sous-citoyens.

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Lorsque la question du décalage temporel a été abordée, mes chers collègues, certains d'entre vous ont murmuré. C'est vrai, la protection sanitaire a été accordée à deux vitesses, parce qu'il s'agissait d'un problème ultramarin.

Le libellé de l'article 1er est essentiel. En écrivant « La République française reconnaît sa responsabilité dans les préjudices », nous sommes lucides sur la responsabilité et sur ses conséquences sanitaires.

Manifestement, la dénonciation des méfaits du chlordécone fait consensus. Votre amendement AS25, Mme Parmentier-Lecocq, tend à dévitaliser le texte, pas seulement à amoindrir sa portée symbolique. Au regard de notre proposition d'écrire que la République française reconnaît sa responsabilité, votre rédaction revient à faire trois pas en arrière. En légistique, les mots ont leur importance : écrire « La République française reconnaît l'ampleur des dommages sanitaires », c'est enfoncer une porte ouverte. Les scientifiques, les politiques et, surtout, les Antillais eux-mêmes en connaissent l'ampleur. En revanche, ils attendent que la République reconnaisse ses responsabilités pour en tirer les conséquences : la dépollution des terres et des eaux contaminées et l'indemnisation des victimes.

Je nous invite à mesurer combien il serait désastreux d'aboutir à un texte croupion.

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Mme Parmentier-Lecocq a affirmé que l'Assemblée nationale ne pouvait pas reconnaître la responsabilité de l'État. C'est faux. En 2014, Mme Ericka Bareigts a défendu une proposition de loi visant à reconnaître la responsabilité de l'État dans le transfert de 1 600 enfants réunionnais vers la métropole entre 1963 et 1982. L'Assemblée nationale l'a votée. Ainsi, elle peut adopter un texte reconnaissant la responsabilité de l'État. Évidemment, il est impossible de dédommager un tel préjudice, mais la reconnaissance de la responsabilité permet d'engager des recours. C'est primordial. Ce qui a été accompli pour les enfants réunionnais peut l'être pour les Martiniquais et les Guadeloupéens.

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Je vous parle au nom de Français, et non de ressortissants étrangers. Il ne s'agit pas de coopération. Dans leur territoire, ces Français défendent les valeurs de la République, avec générosité et avec honneur.

Madame Parmentier-Lecocq, je connais l'intérêt sensible que vous inspire ce scandale. Nous, représentants du peuple, pouvons tout à fait légiférer pour reconnaître la responsabilité de l'État. Dans quelques jours, nous examinerons une proposition de loi, adoptée par le Sénat, portant réparation des personnes condamnées pour homosexualité entre 1945 et 1982. Elle prévoit que la République française reconnaît sa responsabilité. Encore une fois, je demande qu'on regarde les habitants de ces territoires comme des Français.

L'article 1er de la loi du 23 février 2022 portant reconnaissance de la nation envers les harkis et les autres personnes rapatriées d'Algérie anciennement de statut civil de droit local et réparation des préjudices subis par ceux-ci et leurs familles du fait de l'indignité de leurs conditions d'accueil et de vie dans certaines structures sur le territoire français dispose que la nation « reconnaît sa responsabilité ». Nous pouvons donc tout à fait légiférer en ce sens. Nous sommes d'accord, il faut aller plus loin ; mais le dispositif de l'amendement que vous nous soumettez n'est qu'une copie du plan Chlordécone IV !

Madame Levavasseur, je partage complètement votre analyse. Il faut dire à tous que la chlordécone a dévasté nos territoires ! Au-delà des obédiences politiques, nous devons tous admettre que cela engendrera de la souffrance pour des centaines d'années. Il ne s'agit pas de défendre les positions d'un groupe mais de tendre la main à des hommes et à des femmes condamnés, pires, désignés comme responsables de leur propre malheur, lorsque les agriculteurs sont mis en cause. Qui a autorisé la dérogation ? Ce n'étaient ni les agriculteurs ni les planteurs.

Vous avez raison, madame Simonnet, la Martinique et la Guadeloupe ont connu un régime différent du régime national. Il faut peut-être aller plus loin, mais à une autre occasion.

Monsieur Neuder, vous soulignez l'ampleur des dégâts, que la situation des Antilles est unique au monde. La stratégie à adopter, c'est la main tendue de la reconnaissance. Ensuite, le Parlement pourra travailler de manière transpartisane.

Chère Maud Petit, je connais votre sensibilité au problème. La position du groupe Démocrate me surprend, mais elle est démocratique. Oui, le Président a pris une décision – non sans hésitation. Il a assisté à une réunion avec les représentants de la nation ; il y eut un temps de rejet, puis l'acceptation et la déclaration en Martinique. Pour éviter tout nouveau recul, nous voulons inscrire la reconnaissance dans le marbre de la loi.

Je ne veux pas, madame Iborra, accuser tel ou tel gouvernement. Nulle part dans le texte je ne désigne de ministre en particulier, qu'il s'agisse des années 1970 ou 1980. Le problème est grave : ne relançons pas ce débat politicien !

Parfois, les symboles ouvrent de grandes portes. Pour les Antillais que nous sommes, ce texte a une signification forte. Pour leur descendance, pour celle de l'humanité, nous devons nous accorder et agir collectivement.

Cher Arthur Delaporte, nous avons suffisamment travaillé sur ce dossier pour convenir des insuffisances de l'État.

Monsieur Christophe, je sais que vous partagez avec la banane une belle complicité. Mais vous savez que pour arriver jusqu'à vous, elle a causé bien des dégâts – sur les personnes et sur l'environnement. Nous devons avancer ensemble. Je crois honnêtement pouvoir compter sur votre décision. Il ne s'agit pas de pesticides classiques ; la rémanence de la chlordécone est supérieure. Certains d'entre nous pensent qu'il faudra constituer un fonds spécial, mais nous n'en sommes pas encore là. Nous devons examiner ces aspects avec calme et avec la volonté qui sied à notre mission de représentants du peuple français, dont font partie les Guadeloupéens et les Martiniquais.

Bien sûr, madame Rousseau, l'État a été pire que négligent. Des amendements ont été déposés pour y remédier, mais nous devons préserver l'économie du texte. Nous aurons l'occasion d'y revenir, puisque telle est la volonté du peuple, que tous ensemble nous représentons.

Vous comprenez aisément, monsieur Monnet, que le texte de M. Marcellin Nadeau et le mien ne sont pas concurrents mais se complètent. Peut-être à terme verrons-nous mieux comment mener le travail qu'appelle l'ampleur de la catastrophe. L'affaire est devant nous.

Oui, monsieur Colombani, nous avons des camarades dans votre groupe. Vous l'avez dit, il faut aller beaucoup plus loin.

Madame Iborra, j'ai été très mesuré – je pense d'ailleurs que ceux qui m'écoutent de là-bas ne sont pas contents de moi, ni du tempo que j'ai choisi ! Je le répète : il ne s'agit pas d'incriminer tel ou tel gouvernement. Pendant cinquante ans, tous ont été concernés. M. Macron n'a pas tout de suite admis les faits, mais il est revenu sur sa position initiale et des plans ont été déployés.

Nous ne sommes pas des sous-citoyens, monsieur Ruffin, cela va de soi. J'ai dépassé ce stade : je veux que l'on nous considère comme des citoyens français et que l'on nous accompagne.

Monsieur Guedj, vous avez raison s'agissant de la protection à deux vitesses. Comme Mme Rabault et vous, j'affirme que nous pouvons tout à fait légiférer.

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L'exposition au chlordécone s'inscrit dans le problème plus global de l'exposition aux produits chimiques, comme les phytosanitaires – j'ai remis au Gouvernement un rapport intitulé « Per- et polyfluoroalkylés (Pfas), pollution et dépendance : comment faire marche arrière ? » –, les microplastiques, les antibiotiques et les hormones. Elle soulève d'abord la question de la responsabilité. Le chlordécone a été utilisé pendant des années, mais qui en est responsable ? Faut-il désigner l'État, les responsables politiques de l'époque, les planteurs, les industriels ? Il est difficile d'en incriminer un en particulier. Ensuite, tout le monde reconnaît qu'il y a eu un scandale. L'important est d'éviter que cela se reproduise. On crée des instances pour surveiller le climat et le nucléaire. Je plaide pour l'instauration d'un organe de veille consacré aux produits chimiques.

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Il faut appeler un chat « un chat ». La majorité propose de reconnaître « l'ampleur des dommages ». Au regard des éléments dont nous disposons, il faut reconnaître une responsabilité, le contraire serait un affront aux populations antillaises qui subissent les effets de la pollution, notamment pathologiques.

Les mots ont un sens, il faut donc nous assigner l'objectif de « la dépollution des terres et des eaux contaminées », et non seulement de « mener des actions visant à supprimer le risque d'exposition ». Le texte doit être précis.

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Cette proposition de loi vise à reconnaître la responsabilité de l'État dans les préjudices que l'utilisation du chlordécone a causé aux Antilles, afin d'en indemniser les victimes. Le texte prévoit de fixer l'objectif de dépolluer les terres et les eaux contaminées. Il s'agit d'un pesticide interdit en France depuis 1990, qu'une dérogation ministérielle a malheureusement autorisé dans les bananeraies jusqu'en 1993.

Le taux d'incidence du cancer de la prostate aux Antilles est parmi les plus élevés du monde. Pour l'heure, les actions judiciaires visant à dédommager les victimes n'ont pas abouti, toutefois l'État a créé un fonds de soutien qui a permis de premières indemnisations. De nombreuses associations dénoncent cependant les lenteurs administratives. De plus, le dispositif ne concerne que les professionnels ; or le préjudice sanitaire et environnemental s'étend à l'ensemble de la population.

La présente proposition de loi met en lumière l'enjeu de santé public que représente l'exposition des territoires ultramarins à la chlordécone. Pourriez-vous nous préciser le nombre de plaintes déposées, le nombre de victimes déjà indemnisées et les montants versés ? Des actions de dépollution ont-elles déjà été menées ?

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Monsieur le rapporteur, vous souhaitez que la République reconnaisse sa responsabilité. Ce n'est pas la même chose que reconnaître l'ampleur des dommages. Au centre de la question se trouve la reconnaissance des préjudices. Tel doit être l'objet de la loi, et non dresser un simple catalogue des dégâts.

La majorité présidentielle préconise de réinventer des outils pour améliorer la santé environnementale. Quid du plan Écophyto II+ ? Le Premier ministre vient de le supprimer ! Vos arguments sont cohérents avec son arrêt sec et sans concertation : la santé humaine et la santé environnementale sont des sujets de second plan.

Il s'agit ici de reconnaître un préjudice durable – un à six siècles – et d'apporter une réponse forte à la défiance de nos concitoyens. Le chlordécone a participé à rompre les liens qui rattachent les Antilles à la République. Dépassons les considérations partisanes pour assumer nos responsabilités parlementaires en posant la première pierre de la reconnaissance qu'ils attendent.

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J'ai découvert le problème du chlordécone avec Mme Maud Petit, ma voisine en séance publique pendant la précédente législature. Elle m'en a parlé à l'occasion des débats relatifs au glyphosate ; grâce à nos discussions et à celles que j'ai eues avec des Antillais, j'ai compris à quel point la question était pour eux viscérale. Nous ne pouvons l'examiner de manière seulement politique.

Reconnaître la responsabilité de l'État et prévoir une indemnité ne serait pas faire le bon choix. D'abord, plusieurs acteurs, économiques et institutionnels, ont joué un rôle. La justice elle-même a eu du mal à trancher. Ensuite, décider une réparation reviendrait à laisser indéfiniment la plaie ouverte : les situations sont différentes, un même problème de santé peut avoir des causes diverses. La crise de confiance est grave ; il faut réparer le lien qui nous unit à nos compatriotes antillais. Nous devons investir beaucoup plus dans la prévention, dans les soins et dans la recherche : en matière d'alimentation, de modes de vie, de traitement des sols, il existe des pistes prometteuses.

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Le chlordécone est un scandale sanitaire dont nous n'avons pas encore pris toute la mesure, et tout n'a pas encore été fait pour la prendre.

Nous devons éviter de transformer ce texte en un communiqué de presse, et lui conserver une portée juridique. Pour cela, il faut reconnaître une responsabilité publique, même si elle n'est pas la seule. Pour notre part, nous sommes décidés à en tirer les conséquences.

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Nous sommes d'accord, monsieur Isaac-Sibille, il faut éviter que cela se reproduise. Mais la substance est dans les terres, elle est inscrite dans notre devenir : la science a montré l'influence épigénétique de la molécule – nos enfants en seront atteints à tout jamais.

En application des lois de 1943 et de 1972, l'État devait solliciter l'avis de plusieurs commissions avant d'autoriser l'utilisation du chlordécone. Or il n'a pas attendu leur avis, ou n'en a pas tenu compte. Nous avons tous été maire : même lorsque nous répondons à la demande d'un citoyen, on est responsable de ce qu'on signe.

Oui, monsieur Petit, les mots ont un sens. Nous reconnaissons les avancées du plan Chlordécone IV, mais nous voulons garantir qu'un autre gouvernement ne puisse revenir sur ces décisions. Il faut un engagement à long terme. Il serait beau que le peuple, par la voix de ses représentants, affirme que nous agirons jusqu'à la résolution du problème.

Vous m'interrogez sur le nombre de dossiers, madame Valentin : c'est là tout le drame de l'affaire. J'ai eu l'honneur d'administrer la ville bananière de Saint-Claude : la carte de la contamination des sols n'est pas achevée ; nous savons seulement qu'il ne faut ni planter, ni consommer les produits cultivés. Les plans Chlordécone successifs ne concernent que les maladies professionnelles. La Martinique compte entre 12 000 et 13 000 ouvriers agricoles ; 155 dossiers ont été déposés, 58 ont connu une issue favorable, soit 0,007 % de la population contaminée. Voilà où nous en sommes !

Certains ont demandé la reconnaissance comme un geste susceptible d'apaiser la défiance et d'engager un accompagnement à long terme. C'est bien ce que nous voulons.

Monsieur Turquois, la justice, plongée dans un profond embarras, a reconnu les carences fautives de l'État. Mais ce n'est pas l'objet du texte, qui tend à affirmer la reconnaissance.

Vous avez raison, monsieur Dharréville, nous n'avons pas pris toute la mesure de la situation. Cette proposition de loi est la porte d'entrée du travail d'analyse que nous devons mener, sereinement, en pensant qu'il y a des hommes qui meurent, d'autres qui sont morts, et derrière eux tout ce qu'on ignore encore. Aussi demandons-nous de renforcer le travail de l'Agence nationale de la recherche.

Article 1er : Reconnaître la responsabilité de l'État dans les préjudices liés au chlordécone

Amendement AS25 de Mme Charlotte Parmentier-Lecocq

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Je vais d'abord remettre les pendules à l'heure. Je suis d'accord avec la reconnaissance de la responsabilité de l'État et n'ai jamais rien dit d'autre. Le Président de la République l'a déclarée. D'ailleurs, nous discutons de décisions prises il y a trente, quarante ou cinquante ans : Emmanuel Macron n'était pas Président de la République, alors – il n'était même pas né ! Rappelez-vous qui l'était. Enfin, madame Rabault, le texte que vous avez mentionné était une proposition de résolution, non une proposition de loi.

Je défends le présent amendement pour ne pas nous en tenir à une déclaration. Ce texte a une portée symbolique qui ne résoudra rien du problème lié à la chlordécone. L'amendement tend à inscrire dans la loi des objectifs, conformément aux attentes des populations antillaises : poursuivre l'application du plan Chlordécone IV et l'amplifier ; dépolluer ; accompagner les populations ; aider les victimes à solliciter les indemnités auxquelles elles ont droit. L'État a mis en place des aides pour remplir les dossiers. Je ne pense pas que des procès les aideront à s'en sortir. Enfin, l'amendement vise à créer l'instance de suivi et de contrôle que vous appelez tous de vos vœux.

Vous faites de la politique avec la détresse des gens, alors que nous proposons d'agir, d'agir et d'agir pour aider les populations victimes de décisions prises il y a entre trente et cinquante ans.

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Votre amendement tend à réécrire l'article, donc à refondre complètement le dispositif. Vous décrivez les mesures du plan Chlordécone IV. Avec beaucoup de respect, je dirais même que vous dressez le catalogue des actions déjà entreprises. Vous êtes de bonne foi, mais votre rédaction n'est pas acceptable.

Elle ne l'est pas au regard de notre souffrance : vous n'explicitez pas la responsabilité de l'État. Or cet acte symbolique est essentiel ; les Guadeloupéens et les Martiniquais l'attendent. Vous vous bornez à reconnaître les dommages subis, mais bon Dieu, ils sont devant nous et dans nos corps ! Je les porte en moi, et mes enfants aussi ! Votre formulation engage beaucoup moins l'État. C'est vrai, le président Macron a reconnu le scandale en 2018, mais un autre peut arriver. Nous ne faisons pas son procès, il a eu le mérite de faire une déclaration. Toutefois, il est capital que la proposition de loi reconnaisse sans détour une responsabilité qui ne fait même pas débat. Nous devons aller plus loin.

Par ailleurs, votre rédaction est peu ambitieuse. Elle n'enverrait pas aux Antillais un message très positif. Vous proposez de fixer un objectif de dépollution à terme. Qu'est-ce que cela signifie ? Dès maintenant, nous devons viser une dépollution complète. Il faut mettre les moyens nécessaires dans la recherche. À terme, comme le disait Keynes, nous serons tous morts – nous, les Antillais, peut-être plus vite que les autres. Vous voulez encourager les élus locaux et les acteurs économiques et associatifs à atteindre les objectifs de dépollution et de protection de la population. Vous donnez l'impression que ce sont eux les responsables. Quand même ! Il ne faut ni nous défausser ni défausser l'État.

L'amendement tend à préciser que la République « poursuit son objectif d'indemnisation » : il ne faut pas poursuivre avec le FIVP, il faut un plan Chlordécone spécifique. J'appelle à un changement de paradigme, non à un éloge du plan Chlordécone IV.

Avis défavorable.

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Si la proposition de loi a une portée symbolique, elle a aussi une utilité réelle : l'État a une part de responsabilité, même s'il n'est sans doute pas le seul et qu'il appartiendra au juge de le déterminer. Notre groupe regrette la disparition du mot « responsabilité » dans cette nouvelle rédaction. Quant à la dimension symbolique, il me semble que le Président de la République ne saurait reconnaître la responsabilité de l'État sur place, pour se contredire une fois de retour en métropole. C'est pourquoi la rédaction de cet amendement ne nous convient pas.

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Il faut absolument rejeter cet amendement car il vise à réécrire totalement le texte en le vidant de sa substance. Le texte proposé reconnaît en effet la double responsabilité de l'État français : non seulement les travailleuses et les travailleurs ont continué à être empoisonnés alors que la dangerosité du chlordécone était connue, mais le produit a été utilisé en Guadeloupe et en Martinique, alors qu'il était interdit en métropole.

De plus, alors qu'il est nécessaire de fixer un objectif en matière de dépollution, l'amendement se contente, « à terme, de supprimer les risques liés à la pollution » : quel est ce terme ? Les victimes doivent pouvoir être indemnisées. Or elles sont peu nombreuses, car les dossiers sont très compliqués à monter et seuls les travailleurs répondant à des conditions particulières sont éligibles. La formulation selon laquelle « la République française poursuit son objectif d'indemnisation des victimes de cette contamination » n'est donc pas pertinente. Nous présenterons d'ailleurs des amendements pour élargir la recevabilité à toutes les personnes contaminées, quel que soit leur lieu de résidence actuel. Cet amendement est une honte !

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Il faut bien connaître le dossier pour se permettre de donner des leçons. Ce pesticide vise à lutter contre le charançon du bananier. Or, puisque l'on ne cultive pas de bananes à Lille ni à Strasbourg, lorsqu'il est interdit en France, cela signifie qu'il l'est aux Antilles – le seul endroit où il est utilisé.

Par ailleurs, le groupe Démocrate a noté que le rapporteur n'entendait pas stigmatiser un gouvernement plus qu'un autre : il ne s'agit pas de faire le procès de la majorité, ni du Président de la République. Une responsabilité doit être reconnue et elle n'incombe pas au seul État, comme cela a déjà été dit : nous en avons pris acte.

Toutefois, notre groupe s'abstiendra sur cet amendement – comme sur l'ensemble de la proposition de loi – car il contribuerait, s'il était adopté, à dénaturer le message du rapporteur. Je souhaite, monsieur le rapporteur, que nous réfléchissions à une position commune avant l'examen du texte en séance.

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Le 27 septembre 2018, le Président de la République a indiqué que ce scandale était le fruit d'un aveuglement collectif, obligeant l'État à prendre sa part de responsabilité quant à cette pollution et à avancer dans le chemin de la réparation. Les trois objectifs de la proposition de loi – la reconnaissance de la responsabilité de l'État, la dépollution des terres et l'indemnisation – permettent de respecter cette parole. Or cet amendement vise à affaiblir, voire à nier ces trois piliers du texte, puisque la responsabilité est réduite à « l'ampleur d'un dommage », la dépollution devient « une suppression du risque d'exposition » et l'objectif d'indemnisation tend à entériner le dispositif existant, pourtant défaillant, mal connu et ne permettant pas une réparation intégrale. La parole du Président de la République nous engage collectivement.

Nous voterons contre cet amendement, qui ne respecte ni l'engagement pris par le chef de l'État, ni l'objectif du rapporteur Elie Califer, issu de notre groupe, ni l'ensemble des travaux menés avec pugnacité par nos collègues.

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Ce texte revêt une portée symbolique très importante pour la Guadeloupe et la Martinique. Or il serait effectivement dénaturé par cet amendement. Les territoires concernés, déjà marqués par l'esclavage et par le colonialisme, le sont désormais par le chlordécone, d'où un manque de confiance et une mortalité plus importante : lors de la crise du covid, mon collègue Max Mathiasin me signalait que des personnes de son âge n'avaient plus accès aux services de réanimation et que son territoire manquait de cercueils. Il est important de procéder à une réparation.

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Vous avez, monsieur le rapporteur, repris mes propos selon lesquels, bien que la proposition de loi paraisse exclusivement déclarative, notre groupe en salue la démarche et soutient l'objectif du texte, tout en demeurant vigilant aux discussions en commission. Nous sommes au cœur du sujet : la responsabilité de l'État doit être reconnue, même si elle n'est pas exclusive. La question sous-jacente est celle de l'indemnisation : qui doit en décider et la financer ? Le Parlement n'est pas un tribunal et n'a pas à se substituer au travail des juges. L'amendement de Mme Parmentier-Lecocq, qui ne reconnaît pas suffisamment la responsabilité de l'État, ne saurait donc être adopté en l'état : en l'absence de sous-amendement ou de retrait, nous nous abstiendrons. Le texte doit servir aux populations et reconnaître la responsabilité de l'État, tout en permettant au juge de procéder à la répartition financière de l'indemnisation.

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Cet amendement correspond à ce que l'on attend de la République, en matière de responsabilité. Avons-nous besoin d'un symbole, en reconnaissant unilatéralement et uniquement la responsabilité de la République ? Peut-être, mais, vous le savez, la responsabilité est partagée. Les îles françaises des Caraïbes sont inscrites en lettres d'or et de sang dans l'histoire de la France et de la République, marquées par l'esclavage et par les pollutions diverses, par un tempérament local parfois volcanique, avec des caractéristiques sociales et climatiques propres.

Or, la proposition de loi cible uniquement la responsabilité de la République. Le Président de la République – c'est l'essentiel – a clairement exprimé ce que vous revendiquez : il n'y a dès lors nul besoin d'un texte érigé en étendard. Si je sais que le rôle de l'opposition consiste à contester la personne d'Emmanuel Macron, je vous invite à considérer la fonction du Président de la République. Ne rajoutons pas de la douleur à la douleur, du feu sur le feu, et adoptons cet amendement, qui répond aux attentes et aux besoins de la Martinique et de la Guadeloupe.

La réunion est suspendue de dix heures vingt-cinq à dix heures quarante.

Amendement AS28 de Mme Charlotte Parmentier-Lecocq

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Pour qu'il n'y ait aucune ambiguïté je le redis clairement, la position de notre groupe est celle du chef de l'État : l'État a bien une part de responsabilité dans les décisions qui ont été prises, il y a trente à cinquante ans, concernant le chlordécone. Je retire donc l'amendement AS25 au profit d'un nouvel amendement AS28, qui réaffirme la reconnaissance par la République de sa part de responsabilité dans les dégâts causés par le chlordécone. Ce nouvel amendement va plus loin que la seule dimension symbolique, en reconnaissant cette part – non exclusive – de responsabilité. Les objectifs de prévention, de dépollution, de suivi par une instance neutre et objective, d'indemnisation des victimes sont réaffirmés.

L'amendement AS25 est retiré.

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Nos territoires ne sont pas plus volcaniques que d'autres, mais connaissent des problématiques qu'aucun territoire métropolitain ne saurait supporter. Je n'ai pas encore pris connaissance de l'amendement AS28 et je regrette que nos conditions de travail soient si peu respectueuses de nos territoires et de nos responsabilités en tant qu'élus. Je le redis, à deux reprises, suite aux lois de 1943 et 1972, l'État a pris seul la décision d'accorder une autorisation de commercialisation du chlordécone. Il faut donc reconnaître sa responsabilité. Compte tenu de la problématique et des souffrances vécues, la rédaction du texte mériterait d'être revue de façon calme et sereine.

La formulation de l'amendement est ambiguë eu égard à la responsabilité de l'État et ne permet pas de délivrer un message suffisamment clair. En tant que rapporteur, je suis à votre entière disposition, madame la présidente, pour retravailler le texte avant la séance : prenons le temps de la réflexion, plutôt que d'agir dans la précipitation, sur un coin de table.

De plus, la formulation d'un objectif « à terme » ne veut rien dire. Notre objectif est de sertir un dispositif sans équivoque dans le marbre de la loi. L'amendement AS28 indique que « la République française reconnaît sa part de responsabilité dans l'ampleur des dommages causés », mais qu'en est-il des autorisations ? Elles relèvent de la responsabilité de l'État, qui les a signées, voire de la République elle-même.

Mon avis est donc défavorable. L'amendement pourrait être retiré afin d'être retravaillé.

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Il y a un problème de méthode. Comment peut-on limiter ainsi les débats et réécrire l'article d'une proposition de loi le temps d'une suspension, alors que se posent plusieurs problèmes de fond ? Je nous invite, collectivement, à respecter l'usage habituel qui est le nôtre. De plus, cette façon de procéder n'est pas respectueuse du travail de notre collègue Califer. L'amendement AS28 devrait être retiré, pour être retravaillé en vue de la séance.

Selon moi, une « part de responsabilité » n'est pas une notion de droit – elle n'est reconnue ni par la Cour de cassation, ni en matière de responsabilité civile, pénale ou de l'État. De plus, l'amendement mentionne une « responsabilité dans l'ampleur des dommages sanitaires » et non de l'État. Au-delà de la méthode, le fond ne convient pas non plus.

Je le redis, l'article 1er du texte comporte trois piliers : sur la question de la responsabilité, vous tentez de revenir par la petite porte ; la notion de dépollution ne figure pas dans l'amendement, ni un nouvel objectif en matière d'indemnisation. Je vous en conjure, retirez cet amendement, afin que nous puissions avoir des débats de qualité et sereins en séance publique.

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Trois raisons nous conduisent à nous opposer à cet amendement. Tout d'abord, si la responsabilité de l'État ne saurait être exclusive, elle ne peut pas non plus disparaître du texte.

Je rappellerai que le premier plan sur le chlordécone date de 2008. Mis en place par le Premier ministre François Fillon, il comprenait quarante mesures et reposait sur une mission interministérielle regroupant sept ministères et quinze organisations. Les premiers plans Chlordécone ont ainsi été construits en 2011-2013, 2014-2020 et 2021-2027.

Par ailleurs, nous souhaitons une meilleure indemnisation de la prise en charge sanitaire des victimes, sur le modèle du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, qui a fait ses preuves.

Enfin, des objectifs de dépollution doivent être fixés, sans être intenables – la dépollution zéro n'existe pas. Il faut veiller à ne pas nuire aux futures cultures agricoles.

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Je souhaite qu'il n'y ait aucune ambiguïté quant aux intentions de notre groupe et je remercie le rapporteur d'avoir reconnu ma bonne foi. Je retire mon amendement, de façon que nous puissions le rediscuter de manière apaisée et trouver un accord en vue de la séance.

L'amendement AS28 est retiré.

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Je ne peux que me satisfaire de ce retrait. Je le redis, l'État est responsable, même s'il n'est pas le seul. L'amendement AS28 m'interpellait à plusieurs titres, notamment en raison de la formulation inappropriée visant à « encourager les élus locaux à atteindre les objectifs ». De même, il aurait mieux valu indiquer que l'État poursuit sa politique plutôt que « son objectif d'indemnisation ». Ce qui compte est de pouvoir en rediscuter sereinement avant la séance.

Amendement AS18 de Mme Katiana Levavasseur

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Au-delà de ses effets sanitaires ou économiques, l'utilisation du chlordécone a également une dimension sociale et a privé des familles entières de la possibilité de jouir de leurs terres en toute quiétude. Elles se sont retrouvées entièrement démunies du jour au lendemain, alors qu'elles vivaient de leur activité. Des traditions et des savoir-faire qui se transmettaient depuis plusieurs générations ont été perdus. De nombreuses personnes ont été jetées dans la pauvreté, quand d'autres sont décédées prématurément. Des liens ont été brisés. Selon les plus optimistes, l'économie locale et la culture en subiront les conséquences pendant des décennies – voire des siècles, selon les plus pessimistes.

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Chers collègues, en sus des conséquences écologiques, économiques et sanitaires liées au chlordécone, vous souhaitez que soit reconnu un préjudice social. Je le comprends, car le scandale du chlordécone affecte grandement la société dans son ensemble. Toutefois, la notion de préjudice social me semble floue : sur quels critères serait-il possible d'indemniser le préjudice ? Sur le fond, le fait de considérer les territoires de Guadeloupe et de Martinique eux-mêmes parmi les victimes répond à la dimension collective et sociale du scandale. Il me semble donc que la proposition de loi satisfait votre préoccupation, sur le fond.

Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AS11 de Mme Sandrine Rousseau et sous-amendement AS26 de M. Elie Califer

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L'amendement vise à élargir l'étude et la recherche scientifique sur les risques environnementaux et sur la santé par la chlordécone, mais aussi par ses produits de transformation. Des recherches ont montré que si le glyphosate est toxique, ses sous-molécules le sont peut-être encore davantage. L'objectif est donc d'étendre les recherches aux sous-molécules, afin de mesurer véritablement le risque social et de permettre des opérations de dépollution à la hauteur de l'enjeu.

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Les scientifiques sont unanimes : les sous-produits de la chlordécone sont nocifs et dangereux. L'amendement est donc judicieux : nous devons nous préoccuper du devenir de la molécule de chlordécone, notamment lorsqu'elle est dégradée dans le sol. Il arrive parfois que les produits de transformation soient encore plus dangereux que la molécule initiale, ce qui suppose une vigilance particulière sur le long terme.

Mon sous-amendement est de cohérence rédactionnelle. Sous réserve de son adoption, j'émets un avis favorable à l'amendement.

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Nous soutenons cet amendement.

Je reviens sur certains des propos – choquants – qui ont été tenus : puisque le Président de la République s'est exprimé, les parlementaires n'auraient plus d'intérêt à agir. Il existe une séparation des pouvoirs ; l'Assemblée nationale dispose de sa propre légitimité et son rôle est différent. Il ne suffit pas que le Président de la République parle pour que toutes les questions soient réglées.

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Le scandale sanitaire que représente le chlordécone est inadmissible. Je rappelle que, dès 1963, les chercheurs ont démontré sa toxicité : il ne sera, hélas, interdit que trente ans plus tard. Il faut tirer toutes les conclusions de ce drame sanitaire et organiser, dans la durée, notre système de recherche et de veille sanitaire, de façon à détecter et à répondre à ce type de pollution.

Nous soutenons bien évidemment cet amendement. Il est absolument nécessaire de rechercher la chlordécone dans les sols, mais aussi une partie de ses dérivés : en écotoxicologie, nous savons qu'un polluant peut se dégrader en d'autres polluants tout aussi cancérigènes. La dégradation de la chlordécone se traduit par la formation de produits de transformation, dont certains présentent une structure relativement similaire. Dès lors, il est primordial d'étudier la toxicité de ces produits, ainsi que leurs propriétés, afin d'évaluer leur rémanence et leur capacité de transfert vers l'eau et les plantes. L'élargissement de la surveillance aux produits de transformation est donc nécessaire.

Je rappelle par ailleurs qu'il est également urgent d'élargir les surfaces analysées. Selon un récent rapport de l'Opecst, les surfaces analysées ne représentent actuellement, en Guadeloupe, que 17 % de la surface agricole utile des exploitations agricoles et 3,4 % seulement du territoire total. En Martinique, les surfaces ne représentent que 23 % des zones agricoles et 9 % du territoire total. Il faut donc développer des méthodes de décontamination et de dégradation – l'amendement n'évoque pas cette question.

Le manque de recherche et développement sur la chlordécone démontre aussi l'échec d'une recherche fonctionnant exclusivement en mode projet et son sous-investissement chronique, notamment dans le service public de recherche agronomique en outre-mer, à Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement et au Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement. Notre débat démontre également l'hérésie que constitue l'abandon du plan Écophyto.

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Cet amendement est une fausse bonne idée et je vous invite à le rejeter. Je reviens sur la comparaison avec le glyphosate : nous savons qu'il se dégrade dans la nature, avec différents composés. Or ceux-ci n'émanent pas tous de la dégradation du glyphosate – les lessives produisent exactement les mêmes types de molécules en se dégradant dans le milieu naturel. Le fait de rechercher ces produits de dégradation ne permet pas d'incriminer uniquement la pollution par le glyphosate. L'extension proposée par cet amendement me semble donc inutile.

Par ailleurs, monsieur Dharréville, je crois à la valeur de la déclaration officielle et solennelle d'un président de la République. Lorsque le président Chirac a reconnu la responsabilité de l'État français dans la déportation des juifs, cela avait valeur de reconnaissance officielle. Je considère donc que la déclaration de l'actuel Président de la République concernant la pollution inadmissible par le chlordécone dans les îles des Caraïbes – en Martinique et en Guadeloupe en particulier – vaut reconnaissance.

J'en reviens à cet amendement, qui vise à augmenter le champ des explorations, sans préciser l'imputabilité de la pollution inadmissible par le chlordécone, au risque de diluer l'établissement de la responsabilité des pollueurs : il n'y a aucun intérêt à l'adopter.

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Je suis en désaccord avec vos propos. L'objectif est de protéger la santé des personnes et l'environnement. Si certains produits sont toxiques – qu'ils proviennent de la chlordécone ou pas –, nous devons le savoir. Quels sont les produits de dégradation de la chlordécone et leurs effets sur la santé ? Il n'existe pas de recherches suffisamment importantes et systématiques nous permettant de l'identifier clairement. Je précise que cet amendement ne vise que les recherches : il n'y aurait aucun sens à le rejeter.

La commission adopte successivement le sous-amendement et l'amendement sous-amendé.

Amendement AS22 de Mme Katiana Levavasseur

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Après des années de dissimulation, la population est méfiante envers les autorités, notamment métropolitaines. Cet amendement vise donc à garantir une meilleure implication des autorités et des organismes. Un travail en partenariat – chacun des acteurs y participerait, avec ses connaissances et ses compétences – devrait, à terme, permettre de rétablir des relations de confiance entre toutes les parties.

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Si je comprends l'esprit de cet amendement, sa formulation ne me semble être ni très précise, ni opérationnelle. S'il faut effectivement associer au maximum les acteurs locaux, cela vaut pour tout le périmètre couvert par la proposition de loi et pas uniquement pour l'alinéa 2.

Les associations et les élus sont en réalité déjà mis à contribution. J'ai ainsi récemment participé au bilan du plan Chlordécone IV : j'ai indiqué au préfet que je me chargerais d'informer les maires, pour une meilleure coopération. Sur nos territoires, dans divers domaines – par exemple, l'achat de scanners, en matière de santé –, nous sommes contraints de nous associer. Il n'est donc pas utile de le préciser.

Par ailleurs, la proposition de loi vise à instaurer un principe de responsabilité et des objectifs mais ne se veut pas exhaustive : elle n'a pas vocation à définir toutes les modalités en matière de dépollution, de recherche ou d'indemnisation. Ces problématiques complexes feront l'objet de précisions dans d'autres textes, comme la proposition de loi déposée par M. Nadeau. La lisibilité de notre message ne doit pas être brouillée.

Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AS13 de Mme Sandrine Rousseau

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Cet amendement vise à évaluer l'effet cocktail, le plus nocif sur la santé : Lorsqu'un produit est mêlé à d'autres, sa toxicité peut être multipliée par dix, vingt, cent ou mille. En Guadeloupe et en Martinique, plusieurs sortes de produits susceptibles d'interagir avec le chlordécone ont été utilisés.

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Vous avez raison de vouloir élargir le débat aux autres pesticides utilisés dans les Antilles, en prenant en considération l'exposome, soit la totalité des expositions que subissent les Antillais. Les maladies ont souvent des causes plurielles et la chlordécone est susceptible d'affecter le génome. Toutefois, la proposition de loi vise à poser de grands principes et objectifs : ouvrir le champ aux autres pesticides serait de nature à brouiller le message.

S'il existe effectivement d'autres pesticides, la problématique de la chlordécone est spécifique et particulièrement grave : je préfère que l'on se focalise sur cette molécule, en raison de sa toxicité, de sa rémanence, de son omniprésence dans l'environnement et dans le sang des Antillais. Dans cette situation, l'État est responsable puisqu'il a donné une autorisation en connaissance de cause et au mépris des règles en vigueur. Restons centrés sur la chlordécone.

Avis défavorable.

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Malgré les explications du rapporteur, nous voterons pour cet amendement, notamment parce que nous sommes favorables à l'idée de mesurer les éventuels effets cocktails du chlordécone mélangé à d'autres substances.

Au-delà de cela, je voudrais interpeller nos collègues de la majorité et Mme la présidente Parmentier-Lecocq sur les échanges prévus en vue la séance. Il ne faut pas chipoter sur la responsabilité et être mesquin dans un tel débat en introduisant des pourcentages. Prenons l'exemple de la loi du 23 février 2022 portant reconnaissance de la nation envers les harkis et les autres personnes rapatriées d'Algérie, dont l'adoption m'a rendu fier. La nation exprime sa reconnaissance envers ceux « qui ont servi la France en Algérie et qu'elle a abandonnés ». Puis, elle « reconnaît sa responsabilité du fait de l'indignité des conditions d'accueil et de vie sur son territoire [...] ». Nous n'avons pas chipoté sur la part de responsabilité de l'État puisque nous avons admis une pleine responsabilité.

On nous dit que le président Macron l'a reconnue comme le président Chirac avant lui. Remarquons déjà qu'ils n'ont pas agi de la même manière : le président Chirac a fait une cérémonie officielle, tandis que le président Macron a fait une déclaration aux Antilles, ce qui n'équivaut pas à une pleine reconnaissance. Je pense que nous avons notre rôle à jouer et que nous ne devons pas bidouiller.

Sans chercher à polémiquer, je constate que certains affirment que les territoires d'outre-mer veulent ceci ou cela, mais qu'il n'y a pas un seul élu de Guadeloupe ou de Martinique qui soit de la majorité. Les élus, qui écoutent les populations en direct, entendent peut-être la nécessité d'une pleine reconnaissance. Pour sortir de la sous-citoyenneté que je décrivais, il ne faut pas y aller en chipotant.

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Monsieur Ruffin, je vous prierai de garder vos attaques personnelles pour un autre endroit que celui-ci, où nos débats se passent bien depuis le début de matinée.

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Pourquoi ai-je eu à subir ces attaques personnelles à plusieurs reprises ? Comme d'habitude, La France insoumise a décidé de politiser le sujet, d'utiliser la détresse des Antillais pour faire son beurre politique. Vous êtes dans l'incantation alors que nous proposons d'agir, dans le droit fil des déclarations du Président de la République. Ne vous en déplaise, la parole du Président de la République engage l'État. Et, même si cela vous fait mal, Emmanuel Macron est le premier président à avoir reconnu la responsabilité de l'État dans cette affaire. Arrêtez de prétendre que cela n'a pas été fait et qu'il faut l'écrire dans la loi : cette reconnaissance a eu lieu de manière officielle. Cessez de faire de la politique politicienne sur la détresse des gens. Agissons.

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Rappelons que la chlordécone est considéré comme le déclencheur de l'effet cocktail – nous ne nous éloignons donc pas de la problématique. Néanmoins, pour ne pas apporter de la confusion et tenir compte de l'avis négatif de la rapporteure, je peux retirer cet amendement. Quoi qu'il en soit, je remercie les collègues qui l'ont approuvé.

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Il est tout à fait légitime que nous discutions, en commission et dans l'hémicycle, des sous-produits et de la complexité des effets cocktail. De là à ce que nous expliquions aux scientifiques que tel ou tel produit doit être analysé ou pas, en écrivant tout cela dans la loi... Ils connaissent mieux le sujet que nous et ils ne nous ont pas attendus pour essayer de déterminer quels sous-produits analyser et quel effet cocktail traiter. Cela ne relève pas de la loi : les scientifiques et les organismes patentés tels que l'Anses sont bien mieux placés que nous pour le faire. La question est légitime ; l'inscrire dans la loi est totalement déplacé.

Quant aux propos de M. Ruffin, ils démontrent, une fois encore, que lui-même et quelques-uns de ses amis n'aiment pas la nuance et refusent la complexité. Eh oui, c'est un peu plus compliqué que ce que vous essayez de faire croire : il y aurait un responsable absolu de cette pollution et de ses effets sanitaires. Nous avons hélas l'occasion de constater régulièrement que vous avez décidément du mal avec la complexité et la nuance.

L'amendement AS13 est retiré.

Amendements AS7, AS6 et AS5 de Mme Mereana Reid Arbelot et sous-amendement AS27 de M. Elie Califer, amendements AS1 de M. Jean-Philippe Nilor et AS14 de Mme Katiana Levavasseur (discussion commune)

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Je vous propose de défendre les trois amendements de ma collègue polynésienne Reid Arbelot, les deux derniers étant de repli. Il s'agit d'étendre l'objectif d'indemnisation aux victimes indirectes et aux ayants droit des victimes directes.

De nombreux systèmes d'indemnisation visant à réparer des dommages sanitaires prévoient l'indemnisation des victimes indirectes et des ayants droit, tels que les régimes concernant les victimes de l'amiante ou des erreurs médicales. Le droit civil français reconnaît en effet les divers préjudices que peuvent subir les victimes indirectes : frais d'obsèques en cas de décès de la victime ; perte de revenus ; préjudice moral d'accompagnement ou d'affection ; autres préjudices extrapatrimoniaux. Or les systèmes d'indemnisation des victimes des essais nucléaires – par la loi dite « Morin » – et du chlordécone – au travers du FIVP – ne prévoient rien au sujet des victimes indirectes.

Me Labrunie, avocate au barreau de Paris spécialisée dans la défense de victimes de dommages corporels, qui a défendu de nombreuses victimes de l'amiante et des essais nucléaires, estime que c'est une anomalie à laquelle le Gouvernement français pourrait remédier sans grande difficulté. Les milliers de manifestants réunis à Fort-de-France le 10 décembre 2022, à la suite du non-lieu prononcé le 2 janvier, demandaient justice à la fois pour les victimes directes et pour les victimes indirectes de l'exposition au chlordécone. La proposition de loi déposée le 20 juillet 2023 par les députés Elie Califer et Marcellin Nadeau tenait d'ailleurs compte des victimes indirectes et des ayants droit. Ce texte avait obtenu le soutien de nombreux autres députés ultramarins.

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Merci, monsieur Monnet, de faire référence à cette proposition de loi, texte dont l'ambition aurait rendu son examen difficile dans le cadre d'une niche parlementaire. En ce qui concerne le présent texte, je propose que nous restions concentrés sur le cœur des propositions, sans entrer dans trop de précisions.

Cependant, je suis attentif à deux points soulevés par les amendements du groupe GDR, dont je pense qu'ils pourraient utilement figurer parmi les grands principes, tant il s'agit de questions sensibles. Premier point : l'indemnisation intégrale des victimes directes et indirectes, comme le pratique le FIVP. Second point : les ayants droit de victimes décédées, qui font partie de notre combat, sachant que les scientifiques constatent des cancers de la prostate en lien avec ce pesticide depuis déjà quarante ans aux Antilles.

Pour ces raisons, j'ai déposé un sous-amendement à votre amendement AS5, qui était celui qui me convenait le mieux car les autres me semblaient redondants pour ne pas dire bavards – terme assez péjoratif pour l'ancien enseignant que je suis. Le but de ce sous-amendement est de réintégrer les ayants droit mais aussi les territoires que vous aviez oubliés parmi les victimes pouvant faire l'objet d'une indemnisation intégrale. Mon sous-amendement reprend aussi une disposition de l'amendement AS1 de M. Nilor, qui tombera si nous adoptons l'amendement AS5. M. Nilor précise que la contamination peut avoir eu lieu dans ou en dehors du cadre professionnel. Si nous voulons indemniser toutes les victimes, il ne faut oublier personne.

Sous réserve de l'adoption de mon sous-amendement, je donnerai donc un avis favorable à votre amendement AS5.

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L'indemnisation des victimes du chlordécone doit être généralisée à toutes les victimes. Actuellement, les conditions d'accès à l'indemnisation sont trop restrictives : des milliers de travailleuses et de travailleurs antillais des bananeraies en sont exclus, en raison notamment de la condition d'avoir travaillé pendant au moins dix ans au contact de l'insecticide.

En réalité, beaucoup de personnes ont été au contact du chlordécone en dehors du travail. Selon Santé publique France, la quasi-totalité des Antillais – 92 % des Martiniquais et 95 % des Guadeloupéens – étaient contaminés au chlordécone en 2018. Plusieurs études ont établi un lien de présomption entre l'exposition au chlordécone et le cancer de la prostate. La Martinique détient le triste record mondial du nombre de cancers de la prostate avec près de 230 nouveaux cas pour 100 000 hommes chaque année. Que la contamination ait eu lieu dans le milieu de professionnel ou non, il est urgent de reconnaître, d'inclure et d'indemniser toutes les victimes. C'est une question d'égalité, de justice.

Nous retirerons notre amendement AS1 si l'amendement AS5 était adopté avec la modification proposée par M. Califer.

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Si quasiment tous nos compatriotes des Caraïbes ont été touchés, il faudra les indemniser. Cependant, nous devons reconnaître que certaines catégories de la population – les pêcheurs et les agriculteurs notamment – ont été particulièrement affectées sur les plans économique, sanitaire et social. L'exposition au chlordécone a aussi exacerbé certaines pathologies telles que le cancer de la prostate chez les adultes, ou de nombreux troubles neurologiques chez les enfants et adolescents. Notre amendement AS14 vise à répondre à ce besoin réel de reconnaissance.

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Le groupe Dem votera contre ces amendements. Il me semble inutile de préciser que l'indemnisation est « intégrale » : on doit être indemnisé à hauteur de son préjudice, une fois celui-ci reconnu. Rappelons une chose trop méconnue : il est possible de faire des tests en Guadeloupe sur prescription médicale et en Martinique sans prescription médicale. Une fois la contamination reconnue, la personne est indemnisée en fonction de son préjudice.

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Pour ma part, je m'interroge sur les effets des mesures proposées dans ces amendements : il faut anticiper de futurs contentieux probables et la manière de les interpréter. Nous avons l'expérience de la branche accidents du travail et maladies professionnelles qui instruit des dossiers de demande d'indemnisation. Comment différencier ce qui est intégral de ce qui ne l'est pas ? Le risque est même d'obtenir l'inverse de l'effet escompté : faute de bases juridiques solides, les interprétations pourraient donner lieu à des contentieux, et, finalement, à une absence d'indemnisation pour des personnes qui auraient pourtant été directement en contact avec le chlordécone.

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En réaction à l'intervention de M. Ruffin, je tenais à préciser que le président Chirac n'avait pas seulement fait un discours : en 1999, c'est sous sa présidence qu'il y a eu une première prise de conscience du sujet et que des mesures sanitaires et agronomiques de protection ont été prises. Ces études épidémiologiques ont permis au Premier ministre François Fillon de lancer en 2008 des actions interministérielles et les quinze actions de recherche, à l'origine des trois plans actuels.

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Comme pour les essais nucléaires et l'amiante, nous nous trouvons face à la nécessité de créer un fonds permettant d'indemniser des personnes contaminées dans le cadre professionnel ou autre. Dans le cas d'une maladie professionnelle, l'imputation est assez aisée : le médecin pourra dire au magistrat saisi qu'il existe une relation directe et certaine entre l'exposition au chlordécone et la maladie constatée. En revanche, l'imputation est plus difficile à établir pour l'entourage ou les enfants nés après l'utilisation du pesticide mais présentant des pathologies.

Comme M. Bazin, je pense qu'il faut anticiper les difficultés financières et donc envisager une reconnaissance réaliste. Même si nous avons un avis positif sur les amendements et le sous-amendement proposés, nous n'ignorons pas que les sommes en jeu sont très importantes. Si nous voulons parvenir à cerner les préjudices patrimoniaux et extrapatrimoniaux – c'est comme cela qu'ils sont appelés –, nous devons être très prudents car notre responsabilité est engagée.

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Il n'est évidemment pas question de nier la souffrance de l'entourage d'une victime de pollution tant il est douloureux de voir un proche atteint d'une maladie professionnelle. Pour ma part, je m'interroge sur la définition légale d'une victime indirecte ou d'un territoire indirectement victime d'une pollution. Il ne me semble pas pertinent d'intégrer une notion aussi floue dans le texte. Rappelons que certaines pathologies, dont le cancer de la prostate, sont multifactorielles et leur imputabilité passe par la reconnaissance de maladie professionnelle. Pour la population, massivement exposée à une pollution de l'air, de l'eau et de la terre, il faut renforcer les méthodes de détection de l'atteinte organique de chaque individu et, le cas échéant, lui reconnaître le statut de victime directe. Personnellement, je trouve que ces amendements ne sont pas bienvenus.

La commission rejette successivement les amendements et le sous-amendement.

Amendement AS2 de Mme Danielle Simonnet

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Cet amendement propose de considérer comme victimes les personnes qui ont été exposées à la molécule et qui résident toujours en Guadeloupe et en Martinique, mais aussi celles qui ont quitté ces territoires, notamment pour résider en France hexagonale. Dès lors que vous avez été exposé, les maladies peuvent surgir tout au long de votre vie, parfois des décennies plus tard. L'amendement de Danielle Simonnet, travaillé avec l'association afro-caribéenne DiivinesLGBTQIA+, permet d'apporter cette précision.

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Vous souhaitez que les victimes puissent être indemnisées, même si elles ne résident plus en Martinique ou en Guadeloupe.

Sur le fond, votre amendement me paraît satisfait. Dans le dispositif actuel, le statut de victime n'est pas déterminé par la résidence en Guadeloupe ou en Martinique, mais par le fait d'avoir subi un préjudice économique, écologique ou sanitaire, lié à l'utilisation du chlordécone sur ces territoires. Je ne vois pas pourquoi ceux qui ont quitté les Antilles en seraient exclus. Cela dit, je suis conscient que c'est plus difficile pour eux de faire les démarches, notamment parce qu'ils ne peuvent pas bénéficier du dépistage gratuit permettant de détecter la trace éventuelle de chlordécone dans leur sang. Il faudrait prévoir ce dépistage gratuit pour tous ceux qui ont résidé aux Antilles, indépendamment du lieu actuel de résidence et, plus largement, ouvrir les mêmes droits en matière de réparation aux victimes qui résident en France hexagonale. Pour cette raison, je donnerai un avis favorable à votre amendement qui apporte une précision utile.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AS15 de Mme Katiana Levavasseur

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Par cet amendement je propose la création d'un fonds spécifique de recherche et d'indemnisation pour les victimes de l'exposition au chlordécone. Il leur sera exclusivement dédié, contrairement au FIVP qui a tendance à noyer le poisson car son champ d'intervention est très large. En outre, le FIVP présente des lacunes : il pose des conditions trop restrictives pour que les victimes puissent s'en saisir, ce que corrobore le petit nombre de dossiers déposés. Ce qui s'est passé dans ces îles est trop lourd pour que nous nous en contentions. Nous devons aller dans le sens des associations qui demandent des moyens, des recherches et des mesures propres concernant le chlordécone.

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Chère collègue, on voit que vous avez travaillé le sujet et que vous avez rencontré des associations : votre proposition correspond à une forte demande. Votre fonds rappelle le dispositif prévu dans ma proposition de loi de juillet dernier, qui créait une autorité indépendante avec un peu les mêmes missions. Nous y avons renoncé dans ce texte car nous souhaitons un dispositif ramassé qui puisse être discuté et adopté dans le cadre de notre niche parlementaire. Il ne s'agit pas seulement de créer une structure, il faut définir son fonctionnement, sa composition et ses principes d'action, ce qui est un peu lourd. En outre, vous placez votre structure sur la tutelle des ministères, alors que nous plaidions pour son indépendance.

Votre proposition me semblant un peu prématurée, j'émets un avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AS8 de M. Frédéric Maillot

Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette l'amendement.

Amendement AS12 de M. Paul-André Colombani

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Cet amendement d'appel vise à essayer d'améliorer le dépistage de cancer de la prostate, mais sa rédaction mérite d'être améliorée car il concerne l'ensemble du territoire. Je vais le retirer et j'en déposerai une meilleure version en séance.

L'amendement est retiré.

Amendement AS19 de Mme Katiana Levavasseur

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La principale difficulté réside actuellement dans le manque d'information de la population. À force de dissimuler les problèmes et de repousser les actions nécessaires, les gouvernements successifs ont suscité une méfiance importante, parfaitement compréhensible, qu'il convient désormais de lever. Pour remédier à cette situation, cet amendement entend soumettre l'État à une obligation d'information, totalement transparente et juste, sur la chlordécone, les avancées en matière de dépollution et les démarches que nos concitoyens ultramarins pourront entreprendre telles que les analyses et dépistages gratuits ou la saisine du fonds d'indemnisation.

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Il est souhaitable d'avoir une information juste et transparente, mais ce n'est pas vraiment là où le bât blesse car le Gouvernement a d'ores et déjà fait un important effort de communication, reconnaissons-le. Le problème est que la confiance est rompue avec les populations de Guadeloupe et de Martinique, ce qui rend cette communication inefficace. Il faut adopter cette proposition de loi pour que l'État redevienne audible sur ces territoires. Nous pourrons alors vraiment commencer à travailler sur les préjudices causés à nos populations et nos territoires par le chlordécone.

Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AS9 de Mme Sandrine Rousseau

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Rien ne pouvait justifier qu'en 1972 le ministère de l'agriculture autorise la mise sur le marché du chlordécone alors que sa toxicité était déjà scientifiquement connue depuis 1963 et que la Commission des toxiques avait refusé par deux fois son homologation.

Rien ne pouvait justifier que le 2 avril 1976, soit un peu moins d'un an après l'incident de l'usine de Hopewell aux États-Unis et ses conséquences sanitaires graves à la suite de l'exposition au chlordécone, la France prolonge l'autorisation provisoire de cette substance.

Rien ne pouvait justifier, en 1981, l'homologation du chlordécone, alors que l'OMS avait classé la molécule comme cancérigène possible dès 1979, et que des rapports de 1977 et 1980 faisaient état de niveaux de contamination inquiétants des sols, des milieux marins, des plantes et de certains animaux.

Surtout, rien ne pouvait justifier que les pouvoirs publics français autorisent, comme ils l'ont fait, l'utilisation sur les sols martiniquais et guadeloupéens du chlordécone, interdit sur son territoire hexagonal en 1992 puis en 1993.

Pourtant, ces décisions ont été prises en connaissance de cause. Le temps est désormais à la reconnaissance de la responsabilité et à la réparation. Pour réparer et restaurer la confiance, il est nécessaire que la responsabilité des décideurs politiques soit publiquement établie. Ce travail de mémoire est aussi utile pour permettre de se rappeler les erreurs du passé et éviter de les reproduire.

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J'avoue ne pas vraiment comprendre vos intentions. Il me semble que les responsabilités sont établies dans cette affaire, notamment grâce aux travaux de la commission d'enquête présidée par Serge Letchimy. Nous savons comment la décision d'autorisation ou de prorogation a été prise, et que la responsabilité de l'État est engagée. Nous ne voulons pas faire de procès aux hommes politiques, aux gouvernements ou ministres successifs. Nous voulons que cette responsabilité soit reconnue et que toutes les conséquences en soient tirées sur le plan de la dépollution et de l'indemnisation. Il faut aller beaucoup plus loin que les plans chlordécone.

Avis défavorable.

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Rien ne pouvait justifier la prolongation de ces autorisations alors que l'on savait ce produit toxique, sauf peut-être aussi la demande locale, celle des producteurs, soutenue par les territoires, car ce produit était efficace pour lutter contre le charançon du bananier. Face à cette demande locale, il a été décidé de prolonger l'utilisation de ce produit avec ses risques afférents qui menaçaient les travailleurs dans les exploitations, mais pas les décideurs des territoires ni les propriétaires des bananeraies. Rien ne pouvait l'expliquer, sauf une demande locale acceptée par l'État.

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Nous ne voterons pas pour cette proposition, tout en reconnaissant qu'elle a le mérite de poser une question très importante : quelle est la responsabilité des dirigeants politiques qui signent des autorisations de mise sur le marché de produits dont la toxicité est connue ? On ne peut pas se contenter de faire allusion à des intérêts. Quelques industriels, voire quelques travailleurs, avaient peut-être intérêt à utiliser ce produit. En face, la totalité d'une population a été contaminée. Cela pose la question des lobbies et des sanctions à l'égard d'un personnel politique qui préfère écouter des lobbies industriels plutôt que de protéger la santé de l'ensemble des citoyens. Merci d'avoir posé cette question de la responsabilité des politiques – qui dépasse largement celle du chlordécone –, même si cette proposition de loi n'est pas le véhicule législatif idéal pour la trancher.

La commission rejette l'amendement.

Puis elle adopte d'article 1er modifié.

Après l'article 1er

Amendement AS16 de Mme Katiana Levavasseur

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Cet amendement entend impliquer les professionnels de santé et de l'éducation des territoires guadeloupéens et martiniquais dans ce dossier. L'idée est de passer par ces professionnels, qui ont la confiance des habitants, pour mieux informer nos concitoyens de ces territoires sur les répercussions de l'utilisation du chlordécone, mais aussi sur les avancées en matière de dépollution. Ces professionnels pourront répondre aux interrogations et inquiétudes de tous – du jeune qui va à l'école à la femme enceinte qui se rend chez son médecin –, et donner des conseils. Cela suppose évidemment la justesse et la transparence des informations.

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Sur le fond, je ne suis pas défavorable à votre proposition : il est évident que les professionnels devraient être mieux formés sur ce sujet – c'est d'ailleurs l'un des objectifs poursuivis par le Gouvernement dans le cadre du plan Chlordécone IV. Cependant, il ne me paraît pas souhaitable d'en faire un objectif de même rang que la dépollution des territoires et l'indemnisation des victimes. À mon avis, votre proposition aurait davantage sa place dans les débats sur le financement de la sécurité sociale.

Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AS3 de M. Jean-Philippe Nilor

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Par cet excellent amendement de notre camarade Nilor, nous demandons un rapport relatif à l'utilisation du chlordécone sur l'ensemble du territoire national. Grâce à un rapport publié en 2009 par l'Opecst, nous savons déjà que quelque 1 500 tonnes de chlordécone se sont évaporées en Europe par le biais de la société allemande Spiess & Sohn. La présence sur le territoire de l'Union européenne d'une telle quantité de ce dangereux pesticide dont la destination est inconnue interpelle : a-t-elle servi à alimenter des réseaux clandestins à destination des Caraïbes ? A-t-elle aussi été utilisée chez nous, à La Réunion, où il y a des bananeraies et des cultures intensives ? A-t-elle été utilisée pour d'autres cultures dans l'Hexagone ? Notre demande de rapport correspond à un besoin de transparence et de connaissances sur l'utilisation du chlordécone, y compris sur l'ensemble du territoire national.

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Tout en étant aussi un partisan de la transparence, j'ai du mal à cerner le périmètre de votre demande de rapport, qui me semble excéder celui du présent texte. Si certains faits vous paraissent troubles et même troublants, ce n'est pas le Gouvernement qui va vous éclairer, c'est au Parlement de faire la lumière, au moyen d'une mission d'information ou d'une commission d'enquête.

Avis défavorable.

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Cette demande de rapport est triplement importante.

Tout d'abord, nous savons que certaines informations existent, dont notamment les comptes de l'entreprise allemande Spiess & Sohn, qui a importé aux Antilles 1 200 tonnes de chlordécone après l'interdiction de ce dernier aux États-Unis. Ces comptes n'ont toujours pas été publiés, alors qu'on pourrait y trouver la liste des fournisseurs d'intrants et celle des personnes morales ou physiques auxquelles ce produit a été vendu.

Cela permettrait ensuite d'identifier les terrains où un épandage de chlordécone a pu avoir lieu. Car, contrairement à ce qui a pu être dit précédemment, ce produit n'a pas été utilisé seulement pour traiter les bananiers. Il sert aussi contre les taupins et les doryphores, donc à traiter les pommes de terre.

Certains rapports font ainsi état de la présence de traces de chlordécone dans le Nord-Est de la France ou dans les Sud-Est de l'Allemagne. Nous pourrions donc savoir un peu plus précisément où ont eu lieu des épandages et adapter en conséquence la politique de santé publique – en nous appuyant sur les luttes et l'expérience de nos compatriotes antillais, qui ont montré le chemin d'un combat qui doit être mené de manière universelle.

La commission rejette l'amendement.

Amendement AS20 de Mme Katiana Levavasseur

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La cartographie actuelle de la contamination des sols et des eaux par le chlordécone en Martinique et à la Guadeloupe est jugée trop lacunaire et a fait l'objet de nombreuses critiques, notamment de la part de la population locale. Il est donc impératif de réaliser une cartographie exhaustive des territoires affectés par l'utilisation de ce produit, mais également de la mettre régulièrement à jour. En effet, il est essentiel de surveiller de près l'évolution de la situation car, comme l'affirment certains experts, la molécule peut se transformer voire se dégrader au fil du temps.

C'est la raison pour laquelle cet amendement demande au Gouvernement de remettre un rapport établissant une telle cartographie.

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Il est exact que la cartographie dont nous disposons est assez lacunaire. Je me suis penché sur la question dans ma circonscription, où l'on cultive la banane, et l'information est inexistante. C'est bizarre.

Le processus actuel de cartographie repose sur le volontariat : il faut que le propriétaire demande que ses terres soient analysées. Il conviendrait plutôt que le Gouvernement intensifie ce processus afin d'aller au bout de la démarche. Même si le plan Chlordécone IV a permis d'accélérer un peu, cela n'avance pas très vite.

Mais demander de réaliser une cartographie tous les deux ans me semble quelque peu surréaliste et compliqué. On sait que la chlordécone est particulièrement rémanente et il est probable que cette molécule sera encore présente pendant très longtemps. Actualiser la cartographie tous les deux ans n'apportera pas d'informations supplémentaires. En revanche, il faut se donner les moyens de réaliser une cartographie générale.

Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Amendements AS21, AS17 et AS23 de Mme Katiana Levavasseur

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L'amendement AS21 est une demande d'audit complet de la situation écologique, sanitaire et médicale en Guadeloupe et en Martinique. Nous devons tout mettre en œuvre pour restaurer la confiance de nos compatriotes d'outre-mer et suivre l'évolution de la situation dans ces îles.

L'amendement AS17 propose quant à lui que le Gouvernement remette un rapport sur les répercussions sur le corps des femmes de l'utilisation du chlordécone. Cette demande a été formulée à plusieurs reprises, notamment lors des auditions. En effet, les recherches se sont pendant longtemps principalement concentrées sur les hommes, les problèmes de fertilité ou encore les cancers de la prostate. Si bien que l'on ne connaît pas vraiment l'impact qu'a eu la chlordécone sur la santé des femmes, qu'il s'agisse du cancer du sein ou de l'utérus.

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Avis défavorable, même si je reconnais qu'il est nécessaire d'éclaircir les choses. Ces deux demandes de rapport ont le mérite de souligner qu'il faut aller plus loin et plus vite.

Les effets du chlordécone sur la santé des femmes et des jeunes filles pubères constituent une préoccupation majeure. Les médecins indiquent aussi qu'ils voient arriver en consultation des jeunes hommes dont les seins poussent. Il faut donc accélérer les recherches et donner aux scientifiques les moyens de travailler. La recherche sur le chlordécone doit devenir une priorité nationale.

Les amendements sont en partie satisfaits par la proposition de loi, qui demande que cette recherche soit renforcée. À ce stade, nous ne disposons pas des éléments scientifiques d'une qualité suffisante pour qu'un rapport assure notre bonne information.

La commission rejette successivement les amendements.

Article 2 : Gage de recevabilité financière

Amendement AS10 de Mme Sandrine Rousseau

La commission rejette l'amendement.

Elle adopte ensuite l'article 2 non modifié.

Puis elle adopte l'ensemble de la proposition de loi modifiée.

La réunion est suspendue de douze heures à douze heures cinq.

La commission examine ensuite la proposition de loi visant à lutter contre les pénuries de médicaments (n° 2062) (Mme Valérie Rabault, rapporteure).

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Chacun d'entre nous et chacun des habitants de nos circonscriptions, qu'il s'agisse de patients ou de pharmaciens, a été confronté aux pénuries de médicaments.

« Imposer des stocks au laboratoire pour des médicaments d'intérêt thérapeutique est une bonne façon de procéder. [...] Le délai de quatre mois est raisonnable, juste, avéré scientifiquement et surtout suffisant pour assurer la continuité de l'accès aux médicaments pour le marché français. » Ces mots ont été prononcés en séance publique le 25 octobre 2019 par Olivier Véran, alors rapporteur général de la commission des affaires sociales, à l'occasion de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2020.

Je ne peux que faire mienne son affirmation, qui a d'ailleurs inspiré l'article 1er de cette proposition de loi. L'article de ce PLFSS qui imposait aux entreprises pharmaceutiques de constituer un stock de sécurité destiné au marché national avait d'ailleurs été adopté à l'unanimité.

La proposition de loi que j'ai l'honneur de vous présenter trouve son origine dans cette ambition partagée de garantir la disponibilité des médicaments destinés à répondre aux besoins de nos concitoyens. C'est la première fois qu'une proposition aborde la question des pénuries de médicaments – même si des dispositions ont été présentées dans le cadre du PLFSS.

Son inscription à l'ordre du jour vise à répondre à une conjoncture très difficile puisque, selon France Assos Santé, 37 % des Français ont été confrontés à au moins une pénurie de médicaments en 2023, contre 25 % l'année précédente.

Le nombre de ruptures et de risques de rupture de stock déclarés à l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a été multiplié par dix au cours de la dernière décennie. Nous sommes passés de 404 déclarations en 2013 à 4 925 en 2023. Il est important de rappeler que cela peut donner lieu à des mesures de limitation de la quantité de médicaments délivrés ou encore de restriction d'accès à certaines molécules – y compris à certaines qui sont absolument essentielles. L'ANSM a indiqué qu'un quart des déclarations de rupture ou de risque de rupture d'approvisionnement ont donné lieu à de telles restrictions en 2019. Cette proportion atteint désormais environ 40 %. Notre pays manque encore d'antibiotiques, d'amoxicilline, de salbutamol contre l'asthme, de Corgard – un bêtabloquant essentiel –, de Creon – prescrit à ceux qui n'ont plus de pancréas – et de bien d'autres médicaments d'importance vitale.

Je pense que notre responsabilité première de députés est de faire en sorte que le droit effectif à la protection de la santé, qui figure dans le Préambule de la Constitution de 1946, soit défendu par tous les moyens.

Il est également important de rappeler l'augmentation exponentielle du temps passé par les professionnels de santé pour faire face aux conséquences de ces pénuries, que ce soit dans les officines ou à l'hôpital. On nous a indiqué que dix heures par semaine y étaient en moyenne consacrées dans une petite officine, tandis que le nombre d'équivalents temps plein (ETP) affectés dans les hôpitaux à la gestion des pénuries est en augmentation croissante.

Cette proposition de loi me tient à cœur. J'ai interpellé le Gouvernement sur ce sujet à plusieurs reprises depuis 2017. Lors des questions au Gouvernement, j'ai interrogé Agnès Buzyn, puis le Premier ministre Édouard Philippe en juin 2019. À la suite de cela, ce dernier a demandé un rapport à Jacques Biot et l'obligation pour les industriels de constituer des stocks a été inscrite dans la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2020. J'ai rappelé que cette disposition avait été adoptée à l'unanimité.

Il était prévu que ces stocks couvrent quatre mois de besoins, mais cette ambition a été amoindrie par le décret du 30 mars 2021 – dont la parution a été attendue pendant deux ans. Ce dernier a fixé, pour chaque catégorie de médicaments, le niveau de stock nécessaire que tout exploitant ou titulaire d'autorisation de mise sur le marché est tenu de constituer afin d'assurer l'approvisionnement du système de santé. En outre, pour la plupart des médicaments, les niveaux de stocks établis par ce décret se sont avérés inférieurs à ce qui avait été voté à l'unanimité par l'Assemblée nationale lors de l'examen du PLFSS 2020. Ainsi, pour les médicaments d'intérêt thérapeutique majeur (MITM), le stock de sécurité doit correspondre à deux mois de besoins. Il est exact qu'une marge de manœuvre est accordée à l'ANSM, qui peut porter ce plafond à quatre mois. Mais elle peut le faire seulement lorsque le médicament concerné a connu une pénurie au cours des deux années précédentes.

En pratique, cela signifie que si l'ANSM est alertée par un industriel ou un laboratoire sur un risque de pénurie de médicament, elle ne peut pas leur enjoindre de passer tout de suite à un stock de quatre mois si une telle pénurie ne s'est pas déjà manifestée pendant ces deux années passées. L'obligation de stocks de quatre mois concerne actuellement 400 médicaments. Les niveaux de stocks ne paraissent pas suffisants pour prévenir le risque de pénurie.

Nous avons mené dix-neuf auditions dans le cadre de l'examen de cette proposition. L'ANSM, France Assos Santé, l'UFC-Que choisir, le Conseil national de l'Ordre des pharmaciens et l'Union des syndicats de pharmaciens d'officine ont tous souligné la nécessité de disposer d'un stock minimal pour être capable de faire face aux tensions en matière d'approvisionnement – c'est-à-dire de pouvoir faire varier la durée des stocks en fonction des informations disponibles sur des difficultés éventuelles de production.

L'ANSM a insisté sur la nécessité de recueillir l'information de manière précoce, dès que se manifeste un risque de tension, et de rehausser la durée minimale de stocks afin de se donner du temps et de pouvoir réagir. Le président de la chambre syndicale de la répartition pharmaceutique – qui représente les grossistes répartiteurs – a confirmé ce point lors de son audition. Lorsque je lui ai demandé comment éviter la pénurie, il a apporté la réponse suivante : « Il faut qu'on soit livré de nos stocks. Il faut que les stocks existent en quantité suffisante. »

Les auditions ont montré que les stocks sont indispensables pour faire face aux augmentations imprévues des besoins, comme on a pu le constater lors des hivers 2022 et 2023.

Ils sont également nécessaires pour nous protéger des vulnérabilités inhérentes à la fragmentation et à la mondialisation des chaînes de production. On sait que les médicaments dits « princeps » sont fabriqués à 80 % en Chine et en Inde, tandis qu'entre 70 et 80 % des médicaments génériques que nous consommons proviennent d'Europe – une grosse usine située en Autriche a d'ailleurs connu quelques difficultés. Il faut évidemment traiter la question de cette vulnérabilité à l'échelle européenne, mais tel n'est pas l'objet de cette proposition.

Pour nous prémunir des risques de rupture d'approvisionnement de certains médicaments, nous devons donner à l'ANSM la possibilité d'enjoindre de constituer des stocks plus importants.

L'article 1er prévoit donc de renforcer l'obligation de constituer un stock de sécurité, introduite dans la LFSS 2020. Comme je l'ai rappelé, le décret ne correspond pas à l'objectif que nous avions voté à l'unanimité.

L'article 2 prévoit de relever le plafond des sanctions. Je veux bien entendre tous les arguments sur la proportionnalité des sanctions, notamment par rapport au niveau de rentabilité de certains médicaments génériques. Mais je signale que de nombreuses personnes auditionnées ont indiqué que le dispositif que je propose leur convenait. C'est le cas de Thomas Fatôme, directeur général de la Caisse nationale de l'assurance maladie – qui était précédemment le directeur de cabinet adjoint du Premier ministre Édouard Philippe – et des représentants de la direction générale de la santé (DGS) et de l'ANSM. Pour Thomas Fatôme : « L'article 2 va totalement dans le bon sens. Je ne crois pas que les mécanismes actuels de sanctions jouent suffisamment leur rôle. » Et pour la DGS : « L'article 2 est OK pour nous. ». Cela pourra être confirmé par tous ceux qui ont assisté aux auditions. Les sanctions doivent en effet être un peu dissuasives.

J'ai travaillé sur cette proposition de loi avec pour but que nous puissions aboutir à un texte qui suscite l'adhésion collective, car nous sommes tous concernés par les pénuries de médicaments. C'est ce qui m'a amené à proposer un amendement de réécriture de l'article 1er, afin de donner de la flexibilité à l'ANSM dans l'exercice des missions que nous lui confions. Il ne faut pas que les industriels, obligés par la loi de constituer des stocks, refusent d'y puiser à la demande de l'ANSM en cas de sévère pénurie par crainte d'être sanctionnés. J'ai conscience que cette ligne de crête est étroite, mais le principe de réalité doit primer. Il serait irresponsable qu'on en vienne à refuser d'utiliser des stocks de médicaments dont nos concitoyens ont besoin.

J'en viens à une question qui ne relève pas de cette proposition mais qui pourrait faire l'objet d'une mesure dans le cadre d'un PLFSS : qui connaît les stocks de médicament en France ? Leur gestion relève de trois systèmes d'information qui fonctionnent en tuyaux d'orgue : Trustmed, TRACStocks et DP-Ruptures. L'ANSM emploie dix ETP pour agréger leurs données afin de connaître l'état et la localisation des stocks. Il serait nécessaire d'aider l'ANSM à mettre en place un système d'information partagé, qui lui permette de disposer en permanence d'une vision d'ensemble et d'être en mesure d'agir. Elle pourrait ainsi assurer un pilotage global, à la manière d'une tour de contrôle.

L'Assemblée nationale doit être capable de répondre à ces pénuries de médicaments, qui constituent une source d'angoisse constante pour nos concitoyens – en particulier quand on habite un territoire rural, qu'on est très âgé et que l'on ne peut pas faire 200 kilomètres pour essayer de trouver une pharmacie qui dispose des médicaments dont on a besoin. Cette angoisse est partagée par les pharmaciens d'officine, qui subissent les réactions d'incompréhension des patients – lesquelles prennent parfois une forme de violence inacceptable. Sans sous-estimer les difficultés, il faut donc trouver un mode de fonctionnement qui permette d'alléger la pénurie de médicaments.

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Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

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Chacun d'entre nous a en effet pu être confronté à des problèmes de pénurie de médicaments. Notre groupe a donc regardé avec intérêt cette proposition de loi.

La première feuille de route destinée à lutter contre ces pénuries a été publiée en 2019 et une nouvelle version devrait être présentée prochainement. De nombreuses actions ont été mises en place ces dernières années. Je tiens à rappeler que c'est notre majorité qui a prévu en 2019 une obligation de constitution de stocks pour les industriels. Conformément aux recommandations de l'ANSM, nous avons aussi donné aux pharmaciens la possibilité de substituer un médicament à un autre en cas de rupture de stock. Nous avons posé dans la LFSS 2024 les bases d'un nouveau pacte entre les pouvoirs publics et les industriels pour réguler les médicaments. En effet, diverses mesures ont été prises pour économiser des médicaments en cas de rupture de stock, comme leur délivrance à l'unité, la réalisation préalable d'un test diagnostic avant l'utilisation d'antibiotiques et le renforcement des pouvoirs de police de l'ANSM.

Notre majorité fera des propositions constructives pour enrichir ce texte, mais nous ne sommes pas favorables à l'augmentation de la durée des stocks obligatoires prévue par l'article 1er. En effet, élargir cette mesure à l'ensemble du marché des médicaments aurait des conséquences contreproductives. C'est une fausse bonne idée et notre groupe recherche l'efficacité plutôt que les effets d'annonce.

Le groupe Renaissance espère que nos débats aboutiront à des propositions efficaces qui permettront de diminuer la pénurie de médicaments, ce qui constitue une réelle attente de nos concitoyens.

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Les auditions ont permis de révéler la complexité des rouages de la distribution des médicaments en France, tout particulièrement pour le dernier kilomètre. De très nombreuses causes en amont sont à l'origine des pénuries constatées : production des principes actifs au bout du monde, contrôle de qualité, façonnage, conditionnement, acheminement, blocages administratifs, règles commerciales contradictoires tant au niveau mondial qu'européen – le tout dans un contexte géopolitique tendu.

Une fois les produits arrivés sur notre sol, tout reste à faire. L'opacité et les règles commerciales de concurrence dans un domaine de délégation de service public, la pénurie de prescripteurs, le désarroi des officines et des hôpitaux plongés dans un nouveau dédale administratif : tout est stupéfiant et source de nouvelles pénuries.

Il existe déjà une obligation de constituer un stock national, dont la taille varie selon les types de médicaments. Comme nous en 2020, vous proposez d'augmenter leur plancher. Nous soutenons bien entendu votre proposition, indispensable pour protéger les Français.

Pour autant, lorsque des pénuries en amont menacent des produits gérés à flux tendus ou s'il n'existe pas d'alternative, l'ANSM doit disposer de pouvoirs dérogatoires et être en mesure, grâce à l'article 1er, d'enjoindre de constituer des stocks avec un préavis adapté. Nous savons que ces derniers ont un coût : ils doivent être situés dans des lieux spécifiques et dépendent de lignes de production qui sont déjà saturées, tant en France qu'en Europe.

Leur gestion doit être aussi transparente que possible et l'ensemble des acteurs doit transmettre les données dont ils disposent. Celles-ci devraient être centralisées par un seul acteur sur une plateforme unique, ce qui contribuerait à une meilleure répartition des médicaments sur le plan national, voire internationale en cas de pandémie.

Cela remettra forcément en question la gestion à flux tendu de certains producteurs. Le stockage ne doit pas être un outil à double tranchant qui serait une cause secondaire de pénurie. C'est la raison pour laquelle j'espère que l'article 1er sera très sérieusement amendé, comme l'a proposé la rapporteure générale.

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Certains chiffres parlent d'eux-mêmes : en 2017, l'ANSM recensait 530 MITM en rupture de stock ou sur le point de l'être. Ces signalements se sont élevés à 1 500 en 2022 et à presque 5 000 en 2023, soit une multiplication par dix. Où va-t-on ?

Derrière ces chiffres, il y a l'épuisement des patients qui errent en vain de pharmacie en pharmacie en quête de médicaments parfois vitaux. Il y a l'épuisement et l'impuissance des parents, qui ne parviennent pas à soigner leurs enfants alors que des traitements existent. C'est vraiment rageant. Une pénurie de traitements contre la bronchiolite a été constatée. Il y a aussi le désespoir des personnes âgées, réduites à prendre leur mal en patience, mais aussi les burn-out des soignants qui se démènent pour pallier les pénuries avec les moyens du bord.

Comment en est-on arrivé là ? C'est le résultat de décennies de marchandisation de la santé et de cadeaux faits aux multinationales du médicament – dont le seul objectif est de verser plus de dividendes à leurs actionnaires. C'est aussi le résultat d'un quinquennat d'inaction.

La proposition de loi du groupe Socialistes et apparentés va donc dans le bon sens. Les laboratoires pharmaceutiques ont l'obligation d'assurer un approvisionnement pérenne pour les médicaments qu'ils commercialisent. Ce texte propose de fixer un seuil minimal de réserves que devront constituer des industriels pour anticiper les périodes de forte demande. Il a aussi le mérite d'augmenter les sanctions à l'encontre des laboratoires qui ne respectent pas leurs obligations. Nous voterons donc pour.

Mais est-ce suffisant ? Non : le manque de stocks n'est pas la seule raison des pénuries. Il faut un grand plan d'urgence pour sécuriser l'approvisionnement en médicaments.

Cela passe évidemment par la création d'un pôle public du médicament ayant vocation à assurer l'approvisionnement, notamment en médicaments stratégiques. Tel est le sens de la proposition de loi déposée par mon collègue Damien Maudet, qui est soutenue par 90 % des Français.

Cela suppose aussi de conditionner les aides aux multinationales du médicament, notamment le crédit d'impôt recherche (CIR). Tel est l'objet d'un amendement que nous avons déposé. Comment l'entreprise Sanofi a pu supprimer encore 400 postes en 2021, alors qu'elle a bénéficié en dix ans de plus de 1 milliard d'euros d'exonérations d'impôts au titre du CIR ? Il faut rendre plus transparentes les aides publiques dont bénéficient les multinationales, mais aussi revoir les modalités de fixation des prix. Hélas, nos amendements sur ce dernier sujet ont été déclarés irrecevables.

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L'inscription de cette proposition à l'ordre du jour est bienvenue.

Les pénuries de médicaments touchent la médecine de ville et il a été fait état de nombreux cas de pharmacies qui n'ont pas été en mesure de fournir des médicaments pourtant indispensables à nos concitoyens. Ces pénuries concernent également l'hôpital. Les ruptures ont été multipliées par dix-neuf en une dizaine d'années. La situation est donc extrêmement préoccupante.

L'article 1er propose tout d'abord de fixer le seuil plancher de quatre mois de stocks pour les MITM et de deux mois pour les autres. La question des stocks est évidemment clef, mais on voit que la politique actuelle en la matière ne fonctionne pas. Si elle fonctionnait, il n'y aurait pas de pénuries.

Ensuite, la gestion des stocks peut produire le meilleur comme le pire. Si les obligations sont très dures, on risque d'inciter un certain nombre d'acteurs du marché à aller voir ailleurs. C'est une affaire extrêmement subtile.

Je partage l'avis de la rapporteure : la libération des stocks est un élément fondamental.

Est-il pertinent de cibler une catégorie aussi large que celle des MITM ? Elle comprend plusieurs milliers de médicaments. Ne faudrait-il pas prévoir une catégorie plus réduite de médicaments de souveraineté, ou bien retenir deux médicaments par classe thérapeutique importante – un per os et un par voie parentérale ? Cela doit faire l'objet d'une réflexion et nous la menons au sein du groupe LR.

Où en sommes-nous en matière de surveillance de l'état des stocks ?

Nous sommes globalement favorables à l'article 2.

Nous sommes nombreux à penser qu'il est nécessaire d'utiliser la clause de sauvegarde pour répondre à des objectifs de santé publique, mais aussi pour lutter contre les pénuries de médicaments.

Enfin, cette proposition n'aborde malheureusement pas la question fondamentale de la stratégie de relocalisation durable de la production de médicaments en Europe.

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Tous les Français sont confrontés aux ruptures de stocks de médicaments et je n'y reviendrai pas.

Cette situation est le fruit d'un problème de production industrielle mais aussi de gestion des stocks. Ces derniers sont dispersés – chez les grossistes, les pharmaciens et les Français – et tout le monde est un peu responsable. On produit ainsi plus de Clamoxyl qu'il en est prescrit, mais les stocks sont mal répartis et certains de nos compatriotes font des stocks excessifs.

La proposition de loi cible les producteurs, alors même qu'ils sont peu nombreux, que la demande est forte et que la rentabilité est faible. J'insiste sur ce point : les produits matures rapportent très peu. On impose à leurs producteurs un faible prix. Je rappelle que la clause de sauvegarde que nous votons chaque année dans le cadre de la LFSS représente désormais 1 milliard d'euros d'économies. Et l'on voudrait en plus leur faire financer la constitution de stocks, c'est-à-dire des coûts d'immobilisation et logistiques.

Cette proposition est intéressante, mais elle est selon moi malheureusement contreproductive. Si l'on fait pression sur les industriels, ils seront de moins en moins nombreux et leurs marges seront encore plus réduites. Si l'on prévoit de surcroît des pénalités accrues, ils vont tous se retirer du marché. Cela m'inquiète.

Il faut une stratégie européenne de long terme pour relocaliser la production.

Il convient également de s'interroger au sujet de la surconsommation de médicaments en France, ce que l'on ne fait jamais alors que c'est un point important.

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Bravo, madame la rapporteure, pour votre persévérance et votre détermination dans ce combat urgent.

Le 13 décembre dernier, nous avons eu l'occasion d'interpeller la directrice générale de l'ANSM à propos du bilan de son premier mandat, notamment en ce qui concerne les pénuries de médicaments. Il est plus que temps de légiférer de manière décidée sur ce sujet. Pas une semaine ne passe sans qu'un article de presse ou un message provenant de nos circonscriptions ne fasse état d'une nouvelle situation intenable. Chaque année, le nombre de déclarations de rupture et de risque de rupture de stock grimpe. En 2014, on en comptait 330 ; en 2022, elles s'élevaient à 3 800 ; l'année dernière, il y a eu 5 000 déclarations de ce type. Selon France Assos Santé, 37 % des Français ont été confrontés à une pénurie de médicaments en pharmacie en 2023, soit une augmentation de 8 points par rapport au niveau déjà très élevé enregistré en 2022.

Cet état de fait donne lieu à des situations ubuesques et dangereuses, avec des personnes qui déclarent disposer d'un an de Levothyrox chez eux, par peur de manquer. On peut aussi mentionner le cas de cette mère désespérée qui, devant l'état de son nourrisson, a témoigné dans les médias avoir dû se procurer du Gaviscon pédiatrique sur un groupe Facebook d'entraide locale.

Il est évidemment encore plus nécessaire d'agir s'agissant des MITM. Les pénuries entraînent des reports de traitement, des changements de médicaments et des situations de stress chronique. Elles conduisent donc directement à une détérioration de la santé des patients et à une baisse de leur espérance de vie.

À travers les deux articles de ce texte nous souhaitons, d'une part, responsabiliser davantage l'industrie pharmaceutique en matière de gestion des stocks et, d'autre part, nous donner les moyens de faire respecter les obligations – car l'efficacité d'un système contraignant repose sur la réalité des sanctions qu'il prévoit.

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L'enjeu des pénuries de médicaments n'est pas nouveau. Il est d'ailleurs à l'origine de la création de l'ANSM à l'occasion de la LFSS 2012. Le dispositif alors adopté a permis d'instaurer des obligations à l'ensemble des acteurs de la chaîne du médicament, des industriels aux pharmaciens.

Malgré cela, il est indéniable que les ruptures de stock augmentent de manière tendancielle, et ce depuis plusieurs années. Les 4 900 déclarations de rupture de stock ont nécessité, dans 40 % des cas, de prendre des mesures pour garantir la couverture des besoins des patients.

Rappelons que, conscients des risques que cela fait peser sur nos concitoyens, le Gouvernement a décidé d'accroître la capacité d'action des autorités sanitaires lors de l'examen du PLFSS 2024. Je pense notamment au renforcement des pouvoirs de police sanitaire de l'ANSM ou encore à la faculté qui lui est confiée de requalifier un médicament en MITM.

Selon la directrice de l'ANSM, depuis l'entrée en vigueur en 2021 du dispositif de constitution de stocks de sécurité, le stockage n'est plus le principal frein au bon approvisionnement – contrairement à ce que laisse entendre la proposition. Il faut plutôt s'interroger sur la gestion des stocks et sur leur répartition sur le territoire national, comme la rapporteure l'a reconnu dans son propos liminaire.

Plus encore, nous devons soutenir la réindustrialisation, et donc la production sur notre territoire ou au sein de l'Union européenne.

La Commission européenne a par ailleurs dévoilé à la fin de 2023 son plan pour remédier aux pénuries, annonçant notamment le lancement d'un mécanisme européen de solidarité volontaire en matière de médicaments. Parmi les mesures figure l'acquisition de stocks conjoints à l'échelle européenne pour l'hiver prochain.

Si le groupe Horizons et apparentés partage la volonté d'agir sur ce sujet qui affecte très directement le quotidien et la santé de nos concitoyens, nous ne pensons pas qu'en l'état la proposition permette d'atteindre sa cible. Votre amendement de réécriture de l'article 1er nous encourage d'ailleurs à discuter des risques liés à la constitution de stocks exagérés. Cela pourrait décourager les industriels d'investir en France.

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Paracétamol, antibiotiques, traitements anticancéreux ou hormonaux, corticoïdes, insuline, anesthésiants : jamais notre pays n'avait connu autant de ruptures de stock. Et pourtant les industries pharmaceutiques n'ont jamais fait autant de profits. Cherchez l'erreur.

Cette proposition de loi fait écho au véritable chantage que nous subissons depuis plus de quinze ans de la part d'industries pharmaceutiques prédatrices, auxquelles les politiques néolibérales successives ont déroulé le tapis rouge pour faire systématiquement passer le profit devant l'intérêt général.

Si notre groupe salue l'initiative du groupe Socialistes et apparentés, il insiste sur la nécessité d'aborder les causes structurelles qui ont mené à la perte de souveraineté de notre pays sur les médicaments. Elle s'explique notamment par la délocalisation massive de la production en Asie au cours des quarante dernières années. Le rapport de force extrêmement favorable aux industriels leur a laissé le champ libre pour exiger des prix exorbitants pour les thérapies innovantes tout en abandonnant les médicaments les moins rentables.

L'examen de cette proposition doit être l'occasion de rappeler que la course aux profits ne sera jamais compatible avec la planification sociale et écologique, dont notre système de santé a terriblement besoin. Le groupe Écologiste souhaite, d'une part, mettre en lumière les stratégies de dumping fiscal, social et écologique à laquelle se livrent les entreprises pharmaceutiques et, d'autre part, renforcer drastiquement leurs obligations environnementales. Nous proposerons également d'envisager la création d'un pôle public du médicament, seule structure à même de garantir notre souveraineté sanitaire.

Cette proposition doit être l'occasion de tirer les leçons de l'extrême vulnérabilité de la nation de Pierre et Marie Curie, mise en évidence lors du covid-19. Car nul besoin d'être devin pour savoir avec certitude que de nouvelles crises sanitaires auront lieu. Alors, soyons prêts.

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Le rapport de la commission d'enquête du Sénat sur la pénurie de médicaments et les choix de l'industrie pharmaceutique française – créée à l'initiative du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – a été publié au printemps dernier. Rédigé par Laurence Cohen, ce rapport est riche en données objectives et il nous apprend qu'en 2022 plus de 3 700 médicaments ont été signalés en rupture ou à risque de rupture de stock, soit trois fois plus qu'en 2019.

Il indique aussi que l'ANSM use peu de son pouvoir de sanction. Entre 2018 et 2022, elle n'a prononcé que huit pénalités financières, pour un montant total de 922 000 euros. Et aucune d'entre elles n'avait pour motif une violation des obligations d'élaboration d'un plan de gestion de pénurie ou de constitution d'un stock de sécurité – ce qui est pour le moins étonnant en période de pénurie avérée.

Cette proposition prévoit à juste titre, d'une part, de renforcer les stocks de sécurité en allongeant la durée de réponse aux besoins qu'ils doivent assurer et, d'autre part, de renforcer les sanctions financières.

Il nous semble néanmoins nécessaire de rendre obligatoires ces dernières et de les assortir d'un montant plancher. Les pénuries trouvent leur origine dans le choix du Gouvernement de s'en remettre à une logique marchande, au détriment de l'intérêt général.

Le rapport du Sénat pointe ainsi l'insuffisance des mesures prises pour contraindre les entreprises pharmaceutiques en matière de prévention, de déclaration et de gestion des pénuries dans un contexte de dépendance croissante aux importations, venues notamment d'Asie. Il évoque un chantage aux prix encouragé par la financiarisation des laboratoires et souligne le problème que constitue l'augmentation du pouvoir de laboratoires qui développent des médicaments en monopole. Cela pose la question des brevets et de l'organisation de l'ensemble de la chaîne de production. Un pilotage par une politique publique plus forte est nécessaire. Il faut aussi mettre en place un service public du médicament, afin d'instaurer un rapport de force différent.

Par ailleurs le secteur pharmaceutique est le deuxième bénéficiaire du CIR, avec 710 millions d'euros en 2020 – sans aucune contrepartie puisqu'il ferme des sites de recherche et de production. Le rapport du Sénat ne manque pas de propositions sur ce point, afin que les entreprises pharmaceutiques rendent des comptes à l'État et aux patients.

Je remercie la rapporteure d'avoir mis ce sujet sur la table.

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Le phénomène des pénuries de médicaments s'est dangereusement accru et s'est durablement installé. L'an passé, plus d'un tiers de la population y a été confronté. Les pénuries de l'hiver 2023-2024 n'ont été anticipées ni par les industriels, ni par les pouvoirs publics. Tous les médicaments sont touchés. Il ne s'agit plus seulement des antibiotiques mais également des médicaments destinés à traiter le diabète ou les pathologies cardiovasculaires.

Cela pose un problème majeur en matière d'accès aux soins. C'est avant tout un risque accru de perte de chance pour les malades. Mais ces pénuries entraînent aussi une surcharge de travail pour les médecins et les pharmaciens, qui cherchent des alternatives pour leurs patients.

Notre responsabilité est en premier lieu de nous assurer que l'industriel s'acquitte de ses obligations. C'est la contrepartie de l'autorisation de mise sur le marché : il doit s'engager à fournir les volumes nécessaires et attendus. Or le système industriel favorise désormais les médicaments les plus rentables, au détriment des plus anciens pourtant souvent plus efficaces.

Nous soutiendrons donc ce texte qui prévoit de renforcer les obligations de constitution de stocks de sécurité applicables aux industriels. Nous avions proposé des mesures similaires lors de la discussion du précédent PLFSS.

Une attention particulière doit être portée aux médicaments d'intérêt thérapeutique majeur, qui sont vitaux pour les patients concernés. Nous proposons par exemple de reprendre la recommandation de la commission d'enquête du Sénat qui consiste à mettre à jour chaque année la liste de ces médicaments, qui font l'objet d'une obligation de constitution de stocks.

D'autres pistes qui ne sont pas abordées par cette proposition mériteraient également d'être étudiées, comme la relocalisation de la production de matières premières – rappelons que 80 % des principes actifs des médicaments sont fabriqués en Inde ou en Chine. La France est tombée de la première à la cinquième place parmi les producteurs européens. Les industriels pharmaceutiques français envisagent d'abandonner la production de 700 médicaments, dont des MITM.

Il est donc urgent de proposer des solutions adaptées.

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Les difficultés d'approvisionnement en médicaments ont continué de s'aggraver en 2023 : 4 925 signalements de rupture de stock ou de risque de rupture ont été enregistrés ces douze derniers mois, soit une augmentation de 30,9 % par rapport à 2022. Les pénuries provoquent des pertes de chance et les médicaments concernés sont de tous types.

Les causes sont conjoncturelles : explosion de la demande mondiale et guerre en Ukraine, laquelle a affecté la chaîne du médicament ; elles sont également structurelles, comme le montrent notamment les délocalisations massives. La Chine et l'Inde produisent désormais 80 % des principes actifs : cette dépendance est très dangereuse.

La financiarisation du secteur a joué un rôle crucial. Les prix des MITM, souvent anciens et déclinés en génériques, ne sont pas suffisamment attractifs pour les fabricants.

Ainsi, la pénurie de médicaments concerne aussi bien la souveraineté que la santé publique. Or le présent texte ne prévoit pas de solution pérenne pour garantir la première. Nous n'atteindrons pas l'indépendance sanitaire en appliquant des sanctions qui aggraveront davantage la fuite des entreprises pharmaceutiques.

Il serait plus opportun de réformer le mode de fixation des prix des médicaments, autrefois administré par l'État au regard des coûts de production, et de réfléchir à des solutions durables pour relocaliser les productions de médicaments dans le territoire hexagonal.

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En matière de médicaments, nous avons manqué de tout, tout le temps, partout. À Ambazac, dans les services pédiatriques d'Île-de-France ou dans le salon d'Apolline de Malherbe, tout le monde se plaint des pénuries qui mettent en danger la santé des patients.

Depuis qu'Emmanuel Macron a été élu, peu de choses ont augmenté. C'est le cas de ces pénuries, multipliées par neuf depuis 2017. La raison en est simple : on a délocalisé pour faire des profits, 80 % des principes actifs sont fabriqués en Asie et 40 % des médicaments proviennent de pays hors de l'Union européenne. Le covid aurait dû être un tournant. À l'époque, on parlait du bien public mondial et de la nécessaire souveraineté. Au lieu de les rechercher, on a assisté à un grand renoncement des gouvernements, y compris de celui de la France. On a laissé se produire un grand gavage, avec pour résultat quarante nouveaux milliardaires. Sanofi va même coter le Doliprane en bourse, nous faisant risquer une nouvelle perte de souveraineté. Le laisser-faire du Gouvernement est insupportable.

Cette proposition de loi va dans le bon sens, en particulier s'agissant des stocks. Toutefois, il faut aller plus loin. M. Cyrille Isaac-Sibille a souligné que certains médicaments ne sont pas rentables. Mais les Français ne peuvent accepter d'être privés de médicaments parce que leur production n'est pas rentable ! Si c'est le cas, il faut instaurer une production publique des médicaments matures. Certains pays le font. Nous devons également améliorer la transparence et la régulation de l'industrie pharmaceutique : elle fait partie de celles qui engendrent le plus de profit, sans que le service rendu aux Français soit à la hauteur.

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Il y a quinze jours, j'avais un bon gros rhume. La médecin de l'Assemblée m'a expliqué que j'avais besoin d'amoxicilline mais que la pharmacie d'à côté n'en avait plus ; elle a ajouté qu'elle n'aurait jamais cru que notre pays en viendrait là. Les pharmaciennes n'avaient effectivement pas le médicament prescrit. Elles ont cherché un produit de remplacement, mais elles m'ont surtout demandé de faire quelque chose pour elles.

Ce petit témoignage corrobore la multiplication par neuf ou dix des pénuries de médicaments depuis 2017, puisque nous sommes passés de 500 à 5 000 ruptures. La première cause, c'est que le marché ne marche plus. Il faut donc le réguler, peut-être en sortir. Nous ne sommes pas près de rapatrier les médicaments : le rapport d'information du Sénat indique que seuls 17 % des 106 projets de rapatriement ont réellement abouti.

Pour assurer le « réarmement » de la France dans ce domaine, Sanofi devrait être en première position. Il va céder le Doliprane à Lisieux, après avoir fermé les sites d'Alfortville et de Chilly-Mazarin et cédé Vertolaye, Saint-Aubin-lès-Elbeuf et le site de Strasbourg – le massacre continue.

Mme la rapporteure propose donc de renforcer les stocks pour disposer d'un tampon, au moins pour les 422 MITM. La loi en vigueur est bizarre puisqu'elle interdit aux industriels d'avoir plus de quatre mois de stock. Le texte tend à transformer ce plafond en plancher.

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Pour l'anecdote, monsieur Ruffin, le manque d'antibiotiques n'était pas grave dans votre cas, puisqu'ils ne sont pas nécessaires pour soigner un rhume. Vous avez donc évité de contribuer à l'antibiorésistance.

Le débat permet notamment d'éliminer les fausses bonnes solutions. L'application du présent texte entraînerait inévitablement une surchauffe de la production de médicaments. Les entreprises devraient construire de nouvelles unités de fabrication alors qu'elles connaissent déjà des problèmes de recrutement, il s'écoulerait donc au moins un an avant d'en percevoir les effets.

Il faut éviter que l'augmentation des contraintes ne conduise les fabricants à se retirer du marché. Surtout, il faut réduire le nombre de médicaments concernés, peut-être à une centaine de molécules, en appliquant plusieurs critères : quand une classe de médicaments n'a qu'un seul fabriquant par exemple, la situation est plus délicate. Ne pas restreindre la liste entraînerait des effets pervers.

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Pendant la précédente législature, Mme Marine Le Pen avait déposé un amendement visant à obliger les entreprises pharmaceutiques à constituer un stock de sécurité minimal de quatre mois pour les MITM. C'est précisément ce que prévoit l'article 1er. Nous y sommes donc favorables.

J'avais également déposé un amendement en ce sens lors de l'examen du PLFSS 2024. Bien qu'il ait été adopté, le Gouvernement n'a malheureusement pas jugé nécessaire de l'intégrer au texte pour lequel il a recours à l'article 49, alinéa 3, de la Constitution – peut-être le problème ne lui a-t-il pas semblé assez grave.

Il est vrai qu'une augmentation de 606 % des ruptures et risques de ruptures de stock entre 2017 et 2022 constitue un bilan rassurant. Après tout, seuls 37 % des Français déclarent avoir été confrontés à une pénurie de médicaments en 2023 !

Nous n'avons pas encore évoqué un point pourtant crucial : l'emplacement des stocks. En vertu de la loi, ils peuvent se trouver éparpillés dans trente pays européens différents. Le limiter au territoire national faciliterait l'information des professionnels de santé et du public sur leur état à chaque étape du circuit et permettrait d'en améliorer la gestion et la distribution.

Article 1er : Augmenter le niveau des stocks de sécurité obligatoires destinés au marché national

Amendement AS53 rectifié de Mme Valérie Rabault et sous-amendement AS64 de Mme Stéphanie Rist, amendement AS49 de Mme Stéphanie Rist (discussion commune)

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Mon amendement tend à réécrire l'article 1er. Le texte ne concerne pas les aspects industriels, qui sont cruciaux ; déposé dans le cadre d'une niche, il vise à résoudre certains problèmes urgents. Aujourd'hui, 80 % des principes actifs sont produits en Chine et en Inde, mais les médicaments utilisant ces principes sont fabriqués en Europe. Par exemple, trois entreprises en Europe fabriquent de l'amoxicilline ; l'une, située en Autriche, a connu des difficultés de production, entraînant les problèmes d'approvisionnement que M. Ruffin a évoqués. Nous sommes d'accord, il faut réfléchir à un plan industriel, mais ce n'est pas l'objet du texte.

S'agissant de la clause de sauvegarde, j'estime, en tant qu'ancienne rapporteure générale de la commission des finances, que les aspects budgétaires et financiers relèvent exclusivement des lois de financement de la sécurité sociale. Le droit prévoit un plafond de stocks mais pas de plancher ; le texte tend à en créer un. Olivier Véran avait défendu la mesure lorsqu'il était rapporteur général de la commission des affaires sociales et elle avait été approuvée à l'unanimité.

L'introduction d'un tel plancher pourrait être financée, le cas échéant, par une clause spécifique dans la clause de sauvegarde de la LFSS. La proposition de loi vise à instaurer un plancher en matière de stocks, car il s'agit de la condition même de leur existence.

Le second volet est celui d'une gestion fluide des médicaments et des stocks. À cet égard, l'ANSM a indiqué, lors de son audition, qu'une dérogation à quatre mois serait nécessaire lorsqu'il n'existe qu'un seul façonnier pour le médicament. Sa vision globale de la chaîne de production lui a permis de constater l'existence d'un risque lié à la présence d'un seul producteur et d'un seul façonnier, d'où l'importance d'avoir un deuxième façonnier ou de constituer un stock.

L'ANSM signale également que la législation actuelle ne permet pas de répondre à la problématique des médicaments ne disposant pas d'alternative : le législateur doit accorder davantage de sécurité et d'agilité à l'ANSM. À l'aune des auditions, j'ai donc réécrit l'article 1er, afin d'inscrire dans la loi une obligation de détenir un stock de sécurité plancher. Il vise également à donner une plus grande flexibilité à l'ANSM, qui pourra autoriser un industriel à déstocker en cas de besoins constatés en France, sans qu'il ne paie de sanction financière. Tel est l'objet de cet amendement de réécriture de l'article 1er.

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Dans une visée constructive, le sous-amendement AS64 a pour objet de maintenir le principe d'un plancher, sans toutefois en rehausser la durée, et conserve la possibilité, pour l'ANSM, de libérer les stocks dormants. Il réintroduit également des dispositions d'économie du médicament figurant dans la loi de financement de la sécurité sociale.

Par ailleurs, je considère que l'amendement AS49 est déjà défendu.

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Le sous-amendement vise à maintenir le plafond à quatre mois au maximum et à introduire – je vous en remercie – la notion de plancher, toutefois réduit à deux mois au lieu de quatre. Or, comme l'a demandé l'ANSM, ce plancher devrait être d'au moins quatre mois pour la liste des MITM, qui sera bientôt publiée par le Gouvernement – la liste actuelle, comportant 450 produits, est trop longue, j'en conviens. Le délai nécessaire à l'ANSM pour importer des médicaments étant d'au moins deux mois, il est souhaitable de lui laisser un temps suffisamment long. Enfin, je suis d'accord avec la disposition autorisant les ordonnances conditionnelles. Je ferai toutefois remarquer que, bien que la France soit considérée comme une grande consommatrice de médicaments, de gros efforts ont été faits dans ce domaine : le volume des médicaments consommés a baissé de 16 % entre 2004 et 2019.

Avis défavorable.

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J'interviendrai sur le sous-amendement. Le plancher de deux mois existe déjà, mais d'un point de vue réglementaire. Je partage votre avis, madame la rapporteure générale, il est préférable qu'il figure dans la loi. Toutefois, vous avez indiqué que certaines filières ne comptent qu'un seul façonnier, un seul producteur qui met la molécule sur le marché. Quelle en est la raison ? Les médicaments concernés sont généralement matures et très peu rentables : si le seul producteur restant se voit imposer une contrainte supplémentaire, ne risque-t-il pas de se retirer du marché, conduisant à sa disparition pure et simple ? Ne craignez-vous pas que la France n'en soit réduite à créer un service public du médicament, comme à Cuba ?

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Je le redis, lorsque le décret relatif au plancher des stocks a été publié, la Commission européenne a fortement réagi, car la France est le seul pays qui encadre les stocks, tant en matière de durée – une disposition à caractère législatif – que de plancher – par la voie réglementaire. La Commission européenne considère qu'il peut s'agir d'une entrave à la liberté de circulation des produits. Nos concitoyens attendent des mesures efficaces et nous ne voulons pas prendre le risque que cette proposition de loi n'aboutisse pas, en raison d'un blocage au niveau européen. En l'absence d'adoption du sous-amendement, nous ne voterons donc pas en faveur de l'amendement AS53 rectifié.

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Notre groupe est fermement attaché à l'instauration d'un stock minimal d'une durée de quatre mois. En effet, l'ANSM a indiqué avoir besoin de plus de deux mois pour reconstituer les stocks d'un certain nombre de médicaments. De plus, la simple reproduction dans la loi de la disposition – deux mois au minimum – qui figure actuellement dans le décret n'est pas à la hauteur de l'enjeu – une multiplication par dix des pénuries dans le pays, des pharmacies et des médecins ne sachant plus comment faire. Faut-il se contenter de faire du bricolage, en vendant des médicaments à l'unité ou en décidant que les pharmaciens peuvent remplacer un médicament par un autre ? Des mesures permettant une véritable régulation doivent être instaurées.

Par ailleurs, je rejette les arguments évoqués par la majorité pour refuser un stock d'une durée minimale de quatre mois. Prétendre que Bruxelles n'en voudrait pas, au motif d'une entrave à la liberté de circulation des produits, n'est franchement pas un moyen de faire apprécier l'Europe ! L'autre argument, consistant à dire que cela ferait chauffer l'industrie et qu'il faudrait construire des unités de fabrication, avec des problèmes de recrutement, est tout aussi faux : les médicaments ne seront sans doute pas produits en France, mais continueront à l'être, à 80 %, en Inde ou en Chine. Enfin, c'est une erreur de présumer que les industriels – qui touchent des milliards d'euros de dividendes – vont fuir et se retirer du marché.

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Il ne nous revient pas de faire ce que visaient les quatre ou cinq derniers textes européens sur la santé : faire tomber l'article 168 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, qui tend à protéger la subsidiarité des États en matière de santé – chaque État peut encore gérer ses stocks de médicaments comme il l'entend. On peut certes blâmer les pratiques commerciales des industriels, mais on peut surtout critiquer le marché européen du médicament qui fait que l'on trouve de l'amoxicilline à Vintimille mais pas à Menton. En l'occurrence, l'Europe n'a pas à s'en mêler. Oui, il faut faire des stocks, au moins de médicaments qui ont encore des substituts et dont la production n'est pas à flux tendu au point de provoquer les effets pervers d'un surstockage. Dans ces conditions, je ne comprends pas du tout la position de la majorité, dont le bricolage est sous-dimensionné par rapport à la réalité du problème mondial, européen et français.

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Madame Rist, je vous signale que certains pays ont des stocks, ceux de l'Allemagne étant de six mois. Certes, ce n'est pas écrit dans la loi fédérale car le système de santé dépend largement des Länder pour son organisation. Dans votre amendement, vous proposez de prévoir deux mois de stocks pour le Doliprane, ce qui est déjà bien puisque nous n'avons actuellement que quinze jours de réserves. Mais il serait préférable de prévoir quatre mois de stocks pour certains médicaments dont la liste serait définie par le Gouvernement. Ce serait une manière de lui donner la liberté et l'agilité qui manquent actuellement à l'ANSM.

La commission adopte le sous-amendement AS64 puis l'amendement AS53 rectifié sous-amendé.

En conséquence, l'article 1er est ainsi rédigé et les amendements AS49 de Mme Stéphanie Rist, AS6 de Mme Sylvie Bonnet, AS13 de Mme Angélique Ranc, AS8 de Mme Sylvie Bonnet, AS22 de M. Pierre Cordier, AS3 de M. Fabien Di Filippo, AS48 de Mme Joëlle Mélin, AS7 de Mme Sylvie Bonnet, AS4 de M. Fabien Di Filippo, AS21 de M. Pierre Cordier et AS47 de Mme Joëlle Mélin tombent.

La réunion s'achève à treize heures dix.

Information relative à la commission

La commission a désigné M. Vincent Thiébaut rapporteur de la proposition de loi visant à garantir le versement des pensions alimentaires aux enfants majeurs (n° 2128).

Présences en réunion

Présents. – M . Éric Alauzet, Mme Farida Amrani, M. Thibault Bazin, M. Christophe Bentz, Mme Fanta Berete, Mme Anne Bergantz, Mme Chantal Bouloux, M. Louis Boyard, M. Elie Califer, M. Victor Catteau, M. Pierre Cazeneuve, Mme Émilie Chandler, M. Paul Christophe, M. Hadrien Clouet, M. Paul-André Colombani, Mme Laurence Cristol, M. Hendrik Davi, M. Pierre Dharréville, Mme Sandrine Dogor-Such, Mme Ingrid Dordain, Mme Nicole Dubré-Chirat, Mme Karen Erodi, M. Olivier Falorni, M. Thierry Frappé, M. Philippe Frei, M. Perceval Gaillard, Mme Marie-Charlotte Garin, M. François Gernigon, M. Jean-Carles Grelier, Mme Claire Guichard, M. Pierre Henriet, Mme Monique Iborra, M. Cyrille Isaac-Sibille, Mme Caroline Janvier, M. Philippe Juvin, Mme Rachel Keke, Mme Laure Lavalette, M. Didier Le Gac, Mme Christine Le Nabour, Mme Katiana Levavasseur, Mme Christine Loir, M. Didier Martin, M. Damien Maudet, Mme Joëlle Mélin, M. Yannick Monnet, M. Serge Muller, M. Yannick Neuder, M. Laurent Panifous, Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, M. Bertrand Petit, Mme Maud Petit, Mme Michèle Peyron, M. Sébastien Peytavie, Mme Valérie Rabault, Mme Angélique Ranc, Mme Stéphanie Rist, Mme Sandrine Rousseau, M. Jean-François Rousset, M. François Ruffin, M. Emmanuel Taché de la Pagerie, M. Vincent Thiébaut, Mme Mélanie Thomin, M. Nicolas Turquois, Mme Isabelle Valentin, Mme Annie Vidal, M. Alexandre Vincendet, M. Stéphane Viry

Excusés. – Mme Caroline Fiat, Mme Justine Gruet, Mme Sandrine Josso, M. Olivier Serva

Assistaient également à la réunion. – M. Ugo Bernalicis, M. Pierre Cordier, M. Arthur Delaporte, M. Fabien Di Filippo, M. Jérôme Guedj, M. Christophe Naegelen, Mme Danielle Simonnet