Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Réunion du mercredi 24 mai 2023 à 15h00

La réunion

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La séance est ouverte à quinze heures.

(Mme Isabelle Rauch, Présidente)

La commission auditionne Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la Culture.

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Pour faire le point sur les nombreux chantiers en cours et les sujets d'actualité, j'ai souhaité que nous entendions Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la Culture, qui a pris ses fonctions il y a un an exactement. Madame la ministre, je vous remercie pour votre disponibilité.

Nous avons auditionné ces dernières semaines M. Bruno Lasserre, qui vous a remis, ainsi qu'au ministre de l'Économie, son rapport intitulé « Cinéma et régulation - Le cinéma à la recherche de nouveaux équilibres : relancer des outils, repenser la régulation », et le sénateur Julien Bargeton, qui vous a présenté son rapport sur le financement de la filière musicale dont la Première ministre lui avait confié l'élaboration. Les recommandations formulées sur ces deux sujets seront-elles reprises par le Gouvernement, notamment la proposition de M. Bargeton tendant à créer une taxe sur le streaming musical pour compléter le financement du Centre national de la musique (CNM) ?

Le rapport de la mission d'information sur l'avenir de l'audiovisuel public présidée par Jean-Jacques Gaultier et dont Quentin Bataillon est le rapporteur sera présenté à notre commission le 7 juin prochain. Parallèlement se négocient les contrats d'objectifs et de moyens (COM) des sociétés et établissements de l'audiovisuel public. Quels changements stratégiques préconisez-vous ?

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Rima Abdul-Malak, ministre de la Culture

Le jour de mon entrée en fonction, j'avais indiqué quelles seraient mes priorités. La première était de développer l'envie de culture de la jeunesse par l'éducation artistique. Cela s'est d'abord traduit par la poursuite de la politique « 100 % éducation artistique et culturelle », et aujourd'hui, soixante-dix-neuf territoires sont labellisés 100 % EAC, et par l'extension du pass Culture. Á ce jour, trois millions de jeunes gens se sont inscrits à titre individuel et le pass existe dans sa version collective pour les classes de la quatrième à la terminale. Il a pour effet le développement des sorties scolaires, en premier lieu au théâtre, en second lieu au cinéma, et la multiplication de résidences d'auteur dans les établissements d'enseignement. Lors de la prochaine rentrée scolaire, le pass Culture se déploiera dans la version collective pour les classes de sixième et de cinquième et nous travaillons à son extension en 2024 pour les Français de l'étranger. La lecture a toute sa place dans cette politique d'éveil à la culture de la jeunesse et la pratique du quart d'heure de lecture quotidien à l'école ne cesse de s'étendre.

J'ai pour deuxième priorité la défense de notre souveraineté culturelle face à l'hégémonie des plateformes numériques. Affirmer la place de la création, de la langue et de l'innovation françaises suppose d'agir dans le monde physique, si je puis dire, avec des créations artistiques dont les 260 projets déjà retenus dans le cadre de la commande publique « Mondes nouveaux » ; bientôt viendra l'acte II de ce programme qui irrigue tous les territoires. Cela suppose aussi d'agir par la régulation, ce que nous avons fait pour nos libraires, confrontés à la concurrence d'Amazon, par l'adoption de la proposition de loi de la sénatrice Laure Darcos visant à améliorer l'économie du livre et à renforcer l'équité entre ses acteurs, en particulier en instaurant un prix minimum de frais de port pour les livres achetés en ligne.

Défendre notre souveraineté culturelle, c'est aussi appuyer la vie culturelle locale et tel est l'objet du plan de soutien aux fanfares que j'ai pérennisé. C'est encore une politique volontariste en faveur de nos industries du cinéma et de l'audiovisuel. Elle se traduit par l'appel à projets La Grande Fabrique de l'image, dont j'ai annoncé les lauréats pendant le festival de Cannes. Dans le cadre du plan d'investissement d'avenir France 2030, 350 millions d'euros seront consacrés d'une part au développement des studios de tournage en France, car nous manquons actuellement des infrastructures adaptées pour répondre à la demande croissante de production de films et de séries sur notre territoire, d'autre part au doublement de nos capacités de formation, qui devraient permettre d'enseigner 10 000 jeunes en 2030. Il y a énormément d'emplois dans ces secteurs et les retombées économiques des tournages sont colossales, un euro investi dans un tournage entraînant 7,60 euros de retombées économiques directes et indirectes. Ce sont là de belles opportunités pour la jeunesse.

Enfin, l'inauguration, en septembre prochain, de la Cité internationale de la langue française au château de Villers-Cotterêts sera l'aboutissement d'un projet novateur ambitieux, ouvert sur la diversité des territoires avoisinants et la diversité de la francophonie.

J'ai pour troisième priorité la préservation et la transmission de notre patrimoine, qui englobe les monuments et les métiers. Pour la première fois, dans la loi de finances pour 2023, le ministère de la Culture consacre au patrimoine plus d'un milliard d'euros. Cela nous a permis de renforcer le fonds incitatif et partenarial, dispositif qui permet notamment d'aider de petites communes à financer la restauration de leurs édifices protégés au titre des monuments historiques ; 80 % des ressources de ce fonds vont à des localités de moins de 2 000 habitants. Ce budget nous permet aussi d'amplifier notre plan de sécurisation et de restauration des 87 cathédrales propriétés de l'État – 52 millions d'euros y seront consacrés en 2023 – et de reconduire pour cinq ans le Loto du patrimoine, que finance aussi le ministère de la Culture et qui a permis de sauver 766 sites en péril depuis sa création.

Dans quelques jours, ma collègue Olivia Grégoire et moi-même présenterons les grandes lignes de notre stratégie nationale pour les métiers d'art, politique interministérielle de soutien aux 281 métiers d'art recensés en France, tous porteurs de sens et de chances pour la jeunesse.

Ma quatrième priorité était de contribuer à l'apaisement des mémoires par la culture. L'histoire doit être regardée en face. Cela ne signifie ni l'effacement de ce qui nous gêne, ni le déboulonnage de statues, ni le déni des périodes les plus sombres de notre histoire, le révisionnisme ou la contestation des crimes contre l'humanité. C'est le chemin exigeant de la reconnaissance de la vérité historique et de la justice. Nous avons vécu un moment très émouvant hier au Sénat lors de l'adoption à l'unanimité du projet de loi relatif à la restitution des biens culturels ayant fait l'objet de spoliations dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945, que vous examinerez à votre tour. C'est le cheminement obligé pour que les restitutions aient lieu, chacune étant l'acte de justice depuis si longtemps attendu par les ayants droit de ceux qui ont été spoliés.

Le Parlement examinera deux autres textes de restitution. Le premier est une proposition de loi de la sénatrice Catherine Morin-Desailly relative à la restitution des restes humains appartenant aux collections publiques. Le second concernera les biens culturels africains ; pour en fixer le cadre, M. Jean-Luc Martinez a rédigé un rapport qui va nous aider à définir les critères, la méthode et la doctrine.

L'apaisement des mémoires passe aussi par l'accès aux archives. Pour faciliter le travail des chercheurs et des historiens, le Gouvernement a autorisé l'accès anticipé aux archives des procès de Maurice Papon et simplifié l'accès aux archives de la guerre d'Algérie. Sont également à venir plusieurs projets mémoriels, culturels et éducatifs auxquels nous travaillons activement par des études bâtimentaires et de préfiguration : le musée-mémorial du terrorisme annoncé par le président de la République, l'Institut de la France et de l'Algérie, la Maison du dessin de presse.

Ma cinquième priorité est une nouvelle ambition pour l'audiovisuel public et la lutte contre la désinformation. Parce que nous avons tous conscience de l'ampleur du chaos informationnel, pour reprendre le terme de Christophe Deloire, directeur général de Reporters sans frontières, nous devons soutenir un audiovisuel public proposant une information pluraliste, indépendante et fiable. Nous avons vécu ensemble la suppression de la redevance et son remplacement par un autre mode de financement que vous avez proposé, le fléchage d'une partie de la TVA collectée. Lors de ce débat, nous avons, ensemble, réaffirmé l'indépendance de l'audiovisuel public. Je le redis, redevance ne signifie pas indépendance, laquelle découle de la non-ingérence dans l'éditorial et de la nomination par un régulateur indépendant des dirigeants des entreprises de l'audiovisuel public. J'ai prolongé les COM d'un an et proposé, pour donner plus de visibilité aux entreprises de l'audiovisuel public, que les prochains COM vaillent pour cinq ans au lieu de trois. La discussion relative à la définition des missions de service public concerne évidemment les parlementaires ; j'ai décidé une nouvelle méthode de concertation et je vous ai beaucoup associés à ces échanges. J'ai réuni plusieurs fois les entreprises de l'audiovisuel public et nous avons dégagé les orientations stratégiques prioritaires : l'information, la proximité, le numérique, la jeunesse, le soutien à la création.

Ma sixième priorité annoncée concernait la transition écologique de la culture. Le ministère de la Culture est désormais très engagé sur ce plan et les efforts de sobriété énergétique demandés à tous les lieux culturels ont déjà porté des fruits puisque la consommation d'énergie a baissé de 10 % en moyenne au cours des derniers mois.

Nous avons répondu à la crise due à l'inflation en débloquant dès le mois de janvier des aides exceptionnelles qui se sont ajoutées aux aides transversales décidées par le ministère de l'Économie pour soutenir les structures les plus fragiles. Pour le long terme, nous finançons dans le budget 2023 des travaux d'amélioration de la performance énergétique des bâtiments, qu'il s'agisse de musées, tel le musée d'Orsay, d'écoles d'art ou d'architecture, ou de théâtres, tel Chaillot. Je porte une attention particulière aux écoles d'architecture car ce vivier de 20 000 étudiants est un potentiel d'espoir. Parce qu'il leur reviendra de construire dans une optique écoresponsable, j'ai créé un palmarès national, RESEDA, conçu pour mettre en valeur les projets de fin d'études les plus innovants en matière de transition écologique. Nous avons aussi financé des innovations visant à accélérer la conversion écologique des établissements de la culture par le biais des appels à projet « Alternatives vertes » lancés dans le cadre du plan d'investissement France 2030. La première vague était dotée de 10 millions d'euros ; 25 millions sont consacrés à l'appel à projets en cours. Nous avons aussi ouvert avec le monde du spectacle vivant une concertation sur le thème « mieux produire pour mieux diffuser ». Vous pourrez être associés à ces échanges lors du festival d'Avignon.

Au long de cette année, j'ai donc accompagné avec énergie et enthousiasme tous les secteurs de la culture, qui sont confrontés à de nombreuses mutations : mutations numérique et écologique et aussi mutations des usages des publics. J'ai donné un nouvel élan à nos institutions culturelles en nommant quarante-deux personnalités, dont vingt-huit femmes, à la direction d'institutions culturelles ainsi féminisées, renouvelées, rajeunies et revitalisées, en puisant aussi dans le vivier des professionnels étrangers.

J'ai défendu, et je continuerai de le faire, le modèle français de liberté de création et d'expression, de diversité culturelle, d'exception culturelle face à toutes les menaces et à toutes les attaques. Certains s'en prennent directement à des œuvres d'art dans des musées après que des élus ont incité à décrocher des tableaux. Certains se mobilisent pour interdire des manifestations culturelles et des concerts ; à Carnac, à Metz… les exemples se multiplient. Certains décident aussi de supprimer ou de réduire des subventions, mettant en péril l'avenir de structures culturelles. La menace plane du désengagement des collectivités – mais pas de toutes. Un grand nombre d'entre elles sont très engagées à nos côtés pour soutenir la vitalité culturelle française, mais certaines décisions prises unilatéralement dans certaines régions ou villes ne laissent pas d'inquiéter ; il n'est pas nécessaire que je donne des noms, vous m'avez comprise.

Je ne manquerai pas, madame la présidente, de répondre à vos questions, mais je tenais, dans ce propos liminaire, à vous redire mon engagement, mes convictions et ma détermination au service de la culture, dans un dialogue constant avec vous.

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Je vous remercie, madame la ministre. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

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Votre engagement depuis votre entrée au Gouvernement a déjà porté ses fruits. Par l'augmentation historique du budget du ministère en faveur de laquelle vous avez œuvré, vous soutenez toutes les formes de culture. Je salue votre défense combative de la liberté de création que certains, y compris dans notre assemblée, cherchent à remettre en question. Mais soutenir la liberté des artistes, c'est aussi soutenir financièrement la création, ce que permet notamment l'appel à projets La Grande Fabrique de l'image, doté de 350 millions d'euros. Ce dispositif tend à faire de notre pays l'un des champions des tournages, de la production de films, séries et jeux vidéo, de la post-production et de la formation aux métiers du cinéma et de l'audiovisuel. Je suis heureuse que le groupe Ouest, installé à Plouneour-Brignogan-Plages, figure au nombre des organismes de formation lauréats. Cette résidence pour scénaristes est devenue le premier site européen de coaching d'auteurs et je me réjouis du soutien que lui apporte le ministère en mettant à l'honneur le travail du scénariste, souvent considéré comme le parent pauvre du monde du cinéma. Le groupe Ouest revendique son ancrage rural et explique son succès par la radicalité de son positionnement, sa proximité avec le monde agricole et l'implication des habitants. Les résidences d'artistes installées loin des pôles urbains permettent de stimuler la créativité, de faire vivre culturellement et économiquement un territoire et de tisser des liens entre les populations. Entendez-vous renforcer encore l'installation et le développement de ces structures hors des métropoles ?

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Vous avez menacé les chaînes de télévision CNews et C8 de ne pas voir leur licence renouvelée en 2025, donc de les priver de leur fréquence. Alors que l'octroi des licences ne relève pas de votre compétence mais de celle de l'Arcom, vous êtes sortie de votre devoir de réserve pour vous attaquer à des chaînes et à des animateurs envers lesquels vous cachez mal votre détestation. Le ministère de la Culture est chargé de conduire la politique du Gouvernement dans le domaine des media. Est-ce la politique du Gouvernement de bafouer l'indépendance et la pluralité des media et leur liberté de ton sous prétexte qu'ils agacent le pouvoir, ou est-ce une initiative personnelle ? Vous avez défendu bec et ongles l'exposition au Palais de Tokyo d'une toile de Miriam Cahn présentant aux yeux de beaucoup une scène de pédo-criminalité sans interdiction aux mineurs. Le groupe Rassemblement national condamne toutes les dégradations d'où qu'elles viennent. Mais la liberté d'expression, c'est aussi celle des représentants de la nation d'exprimer leur indignation et celle de millions de Français face à des œuvres représentant une scène pédo-criminelle sans se faire diffamer par une ministre. Certes, en cette occasion, la justice a donné raison au Palais de Tokyo. Mais vous avez aussi soutenu la tenue au festival d'Angoulême d'une exposition de l'auteur de bandes dessinées Bastien Vivès et regretté publiquement qu'elle soit annulée. Or, trois de ses albums mettent en scène des viols et des agressions sexuelles sur des mineurs, et il est sous le coup d'une enquête pour diffusion d'images pédopornographiques. Est-ce de cette façon que vous entendez remplir la mission du ministère de la Culture qui est de contribuer au développement de l'éducation artistique et culturelle des enfants et des jeunes ?

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Nous rentrons toutes deux du festival de Cannes. Une fois encore, ce festival, dans sa bulle d'hôtels de luxe et de robes de soirée, semble déconnecté, sourd aux bruits du monde, au bruit des casseroles dénonçant la brutale réforme des retraites, aux cris des féministes qui se lèvent et parfois, lasses, « se cassent ». Pourtant, derrière le strass et les paillettes, un grand nombre d'artistes et de professionnels, ceux-là mêmes qui ont à cœur de faire vivre la diversité du cinéma français et de le voir renouer avec sa vocation d'art populaire, disent leur détresse. « Sous les écrans, la dèche ! », s'exclame le collectif des travailleurs précaires des festivals de cinéma. Á l'ouverture de la Quinzaine, j'ai entendu la Société des réalisatrices et réalisateurs de films parler d'un art pris en tenaille entre logique marchande de concentration et poussée de censure réactionnaire, un écho à leur déclaration commune avec la Société civile des auteurs réalisateurs et producteurs dans laquelle les deux organismes dénoncent des pratiques qui réduisent le créateur au rôle d'exécutant.

J'ai rencontré des distributeurs indépendants. Ce chaînon essentiel du cinéma est fragilisé par le non-respect des engagements de programmation et de promotion. J'ai vu deux modèles d'exploitation s'opposer : les salles indépendantes et les gros circuits de distribution, au risque d'une scission entre deux visions du cinéma, agora populaire et accessible où l'on vient régulièrement ou « expérience premium » privative, hors de prix. J'ai aussi entendu Adèle Exarchopoulos poser, comme l'avait fait Kad Merad, la question du prix du billet de cinéma, rejoignant en cela les Français qui, l'année dernière, faisaient de ce coût la deuxième cause de la désertion des salles du cinéma.

Mis à part les millions d'euros versés aux studios de production, comment comptez-vous répondre aux besoins des autres acteurs de la filière ? Comment veillerez-vous à ce que le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) demeure le garant de la diversité du cinéma, exception culturelle française, et non un instrument de concentration ? Que proposez-vous pour revoir le partage de la valeur entre producteurs, auteurs, distributeurs, exploitants ? Que dites-vous aux Français qui, pris à la gorge par l'inflation, renoncent aux sorties culturelles ? Leur expliquerez-vous, comme Jérôme Seydoux, que le prix des places de cinéma n'a pas fini d'augmenter ? Je déposerai demain une proposition de loi prévoyant le plafonnement du prix des billets de cinéma et le partage de la valeur ; j'espère qu'elle vous inspirera.

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Pour sa part, le groupe les Républicains a toujours plaisir à voir de jolies robes ! Le projet de loi-cadre adopté hier par le Sénat unanime facilitera la restitution des œuvres spoliées lors des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945 en créant une dérogation au principe d'inaliénabilité des biens culturels du domaine public pour simplifier le dispositif de restitution de ces biens particuliers. On estime à 100 000 le nombre d'œuvres concernées, et ce nombre semble sous-évalué. Le texte permet aux ayants droit de négocier un accord amiable de réparation autre que la restitution – une compensation financière ou tout autre engagement. Cette disposition tend à permettre le maintien de biens significatifs du point de vue de l'intérêt ou de la cohérence des collections publiques. Mais la commission de la Culture du Sénat a souligné le risque que des considérations financières contrarient la possibilité de négociation offerte aux personnes publiques car peu de collectivités auront sans doute les moyens de régler une seconde fois la valeur du bien. Peut-on envisager que les collectivités bénéficient de l'aide de l'État ?

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Le secteur culturel connaît encore de nombreuses incertitudes, à la crise sanitaire ayant succédé une crise énergétique majeure. L'augmentation régulière des crédits et les aides exceptionnelles allouées en 2020 ont permis de rendre un certain souffle au budget de la culture : le secteur, vous l'avez rappelé lors de la cérémonie des Molières, a bénéficié, outre les crédits budgétaires, de plus de 14 milliards d'euros d'aides exceptionnelles sous la forme de paiement du chômage partiel, de prêts garantis par l'État et d'année blanche pour les intermittents du spectacle. Aucun autre pays n'a consenti un effort financier aussi considérable. C'est que la culture nourrit et change la vie des hommes. Le groupe démocrate salue cet engagement et forme le vœu qu'il se poursuivra pour que la culture soit effectivement un bien commun, non l'apanage ornemental de quelques-uns mais une compagne de route pour toute la vie. Nous apprécions les initiatives prises : le pass Culture, les micro-folies, le dispositif Classe Orchestre, l'annonce d'une olympiade culturelle.

Ériger la lecture en grande cause nationale a fixé l'ambition d'un peuple de lecteurs, comme il est naturel au pays de Molière, Voltaire, Hugo, de la marquise de Sévigné et de George Sand, et je me réjouis de voir enfin progresser les performances de nos élèves en lecture. Nous avons auditionné ce matin Régine Hatchondo, présidente du Centre national du livre ; pouvez-vous nous dire quelles mesures poursuivra le ministère pour mener à bien cette ambition cruciale ? Qu'en sera-t-il, particulièrement, du soutien au dispositif Jeunes en librairie ?

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Parce qu'ils provoquent des besoins de sécurité abyssaux, les Jeux olympiques de 2024 font planer des doutes sur la tenue des festivals culturels. En janvier dernier, le ministre de l'Intérieur a donné quelques garanties aux organisateurs et aux syndicats mais les inquiétudes persistent. Nous venons d'apprendre que la cérémonie d'ouverture mobilisera à elle seule 35 000 membres des forces de l'ordre. Cela aura un impact sur la préservation de la sécurité quotidienne des Français et sur celle des manifestations culturelles de l'été. Trois événements culturels majeurs se dérouleront en Bretagne pendant les Jeux olympiques et paralympiques : Les Vieilles Charrues, le festival Interceltique de Lorient et le festival du roi Arthur. Pouvez-vous confirmer qu'ils pourront avoir lieu et être sécurisés comme ils l'ont été les années précédentes, le ministre de l'Intérieur ayant souligné que le risque terroriste est à un niveau majeur ? En janvier dernier, le ministre a indiqué que les discussions à ce sujet se poursuivent sous la responsabilité des préfets. Je réitère donc ma demande : peut-on associer les parlementaires des territoires concernés à ces réunions de travail, afin que nous puissions répondre aux légitimes questions des citoyens ? Le monde des spectacles culturels est très inquiet ; pouvez-vous le rassurer et nous rassurer ?

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Chacun jugera dans le détail votre politique culturelle et sa mise en œuvre mais nous pouvons tous reconnaître votre combativité et votre attachement au rayonnement et à la vitalité de notre culture alors que les menaces qui pèsent sur notre modèle culturel sont nombreuses. En ces temps de mutations vertigineuses, notre pays doit avoir un ministère de la Culture de combat. Je me réjouis de votre engagement et de votre attachement à la vitalité culturelle des territoires ruraux et je salue le déploiement des micro-folies que le ministère soutient avec force, tout comme le plan Fanfare.

La vitalité du cinéma français fait de notre pays un leader des industries culturelles. Je salue votre annonce d'un plan ambitieux de 350 millions d'euros pour le cinéma et l'audiovisuel. Quelles en seront les retombées détaillées espérées ? Dans quelle mesure les projets envisagés amélioreront-ils la capacité de production d'œuvres françaises et notre attractivité pour les tournages d'œuvres étrangères ?

Le plan « sécurité cathédrales » a permis d'améliorer considérablement la sécurité incendie des 87 cathédrales appartenant à l'État, mais il ne concerne pas les 67 cathédrales qui ne sont pas propriété de l'État. Envisagez-vous d'étendre le plan sécurité à toutes les cathédrales de France et de reprendre la propriété de certaines cathédrales demandant d'importants travaux dont les communes peinent à assurer la maîtrise d'ouvrage et le financement ?

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Le CNM a apporté un soutien clé au secteur musical au plus fort de la crise sanitaire. Ses missions de conseil, de formation des professionnels, d'aides à l'exportation, de soutien à l'innovation et à la diversité musicale sont essentielles à la bonne santé de l'industrie de la musique. Mais la crise sanitaire a révélé les failles de son modèle de financement et sa dépendance à la billetterie. Aussi avons-nous défendu lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2023 l'instauration d'une taxe sur la valeur ajoutée du streaming musical permettant de combler le financement du CNM et de lui offrir une nouvelle ambition. La forte croissance du streaming musical, qui représentait déjà 61 % des revenus du secteur musical en 2022, se poursuivra étant donné l'évolution des pratiques de consommation des jeunes générations. Il est logique qu'il tire la création vers le haut en contribuant à son financement ; le prochain projet de loi de finances mettra-t-il à contribution le streaming musical pour financer le CNM ?

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Le festival de Cannes bat son plein. Á la sortie de la guerre, il n'aurait jamais pu voir le jour sans les ouvrières et ouvriers qui l'ont bâti, souvent bénévolement, sous l'impulsion de la municipalité et de la CGT. Pour reprendre les mots de l'historien Tangui Perron, « le premier festival de Cannes est l'enfant tardif du Front populaire ». Les ouvrières et ouvriers de tous les corps de métiers continuent par leur travail de faire vivre la culture dans toutes ses formes, permettant que les décors se montent, que les festivals se tiennent, que les scénographies se créent. Je me dois donc d'aborder la loi sur les retraites : améliorons leurs conditions de travail et leurs rémunérations plutôt que de vouloir les faire travailler deux ans de plus ! Ne les privons pas de deux ans de retraite qu'ils pourraient justement consacrer à faire vivre la culture par l'engagement bénévole. Quels seront les effets de la réforme des retraites sur les travailleuses et travailleurs de la culture, intermittents du spectacle, artistes, auteurs ?

Dans mon département, les établissements d'enseignement musical constituent un maillage nécessaire à une approche populaire et accessible à l'éducation artistique et culturelle et à un enseignement musical professionnalisant. Le financement, complexe, des conservatoires à rayonnement régional (CRR), est le plus souvent assumé par les villes faute d'investissements des régions. Elles le peuvent pourtant, au titre du financement des établissements relevant de l'initiative et de la responsabilité des collectivités territoriales qui assurent une préparation à l'entrée dans les établissements supérieurs de la création artistique. Le CRR d'Aubervilliers-La Courneuve et de nombreux autres connaissent ces difficultés, trois régions seulement appliquant le décret permettant ces co-financements nécessaires à la construction de filières d'excellence vers l'enseignement supérieur. Comment parviendrez-vous à rendre effectif le développement des filières d'enseignement musical et à faire en sorte que les régions prennent leur part dans le financement de ces cursus ?

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Rima Abdul-Malak, ministre

Je répondrai à vos questions en commençant par la fin. L'enseignement musical relève des collectivités territoriales, mais une discussion est en cours avec les fédérations d'élus sur un schéma d'enseignement de la musique.

La réforme des retraites s'applique au secteur de la culture comme aux autres mais, quel que soit l'âge légal de la retraite, des enjeux spécifiques de formation et de reconversion valent pour certains métiers artistiques : pour la danse et le cirque par exemple, c'est à partir de 40 ans que doit s'envisager la reconversion. Nous avons créé un fonds de soutien à l'emploi pérenne qui aide aussi à penser ces développements dans la durée.

Le CNM, attendu depuis dix ans au moins et créé juste avant la pandémie, fut un outil crucial d'accompagnement de la filière pendant la crise sanitaire. La mission conduite par le sénateur Julien Bargeton a présenté une proposition complète et équilibrée suggérant différentes modalités de financement de la filière musicale à l'avenir. La contribution du streaming musical est l'une de ces propositions mais elle ne fait pas consensus dans la filière. Nous pourrons en reparler, mais le débat relatif au budget pour 2024 n'est pas engagé. Le rapport lui-même a été remis assez récemment, les discussions avec la filière ont commencé lors du Printemps de Bourges, il y a quelques semaines à peine, et elles se poursuivent.

Je vous remercie, monsieur Patrier-Leitus, pour vos mots aimables. Quand j'ai pris mes fonctions il y a un an, la fréquentation des salles de cinéma ne laissait pas d'inquiéter ; à Cannes, où je m'étais rendue trois jours après ma nomination, le sujet était sur toutes les lèvres. Un an plus tard, les Français sont retournés au cinéma, beaucoup de jeunes gens grâce au pass Culture : plus de 4,5 millions de places ont été réglées via le pass en 2022, c'est colossal. Les salles ont su se réinventer, les films montrés ont été divers et forts et, en avril 2023, la fréquentation s'est élevée à 19 millions de spectateurs, soit 3 % de plus que la moyenne observée entre 2017 et 2019, avant la pandémie. C'est très encourageant. Il faut évidemment attendre pour savoir si ces bons chiffres seront les mêmes jusqu'à la fin de l'année, mais la tendance montre un désir de cinéma dans notre pays, où les chiffres sont bien meilleurs qu'ailleurs. Á Cannes, mes homologues italien, espagnol, allemand et coréen ont fait état d'une situation bien plus mauvaise dans leur pays respectif ; en Italie, la fréquentation des salles est toujours de 60 % inférieure à ce qu'elle était en 2019, et de 40 % en Espagne. La santé de la filière française est donc largement meilleure, et ici la moitié de la fréquentation va vers des films français. Cette part de marché est énorme. En Allemagne et en Italie, la part de marché des films nationaux est de 20 % à peine, et de 8 % au Royaume-Uni. Plus d'un million d'entrées nationales pour le film de Jeanne Herry Je verrai toujours vos visages, c'est considérable, et nous pouvons être fiers d'un système de financement du cinéma qui permet cette diversité.

Les dernières évaluations indiquent, je vous l'ai dit, que chaque euro investi dans les tournages que permettra La Grande Fabrique de l'image entraînera 7,60 euros de retombées directes ou indirectes, et les retombées des formations seront très importantes. Non, madame Legrain, ce plan n'est pas destiné aux grands studios uniquement. De nouveaux studios vont se créer dans des villes où il n'en existait pas – à Marseille par exemple, la deuxième ville la plus filmée de France et qui n'a pas d'infrastructure de ce type. Il est très satisfaisant de se dire que, bientôt, il y aura des studios de tournage à Marseille, que cela créera des emplois et une dynamique locale. Surtout, 34 organismes de formation sont soutenus grâce à ce plan ; c'est énorme. Les formations proposées seront plus inclusives et plus ouvertes, avec des modalités d'enseignement différentes et une diversité sociale affirmée. Je tiens beaucoup à montrer à tous les jeunes gens que les métiers du cinéma, qui vont recruter car ils sont en tension, sont des métiers. J'espère que ces formations attireront beaucoup de monde.

Un audit de sécurité ayant révélé que des efforts très importants étaient nécessaires pour assurer la sécurité des 87 cathédrales propriétés de l'État, nous les avons engagés et nous les poursuivons. Je n'oublie pas les 67 cathédrales qui ne sont pas à la charge de l'État, et l'on peut en discuter avec la conférence des évêques et les collectivités au cas par cas. Je suis toujours ouverte à la recherche de solutions mais, sur le plan budgétaire, vous savez que les 52 millions d'euros prévus en 2023 pour assurer la sécurité de 87 cathédrales, tout importants qu'ils soient, ne suffisent pas totalement, si bien que l'effort devra se poursuivre au cours des prochaines années. Imaginer récupérer complétement la gestion de ces 67 cathédrales ferait passer dans une tout autre dimension.

L'été 2024 sera aussi sportif que culturel et Mme Rouaux peut se rassurer. Nous avons dû procéder à des ajustements pour les vingt à trente très grands festivals qui attirent un public si massif qu'ils doivent être sécurisés par des unités des forces mobiles. C'est le cas des Vieilles Charrues et de l'Interceltique de Lorient. Nous avons demandé à certains de ces festivals de très grande envergure, dont ceux-là, de modifier leurs dates pour permettre la sécurisation de leur manifestation et des moments phares des Jeux olympiques et paralympiques. Je les remercie de la flexibilité dont ils ont fait preuve en acceptant de revoir leur période de programmation, ce qui assurera leur pleine sécurisation, comme de coutume. Un seul cas demeure pendant : le festival Lollapalooza, qui se tient habituellement sur l'hippodrome de Longchamp. En lien avec le maire de Sceaux, que je remercie, nous avons proposé que cette commune l'accueille, mais cette solution n'a pas encore abouti ; je vous tiendrai au courant. Tous les autres festivals qui demandent la présence d'unités de forces mobiles auront bien lieu pendant l'été 2024.

L'Olympiade culturelle a commencé l'été dernier et va s'amplifier avec des journées du patrimoine sur le thème du sport, la découverte de sites sportifs à l'architecture remarquable et aussi, peut-être, des activités physiques dans les monuments où cela est possible. Un programme se déroulera tout au long de l'année, qui vous sera présenté cet été, avec une montée en puissance jusqu'aux Jeux olympiques pour enrichir les liens entre sport et culture. Dans ce cadre, nous avons également lancé un appel à projets visant à ce que des artistes en situation de handicap puissent aussi déployer des projets.

Je sais que vous avez passé en revue ce matin avec Mme Hatchondo la très dynamique stratégie du Centre national du livre. Elle vous a certainement parlé aussi du prix Goncourt des détenus, des résidences d'auteurs et des masterclasses d'auteurs dans les établissements scolaires. Le dispositif Jeunes en librairie, complémentaire du pass Culture, a déjà touché 45 000 jeunes gens et 700 librairies partenaires. Lancé dans le cadre du plan de relance et doté de 3 millions d'euros, il vise à élaborer des parcours de découverte des métiers et des acteurs du livre – auteurs, éditeurs, illustrateurs, bibliothécaires, relieurs, graphistes –, à visiter des structures, à faire des ateliers d'écriture. Ce parcours d'une année ne se réduit pas à l'achat de livres. Nous sommes en discussion sur les suites de cette opération ; tout dépendra aussi du budget du ministère pour 2024.

Votre présentation du festival de Cannes m'a paru un brin caricaturale, chère Sarah Legrain, car on ne peut dire que les films présentés à Cannes sont déconnectés de la société – et le festival, ce sont d'abord des films, pas seulement les polémiques autour des films. Or, les films présentés cette année traitent de l'emprise et des relations toxiques, du féminisme, du climat, d'un nombre considérable de sujets qui sont au centre des débats de notre société. J'ai rencontré des membres du collectif Sous les écrans, la dèche, et discuté avec eux de la précarité dans le secteur. Le prix du billet de cinéma, de 7 euros en moyenne en France, est assez bas comparé à ce qu'il est dans d'autres pays. Certes, le prix de la place est élevé dans certaines salles quand on n'a aucune réduction, mais le pass Culture fonctionne, puisque le cinéma est la deuxième dépense culturelle des jeunes gens, en pass collectif ou en pass Culture individuel. Il y a là un levier très important de soutien culturel à la jeunesse, à quoi s'ajoutent les dispositifs d'éducation au cinéma : collège au cinéma, lycée au cinéma, classes primaires au cinéma… Vous nous expliquerez comment vous envisagez de plafonner le prix des places de cinéma. Le rapport de Bruno Lasserre contient des pistes visant à assouplir les politiques tarifaires des exploitants en les aidant à diversifier les cartes d'abonnement ; cette approche me semble plus adaptée aux attentes du secteur et à la réalité des usages en France.

Madame Parmentier, je n'ai pas menacé CNews et C8 de fermeture. Je me suis contentée de rappeler les obligations qui s'imposent à toutes les chaînes conformément à la loi et à la convention qu'elles ont conclue avec l'Arcom. Quelles sont-elles ? Le respect du pluralisme, l'obligation de montrer une diversité de points de vue sur des sujets prêtant à controverse, l'obligation de traiter les affaires judiciaires avec mesure, l'obligation de maîtriser l'antenne, l'obligation de respecter l'indépendance de l'information vis-à-vis des actionnaires. Dans toutes mes déclarations, que je vous invite à reprendre, je n'ai fait que dresser la liste de ces obligations, rappelé le rôle de l'Arcom et noté que certaines chaînes avaient fait l'objet, plus que d'autres, de nombreuses interventions de l'Arcom. Depuis 2019, le régulateur indépendant a fait une vingtaine d'interventions à l'encontre de CNews et de C8, deux à l'encontre de France Télévisions, aucune pour TF1 et M6. C'est un constat à partir duquel vous extrapolez, mais ce nombre d'interventions pose question et il me paraît important de rappeler devant le législateur les termes de la sacro-sainte loi de 1986 qui fixe le cadre de l'indépendance et du pluralisme des media.

On a largement débattu du tableau de Miriam Cahn. Je refuse que vous me transformiez en soutien d'une œuvre qui serait pédopornographique ; le serait-elle qu'elle n'aurait jamais été exposée au Palais de Tokyo car le Palais de Tokyo connaît la loi. Vous savez très bien que cette artiste n'avait pas l'intention que vous lui prêtez. L'histoire de l'art offre un nombre considérable d'exemples d'œuvres représentant des corps d'oppresseurs difformes et agrandis face à de petits corps ; cela ne veut pas forcément dire que ce sont des enfants. Vous avez le droit d'y voir un enfant, vous avez le droit d'être indignée et vous avez le droit de le dire à l'Assemblée nationale, mais vous n'avez pas le droit de demander qu'un tableau soit décroché, car à ce moment vous outrepassez votre rôle de parlementaire et vous vous posez en censeur. Vous pouvez dire que vous êtes choquée par ce tableau, et je le suis aussi : il me choque par les horreurs de la guerre qu'il représente. Je les ai vécues moi-même ; je ne demande pas pour autant que le tableau soit décroché. Deux décisions de justice ont confirmé que ce tableau pouvait être exposé, vous l'avez dit ; pourquoi donc y revenir encore et faire de cet accrochage le symbole d'une lutte idéologique ?

Je ne vous ai rien entendu dire au sujet de Bastien Vivès lors du festival d'Angoulême ; c'est quand il a été question du tableau de Miriam Cahn que vous avez cru bon de ressortir la polémique le concernant. J'ai trouvé les propos de Bastien Vivès inacceptables et je les ai condamnés clairement, réprouvant sa désinvolture à propos de sujets aussi graves que l'inceste et la violence. Mais l'exposition aurait porté sur des dessins inédits dont on ne sait donc rien et dont on ne saura jamais rien puisque cette exposition n'aura pas lieu. J'ai effectivement regretté son annulation car je préfère toujours qu'il y ait débat. C'est à la justice de dire si les deux ou trois bandes dessinées incriminées sont pédopornographiques, mais l'exposition prévue ne comportait pas ces dessins litigieux mais des dessins inédits. Je préfère toujours la contextualisation, l'échange autour d'une exposition. L'art peut choquer mais s'il doit devenir consensuel et moral, c'est la fin de l'art. Ayons donc des débats au sujet de certaines œuvres. Il y a des controverses à Cannes, tant mieux ! La France est le pays du débat ; parlons, prenons position, réfléchissons ensemble, créons des rencontres, de la médiation. Je serai toujours favorable au dialogue autour des œuvres d'art plutôt qu'à leur censure.

Madame Meunier, la discussion du projet de loi concernant la restitution des œuvres dont les familles juives ont été spoliées a montré que la culture peut rassembler et emporter l'unanimité au Sénat. J'espère qu'il en sera de même à l'Assemblée nationale, et que l'on peut, sur des sujets aussi graves, porter un discours d'apaisement et de justice. Parce qu'il faudra accompagner les musées territoriaux relevant des collectivités et les musées nationaux qui devront procéder aux recherches de provenance, nous nous sommes engagés sur la formation à ces recherches au sein de l'Institut national du patrimoine et de l'École du Louvre, et un nouveau master a été créé à l'université de Nanterre. Ces sujets demandent une rigueur scientifique et nous serons aux côtés des collectivités qui peinent à progresser dans la recherche de provenance de certaines œuvres ; les modalités de cet accompagnement ne sont pas encore déterminées mais j'entends votre demande.

Madame Melchior, nous n'avons pas défini de programme spécifique de résidence d'auteurs en milieu rural mais nous en soutenons un très grand nombre sur tout le territoire, et tous les lieux culturels accueillent des artistes en résidence à un moment ou à un autre. Nous développons les micro-folies, dont la 400ème ouvrira bientôt, et beaucoup sont en milieu rural. Dans l'ensemble de nos politiques nous prêtons une attention particulière à ces zones. Il en est ainsi pour l'Été culturel, instauré en 2020, dont la moitié des projets sont réalisés en zone rurale. Nous avons aussi lancé le fonds d'innovation territoriale, qui vise en priorité les petites communes et les zones rurales. Grâce à tous ces outils et à tous ces budgets, nous parvenons à développer la présence d'artistes au plus près des publics.

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Nous en venons aux questions des autres députés.

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L'intelligence artificielle est présente dans toute la chaîne de valeur de la culture, de la création à la consommation ; comment l'État aide-t-il les acteurs des industries culturelles à s'emparer des potentialités qu'elle offre ? En matière de création artistique, les professeures Alexandra Bensamoun et Joëlle Farchy pointaient dans leur rapport publié en 2020 les enjeux juridiques et économiques de l'intelligence artificielle en matière de droits d'auteur. L'essor de l'intelligence artificielle conversationnelle ravive la question et appelle sans doute une régulation ; Sam Altman, président d'OpenAI, nous y invite lui-même et les institutions européennes y travaillent. Quelles sont vos réflexions à ce sujet ? Comment protéger les œuvres de l'esprit que l'intelligence artificielle utilise sans les mentionner ? Peut-on considérer comme des œuvres les contenus issus des intelligences artificielles conversationnelles ?

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Hier a eu lieu au Mont Saint-Michel le vernissage de l'exposition La Demeure de l'archange, qui retrace l'histoire de l'emblématique abbatiale depuis sa création il y a mille ans. Vous étiez invitée à cette inauguration, madame la ministre, et malheureusement vous n'étiez pas présente. Je déplore autant votre absence que la faible médiatisation de cet événement si important pour notre patrimoine et pour la valorisation de nos racines chrétiennes. Vous aviez d'autres obligations, je le comprends, mais votre intérêt pour notre patrimoine et nos racines est assez limité, voire inexistant. On aurait souhaité vous voir au Mont-Saint-Michel plutôt que dansant au concert de Jay-Z à la Fondation Vuitton.

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Monsieur le député, il est malhonnête de transformer en tribune le moment des questions à la ministre. Vous savez très bien où elle était hier : elle présentait un projet de loi au Parlement, ce qui prime tout. Votre question est malvenue et vous auriez gagné à en poser une autre.

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La France compte des milliers de festivals de musique indépendants et c'est heureux, mais les professionnels s'inquiètent des répercussions de l'inflation sur les salaires, les cachets des artistes, la rémunération des prestataires techniques, le coût des services d'ordre, et s'inquiètent aussi de la nouvelle législation sur les sons amplifiés. D'autre part, des acteurs économiques puissants s'emparent des festivals dans une logique de concentration, proposant un modèle économique nouveau avec des services à 360 degrés qui leur permettent d'augmenter leur marge et de maîtriser le parcours des artistes, avec un risque d'effets délétères sur la diversité des esthétiques, la structuration des filières, l'accessibilité à la culture musicale et l'équilibre économique et environnemental des territoires. Pour préserver cet écosystème fragile et garantir la pérennité et la diversité des festivals, notre souveraineté et notre exception culturelles, envisagez-vous d'adapter la fiscalité applicable aux festivals indépendants ? Prendrez-vous en considération la recommandation faite par la Cour des comptes de conditionner davantage les aides de l'État à des exigences de création, de démocratisation culturelle ou de diffusion numérique ?

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Le temps manque pour vous interroger sur le concept de « décivilisation » mais nous nous accorderons tous pour considérer que la marque de la civilisation, c'est la culture, sans doute plus que le sacre du sport exaltant l'argent roi. La culture en France, c'est le maillage du territoire par de nombreux petits festivals, notamment l'été. Or, un rapport du Conseil économique, social et environnemental conclut que la tenue des Jeux olympiques met en danger nombre de ces festivals. Certes, les dates des plus gros ont pu être déplacées mais l'incertitude demeure pour beaucoup d'autres, plus petits, dont les organisateurs s'inquiètent à l'idée qu'ils ne puissent avoir lieu. Pouvez-vous nous assurer que vous défendrez ces mille et un petits festivals qui font le charme de notre pays ? C'est aussi important, sinon davantage, que de défendre un grand événement sportif qui sera d'abord suivi à la télévision étant donné le prix des places, qui semble en limiter l'accès à une élite – un sujet sur lequel la ministre de la Culture pourrait aussi prendre position : pourquoi est-ce si cher ?

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Notre opinion unanime est que le cinéma est un vecteur de culture et un divertissement en une période troublée. Mais on nous alerte dans la France entière pour nous dire qu'en raison du prix des billets – entre huit et quatorze euros selon les lieux –, les sorties au cinéma sont devenues inaccessibles aux familles des classes populaires. Que comptez-vous faire pour ramener ces familles au cinéma, comme elles le souhaitent ? Certes, nous aidons les jeunes par le biais du pass Culture, mais qu'en est-il des familles au pouvoir d'achat en baisse ?

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Je relaye une question de notre collègue Raphaël Gérard. La loi Climat et résilience a instauré de nouvelles obligations en matière de rénovation thermique du bâti ancien. Or l'étude BATAN réalisée par le Centre de ressources pour la réhabilitation responsable du bâti ancien souligne que les outils de mesure conventionnels utilisés pour la construction neuve n'étant pas adaptés au bâti ancien, les diagnostics de performance énergétique conduisent presque systématiquement à classer ces logements dans la catégorie des passoires thermiques sans tenir compte du comportement réel du bâti. Pour éviter les sanctions, les propriétaires bailleurs tendent à adopter des procédés d'isolation standardisés, rapides et peu coûteux, sans rechercher l'efficacité énergétique réelle de leur logement. Il en résulte l'appauvrissement de la dimension patrimoniale des centres anciens, au risque de compromettre l'attractivité touristique et l'équilibre économique des métiers du patrimoine. Quelles sont les pistes de réflexion en cours au ministère pour promouvoir une approche responsable de la rénovation thermique du bâti ancien ?

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Le 9 février dernier, sur France Inter, à la question de Léa Salamé – « Que laissera Emmanuel Macron comme trace de sa politique culturelle ? » – vous avez répondu : « La Cité internationale de la langue française à Villers-Cotterêts (…) dans un territoire des Hauts-de-France particulièrement défavorisé, dans une ville aujourd'hui Rassemblement national. C'est aussi un enjeu de reconquête républicaine ». Toutes mes félicitations pour cette « reconquête républicaine », mais le maire Rassemblement national Franck Riffaud a été réélu et le député En Marche a été battu par Josselin Dessigny, député Rassemblement national. Mises à part la « reconquête républicaine » et la lutte contre le Rassemblement national qui semblent vous tenir lieu de raison unique ou principale de faire de la politique, quelle est la politique culturelle d'Emmanuel Macron ? Votre réponse sur France Inter ne m'a pas convaincue ; j'espère mieux comprendre aujourd'hui.

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Je suis heureux de vous retrouver au sein de notre commission et je vous prie d'excuser ma modération toute démocrate. Le 9 mars 2022, l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) a publié un rapport intitulé « Pour une science ouverte réaliste, équilibrée et respectueuse de la liberté académique ». Ses auteurs appellent à une réflexion transversale sur l'édition scientifique, alertant sur le péril que court la diversité de l'offre éditoriale en sciences humaines et sociales. La même année, Jean-Philippe Mochon, médiateur du livre, a publié un rapport d'étape sur la politique en France en matière d'édition scientifique et de science ouverte et formulé seize recommandations, et rendu un avis, en avril 2023, sur la situation de l'édition scientifique dans le contexte des politiques en faveur de la science ouverte. Il dit l'insuffisante prise en compte de la promotion de l'édition scientifique et les difficultés que rencontrent les éditeurs du secteur privé à l'heure de la science ouverte. Quelles suites votre ministère donnera-t-il aux propositions émises par les membres de l'OPECST, le médiateur du livre et les éditeurs scientifiques ?

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Je vous remercie pour vos paroles courageuses lors de la Nuit des Molières. Il est utile de rappeler aux artistes et aux Français dans leur ensemble tout ce que notre pays a accompli et continue d'accomplir en faveur des artistes, de la création et de l'exception culturelle, à un niveau inégalé dans le reste du monde. Le festival international du film d'animation d'Annecy est l'équivalent du festival de Cannes pour ce secteur particulier et les haras d'Annecy sont l'écrin qui lui est nécessaire. Il est important que l'État s'engage auprès des collectivités pour boucler ce dossier.

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Des centaines d'artisans charpentiers, forgerons, maîtres verriers, partout en France, participent activement à la restauration de Notre-Dame de Paris. C'est le cas, en Corrèze, de la scierie Dambo et frères de Saint-Pardoux-l'Ortigier, qui débite gracieusement des chênes centenaires en poutres destinées à la fabrication de la nouvelle charpente de la cathédrale. C'est une fierté pour ces artisans de contribuer bénévolement à cet effort national. Je vous ai interrogé il y a quelques mois, madame la ministre, sur la reconnaissance qui pourrait leur être accordée, évoquant l'idée d'une plaque apposée sur le parvis de la cathédrale ou d'une médaille spéciale. Vous aviez jugé la proposition pertinente et m'aviez indiqué que vos services ne s'étaient pas encore penchés sur ce sujet. Pouvez-vous désormais nous apporter des précisions ?

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En Auvergne-Rhône-Alpes, la culture a tristement fait la une de l'actualité en raison des choix opérés par le président de la région dans l'attribution des subventions régionales au monde culturel. Ils se traduisent par une baisse massive et brutale d'un million d'euros de subventions sur un budget de 4 millions, conséquence de choix plus politiques que culturels, ce que je regrette. J'en donnerai quelques exemples : 60 000 euros en moins pour la Comédie de Saint-Étienne, 100 000 euros en moins – sur 200 000 ! – pour le festival international du court métrage de Clermont-Ferrand, 15 % en moins pour le festival international de la bande dessinée de Lyon et, plus marquant, 149 000 euros en moins pour le Théâtre Nouvelle Génération de Lyon, centre d'art dramatique destiné au jeune public, dont le directeur avait osé critiquer le président de la région. Cette pression autoritaire, ce fait du prince d'un président de région utilisant les deniers publics à des fins politiques personnelles a évidemment un impact sur tous les acteurs culturels. Si la libre administration des collectivités territoriales prime, quels leviers peuvent permettre d'éviter de telles dérives autoritaires et populistes, puisqu'au-delà du risque économique pour les acteurs culturels se pose la question du risque culturel pour notre société ?

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Je m'associe évidemment aux propos de ma collègue Caroline Parmentier. Je donnerai un autre exemple : votre défense ouverte et maladroite de l'audiovisuel public pendant la conférence du CNC à Cannes. Vous devriez savoir que la pluralité, l'indépendance et la liberté des media sont un fondement de notre République et que vous êtes tenue à l'objectivité et à l'impartialité à ce sujet. Les membres de l'Association des chaînes privées (ACP) déplorent devoir signer avec l'Arcom des conventions séparées alors que le cahier des charges de France Télévisions, établi par décret, fixe des obligations à hauteur du groupe. L'assujettissement du service public à des obligations par chaîne, à l'instar de ce qui vaut pour le secteur privé, ne serait-il pas plus juste ? Cela réglerait la question de savoir si les missions de service public sont remplies ou ne le sont pas.

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Quelles formations précisément La Fabrique de l'image favorisera-t-elle ? Que pensez-vous de la proposition de loi du sénateur Lafon visant à créer une holding chapeautant les sociétés de l'audiovisuel public ? Ayant visité la Cité des sciences et de l'industrie en compagnie de son président, j'ai été frappée par le projet FabLab à l'école, un dispositif permettant la diffusion de la culture de fabrication numérique en milieu scolaire. Ce projet mérite d'être largement diffusé, particulièrement dans les territoires ruraux. Pouvez-vous confirmer que vous le soutiendrez financièrement et continuerez de le développer avec le ministère de l'Éducation nationale, à long terme ?

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Vous avez annoncé le lancement d'un plan de financement, La Grande Fabrique de l'image, visant à relancer le secteur du cinéma français. Nous encourageons cette démarche mais la colonne vertébrale du projet semble fragile : peut-on réellement le dire ambitieux avec une dotation de 350 millions d'euros répartis sur six ou sept ans quand Netflix dépense chaque année plus de 15 milliards dans ce secteur ?

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Nous saluons la détermination avec laquelle vous avez porté le projet de loi relatif à la restitution des biens spoliés aux Français de confession juive durant l'Occupation. Ce texte permettra aux ayants droit de retrouver des biens confisqués ou pillés par les nazis avec l'étroite complicité du régime de Vichy dans le sombre contexte des persécutions antisémites et des glaçantes mesures d'aryanisation. La dérogation au principe d'inaliénabilité des collections publiques lèvera de nombreux verrous entravant ces restitutions qui pourront prendre la forme d'un maintien dans les collections publiques en contrepartie d'une réparation financière. Se pose alors la question des moyens pour accompagner les établissements publics ou les collectivités. La voie d'un mécénat dédié donnant lieu à une incitation fiscale spécifique, de 90 % dans certains cas, a-t-elle été explorée ? Serait-ce un levier significatif pour assurer des compensations financières suffisantes ?

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Il y a un an, la ville de Sannois a restitué aux ayants droit de victimes de spoliations une œuvre de Maurice Utrillo achetée par la Ville en 2004 avec l'aide du département pour enrichir la collection du musée Utrillo-Valadon. En 2015, le maire nouvellement élu de la commune, ayant appris que le propriétaire du tableau en avait été spolié en 1942 dans le contexte des persécutions antisémites, a immédiatement émis le souhait de restituer le tableau à son ayant droit. Les embûches juridiques ont été telles que l'aboutissement de la restitution aura demandé sept ans. Comment le projet de loi que vous avez présenté au Sénat simplifiera-t-il les choses ?

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Ma question, à laquelle j'associe ma collègue Fabienne Colboc, porte sur le plan en faveur des métiers d'art. La France est reconnue pour son excellence en ces métiers manuels artisanaux qui mobilisent des savoir-faire traditionnels. Le tourisme des savoir-faire, en plein essor, est une source d'attractivité pour nos territoires ; je mentionnerai à cet égard la Maison des savoir-faire de Villaines-les-Rochers que vous avez récemment inaugurée. Ce plan est le premier projet majeur de soutien aux métiers d'art, dont il est essentiel de renforcer l'attractivité auprès des jeunes générations afin de préserver leur excellence. Pouvez-vous préciser les modalités de son déploiement dans les territoires ?

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Le régime des intermittents du spectacle permet la création française ; à ce titre, il participe à l'exception culturelle à laquelle nous sommes attachés. Mais exception culturelle ne doit pas signifier exception sociale ; or, les difficultés des intermittents à faire valoir leurs droits lors de congés de maternité ou d'arrêts maladie sont certaines. Je travaille avec le collectif Les Matermittentes qui accompagne les intermittentes du spectacle confrontées à ces problèmes. Nous avons dernièrement rencontré la directrice adjointe de votre cabinet pour évoquer avec elle le manque de clarté des textes de lois à ce sujet et les méprises que cela entraîne dans la compréhension des dispositions et leur application. Nous lui avons remis un dossier pointant ces difficultés. Á Besançon, dans ma circonscription, nous avons eu à connaître de la situation dramatique d'intermittents privés de toute indemnité qui ont dû mener un premier combat contre la maladie et un autre contre la CPAM simplement pour obtenir leur indemnisation. Une clarification ne s'impose-t-elle pas avec la Sécurité sociale, qui peine à interpréter les spécificités de l'intermittence du spectacle ?

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Vous avez affirmé votre volonté d'apaisement des mémoires par la culture et votre attachement à la liberté d'expression. Notre collègue Jean-Louis Thiériot a déposé le 10 mai dernier une proposition de loi visant à protéger l'intégrité des œuvres des réécritures idéologiques après la mort de leur auteur. C'est que dans les pays anglo-saxons des œuvres de Ian Fleming ont été amputées de passages jugés racistes, des passages jugés offensants retirés d'un ouvrage de Roald Dahl, et que des sensitivy readers sont payés pour débusquer ce qui pourrait blesser les minorités ethniques ou sexuelles. La France ne connaît pas cette pratique qui découle de la pression du mouvement « wokiste » et de la cancel culture, à l'exception peut-être du changement de titre du livre d'Agatha Christie, Dix Petits Nègres, renommé Ils étaient dix. Mais le flou juridique actuel pourrait rendre possible ce qui s'assimilerait à une forme de censure. Aussi, notre collègue propose de compléter le code de la propriété intellectuelle par la mention que le droit de repentir et de retrait ne peut être exercé que par l'auteur et qu'il est intransmissible à ses héritiers. Que pensez-vous de cette initiative ?

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Le rêve du 7e art repose sur une industrie extrêmement polluante. En 2021, à Cannes, Cyril Dion expliquait que le cinéma devait s'emparer des questions environnementales – il était temps ! Deux ans plus tard, un collectif d'artistes a lancé le manifeste CUT !, proposant d'agir pour protéger la planète, toujours à Cannes, où le festival produit quelque 1 200 tonnes de déchets par jour. Il sera difficile pour l'industrie cinématographique et le star system qui l'accompagne d'être écoresponsables. Il faudra les aider, voire les contraindre. Comment envisagez-vous d'accompagner cette démarche ? Quelles mesures concrètes comptez-vous prendre en charge pour que le cinéma s'engage dans la transition écologique ?

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Rima Abdul-Malak, ministre

L'intelligence artificielle va percuter tous les secteurs de la culture. Nous sommes, madame Calvez, en train d'évaluer son impact, en coopération avec le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique et l'ensemble des institutions culturelles concernées, dont l'audiovisuel pour la fiabilité de l'information, et la littérature. On ne peut résumer en une minute ce sujet éminemment complexe, dont nous devrons reparler.

Je le redis, monsieur Odoul : hier, je présentais au Sénat mon premier projet de loi en qualité de ministre. Il porte sur la restitution des biens culturels spoliés aux familles juives entre 1933 et 1945. Visiblement, vous ne jugez pas ce sujet suffisamment important et vous auriez préféré que je sois au Mont-Saint-Michel. Soyez rassuré, le millénaire de l'abbatiale est signalé en lettres clignotantes sur mon agenda ; la célébration durant jusqu'en novembre, j'ai bien l'intention d'y aller. Je continuerai aussi d'assister à des concerts de rap, ce n'est pas incompatible. La Fondation Louis Vuitton est un lieu intéressant du paysage culturel parisien, et l'exposition « Basquiat × Warhol, à quatre mains » vaut le détour ; je vous la conseille.

M. Christophe Marion s'inquiète de l'économie des festivals. On en dénombre 7 000 en France, très divers en tailles, en esthétiques et en implantations. Le fonds Festivals créé lors de la pandémie existe toujours, en sortie de crise, pour accompagner le secteur avec le CNM, mais il existe des festivals dans d'autres domaines que la musique. Plusieurs propositions sont analysées, dans un dialogue constant avec les collectivités, car l'État ne peut soutenir seul les festivals qui, historiquement, l'ont beaucoup plus été par les collectivités.

Pour ce qui est de l'impact possible des Jeux olympiques de 2024 sur les festivals, je vous rassurerai, monsieur Corbière, en disant à nouveau que nous avons ajusté les dates d'un faible nombre de très grands festivals : ceux qui ont lieu en plein air, debout, avec un public massif et dont la sécurité demande la présence d'unités de forces mobiles. Les autres festivals suivront la procédure usuelle, demanderont une autorisation à la préfecture, et rien ne changera. S'il est prévu qu'un festival ait lieu le jour de la cérémonie d'ouverture des Jeux ou le jour où une ville a décidé de créer des fan-zones, des discussions locales ont lieu, comme il est normal. Gérald Darmanin, Amélie Oudéa-Castéra et moi-même avons signé une circulaire commune en nous concentrant sur les festivals sécurisés par des unités de forces mobiles et, comme je l'ai indiqué, seule la tenue du festival Lollapalooza est sans solution à ce jour en dépit d'une proposition du maire de Sceaux. Les dates de tous les autres festivals sécurisés avec des unités de forces mobiles ont été validées et l'été 2024 sera autant culturel que sportif – j'y tiens.

Beaucoup de questions ont porté sur le cinéma. Le prix moyen des places est plutôt bas en France ; il faut travailler à des assouplissements pour les exploitants mais, même si j'entends bien sûr qu'en cette période d'inflation, une sortie en famille au cinéma peut coûter cher et impliquer des choix difficiles, je vois mal comment plafonner les prix des billets.

Le secteur du film d'animation est vital pour nos industries créatives. Nous avons les meilleures écoles et, à Annecy, le meilleur festival spécialisé ; je m'y rendrai d'ailleurs très bientôt et je parlerai avec les élus du projet que vous avez mentionné, madame Riotton.

Comme l'ont montré les réponses à l'appel à projets « Alternatives vertes », l'industrie du film d'animation innove beaucoup en matière de décarbonation Voilà qui me permet de répondre à M. Arenas que pour réduire la consommation énergétique dans les salles de cinéma nous soutenons le passage des projecteurs équipés de lampes au xénon vers des projecteurs laser ; la discussion est en cours avec la Fédération des salles de cinéma. D'autre part, nous travaillons depuis plusieurs mois avec le CNC à l'éco-conditionnalité des aides au tournage, sachant qu'être plus verts ce n'est pas uniquement traiter les déchets mais s'attacher à réduire l'empreinte carbone à tous les stades du tournage.

Madame Loir, vous estimez insuffisants les 350 millions d'euros dont est dotée La Grande Fabrique de l'image au regard de 15 milliards d'investissements par ailleurs. Mais ce plan vise à avoir un effet de levier. Nous estimons que, pour les infrastructures de tournage, chaque euro investi par l'État entraînera l'apport de trois euros par des investisseurs privés ainsi rassurés et mobilisés. L'État n'a pas vocation à nationaliser des studios de tournage : il n'y aura pas de studios de tournage entièrement publics. L'État vient en appui des opérateurs privés pour aider à implanter ces studios dans des territoires qui en sont dépourvus – à Reims, à Tourcoing, à Marseille… – et à agrandir et moderniser ceux qui existent déjà. Les formations représentent un investissement très significatif. Trente-quatre organismes vont se développer, pour doubler la capacité de formation actuelle dans ce secteur. L'aide du secteur privé est évidemment moindre pour ce volet d'action et l'État soutiendra toutes ces structures. Ces formations, madame Mette, concernent l'ensemble des métiers de la filière et je vous en communiquerai la liste complète. Je peux, de mémoire, mentionner déjà le numérique, les effets visuels, le son, l'image, le scénario, la réalisation et tous les métiers techniques.

Vous avez porté une attention soutenue au projet de loi de restitution des biens spoliés qui vous sera bientôt soumis. Je vous en remercie. Grâce à cette loi-cadre, il ne sera plus besoin de lois spécifiques et l'on en finira avec des délais de restitution qui se comptent en années, comme l'a expliqué Estelle Folest, quand bien même l'accord de principe est général. L'année dernière, une loi présentée par Mme Roselyne Bachelot et votée à l'unanimité a permis de restituer une quinzaine d'œuvres ; jusqu'à présent, il fallait attendre quelques années pour regrouper les œuvres avant de présenter au Parlement une loi spécifique permettant les restitutions. Cette fois, on fixe un cadre pour déroger au principe de l'inaliénabilité des collections publiques dans des conditions strictement définies et après avis de la Commission pour l'indemnisation des victimes de spoliations (CIVS).

Monsieur Le Vigoureux, le principe de réparations financières a été prévu lors de création de la CIVS, qui a émis 146 recommandations pour un montant de 3,6 millions d'euros en 2020 et de 4,3 millions en 2021. Des budgets existent donc déjà. Je rends hommage au président Jacques Chirac, dont le discours marquant prononcé en 1995 lors de la commémoration de la rafle du Vél d'hiv a ouvert ce chemin de justice et de vérité historique.

Bertrand Sorre, et Raphaël Gérard par sa voix, s'interrogent sur l'articulation entre rénovation énergétique et préservation du patrimoine. Les deux enjeux ne sont pas antinomiques et nous avons rédigé une circulaire interministérielle visant à favoriser le développement du photovoltaïque tout en préservant le patrimoine.

Vous serez tous invités, en septembre, à l'inauguration de la Cité internationale de la langue française. Nous travaillons très bien avec le maire de Villers-Cotterêts, madame Ranc, sur tout ce qui concerne ce projet symbolique de la politique culturelle dont j'ai décrit les axes dans mon propos liminaire. À Villers-Cotterêts, on retrouve tous ces enjeux : l'éducation artistique, la lecture, la transmission, la redynamisation du lien entre la France et les autres pays du monde francophone, l'accueil des artistes en résidence. Il y aura, à la Cité internationale, une douzaine d'ateliers d'artistes de toutes disciplines, un auditorium pour des films, des spectacles, des concerts, des débats. Il y aura aussi une exposition permanente et un parcours permettant de mieux connaître l'histoire du château, celle de la langue française et son lien avec la nation, la construction de la nation et l'État français et son lien avec les langues régionales et les langues du monde francophone. C'est un projet d'aménagement du territoire, de désenclavement, d'éducation, de transmission, de culture dans tous les sens artistiques du terme. Nous pourrons en reparler après l'ouverture.

La restauration de Notre-Dame de Paris mobilise un très grand nombre d'artisans, de compagnons, d'entreprises, de donateurs et l'on souhaite rendre hommage à chacun de ceux qui apportent leur pierre à l'édifice, si je puis dire. Des discussions sont encore en cours à ce sujet car il y a mille manières de leur témoigner la reconnaissance qui leur est due. Pour l'instant, le chantier avance et une étape décisive a eu lieu mi-avril avec la pose du tabouret, ce qui va permettre d'élever la flèche.

Je remercie Mme Brugnera de ses propos concernant les dérives auxquelles nous assistons dans la région Auvergne-Rhône-Alpes, avec une méthode regrettable. Toute la politique culturelle française, depuis André Malraux, s'est construite dans un partenariat entre l'État et les collectivités. Les gens marchent ensemble, on discute, on se met d'accord dans des conseils d'administration. On peut être en désaccord mais on échange, on signe ensemble des conventions pluriannuelles d'objectifs pour donner aux organismes une visibilité à trois ans. En Auvergne-Rhône-Alpes, c'est l'inverse : des décisions sont prises de manière unilatérale, sans concertation avec les autres partenaires et sans explication claire sur les raisons et les critères qui les motivent. Pourquoi cibler le seul théâtre jeune public de Lyon, qui accueille des élèves de toute la région ? Pourquoi cibler le festival international du court métrage de Clermont-Ferrand, tremplin pour les jeunes talents, touchant un public très jeune, et reconnu dans le monde entier ? À Cannes, tous mes interlocuteurs étrangers m'en parlaient !

L'incompréhension étant dite, de quels leviers disposons-nous ? Le premier est d'échanger avec les maires et les élus concernés, ce que j'ai commencé de faire, et de s'associer pour réfléchir à des solutions alternatives permettant de continuer à soutenir ces structures culturelles qui ne peuvent être ainsi fragilisées du jour au lendemain. Je souhaite, en miroir, mettre l'accent sur le travail positif mené avec d'autres collectivités : la région Hauts-de-France et plusieurs maires de cette région, la région Provence-Alpes-Côte d'Azur et plusieurs de ses maires, la région Occitanie ; je pourrais citer de multiples autres exemples. Ce qui se passe en région Auvergne-Rhône-Alpes ne doit pas donner l'impression d'une vague générale de désengagement de la culture, alors que des élus, ailleurs, sont engagés dans des projets ambitieux, maintiennent leurs subventions et les augmentent même quand ils le peuvent. Je leur rends hommage.

Madame Ranc, que vous dire sinon que l'obligation de pluralisme posée par la loi s'applique à toutes les chaînes ? J'ai le souvenir d'une intervention du CSA à l'encontre de France Télévisions, il y a une dizaine d'années, à la suite d'un reportage portant sur un quartier de Grenoble. Le CSA avait jugé ce reportage insuffisamment équilibré et souligné que France Télévisions aurait dû assurer la diversité des points de vue sur ce sujet qui prêtait à controverse. De même, le CSA est intervenu auprès de CNews après une tribune de militaires dénonçant unanimement le délitement de la France, et a adressé une mise en garde à la chaîne en pointant l'absence de diversité des points de vue exprimés. La défense du pluralisme, c'est cela. C'est exactement ce qui est écrit dans la loi, et le rôle de l'Arcom est de vérifier que la loi est respectée et d'intervenir si elle ne l'est pas.

Une des propositions contenues dans le courrier adressé par l'ACP à la Première ministre, visiblement diffusé à la presse et que vous avez évoqué, est effectivement de fixer un cahier des charges pour chaque chaîne de France Télévisions. Depuis 2009, date de naissance du groupe, un cahier des charges global est défini, fixant aux chaînes des missions précises. Les chaînes du groupe ont des identités différentes et ce débat peut avoir lieu, mais je comprends mal le lien entre votre intervention sur le pluralisme et ce courrier.

Madame Mette, nous pourrons revenir sur la proposition faite par M. Laurent Lafon de créer une holding de l'audiovisuel public après que nous aurons pris connaissance des conclusions, le 7 juin prochain, de la mission d'information sur l'avenir de l'audiovisuel public. L'intéressant débat sur l'organisation de l'audiovisuel public dure depuis des années. La méthode que j'ai choisie à mon arrivée au ministère est de commencer par travailler sur les objectifs, les missions, la stratégie d'avenir et d'analyser les synergies qui ont porté leurs fruits puis de se demander si un changement d'organisation est absolument nécessaire pour faire mieux ou si les coopérations déjà très fortes et qui se sont approfondies ces deux ou trois dernières années peuvent être renforcées dans le cadre des contrats d'objectifs et de moyens, sans passer par un changement d'organisation qui prend nécessairement du temps. De plus, une holding se superpose aux structures existantes, ce qui induit des coûts et des hiérarchies supplémentaires. Est-ce la meilleure manière de porter une ambition nouvelle pour l'audiovisuel public ? Je me pose la question comme vous vous la posez certainement, et nous pourrons en débattre. Il est légitime de la poser, mais d'autres chemins sont possibles.

Pierre Henriet et à travers lui Fabienne Colboc m'ont interrogée sur les métiers d'art. J'ai eu le plaisir d'inaugurer la Maison des savoir-faire de Villaines-les-Rochers et je me suis aussi rendue au centre international d'art verrier de Meisenthal et à la Cité du vitrail de Troyes. Dans le cadre de France 2030, nous avons lancé un appel à manifestations d'intérêt pour créer ou soutenir des pôles territoriaux pour les métiers d'art ; nous analysons, avec la Caisse des dépôts, les dossiers reçus. Nous pourrons ainsi accompagner financièrement la structuration de plusieurs pôles de savoir-faire régionaux, lieux de partage de ressources, d'outils, de matériaux, parfois de vitrine, de vente, de formation. La dimension d'ancrage dans les territoires est très forte – c'est d'ailleurs le plus fort budget dans notre plan métiers d'art. Gardons-nous aussi d'oublier les manufactures qui dépendent du ministère de la culture – la manufacture des Gobelins, les tapisseries d'Aubusson, le Mobilier national, Sèvres et Limoges – elles-mêmes ancrées dans les territoires et que nous continuerons de soutenir.

Vous avez dû, madame Duby-Muller, entendre ma position au sujet des réécritures d'œuvres. Sur celles qui ont lieu avec l'accord des auteurs il n'y a évidemment rien à dire et, parfois, il est heureux qu'elles aient lieu. Quand Hergé a modifié Tintin au Congo parce que certains passages étaient racistes, c'était son choix. De même, Agatha Christie avait donné son accord au changement de titre que vous avez mentionné. Ce qui gêne, ce sont les réécritures sur lesquelles l'auteur ne peut donner son avis, alors qu'il y a des moyens de contextualiser, de mettre en perspective certains mots qui peuvent heurter aujourd'hui, par une note de bas de page ou un texte en préface. Il y a bien des manières de faire, comme l'a montré l'éditeur Gallimard pour Roald Dahl. Le bon sens des éditeurs permet d'agir sans aller jusqu'à effacer des mots ou réduire des textes et donc transformer l'original. Il faut leur faire confiance et, au-delà, au milieu culturel. Je ne suis pas certaine qu'il faille une loi. Il y a une mobilisation de notre secteur, un observatoire de la liberté de création, un engagement de tous les milieux de la culture qui me rassure et me donne de l'espoir pour la préservation de la liberté de création et d'expression, la contextualisation étant toujours possible.

Monsieur Crozier, la couverture des risques maladie, maternité et vieillesse pour les intermittents du spectacle fait l'objet d'échanges réguliers entre le ministère et la direction de la Sécurité sociale pour clarifier ce sujet complexe et éviter les mauvaises interprétations de situations individuelles. Un projet de circulaire relative aux indemnités journalières pour maladie et maternité des travailleurs salariés comporte un volet sur les règles applicables aux intermittents ; nous l'avons annoncé au bureau du Conseil national des professions du spectacle. Des échanges techniques à ce sujet ont encore lieu avec la direction de la Sécurité sociale mais cette circulaire peut aider à clarifier certains points, notamment pour les congés maternité.

La séance est levée à seize heures cinquante-cinq.

Présences en réunion

Présents. - M. Rodrigo Arenas, M. Philippe Ballard, Mme Géraldine Bannier, M. Philippe Berta, Mme Sophie Blanc, Mme Soumya Bourouaha, Mme Anne Brugnera, Mme Céline Calvez, M. Roger Chudeau, M. Alexis Corbière, M. Laurent Croizier, M. Francis Dubois, Mme Estelle Folest, M. Pierre Henriet, M. Fabrice Le Vigoureux, Mme Sarah Legrain, Mme Christine Loir, M. Christophe Marion, M. Stéphane Mazars, Mme Graziella Melchior, Mme Sophie Mette, Mme Frédérique Meunier, M. Julien Odoul, Mme Caroline Parmentier, Mme Francesca Pasquini, M. Jérémie Patrier-Leitus, Mme Isabelle Périgault, Mme Béatrice Piron, Mme Lisette Pollet, Mme Angélique Ranc, Mme Isabelle Rauch, Mme Véronique Riotton, Mme Claudia Rouaux

Excusés. - Mme Emmanuelle Anthoine, M. Quentin Bataillon, Mme Béatrice Bellamy, Mme Aurore Bergé, Mme Agnès Carel, Mme Fabienne Colboc, Mme Martine Froger, M. Raphaël Gérard, M. Frantz Gumbs, M. Stéphane Lenormand, M. Alexandre Loubet, M. Frédéric Maillot, M. Boris Vallaud, M. Paul Vannier

Assistaient également à la réunion. - Mme Virginie Duby-Muller, M. Bertrand Sorre