Publié le 14 mai 2024 par : Mme Manon Meunier, M. Corbière, M. Coulomme, Mme Couturier, M. Davi, M. Delogu, Mme Dufour, Mme Erodi, Mme Etienne, M. Fernandes, Mme Ferrer, Mme Fiat, M. Gaillard, Mme Garrido, Mme Guetté, M. Guiraud.
À l’alinéa 9, après le mot :
« exploitants, »
insérer les mots :
« en leur garantissant des prix rémunérateurs, notamment au moyen de prix plancher, et celle des »
Cet amendement du groupe LFI-NUPES vise à inscrire dans la loi ce principe cardinal : que les politiques publiques doivent garantir des prix rémunérateurs aux agriculteurs, notamment au moyen de prix plancher, et qu’il s’agit d’une condition pour atteindre la souveraineté alimentaire.
En effet, aucun des problèmes auxquels fait face l’agriculture française, que ce soit celui de l’installation-transmission, de la souveraineté alimentaire ou de la bifurcation agroécologique ne se résoudra sans répondre au problème des revenus. Et il est éclairant que celui-ci soit totalement absent de ce projet de loi d’orientation agricole proposé par le Gouvernement.
Egalim a échoué à tenir sa promesse de protection des revenus des agriculteurs. Egalim 1 a été adopté en 2018. Depuis les rustines se multiplient : Egalim 2 (2021), Egalim 3 (2023), bientôt Egalim 4… sans jamais répondre au problème posé. Ce n’est pas surprenant : les lois Egalim n’imposent pas le respect des coûts de production - le coût de production n’est ainsi pas le seul facteur de détermination du prix de vente selon les lois Egalim, en l’état de la loi, il peut donc parfaitement rester inférieur aux coûts de production.
Il y a urgence à agir. Le taux de pauvreté monétaire est de 16,2 % dans les ménages agricoles. Dans le secteur du maraîchage et de l’horticulture, il est même de 24,9 %, 23,6 % dans le secteur ovin, caprin et 21,5 % en bovins viande. C’est inacceptable.
Egalement inacceptable : beaucoup de fermes ne dégageraient aucun revenu sans subventions : 55,1 % des exploitations en bovins viande auraient un excédent brut d’exploitation (EBE) négatif hors subventions (pour un montant moyen de subventions de 51 000 € dans ce secteur), et 23,9 % en fruits et autres cultures permanentes (pour un montant moyen de subventions de 38 000 €). Les agriculteurs, assez unanimement, demandent « des prix, pas des primes ».
Et 100 000 fermes ont disparu en 10 ans entre 2010 et 2020. Soit 10 000 par an. Près de 200 par semaine. Près de 30 par jour.
Au coeur de cette situation catastrophique, le problème du revenu. Les politiques publiques, pour que la souveraineté alimentaire ne soit pas un vain mot, doivent donc avoir pour priorité la garantie de prix rémunérateurs au producteur. A cet égard, les prix plancher, attribués pour des volumes de production plafonnés afin d’éviter les surproductions, sont une réponse.
L’Assemblée nationale l’a d’ailleurs confirmé en adoptant en première lecture, le 4 avril 2024 la proposition de loi en faveur de la mise en place de prix plancher. Un texte adopté malgré l’opposition de la minorité présidentielle, qui paraît bien prompte à renier les engagements du Président de la République au Salon de l’Agriculture.
Nous ne proposons pas, en outre, que l’État fixe unilatéralement les prix plancher : nous proposons que la conférence publique de filière (qui réunit notamment les producteurs, les transformateurs, les distributeurs et les consommateurs) discute et détermine le prix plancher. Et uniquement si elle n’y parvient pas - et pour l’inciter à y parvenir - alors le Gouvernement arrêterait les prix plancher. Cette proposition ne peut décemment être qualifiée de soviétique qu’avec la mauvaise foi déployée jusqu’ici par la minorité présidentielle sur ce sujet. C’était d’ailleurs le système prévalent dans l’UE durant les 30 premières années de la PAC, jusqu’en 1992, et il est pratiqué jusqu’aux États-Unis, pour le lait, au sein des milk marketing boards.
Le vote de la représentation nationale sur les prix plancher, il y a à peine un mois, ne saurait être bafoué. Cet engagement en faveur du revenu doit être ici réaffirmé.
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