Souveraineté alimentaire et renouvellement des générations en agriculture — Texte n° 2600

Amendement N° 3382 (Rejeté)

(7 amendements identiques : 27 1091 3527 3528 3529 3530 3786 )

Publié le 10 mai 2024 par : Mme Belluco, Mme Batho, M. Fournier, Mme Arrighi, M. Ben Cheikh, Mme Chatelain, Mme Garin, M. Iordanoff, Mme Laernoes, M. Lucas-Lundy, Mme Pasquini, M. Peytavie.

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Supprimer cet article.

Exposé sommaire :

L'objet de cet amendement est de supprimer cet article, qui ne peut satisfaire aucun des acteurs concernés par le développement des élevages industriels ou celui des méga-bassines.

Il suffit pour s'en convaincre de se reporter à l'analyse que propose le Conseil d’État de cet article :

- Il y a d'abord des risques d'anti-constitutionnalité du dispositif, "Le Conseil d’État rappelle que les dérogations au régime contentieux de droit commun ne peuvent être admises que si elles sont fondées sur des critères objectifs, en rapport direct et proportionné avec le but poursuivi, et si elles assurent des garanties égales aux justiciables, afin de respecter notamment le principe constitutionnel d’égalité devant la justice et l’objectif à valeur constitutionnelle de bonne administration de la justice".

- Il est inutile de modifier ou d'accélérer la procédure : "Le Conseil d’État souligne aussi que l’étude d’impact ne fait pas apparaître de difficultés particulières en ce qui concerne le contentieux de ces projets, notamment en termes de délais de jugement ou de complexité, et se borne à anticiper une hausse du nombre des recours. Le recensement effectué par le Conseil d’État révèle, par ailleurs, que les projets visés ne représentent qu’une part extrêmement limitée des affaires en cours d’instruction devant les tribunaux administratifs."

- Le dispositif n'a pas fait l'objet d'une évaluation ex ante : "les aménagements contentieux qu’il est proposé d’apporter à la procédure de droit commun n’ont pas fait l’objet d’une évaluation, notamment quant à l’intérêt qu’il y aurait à les appliquer au-delà du champ des autorisations d’urbanisme et des autorisations environnementales" et "Le Conseil d’État relève également que le projet de loi restreint les possibilités de référé sans que l’efficacité d’une telle mesure, qui porte atteinte au droit au recours, soit établie et que les conséquences de la suspension automatique de la durée de validité de toutes les décisions relatives à un même projet n’apparaissent pas clairement, pouvant ainsi être elles-mêmes sources d’incertitudes et de contestations".

- Le dispositif pourrait, contrairement à l'objectif affiché, retarder les processus d'autorisation : "Le Conseil d’État observe qu’il ne peut pas être exclu que les pouvoirs de régularisation du juge, appliqués à une pluralité de décisions successives, soient sources de complication et d’allongement des procédures." ou encore "la multiplication de règles contentieuses spéciales ne peut que nuire à la lisibilité d’ensemble des règles applicables au contentieux administratif qui, à rebours des objectifs recherchés de simplification et de clarté de la norme, se complexifie au détriment de l’égalité entre les citoyens et de la bonne administration de la justice, sans pour autant aboutir à une véritable accélération des procédures contentieuses".

- Le conseil d’État conclut ainsi que "les dispositions du projet de loi, qui sont susceptibles de présenter des risques de constitutionnalité au regard notamment du principe d’égalité devant la justice, comportent des inconvénients importants en termes de sécurité juridique pour les justiciables et, plus généralement, pour la bonne administration de la justice. Il propose, en conséquence, de ne pas les retenir."

Malheureusement, l'avis de la Défenseur des Droits est concordant : "Cette réforme contentieuse porte ainsi une atteinte injustifiée au droit au recours.

En effet, la garantie du droit au recours, et notamment du droit d’accéder à un tribunal, garanti notamment par l’article 6, paragraphe 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, a une signification particulière dans les cadres des litiges ayant trait à des projets ou des politiques publiques ayant une incidence sur l’environnement. De tels projets ou politiques publiques sont susceptibles de porter atteinte au droit de vivre dans un environnement sain, garanti notamment par l’article 1er de la Charte de l’environnement, d’un large public distinct des porteurs des projets ou des destinataires directes des politiques publiques.

Ce public, parce qu’il n’est pas le destinataire des décisions de l’administration, peut ne pas être en mesure d’accéder aux informations concernant ces décisions, de participer au processus décisionnel ou de les contester devant une juridiction. Dès lors, ainsi que l’indique le préambule de la Convention d’Aarhus du 25 juin 1998, afin qu’ils soient effectivement en mesure de faire valoir leur droit à vivre dans un environnement sain, des garanties spécifiques doivent être mis en œuvre pour permettre au public d’être
en mesure « de protéger [ses] intérêts dans le processus décisionnel en matière d’environnement, ce qui implique [qu’il soit] en mesure de participer de manière effective à la procédure en cause et de faire examiner leurs arguments pertinents ».

Pour cette raison, l’article 9, paragraphe 3, de la Convention d’Aarhus impose aux États parties de veiller à ce que chacun puisse « engager des procédures administratives ou judiciaires pour contester les actes ou omissions de particuliers ou d’autorités publiques allant à l’encontre des dispositions du droit national de l’environnement ». Si cette disposition n’a pas d’effet direct en droit interne, le droit au recours, et notamment le droit d’accès à un tribunal, doit être interprété à la lumière de cette exigence spécifique qui vise notamment à permettre à des conflits impliquant de nombreux intérêts et droits contradictoires d’être tranchés par un tiers impartial.

Par conséquent, seules des raisons impérieuses peuvent justifier de restreindre le droit au recours, et notamment d’accès à un tribunal, en matière d’environnement. Or, la réforme contentieuse introduite par l’article 15 du projet de loi, et en particulier la restriction des possibilités de former un référé pour contester une décision concernant certains projets agricoles, limite l’accès à un tribunal des opposants à ces projets sans que cette restriction ne soit justifiée. Le Conseil d’État relève ainsi que « l’étude d’impact ne fait pas apparaître de difficultés particulières en ce qui concerne le contentieux de ces projets, notamment en termes de délais de jugement ou de complexité, et se borne à anticiper une hausse du nombre des recours » qui ne représentent en l’état qu’une « part extrêmement limitée des affaires en cours d’instruction devant les tribunaux administratifs »

Dès lors, la Défenseure des droits estime que la réforme des contentieux concernant les projets d’ouvrage hydraulique agricole et d’installation d’élevage tel que prévue par l’article 15 du projet de loi porte atteinte au droit au recours"

Malheureusement, ces avis n'ont pas convaincu la majorité, la droite et le Rassemblement national de la nécessité de supprimer ce dispositif. Le groupe écologiste espère qu'ils sauront entendre raison lors du débat en hémicycle, à l'occasion du vote sur cet amendement de suppression de l'article 15.

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