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Emmanuelle Anthoine
Question N° 7237 au Ministère de l’économie


Question soumise le 18 avril 2023

Mme Emmanuelle Anthoine appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur la crise de construction de logements neufs. L'invasion de l'Ukraine par la Russie, en février 2022, a amplifié une importante crise énergétique et une très forte hausse du prix des matériaux que la crise pandémique avait initiée. Celle-ci est à l'origine d'une spectaculaire crise de la construction des logements, en particulier des maisons individuelles, dont le coût de revient a augmenté de 20 % en un an. À cette inflation des coûts de construction s'ajoutent une augmentation des prix du foncier, un affaiblissement des dispositifs de soutien à l'accession et à l'investissement locatif, une augmentation record des taux d'intérêt et une restriction des conditions d'accès au crédit, etc. La conjonction de ces conditions défavorables est à l'origine du gel des projets immobiliers de nombreux ménages qui y renoncent, faute d'être éligibles à l'accession à la propriété. Si rien n'est engagé, on assistera à la fin de l'accession de masse à la maison individuelle. Il est à prévoir que cette tendance perdure dans la mesure où une part grandissante des jeunes actifs parmi les Français les moins aisés, faiblement dotés en épargne préalable, renoncent à devenir propriétaire. La crise du marché de la maison neuve que l'on dépore risque, dès lors, de s'aggraver. Celui-ci a chuté violemment de plus de 30 % et même de 38,2 % si on considère le dernier trimestre. En région Auvergne-Rhône-Alpes, par exemple, les ventes de maisons neuves reculent de 28,6 %. D'après le pôle habitat de la Fédération française du bâtiment, il s'agit du pire exercice des seize dernières années. Le secteur de la construction individuelle étant fragilisé, il entraîne par effet d'entraînement d'importantes répercussions déjà visibles, ou annoncées. En effet, un logement en construction nécessite l'équivalent de 2,5 emplois temps plein pendant un an. Ces emplois ont la particularité d'être des emplois ancrés dans les territoires et participent activement à alimenter une économie locale en circuit court. Par conséquent, il y a urgence à apporter des réponses concrètes au risque que la crise ne se propage, durablement, à d'autres secteurs. Refuser délibérément d'intervenir rapidement pour endiguer la crise de la construction de logement fait courir le risque d'une crise de l'appareil de production français. Les difficultés à soutenir la construction de logements ne permettent également pas de soutenir un niveau satisfaisant de l'offre de logement. La crise de la construction risque donc de se traduire par une crise du logement aggravée dans les prochaines années. Au regard de l'ensemble des éléments sus-mentionnés, il apparaît primordiale de proposer un bouclier logement qui prévoit la prolongation du prêt à taux zéro, son rétablissement à 40 % sans discrimination territoriale, le rehaussement de 25 % des plafonds d'opérations pris en compte pour son calcul, l'instauration d'un crédit d'impôt de 15 % sur les cinq premières annuités d'emprunt pour compenser l'impact de la RE2020, ainsi que la restauration du dispositif Pinel dans sa version 2022 jusqu'à la mise en place du statut du bailleur privé. Un tel bouclier logement serait de nature à satisfaire les besoins en logement abordable et ainsi permettrait de sauvegarder une part considérable des emplois de la filière du bâtiment. Alors que construire sa maison individuelle est le rêve de trois quart des Français, il y a urgence à proposer un bouclier logement de manière à soutenir le pouvoir d'achat immobilier des ménages et soutenir, par ricochet, la filière du bâtiment. Aussi, elle lui demande comment le Gouvernement entend résoudre la crise de la construction de logement neuf et s'il envisage de déployer un bouclier logement pour accompagner les ménages français et le secteur dans leur projet de construction de logements.

Réponse émise le 5 décembre 2023

Le Gouvernement a pleinement conscience des effets des multiples crises sur le secteur du bâtiment en France. Le diagnostic doit toutefois être différencié entre les segments. Les indicateurs avancés de la construction de logements au plan national sont toutefois plus encourageants. Les mises en chantier sont ainsi globalement stables depuis le début de l'année 2023. Les données des permis de construire sont plus difficiles à interpréter, en raison de la forte volatilité liée aux effets de l'entrée en vigueur de la norme RE 2020 au 1er janvier 2022 et à l'aide à la relance de la construction durable, qui s'appliquait pour les permis déposés entre le 1er septembre 2021 et le 31 août 2022. Les données récentes montrent toutefois aussi une stabilisation depuis le début 2023. L'activité d'entretien-amélioration est dynamique, dans un contexte où les prix élevés de l'énergie et les dispositifs de soutien publics encouragent les rénovations énergétiques ; ce diagnostic est partagé avec les fédérations du bâtiment (FFB et CAPEB notamment). A l'échelle de l'ensemble du secteur du bâtiment, les enquêtes auprès des chefs d'entreprises témoignent d'une activité globalement résiliente : les soldes liés aux perspectives d'activité et aux carnets de commande dans les enquêtes de conjoncture de l'Insee dans l'industrie du bâtiment sont au-dessus leurs moyennes historiques sur les derniers points connus (août pour les carnets de commande et juillet pour les perspectives d'activité). Les carnets de commande moyens sont ainsi de 8,4 mois, contre une moyenne historique à 6,0 mois. Si le Gouvernement reste pleinement mobilisé pour valoriser la construction des logements dans les zones tendues, il demeure préoccupé par le taux de logements vacants et de résidences secondaires qui augmente continuellement et par les effets de cette construction sur l'artificialisation des sols (64 % de l'artificialisation nouvelle des sols provient de la construction de logements individuels). Ainsi, le Gouvernement a proposé dans le PLF pour 2024 de prolonger le Prêt à Taux Zéro (PTZ) jusqu'en 2027, en le recentrant dans le neuf collectif en zones tendues et dans l'ancien en zones détendues sous condition de réalisation de travaux de rénovation, afin de faciliter l'accès au logement des ménages modestes tout en restant cohérent avec les objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols, de verdissement de la dépense publique et de sobriété foncière. Les barèmes du PTZ seront révisés dans le projet de loi de finances pour 2024, permettant à environ 6 millions de foyers fiscaux supplémentaires d'y être potentiellement éligibles. Par ailleurs, les objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols inscrits dans la loi et indispensables à la lutte contre le réchauffement climatique sont déjà mis en œuvre avec souplesse. En effet, la loi n° 2023-630 du 20 juillet 2023 a introduit une "garantie rurale" d'un hectare dans toutes les communes pour leur permettre de mener à bien des projets d'importance. Pour favoriser l'activité de la filière bâtiment, le Gouvernement appuie donc fortement la réorientation de la construction sur les zones tendues et la massification de la rénovation. La rénovation énergétique performante des 5,2 millions de passoires thermiques nécessiterait en effet 70 000 groupements d'artisans à plein temps, soit 810 000 emplois. C'est pourquoi, l'Etat a encouragé un investissement massif dans ce secteur : MaPrimeRénov' a permis de rénover 720 000 logements en 2022. Toutes aides confondues, les dispositifs de l'Agence nationale de l'habitat ont accompagné 8,5 milliards d'euros de travaux. A cela s'ajoutent les multiples autres sources de financement de la rénovation énergétique : la TVA à 5,5%, les certificats d'économie d'énergie, l'Eco-PTZ, les aides des collectivités territoriales, etc. Enfin, le Gouvernement travaille sur une réforme ambitieuse de MaPrimeRénov' afin d'accélérer encore le rythme de rénovation pour atteindre 200 000 rénovations globales performantes en 2024 (contre 66 000 rénovations globales performantes aidées par MPR en 2022). Enfin, l'action du Gouvernement pour soutenir le secteur immobilier se traduit également par des mesures de soutien au parc locatif, notamment le logement social et le logement intermédiaire. Le 5 octobre dernier, le Gouvernement a présenté un paquet de mesures financières pour soutenir la construction et la rénovation de logements sociaux, notamment en apportant un soutien budgétaire additionnel à la production des logements les plus sociaux et à la réhabilitation du parc existant. Le 16 novembre, la Première ministre a annoncé un plan pour soutenir le développement du logement locatif intermédiaire, avec notamment un effort supplémentaire de l'Etat et de la Caisse des dépôts pour un montant combiné de 500 millions d'euros.

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