M. Hadrien Clouet interroge Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la situation des Françaises aux Etats-Unis d'Amérique depuis la suppression du droit fédéral à l'interruption volontaire de grossesse. La Cour suprême étasunienne a révoqué le 24 juin 2022 l'arrêt Roe vs Wade qui garantissait depuis 1973 le droit à l'interruption volontaire de grossesse et interdisait toute entrave. Il s'agit d'un triomphe de l'extrême-droite trumpiste et des intégristes religieux, qui inspirent leurs homologues lepénistes. Déjà dix États étasuniens ont prononcé une interdiction totale de l'acte abortif par les professionnels. Les avortements ne vont évidemment pas cesser, car ils existent depuis l'aube de l'humanité : ils auront lieu de façon dangereuse et provoqueront des décès parmi les femmes qui le pratiqueront de façon clandestine. Dans cette situation, le droit des femmes à disposer de leur corps est sous double tutelle. D'une part, l'exercice d'une interruption volontaire de grossesse dépend de la majorité parlementaire au Congrès de leur État de résidence, qui approuve ou bannit l'IVG, soit par la loi ordinaire, soit par la Constitution fédérée. D'autre part, les droits reproductifs sont modulés par leur employeur ou leurs prestataires privés de santé, susceptibles de financer ou cofinancer un déplacement vers un état voisin où l'IVG est légal et accessible. Or plus de 150 000 de Français résident aux États-Unis d'Amérique, second pays d'accueil pour eux dans le monde. Le jugement prononcé par un aréopage de religieux intégristes à la Cour suprême menace donc directement les droits reproductifs de plusieurs dizaines de milliers de Françaises. Dans ces conditions, M. le député se demande ce que la ministre souhaite entreprendre pour garantir leur accès à l'avortement, à l'instar de ce qu'il propose à juste titre en Europe par sa subvention au réseau Avortement sans frontière qui accompagne, entre autres, les Ukrainiennes déplacées en Pologne. Les ambassades et consulats français aux États-Unis d'Amérique informent-ils les Françaises des centres d'accès à l'IVG existants sur place ? Mettent-ils en relation les Françaises avec des professionnels qui exercent dans l'État le plus proche où l'IVG est légale, ou favorisent l'accès à l'EMTALA (Emergency Medical Treatment & Active Labor Act, programme fédéral destiné aux femmes en danger vital) ? Soutiennent-ils les associations « pro-choix » actives dans les États qui ont retiré le droit à disposer de son corps ? Enfin, il lui demande si la diplomatie française finance les frais de déplacement et d'accès à l'IVG des Françaises lorsqu'ils impliquent un voyage pénible et cher.
La France mène une diplomatie résolument féministe et continuera à défendre sans relâche le droit des femmes à disposer librement de leur corps. Avec le Forum Génération Egalité, co-organisé avec le Mexique sous l'égide d'ONU Femmes en 2021, la France a mobilisé la communauté internationale pour apporter un soutien concret à ce combat, en prenant la tête d'une coalition en faveur des droits et santé sexuels et reproductifs. Elle a pris à cette occasion l'engagement d'une contribution à hauteur de 400 millions d'euros sur 5 ans en faveur des droits et santé sexuels et reproductifs, et de la santé des femmes. Cependant, si la France promeut dans les instances internationales le droit des femmes à disposer librement de leur corps, elle ne peut intervenir directement auprès d'autorités étrangères pour exiger l'accès à l'IVG pour ses ressortissantes, chaque Etat étant souverain dans la définition des règles de droit qui s'appliquent sur son territoire. Concernant les Françaises résidant dans un pays étranger où l'interruption volontaire de grossesse est interdite, il n'existe pas de dispositif spécifique permettant de couvrir les frais de déplacement vers la France ou vers un autre Etat autorisant l'IVG. Néanmoins, les personnes dans le besoin peuvent solliciter l'accès au dispositif des aides sociales directes classiques (aides à durée déterminée et secours occasionnel), dès lors qu'elles remplissent les critères d'éligibilité. Par ailleurs, les postes de notre réseau consulaire seront sollicités pour tenir à jour une liste d'associations locales susceptibles d'apporter des informations ou un accompagnement, afin de répondre aux demandes qui pourraient être formulées par des Françaises résidant à l'étranger. S'agissant plus précisément des Etats-Unis, les postes de notre réseau consulaire ont été interrogés pour indiquer s'ils ont été sollicités par des ressortissantes françaises sur l'IVG. A ce jour, aucun ne fait état de demandes, mais les services du ministère de l'Europe et des affaires étrangères resteront vigilants et mobilisés sur cette question.
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