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Romain Daubié
Question N° 15729 au Ministère du ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire


Question soumise le 27 février 2024

M. Romain Daubié appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur l'absence de décret d'application de la loi n° 2023-87 du 13 février 2023 visant à réformer le mode de calcul de la retraite pour les non-salariés agricoles. En effet, cette loi dispose, en son article unique, que « la nation se fixe pour objectif de déterminer, à compter du 1er janvier 2026, le montant de la pension de base des non-salariés des professions agricoles en fonction des vingt-cinq dernières années civiles d'assurance les plus avantageuses » et que « les modalités d'application sont définies par décret en Conseil d'État ». 85 % des non-salariés agricoles sont polypensionnés, c'est-à-dire qu'ils ont été affiliés à des régimes différents au cours de leur vie et sont, de plus, confrontés à une fluctuation de leurs revenus de plus en plus importante en raison des divers aléas climatiques, économiques et sanitaires. Or jusqu'à la promulgation de la loi précitée, les agriculteurs étaient la dernière catégorie socio-professionnelle à calculer la retraite sur la totalité de la carrière, bonnes et mauvaises années mêlées. Avec 1,3 million d'agriculteurs touchant une retraite autour de 1 150 euros bruts mensuels, soit environ 350 euros de moins que la moyenne nationale des retraités, cette loi portant réforme sur les retraites des non-salariés agricoles permet un calcul équitable de la retraite des agriculteurs vis-à-vis du reste de la population, en retirant les mauvaises années du calcul. Cependant, à ce jour, le décret d'application mettant en œuvre les dispositions de ladite loi n'a pas été publié. Faute de publication de ce décret d'application, la Mutualité sociale agricole (MSA) et les autres organismes de retraite agricole ne peuvent, à ce jour, ni anticiper la mise à jour de leurs outils informatiques, ni même apporter des conseils éclairés auprès de leurs adhérents. De plus, selon la MSA, en 2021, les exploitants de plus de 57 ans, susceptibles de partir à la retraite dans les 5 prochaines années, représentaient 27,3 % de l'ensemble des agriculteurs en activité. Le renouvellement de ces actifs à travers une promotion de l'attractivité de son secteur doit se faire par une protection sociale cohérente avec celle dont bénéficie le reste de la population. La publication du décret d'application de cette loi est de fait indispensable à la bonne application du dispositif et doit intervenir rapidement compte tenu des difficultés de gestion et de visibilité que cela engendre. Il lui demande de lui indiquer dans quel délai il entend publier ce décret d'application.

Réponse émise le 4 juin 2024

Les retraites agricoles constituent un élément de reconnaissance du travail des agriculteurs comme l'a rappelé le Premier ministre lors de ses dernières interventions. Il s'agit d'un engagement ancien du Parlement, dans un esprit de consensus, qui a toujours été soutenu par le Gouvernement, à travers notamment les lois à l'initiative du député André Chassaigne promulguées les 3 juillet 2020 et 17 décembre 2021. Ces revalorisations ont produit des effets concrets. Au total, ces deux lois ont permis de revaloriser les pensions de plus de 330 000 anciens agriculteurs et agricultrices, soit un tiers des retraités du régime. Le gain est significatif, pour de nombreux agriculteurs, puisque les pensions ont augmenté en moyenne d'environ 100 euros par mois. Le Gouvernement a également défendu la proposition de loi du député Julien Dive, promulguée le 13 février 2023, qui prévoyait, d'une part, le principe d'une modification au 1er janvier 2026 du calcul de la retraite de base des agriculteurs en fonction des 25 années d'assurance les plus avantageuses et, d'autre part, la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement visant à préciser les modalités d'application de cette réforme. Ce rapport, confié à l'inspection générale des affaires sociales (IGAS) et au conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) par les ministres chargés du travail, de l'agriculture et des comptes publics, a été transmis au Parlement le 31 janvier 2024. Il expose plusieurs scénarios, au regard de la concertation menée notamment avec les organisations professionnelles agricoles, et il en privilégie un à savoir, la bascule dans un régime en annuités prenant en compte, comme au régime général, les 25 meilleures années de revenus. Ce scénario s'inscrit dans une logique de convergence avec les salariés ou les autres travailleurs indépendants, ce qui est d'autant plus pertinent que 85 % des agriculteurs partant en retraite ont accompli une partie de leur carrière dans le cadre d'une activité non-agricole. Cette convergence est, par ailleurs, le souhait d'une grande partie de la profession agricole, sans renier les spécificités du régime agricole. Toutefois ce rapport a montré combien la mise en œuvre de cet objectif de convergence soulevait de nombreuses questions au regard notamment de ses effets de bord potentiels. Des travaux complémentaires étaient donc nécessaires afin d'identifier des mécanismes d'ajustement et de compensation possibles pour réduire ou éliminer ces effets de bord. Dans cette optique, le Gouvernement a poursuivi les travaux en lien avec les organisations professionnelles agricoles, la mutualité sociale agricole (MSA), la caisse nationale d'assurance vieillesse et les parlementaires, en vue de respecter l'esprit de la loi Dive et d'assurer l'amélioration concrète des pensions des non-salariés agricoles dès le 1er janvier 2026. Ainsi, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 intègrera bien une réforme du calcul de la pension sur la base des 25 meilleures années de revenus dans une logique de convergence progressive, applicable aux pensions liquidées à compter de 2026. Ce principe de calcul sur le revenu professionnel ne s'appliquerait que pour les années postérieures à 2016, date à compter de laquelle la MSA dispose de l'historique des revenus des exploitants. Pour les périodes avant 2016, le calcul serait effectué sur la base des points acquis. Sur la base de ces deux liquidations, une proratisation permettra de calculer les 25 meilleures années sur l'ensemble de la carrière et, à terme, le calcul sera ainsi effectué uniquement sur le revenu professionnel. Cette réforme nécessitera une augmentation de l'effort contributif des exploitants agricoles pour aligner le niveau de cotisations sur celui des travailleurs indépendants au réel, dans une logique de convergence. Le Gouvernement est donc au rendez-vous de la loi votée à l'initiative du député Julien Dive.

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