Séance en hémicycle du mardi 20 juillet 2021 à 15h00

Sommaire

La séance

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La séance est ouverte à quinze heures.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Mes chers collègues, avant d'aborder l'ordre du jour, je tiens à exprimer la vive émotion de l'Assemblée nationale après les graves inondations qui ont frappé l'Europe ces derniers jours.

Sans épargner certains départements français, ces inondations ont été particulièrement tragiques chez nos voisins et amis allemands et belges, causant de très nombreuses victimes. Je souhaite faire part de notre compassion et de toutes nos condoléances à leurs familles et à leurs proches. En cette circonstance dramatique, j'ai adressé en votre nom à tous un message de solidarité à mes homologues allemand et belge.

Applaudissements sur tous les bancs.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le Premier ministre, nous croyons au progrès, en la médecine et en la recherche médicale. Voilà pourquoi nous ne serons jamais du côté des antivax, des complotistes et de tous ceux qui colportent honteusement les rumeurs les plus folles.

Applaudissements sur les bancs des groupes LR, LaREM, Dem, SOC, Agir ens, UDI-I, LT et GDR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Honte également à ceux qui menacent de mort des députés de la République et à ceux qui comparent la vaccination obligatoire à la Shoah en brandissant l'étoile jaune. Ils n'ont pas leur place dans la République !

Applaudissements sur tous les bancs.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La vaccination pour tous, c'est la clé d'une reprise durable et la condition d'un retour à la vie normale. Hélas, à force de lenteurs, parfois par manque de pédagogie et par défaut d'anticipation, nous avons trois mois de retard par rapport à nos voisins dans la politique de vaccination. Monsieur le Premier ministre, votre passe sanitaire, c'est un passe qui ne passe pas, et qui sanctionne bon nombre de Français.

Par votre manque d'anticipation, vous sanctionnez les jeunes. Pendant des mois, ils n'avaient pas le droit de se faire vacciner ; aujourd'hui, ils se voient imposer un passe sanitaire avec effet immédiat, en plein milieu de l'été.

« Eh oui ! » sur les bancs du groupe LR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C'est injuste et contraire à tout bon sens.

Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe SOC. – M. André Chassaigne applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Par votre manque d'anticipation, vous sanctionnez les restaurateurs en les menaçant de peines disproportionnées qui dépassent largement leurs responsabilités. Vous sanctionnez aussi les primo-vaccinés de juillet : avant même qu'ils aient reçu leur seconde dose, ils voient leurs libertés menacées.

Les Français ne doivent pas payer ce manque d'anticipation face au variant delta, qui est connu depuis des mois. C'est pour cette raison que le passe sanitaire doit entrer en vigueur le 30 août, de façon à laisser à chacun le temps d'achever son parcours vaccinal. Votre mission n'est pas de stigmatiser mais de rassurer et de convaincre les 16 millions de Français qui ne sont pas encore vaccinés. Ils ont des doutes ; pour les lever, vous devez assouplir le passe sanitaire qui ne peut pas être plus liberticide que le confinement. Il doit, au contraire, être un bouclier anti-confinement.

Monsieur le Premier ministre, êtes-vous prêts à sortir de la mécanique anxiogène du reconfinement et des restrictions de liberté pour les vaccinés ?

Applaudissements sur les bancs du groupe LR.

Debut de section - Permalien
Jean Castex, Premier ministre

Monsieur le président Abad, je suis, comme toujours, surtout prêt à lutter contre la pandémie.

Debut de section - Permalien
Jean Castex, Premier ministre

En ces circonstances particulières qui nous réunissent, permettez-moi de le rappeler : il y a quelques semaines, nous avions toutes et tous nourri beaucoup d'espoir. Partout dans le monde – pas uniquement en France, convenez-en –, le variant delta a fait son apparition, avec ses caractéristiques propres. C'est clair : le taux de progression du virus, lié à la contagiosité de ce variant, est sans précédent par rapport aux autres vagues.

Exclamations sur les bancs du groupe LR.

Debut de section - Permalien
Jean Castex, Premier ministre

Nous avons immédiatement réagi.

« Non ! » sur les bancs du groupe LR.

Debut de section - Permalien
Jean Castex, Premier ministre

D'ailleurs, après une concertation approfondie à laquelle je vous remercie toutes et tous d'avoir participé, nous allons proposer au Parlement un texte de loi pour faire face à la situation, à côté d'autres actions que nous avons engagées. La stratégie sur laquelle repose ce texte, vous l'avez rappelée : c'est la vaccination, la vaccination, la vaccination !

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.

Debut de section - Permalien
Jean Castex, Premier ministre

Monsieur le président Abad, vous l'avez observé : le rythme de la vaccination avait ralenti.

Debut de section - Permalien
Jean Castex, Premier ministre

Non que nous manquions de doses, vous le savez parfaitement. La pédagogie dont vous parlez, elle est l'affaire de nous toutes et tous.

Debut de section - Permalien
Jean Castex, Premier ministre

C'est une cause nationale. Bien sûr, tout ce qui ne va pas, c'est la faute du Gouvernement ; vous nous jouez cette musique depuis dix-huit mois, et même davantage.

Exclamations sur les bancs du groupe LR.

Debut de section - Permalien
Jean Castex, Premier ministre

Pour en revenir à votre question, le passe sanitaire est un des éléments de cette stratégie.

Debut de section - Permalien
Jean Castex, Premier ministre

C'est une bonne stratégie. Pour le coup, je voudrais m'associer à vos propos, monsieur Abad, visant celles et ceux qui ont parfaitement le droit de ne pas être d'accord avec le Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Jean Castex, Premier ministre

Ils peuvent penser que la vaccination n'est pas une bonne chose – nous pensons ensemble qu'ils se trompent. Mais ils n'ont en aucun cas le droit de violer les lois de la République, ni de recourir à la violence et à l'intimidation, particulièrement à l'endroit de celles et de ceux qui ont pour mission de la représenter.

Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem et sur plusieurs bancs du groupe LR.

Debut de section - Permalien
Jean Castex, Premier ministre

Je le dis et je le répéterai : le passe sanitaire – dont vous allez débattre de façon approfondie dans les heures qui viennent, mesdames et messieurs les députés – n'a pas que pour objectif d'inciter et d'encourager à la vaccination, même si c'est déjà beaucoup, puisque vous reconnaissez vous-même, monsieur Abad, que la vaccination est indispensable.

Il a aussi pour objectif de protéger les personnes, ainsi que les lieux auxquels il sera applicable. Préférez-vous que nous les fermions à nouveau ? Je suis sûr que non, vous vous êtes toujours élevé contre la fermeture des différents établissements. C'est aussi l'objectif du passe sanitaire, et je suis sûr qu'après des débats approfondis et des améliorations ,

« Ah ! » sur les bancs du groupe LR

Debut de section - Permalien
Jean Castex, Premier ministre

vous le voterez sur tous les bancs.

Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Eu égard à la vitesse des contaminations au covid-19, nous allons indéniablement vers un cap épidémique qui pourrait être dramatique. Le variant delta a engagé avec nous une course contre la montre que nous n'avons pas le droit de perdre. Ainsi résonnent les paroles fortes du Président de la République de la semaine dernière ; elles doivent trouver une concrétisation rapide dans le seul objectif de protéger les Français, tous les Français.

À cet égard, nous devons bien faire la différence entre ceux qui, munis d'une étoile jaune, manifestent et brûlent des centres de vaccination ou menacent les élus, et tous ceux qui s'inquiètent très justement de leur situation. Ces derniers sont inquiets pour leur propre santé et pour celle de la collectivité dans son ensemble, pour l'économie et pour l'avenir de leurs enfants.

Ainsi, nous devons être responsables et aux côtés de tous avec bienveillance pour nous donner les moyens de faire face à ce qu'on appelle désormais la quatrième vague, tout en soulageant ceux qui pourraient pâtir gravement de cette actualité, à commencer par les soignants ou toutes les personnes à risque. De la réussite de ces initiatives dépend notre avenir dans les semaines qui viennent : vacances, rentrées scolaire et universitaire, rentrée économique et, surtout, capacité de notre personnel soignant à faire face une nouvelle fois à l'offensive du covid.

Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, quelles actions de communication et de pédagogie comptez-vous mener dans les prochains jours et les prochaines semaines pour faire comprendre tout le sérieux de la situation et la nécessité de se protéger le plus vite possible ? Pouvez-vous garantir à la représentation nationale que chaque Français qui le souhaite peut avoir, demain, accès au vaccin, seul à même de nous protéger collectivement ?

Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur quelques bancs du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

Vous parlez de quatrième vague ; j'ai peur que vous ayez raison. Cela fait maintenant trois semaines que nous voyons les dégâts épidémiques causés par le variant delta dans les pays autour de nous. Nous constatons aussi les dégâts sanitaires qu'il provoque dans des pays où la population – qui n'a pas la chance de pouvoir se demander si nous avons suffisamment de recul sur les vaccins – demande simplement à l'État de pouvoir disposer de vaccins pour se protéger.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

Le variant delta fait des dégâts sanitaires sans précédent dans des pays où les citoyens manifestent non pas pour lutter contre un gouvernement liberticide qui pousse les gens à se protéger ,

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

mais pour demander des vaccins. Dans ces pays en général très pauvres, ou qui le sont parfois un peu moins, des gouvernements plutôt situés à l'extrême opposé de la démocratie et de l'idée qu'on s'en fait ne mettent pas de vaccins à la disposition de la population et regardent les gens mourir.

Madame la députée, des manifestations ont eu lieu samedi – je n'en minimise pas la portée, mais fort heureusement je ne considère pas qu'elles soient la règle. Au même moment, le virus circulait beaucoup. Il circule beaucoup plus vite, nous le savions et nous le constatons. Il circule essentiellement chez les jeunes et dans tout le territoire national, y compris outre-mer – je pense notamment à la Martinique.

Les chiffres concernant les contaminations des dernières vingt-quatre heures viennent de me parvenir. J'avais évoqué le risque de 15 000 ou 20 000 cas par jour à la fin du mois de juillet ; nous étions hier à 18 000 contaminations en seulement vingt-quatre heures. Cela signifie que l'augmentation de la circulation du virus est de l'ordre de 150 % sur une semaine.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

Nous n'avons jamais connu cela, ni avec la souche originelle du covid-19 ni avec les variants anglais, sud-africain ou brésilien.

Oui, nous avons une arme, la vaccination ; oui, nous avons des vaccins ; oui, nous mobilisons les centres de vaccination, les médecins, les pharmaciens, les infirmiers, partout, sur tout le territoire national et tout le temps. Nous invitons les Français à se connecter massivement aux plateformes, à se rendre dans les centres de vaccination, à prendre rendez-vous et à consulter leur médecin. Le temps n'est plus au doute ni à l'hésitation ; le temps est à l'immunité collective. Elle relève de notre responsabilité collective, c'est le seul moyen que nous avons et nous l'utiliserons à bon escient pour nous débarrasser du covid une fois pour toutes.

Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ma question s'adresse à Mme Amélie de Montchalin, ministre de la transformation et de la fonction publiques. « Mais cessez donc d'emmerder les Français, il y a dans ce pays trop de lois et de règlements » s'exclamait en 1966 Georges Pompidou, alors Premier ministre.

Un demi-siècle plus tard, les choses ont-elles vraiment changé ? Rien n'est moins sûr. Tandis que, depuis des décennies, chaque gouvernement prend des engagements de simplification administrative, je continue, comme la plupart de mes collègues dans cet hémicycle, de recevoir chaque semaine dans ma permanence des Français perdus, stressés, découragés, me demandant de les sauver de relations labyrinthiques et de situations absurdes avec l'administration.

Souvent, les problèmes rencontrés par nos concitoyens se résument à un seul, implacable : ils n'entrent pas dans les cases prévues par l'administration. La faute à des parcours de vie singuliers, la faute, aussi, à une complexité administrative et à une dématérialisation des démarches qui fait peser sur nombre d'entre eux une angoisse quasi-existentielle : celle de cocher la mauvaise case ou, pire, de n'en cocher aucune.

Madame la ministre, j'ai déposé cette semaine une proposition de résolution pour mettre un mot sur ces maux qui pourrissent le quotidien des Français. Ce mot, c'est celui d'épuisement, de burn-out administratif, car il est urgent de reconnaître ces souffrances et de lutter contre elles : elles minent tout à la fois le quotidien de nos concitoyens et la qualité de leur relation avec l'administration.

Je tiens à préciser que je distingue clairement les agents publics de la machinerie administrative, laquelle, en tentant d'administrer de façon presque compulsive la vie des Français, produit toujours plus de règles, de procédures et autres règlements pour tenter de maîtriser et de standardiser la complexité de nos vies. Mais, ce faisant, elle ne réussit bien souvent qu'à produire toujours plus de complications, de déresponsabilisation, d'exclusion et, parfois, de souffrance.

Je connais votre engagement en faveur de la simplification administrative, en faveur d'une administration bienveillante. Je connais aussi le souhait des agents publics de renouer avec l'essence de leur vocation. Ma question est donc simple : à l'heure de la pandémie, où, plus que jamais, l'administration règle le moindre geste de nos vies, comment comptez-vous prendre en compte le risque d'épuisement administratif ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme la ministre de la transformation et de la fonction publiques.

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin, ministre de la transformation et de la fonction publiques

Le Président de la République l'a déclaré il y a encore quelques jours : réformer l'État est une priorité et nous allons continuer à le faire. Je tiens avant tout à rappeler que les agents publics, pendant la crise sanitaire, ont été très mobilisés : ils ont assuré la continuité des services publics et je leur rends hommage parce qu'on le fait trop peu souvent.

Ensuite, il faut rappeler que ces hommes et ces femmes ont une mission : servir les Français. Servir, cela signifie : innover, s'adapter, considérer que la vocation de l'État est d'accompagner, soutenir et pas seulement de contrôler, empêcher ou juger. Ces agents publics font donc face à des rigidités, des complexités, parfois des absurdités. Et, chaque jour, je le sais, ils cherchent, au plus près des Français, à trouver des solutions.

Le Gouvernement, depuis 2017, a une ambition : permettre à ses agents publics de remplir pleinement leur mission. Cela, en les libérant de certaines contraintes, en donnant toujours la priorité au quotidien des Français. Vous avez d'ailleurs voté la loi pour un État au service d'une société de confiance, qui reconnaît le droit à l'erreur et, par-là, instaure une nouvelle relation de l'administration avec les citoyens et avec les entreprises. Vous avez voté le prélèvement à la source. Vous avez accompagné de nombreux projets qui remettent de l'humain au cœur des services publics – je pense aux espaces France services promus par Jacqueline Gourault.

Nous allons continuer dans ce sens. Dans quelques jours, le Premier ministre réunira l'ensemble du Gouvernement pour suivre les chantiers de simplification très concrets que nous avons lancés. Ma volonté est que nous parlions en permanence des difficultés que vous avez évoquées : c'est l'objet du programme Services publics + qui permet à chaque Français, à chaque agent public de faire remonter, par le biais du site service-public.fr, les formulaires qui ne veulent plus rien dire, les situations absurdes. Et j'invite tous les Français à faire part de ces expériences, qu'elles soient positives ou négatives. Ainsi, tous les trois mois, je réunirai l'ensemble des directeurs de tous les services publics afin que nous fassions le point et continuions à améliorer la situation. Oui, nous sommes mobilisés : le Président de la République et le Premier ministre ont fait de cette question une priorité et tous les membres du Gouvernement sont à la tâche. C'est le quotidien des Français qui compte, avec le concours des agents.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM et sur les bancs du groupe Agir ens.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le Premier ministre, le groupe Socialistes et apparentés est favorable à la vaccination obligatoire – avec une évaluation le 1er octobre –, seul moyen d'atteindre l'immunité collective. Mais pour vacciner, encore faut-il disposer d'un nombre suffisant de doses. Pour vacciner tous les plus de 12 ans, il en faut 115 millions. Quelque 65 millions ont déjà été administrées ; il en faut donc encore 50 millions. J'ai compris qu'il en resterait 10 millions dont la moitié seraient des vaccins AstraZeneca qui ne sont pas administrables à tout le monde. Aussi, pouvez-vous nous dire quel est le nombre exact de doses disponibles jusqu'à la fin du mois d'août ?

Plusieurs agences régionales de santé ont demandé qu'on ne prenne plus de rendez-vous pour recevoir une première dose au cours du mois d'août, faute de doses disponibles. Le confirmez-vous ?

En outre, le ministre des solidarités et de la santé a indiqué tout à l'heure au cours de son audition par la commission des lois que le pilotage des opérations ne dépassait pas trois semaines, ce qui semble tout de même un peu léger pour vacciner toute la population française.

Ma seconde question est la suivante : au cas où le nombre de doses serait insuffisant, comment voulez-vous que le passe sanitaire que vous proposez et que nous dénonçons soit applicable ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Comme a dit le Président : « Soyez fiers d'être des amateurs ! »

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous enfermez les Français et, pire, vous leur donnez l'illusion d'une liberté qui, malheureusement, n'est pas encore une réalité. Vous avez pris un décret, cette nuit, qui autorise à ne plus porter de masque au Louvre, par exemple. Aussi, si, demain, je suis pourvue d'un passe, je pourrai le visiter sans masque. Or rien ne dit que je ne sois pas encore contaminée et que je ne puisse diffuser le virus.

Dites-nous donc concrètement de quelles projections vous disposez en matière de contaminations d'ici à la fin août et quel en serait l'impact pour l'ensemble de nos concitoyens.

Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.

Sourires sur les bancs du groupe LR.

Debut de section - Permalien
Jean Castex, Premier ministre

Oui, nous allons poursuivre l'accélération de la vaccination. Je commencerai par répondre à votre question factuelle en me félicitant que, à la suite de l'appel lancé par le Président de la République, plusieurs millions de Français aient décidé de se faire vacciner. C'est une victoire collective, une victoire pour la nation. Nous disposons d'un stock de 6 millions de doses…

Debut de section - Permalien
Jean Castex, Premier ministre

…et il est prévu d'en recevoir, jusqu'à la fin août, de l'ordre de 4,5 millions par semaine, dont 2,5 seront réservées à l'administration des secondes doses.

Mais il ne suffit pas d'avoir des doses, encore faut-il disposer de professionnels de santé – je tiens à leur rendre hommage –, de centres de vaccination, alors même que nous sommes en pleine période estivale et que chacun aspire à se reposer. Or la mobilisation ne faiblira pas, si bien que l'objectif de 40 millions de primo-vaccinés, que j'avais fixé pour fin août, pourrait et devrait même être atteint à la fin du mois de juillet.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM, Dem et Agir ens.

Debut de section - Permalien
Jean Castex, Premier ministre

Il faut maintenir, j'y insiste, notre mobilisation.

Le passe sanitaire, et j'ai déjà répondu sur ce point au président Abad, n'est pas une atteinte aux libertés. Je crois au contraire qu'il est de nature à les promouvoir, madame la présidente Rabault.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.

Debut de section - Permalien
Jean Castex, Premier ministre

Et, quoi qu'il en soit, j'entends dire à la représentation nationale que, sur l'ensemble du texte qui lui est désormais soumis, je saisirai le Conseil constitutionnel.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.

Debut de section - Permalien
Jean Castex, Premier ministre

En effet, n'en doutez pas, notre objectif, comme toujours, a été de prendre des mesures proportionnées à la situation sanitaire, garantissant les libertés publiques fondamentales et assurant le développement de la sécurité sanitaire de nos concitoyens. C'est un enjeu collectif et j'attends beaucoup du débat des prochains jours car il y va de l'intérêt national.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Si je calcule bien, avec 6 millions de doses en stock, auxquelles on en ajoute 4 millions chaque semaine au mois d'août, on parvient à un total de 22 millions de doses, soit loin des 50 millions nécessaires pour vacciner l'ensemble de nos concitoyens.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous ne pouvez donc pas leur imposer des restrictions de liberté par le biais du passe vaccinal, si vous n'êtes pas en mesure de les vacciner tous.

Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ma question, à laquelle j'associe nos collègues Gosselin et Thiériot, s'adresse au Premier ministre. Le 15 juillet 2021 restera comme une journée tristement historique, celle où la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a remis en cause la souveraineté et la sécurité des nations européennes en niant la spécificité des militaires.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR. – M. Jean Lassalle applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il nous faut en effet mesurer l'impact de sa décision de les assujettir au même droit que n'importe quel travailleur, hormis dans certains cas très précis. Elle est inacceptable à plus d'un titre, surtout pour un pays comme le nôtre qui dispose d'un modèle d'armée dont l'agilité et l'aguerrissement sont sans équivalents en Europe.

Cette décision est avant tout inacceptable sur le fond car elle menace très directement notre sécurité intérieure en désorganisant nos armées et en portant atteinte au principe de disponibilité en tout temps et en tout lieu, lequel garantit notre efficacité militaire et assure la défense nationale.

Elle également inacceptable juridiquement car elle manque de base légale tant à l'échelle européenne, en faisant fi du principe de subsidiarité et en s'affranchissant d'une lecture naturelle et raisonnable des traités, qu'à l'échelle nationale, en ne respectant pas le droit constitutionnel.

Enfin, et cela relève du bon sens, considérer les militaires comme des travailleurs comme les autres, c'est renoncer au recours éventuel à la force pour défendre nos intérêts dans un monde toujours plus incertain, donc affaiblir encore davantage l'Europe.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

De nombreuses voix s'élèvent contre cette décision inique qui pousse même votre prédécesseur, Édouard Philippe, à sortir de sa réserve. Or le ministère des armées semble vouloir se conformer à cette décision. Cependant, face à sa gravité et aux menaces qu'elle représente pour notre souveraineté, la France ne peut en rester là.

Monsieur le Premier ministre, allez-vous officiellement dénoncer cette décision et réaffirmer le refus de la France de transiger avec l'exigence de disponibilité de ses armées ?

Applaudissements sur les bancs du groupe LR et parmi les députés non inscrits. – M. Jean Lassalle applaudit également.

Debut de section - Permalien
Florence Parly, ministre des armées

La directive européenne en question a vingt ans d'âge, n'a fait l'objet d'aucune transposition dans le droit national et n'a donc été appliquée à aucune de nos forces armées, plusieurs pays membres de l'Union européenne ayant fait comme nous. Depuis vingt ans, nos forces armées conduisent des opérations, assurent quotidiennement la sécurité des Français, sans que cela pose problème, en particulier aux militaires, en ce qui concerne l'organisation de leurs missions. En effet, le temps de travail des militaires ne se décompte pas et cela pour une raison simple : seule la réalisation de la mission compte.

Depuis quatre ans que je me rends aux armées, en métropole et en outre-mer, mais aussi sur des théâtres d'opérations extérieures, je n'ai constaté qu'une chose : des femmes et des hommes qui sont totalement engagés au service de la nation.

Debut de section - Permalien
Florence Parly, ministre des armées

Et, depuis quatre ans, je n'ai entendu personne, vous entendez bien, personne se plaindre auprès de moi des règles applicables aux militaires en matière de temps de travail.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM, LR et Dem. – M. Jean Lassalle applaudit également.

Debut de section - Permalien
Florence Parly, ministre des armées

Les militaires sont profondément attachés à leur statut et le pays, vous l'avez dit, tient particulièrement à la disponibilité des forces armées.

Nous sommes en train d'analyser l'arrêt de la CJUE pour déterminer la meilleure réponse à lui apporter.

« Alors ? » sur les bancs du groupe LR.

Debut de section - Permalien
Florence Parly, ministre des armées

Et s'il apparaît que la seule solution est de faire évoluer la directive, alors, nous nous engagerons résolument dans cette voie car il s'agit de défendre la libre disposition par la France de ses forces armées.

Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem et Agir ens.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Mme la ministre déléguée chargée du logement, nous allons voter le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets. Le débat a eu lieu : 376 articles, 2 000 amendements adoptés par les deux chambres, et une commission mixte paritaire qui s'est réunie pendant neuf heures. C'est un travail considérable pour lequel je tiens à remercier l'ensemble des rapporteurs.

C'est un texte majeur parce qu'il fait entrer durablement l'écologie dans le quotidien des Français : majeur parce qu'il aborde l'écologie de manière systémique, en agissant sur tous les secteurs émetteurs de gaz à effet de serre ; majeur parce que pour la première fois une loi est directement inspirée par le travail des Français, ceux de la Convention citoyenne pour le climat ; majeur parce qu'il comporte des mesures uniques en Europe, comme la réduction par deux de l'artificialisation des sols.

Nous avions là l'occasion de dépasser les clivages politiciens au nom de l'intérêt général, mais ce texte a au contraire révélé de profondes fractures. À la gauche de l'hémicycle, certains voulaient en faire une litanie d'interdits et de punitions.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

À droite, beaucoup continuent à regarder ailleurs, à minimiser l'ampleur de la crise.

Ce projet de loi est celui de la mobilisation de tous les Français. Il donne une trajectoire, des objectifs, des échéances et bat la cadence d'une transformation à marche forcée. Il définit des moyens considérables pour soutenir cette transition nécessaire et accompagner des changements profonds de la société.

Cependant, la France n'est pas une île : nous ne pourrons relever tout seuls le défi climatique auquel nous faisons face. La semaine dernière, la Commission européenne a annoncé le paquet législatif européen le plus ambitieux de son histoire en matière de politique environnementale.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La France doit être le fer de lance de la politique environnementale européenne. Madame la ministre déléguée, quel a été le rôle de la France dans l'élaboration de ce paquet législatif et comment va-t-il se traduire pour notre pays ?

Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du logement.

Debut de section - Permalien
Emmanuelle Wargon, ministre déléguée chargée du logement

Je vous prie tout d'abord d'excuser la ministre de la transition écologique, Barbara Pompili, qui se trouve actuellement au Sénat pour l'examen du texte de compromis qui a été trouvé entre l'Assemblée et le Sénat sur cette loi majeure « climat et résilience ».

C'est en effet une loi majeure dans son origine : issue de la Convention citoyenne pour le climat, elle a repris beaucoup de ses 150 propositions.

C'est une loi majeure dans les débats, passionnés mais respectueux, sur des sujets fondamentaux pour le quotidien des Français face à l'urgence climatique que nous vivons.

C'est une loi majeure dans ses avancées, vous en avez cité quelques-unes. La réduction de l'artificialisation des sols : nous allons diviser par deux l'étalement urbain dans les dix prochaines années et nous nous sommes donné un objectif à 2050. L'interdiction de la mise en location des logements qui sont des passoires énergétiques : dès 2028 pour les pires, puis en 2034. Le déploiement de trente-cinq zones à faible émission afin de réduire la pollution de l'air. Et le texte comporte bien d'autres mesures.

Vous avez raison, nous avons besoin d'inscrire notre action dans une démarche résolument européenne. Comme la France a été à la manœuvre sur cette loi et ce changement fondamental, elle l'est également dans le paquet législatif que vous avez cité : douze propositions législatives présentées par la Commission pour réduire de 55 % nos émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2030. La France a activement soutenu le travail de la Commission. Nous avons soutenu fièrement ces priorités, notamment le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières. Nous avons été l'un des premiers États membres à soutenir, dès 2018, l'adoption de la neutralité carbone à l'horizon 2050. La présidence française de l'Union européenne sera l'occasion de renforcer notre implication.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les inégalités sociales connaissent une nouvelle accélération depuis le début de la pandémie. Notre pays compte un million de pauvres supplémentaires ; une personne sur huit a recours à l'aide alimentaire et je vois, dans mon département de la Seine-Saint-Denis, l'inquiétude se répandre et cette question tarauder de nombreuses personnes : « Vais-je moi-même, avec ma famille, basculer dans la précarité ? »

Mais à l'autre bout de la société, tout va pour le mieux : depuis le début de la pandémie, le patrimoine des 500 plus grandes fortunes du pays a augmenté de 30 %.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Même les partisans du capitalisme s'inquiètent, pour le système lui-même, des conséquences de ce terrible grand écart. Ainsi, le président des États-Unis reconnaît que la théorie du ruissellement est une imposture et choisit d'amender sa politique fiscale.

Mais vous, rien ne semble devoir vous conduire à infléchir vos choix en faveur des plus riches. Les grandes fortunes prospèrent à l'abri des secousses qui frappent le reste de la société mais vous n'envisagez toujours pas de rétablir l'impôt de solidarité sur la fortune ni même d'instaurer une taxe covid exceptionnelle sur les bénéfices.

À l'inverse, alors que notre système social a montré son efficacité pour atténuer les coups les plus durs portés pendant la crise, vous vous empressez d'en réduire la portée en maintenant le cap de vos réformes des retraites ou de l'assurance chômage. Votre majorité se réclame du progressisme mais souvenez-vous alors qu'une société où les inégalités augmentent est une société qui régresse.

Vous pouvez encore changer de cap. Le débat sur le projet de loi de finances que nous aurons dans quelques semaines sera votre dernière chance. La satisfaction des besoins du plus grand nombre doit être la véritable finalité d'une politique économique.

Allez-vous enfin ouvrir le chantier de la lutte contre les inégalités en révisant votre politique fiscale et en ouvrant le chantier de l'augmentation du SMIC et des bas salaires ?

Applaudissements sur les bancs du groupes GDR et sur plusieurs bancs des groupes SOC et FI.

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La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable.

Debut de section - Permalien
Olivia Gregoire, secrétaire d'État chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable

Monsieur le député, nous ne ruisselons pas, nous agissons, et ce depuis quatre ans. Il y a quelques jours à peine, j'étais dans cet hémicycle pour la lecture de la CMP conclusive du projet de loi de finances rectificative pour 2021 : 15,5 milliards d'euros au service des travailleurs, des Français, pour mieux les protéger et les accompagner pendant la crise, un renouvellement pour la troisième année de la prime Macron en faveur du pouvoir d'achat, un plafond de cette prime que nous avons porté jusqu'à 2 000 euros pour les petites entreprises de moins de cinquante salariés mais aussi pour les plus grandes qui adopteraient des dispositifs de partage de la valeur, de participation-intéressement, justement pour les travailleurs de la première et de la deuxième lignes.

Pour que la sortie de crise soit un retour réel à l'activité et ne montre pas de nouvelles inégalités, ce seront 57 millions d'euros pour le renouvellement des dispositions en faveur des quartiers prioritaires de la politique de la ville, 150 millions d'euros pour les boursiers de l'enseignement supérieur.

Je continue. Le budget arrive, nous nous retrouverons en septembre. Ce sera un budget dédié à l'hébergement d'urgence, en augmentation pour financer 200 000 places d'hébergement jusqu'en mars 2022 ; un budget d'égalité femmes-hommes, sujet dont je sais qu'il vous préoccupe, qui connaîtra une hausse de 25 % en 2022 après la hausse de 40 % du budget 2021.

Et je continue : pour nos jeunes, le revenu d'engagement annoncé par la Président de la République aidera les jeunes sans emploi, sans formation.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.

Debut de section - Permalien
Olivia Gregoire, secrétaire d'État chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable

Et je continue : le pass'sport qui accordera une aide de 50 euros à 5,4 millions de jeunes de 6 à 18 ans. Et je continue : les mesures d'urgence en faveur des étudiants qui seront poursuivies, le soutien psychologique, bien sûr, mais aussi les aides d'urgence des centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (CROUS), le ticket universitaire à 1 euro pour les étudiants boursiers…

Bref, vous le constatez, vous dont je connais l'engagement dans la lutte contre les inégalités sociales, ce gouvernement fait beaucoup, notamment face à la crise.

Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.

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Jeudi dernier, la Cour de justice de l'Union européenne a estimé que les militaires étaient des « travailleurs » comme les autres et devaient donc appliquer la directive européenne sur le temps de travail.

Bien que je sois convaincu que l'avenir de la France passe aussi par l'Europe, je ne peux que constater qu'en méconnaissant la dure réalité de l'engagement militaire, certains technocrates européens ont touché à quelque chose qui les dépasse : la souveraineté de la France et nos forces armées.

Si nos soldats sont considérés parmi les meilleurs au monde, cela n'est pas dû au hasard, cela tient à la singularité du militaire français, à ce lien unique qui unit chaque combattant à notre nation et le pousse à se battre et à accepter pour elle, en tout lieu et en tout temps, des contraintes exorbitantes du droit commun, un lien sacré au nom duquel il est parfois conduit, dans le cadre légitime de sa mission, à retirer la vie d'un autre ou, dans l'accomplissement de son devoir, à donner sa vie pour la France.

C'est bien pour cela que nos soldats disposent d'un statut spécifique qui ne relève pas du code du travail mais bien du code de la défense. Nos militaires tirent leur force de leur singularité, alors mes chers collègues, protégeons la singularité du militaire français.

Madame la ministre, je connais votre détermination sur ce dossier. Comment comptez-vous éviter que cette directive européenne n'abîme l'efficacité de notre armée ?

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.

Debut de section - Permalien
Florence Parly, ministre des armées

Vous le savez, je suis farouchement pro-européenne et je suis une avocate engagée en faveur d'une Europe de la défense solide, mais la souveraineté française ne peut et ne doit pas se dissoudre dans l'Europe, elle doit au contraire en sortir plus forte.

Dans cet arrêt de la CJUE, qui portait sur un cas slovène, les juges découpent l'activité militaire en pièces détachées : il y aurait les militaires en opération et puis les autres. Mais découper ainsi l'action militaire en morceaux n'est conforme ni à l'histoire de nos armées ni à l'ambition que nous avons pour elles.

Cette décision méconnaît, vous le savez mieux que quiconque, la réalité du quotidien de nos militaires, la réalité de leur mission, celle d'être l'ultima ratio de notre pays, le dernier rempart de la nation.

La France est la première armée d'Europe. C'est une puissance nucléaire. C'est désormais le seul pays européen membre du Conseil de sécurité des Nations unies. Cela nous oblige et nous confère aussi une responsabilité éminente dans le concert international. Il nous faut donc pouvoir conserver toute notre agilité.

C'est pourquoi nous sommes en train d'analyser très précisément les conséquences de cet arrêt pour déterminer la meilleure réponse et, je le redis, s'il apparaît que la seule solution est de faire évoluer la directive, alors nous nous engagerons résolument dans cette voie afin de permettre aux États membres qui le souhaitent d'exempter totalement leurs forces armées de son application.

Il n'y aura donc pas en France une armée à deux vitesses. Je ne le souhaite pas, les militaires ne le souhaitent pas et les Français ne le souhaitent pas.

Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.

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Monsieur le Premier ministre, dimanche dernier, un consortium international de dix-sept médias nommé Forbidden Stories a révélé l'existence d'un vaste réseau d'espionnage mondial des téléphones portables nommé Pegasus.

Ce réseau, fondé sur un logiciel provenant de NSO, groupe privé très proche du gouvernement israélien, serait à l'origine de la surveillance massive de 50 000 personnalités politiques, journalistes, avocats, militants, citoyens et entreprises à travers le monde. En France, un millier de nos concitoyens seraient concernés.

Avec Pegasus, il ne s'agit pas d'une cyberattaque privée mais bien d'un acte d'agression d'État contre État. Le régime marocain aurait recouru à ce logiciel pour espionner des journalistes français comme le fondateur du site d'information Mediapart, Edwy Plenel, ou la journaliste grand reporter du quotidien L'Humanité, Rosa Moussaoui.

Le gouvernement français, pour l'heure, n'a fait connaître aucune réaction officielle, si ce n'est quelques propos évasifs de son porte-parole.

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Le porte-parole n'est jamais évasif, il est toujours explicite !

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Pourtant, c'est notre souveraineté et notre indépendance qui sont en cause.

Monsieur le Premier ministre, devant la représentation nationale, je souhaiterais des réponses claires aux questions suivantes. Étiez-vous au courant de ces faits graves avant les révélations de la presse ? Savez-vous, d'ailleurs, si certains d'entre nous, sur ces bancs, sont concernés par cet espionnage ?

Pouvez-vous affirmer devant l'ensemble des députés que l'État français n'a jamais recouru, directement ou indirectement, à ce logiciel espion extrêmement intrusif ou à l'un de ses équivalents pour surveiller des journalistes et des responsables politiques français ?

Quelles mesures comptez-vous prendre pour informer et protéger nos concitoyens visés par Pegasus ? Enfin, quelles sanctions allez-vous engager contre les pays qui ont utilisé ce logiciel contre nos concitoyens, notamment le Maroc mais aussi le gouvernement israélien ?

Applaudissements sur les bancs des groupes FI et GDR.

Debut de section - Permalien
Jean Castex, Premier ministre

Je vous ferai une réponse à la fois solennelle et très courte. Les faits que vous venez de rapporter, s'ils sont avérés, sont en effet d'une très grande gravité.

Debut de section - Permalien
Jean Castex, Premier ministre

Nous avons donc ordonné des investigations sur leur matérialité. Ces investigations n'ayant pas abouti, il ne m'est pas possible de m'exprimer à ce stade devant la représentation nationale et devant la nation.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.

Exclamations sur quelques bancs du groupe LaREM.

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Il y a dans notre groupe des députés qui croient en la recherche et en la science, qui considèrent que la vaccination est une des plus formidables avancées pour l'humanité

Applaudissements sur de nombreux bancs

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car elle a sauvé des centaines de millions de vies au cours de son histoire, des députés qui ne supportent plus la déchéance de rationalité alimentée par des complotistes cyniques manipulant les peurs.

Nous avons été horrifiés de voir samedi dans nos rues des pancartes parlant de « passe nazitaire » avec deux « s » écrits façon SS, de voir des étoiles jaunes portées avec écrit dessus « non vacciné ». Faut-il rappeler à ces imbéciles provocateurs que l'étoile jaune était le passeport pour l'extermination dans les chambres à gaz ? Il n'existe pas, hélas, de vaccin contre la bêtise humaine.

Tous les députés se lèvent et applaudissent.

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Je veux aussi adresser mon soutien aux collègues menacés de mort ces derniers jours. Je le redis, qu'une députée ,

« Elle est où ? » sur plusieurs bancs

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enfin non inscrite, appelle à envahir les permanences parlementaires était particulièrement inacceptable et irresponsable.

Applaudissements sur de nombreux bancs.

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Cependant, dans les manifestations de samedi, la très grande majorité des participants était composée d'hommes et de femmes modérés et pacifiques qui exprimaient sincèrement doutes, inquiétudes ou refus. Il faut absolument les entendre et, si possible, les convaincre.

La vaccination n'est pas qu'un acte individuel, c'est un geste de solidarité. La seule solution pour se libérer de ce maudit virus, c'est la vaccination, c'est l'immunité par le vaccin, non l'immunité façon Koh-Lanta pour uniquement se protéger soi-même mais l'immunité collective obtenue grâce à chacun d'entre nous.

Applaudissements sur de nombreux bancs.

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Pour cela, il faut convaincre et pas seulement contraindre. On ne peut pas seulement contraindre d'en haut, on doit aussi et surtout convaincre d'en bas, en s'appuyant davantage sur les élus locaux et les praticiens de terrain. Monsieur le Premier ministre, cet enjeu est aussi ma question : mieux convaincre pour moins contraindre.

Applaudissements sur les bancs des groupes LT, LaREM, Dem et Agis ens.

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La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

J'ai été, comme vous, particulièrement choqué des menaces proférées à l'encontre de plusieurs représentants de la nation, parfois jusque dans leur domicile. Ayant moi-même été député à des périodes de turbulences sociales et sociétales, je sais ce que c'est que de porter l'écharpe tricolore, d'avoir été légitimement élu par la volonté du peuple et d'être menacé dans l'exercice de son mandat. Je connais aussi le courage des membres de la représentation nationale, capables de porter haut leurs idées, quelles qu'elles soient, sans se laisser intimider.

C'est la raison pour laquelle j'aborde avec confiance le débat que nous allons poursuivre cet après-midi en commission des lois et ouvrir demain dans l'hémicycle sur le projet de loi relatif à la gestion de la crise sanitaire, un texte important.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM, Dem, LT et Agir ens.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

Revenons quelques instants sur l'histoire de la vaccination dans notre pays. C'est en 1902 que le vaccin contre la variole a été rendu obligatoire. Cette maladie était alors l'une des premières causes de la mortalité en France et dans le monde. Pierre Waldeck-Rousseau, connu pour ses phrases célèbres, a décidé de rendre obligatoire la vaccination contre cette maladie, décision qui a entraîné un mouvement social.

D'autres vaccins ont été rendus obligatoires au cours des décennies suivantes, en 1934, puis en 1940, au milieu des années 1960 et dans les années 1970 – je pense notamment au vaccin contre la poliomyélite. Dans tous les cas, la décision de rendre la vaccination obligatoire a entraîné des mouvements sociaux. Qu'ils soient de droite ou de gauche – Édith Cresson est, je crois, à l'origine d'un vaccin obligatoire –, les gouvernements et le Parlement ont-ils reculé ? jamais ! Quand il s'agit de protéger les Français, les parlementaires sont là !

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM, Dem, LT et Agir ens.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

Ils mettent de côté leur étiquette politique au nom de l'intérêt général. Ils ne sont pas toujours d'accord sur les solutions, et nous débattrons prochainement avec les députés de droite et de gauche de différents sujets sur lesquels nous avons des divergences. Mais il arrive aussi que des divergences apparaissent au sein de la majorité !

Sourires.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

À la fin des fins, je suis convaincu que nous parviendrons à un texte équilibré, qui permettra de donner confiance aux Français et les aidera à franchir le pas – un pas parfois très petit – de la vaccination, en prenant une décision courageuse pour se protéger eux-mêmes et pour protéger les autres. Face à l'individualisme, nous faisons le choix de la responsabilité collective !

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM, Dem, LT et Agir ens.

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Madame la ministre des armées, je veux à mon tour vous interroger sur l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne, qui suscite évidemment de nombreuses inquiétudes.

Les armées sont le domaine d'exercice de la souveraineté par excellence. Toutefois, les juges européens connaissent les contraintes propres à chaque État membre et ont limité l'application de leur décision aux tâches qui ne relèvent pas d'opérations extérieures ou de déploiements de crise. Les inquiétudes persistent cependant, notamment au sein de la gendarmerie.

En outre, si cet arrêt concerne la Slovénie, l'interprétation faite par la Cour s'impose aux juridictions de tous les États membres. Rappelons que le principe de primauté est au fondement de la réussite du projet européen et de l'application uniforme du droit qui le sous-tend.

Aussi la voie de crête semble-t-elle étroite pour concilier les impératifs liés à notre défense nationale et nos engagements européens, à l'heure où la France doit défendre ses intérêts sans toutefois rejoindre le camp des pays qui remettent en cause le rôle des juges et la hiérarchie des normes – ce qui constituerait une véritable bombe à fragmentation pour l'Union européenne.

Alors, madame la ministre, quelle voie la France compte-t-elle concrètement emprunter ?

Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.

Bis repetita madame la ministre des armées : vous avez la parole.

Debut de section - Permalien
Florence Parly, ministre des armées

Je vais me répéter et je vous prie de m'en excuser, mais je veux insister sur une dimension à laquelle je sais que vous êtes également attachée. En matière de construction européenne, nous voulons une Europe forte et efficace, mais une Europe qui respecte la compétence des États membres prévue par les traités en matière de défense. Je le redis donc avec gravité : la France n'entend pas déléguer sa compétence dans l'organisation des forces armées.

L'action militaire et collective ne représente pas la somme d'emplois du temps individuels. La fierté de nos militaires est d'accomplir la mission qui leur est confiée quelles que soient les circonstances et de faire primer ce principe sur toute autre considération. La responsabilité des chefs militaires est de veiller non seulement à la santé des militaires, mais aussi à leur moral, et d'y veiller de manière pragmatique.

Ne nous méprenons pas, les militaires ont de lourdes obligations, mais celles-ci font l'objet de compensations adaptées dans le cadre de leur statut général. Or cette organisation donne pleinement satisfaction et, je crois, fait l'admiration de tous.

La Cour de justice de l'Union européenne a joué son rôle et nous jouerons le nôtre. Dès lors que les conséquences de cet arrêt auront été analysées, nous prendrons les initiatives qui s'imposent. Nous n'hésiterons pas, je le redis, à faire évoluer le droit si nécessaire.

Vous disiez à l'instant que la voie est étroite. Elle existe cependant. Nous devons avec rigueur, sans nous dérober à nos responsabilités, assurer, en tout temps et en tout lieu, la sécurité des Français. S'il nous faut certes prendre acte des décisions de la Cour de justice de l'Union européenne, il nous faut aussi assumer la nécessité de faire évoluer le droit de l'Union quand cette évolution est nécessaire pour construire une Europe forte.

Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.

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Ma question s'adresse à M. le ministre des outre-mer.

Voilà maintenant près de dix ans que la Martinique et la Guadeloupe connaissent des échouements d'algues sargasses sur leur façade atlantique. Le phénomène s'amplifie chaque année, avec des conséquences sanitaires quotidiennes et insupportables, telles que des irritations cutanées, des inflammations des muqueuses, des nausées et des vomissements, des conséquences économiques négatives, notamment pour le tourisme et le nautisme – sachant que les dernières restrictions pour lutter contre la covid-19 aggravent ces difficultés –, des dégradations dues à la corrosion des biens, des tuyauteries, des matériaux et des circuits électroniques et électriques, des impacts sur la pêche, avec la formation de zones anoxiques causant la mort de nombreuses espèces de poissons, et enfin des coûts significatifs de traitement des algues pour les collectivités et l'État.

J'appelle votre attention quant au manque de données scientifiques approfondies sur les effets, pour le corps humain, d'une exposition prolongée aux sargasses en décomposition. À ce jour, malgré quelques aménagements et un « plan sargasses », les préconisations du Haut Conseil de la santé publique n'ont toujours pas été appliquées. Ces préconisations concernent le recensement des personnes à risque lors des échouages, l'enlèvement des algues échouées quotidiennement, au maximum dans les quarante-huit heures – tâche souvent effectuée par les communes –, le balisage des zones d'échouages et la collecte des algues en pleine mer, avec un ramassage côtier quotidien, enfin la formation des agents concernés et la prévention.

Monsieur le ministre, les parlementaires de la Martinique ont déjà appelé votre attention sur ce drame dans des courriers. Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour soutenir les communes touchées par ce phénomène ? Acceptera-t-il de les soutenir dans leur demande de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle ?

Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et GDR.

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La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du logement.

Debut de section - Permalien
Emmanuelle Wargon, ministre déléguée chargée du logement

La question des sargasses dans les territoires d'outre-mer, en particulier en Martinique, est en effet un problème sanitaire majeur et nuit également au tourisme. Pour lutter contre ce fléau, le Gouvernement a lancé en 2018 un premier plan de lutte contre les sargasses, qui a permis l'organisation de collectes au moyen d'engins de collecte, dans les quarante-huit heures après les échouages de sargasses, les algues collectées étant ensuite traitées.

Depuis 2018, 11 millions d'euros ont été consacrés par l'État aux équipements et aux opérations de collecte. Ce plan a également permis de créer un réseau de suivi et de prévision des échouements, et surtout rendu possible un effort important en matière de recherche et d'innovation avec l'Agence nationale de la recherche (ANR), à hauteur de 8,5 millions.

En 2019, une conférence internationale sur les sargasses s'est tenue sur notre territoire afin de privilégier la coopération internationale. Le Gouvernement et bien sûr le ministre des outre-mer sont prêts à préparer un deuxième « plan sargasses ». Celui-ci, qui devrait être publié d'ici à la fin de l'année 2021, permettra d'améliorer encore la collecte et le traitement des algues avant échouement, notamment grâce à des barrages proches des côtes, voire un broyage en mer. Ce plan permettra également de mieux utiliser les résultats des projets de recherche et d'innovation, de faire avancer la connaissance en matière de santé et de sécuriser les règles de financement de la solidarité nationale pour assurer des dispositifs pérennes. La concertation locale sur ce deuxième plan sera lancée dès la rentrée. C'est donc avec les élus locaux et les communes concernées qu'il sera élaboré.

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Monsieur le Premier ministre, du 12 au 16 juillet, de violents orages et des pluies diluviennes ont entraîné de graves crues en Allemagne, en Belgique et au Luxembourg. Cette catastrophe a fait plusieurs centaines de morts et nous voulons faire part à nos amis européens de notre compassion et de notre solidarité.

Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe LaREM.

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Les orages et les pluies ne connaissent évidemment pas les frontières. De nombreux départements de l'Est de la France ont connu aussi de très graves intempéries.

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Dans mon département, le Jura, c'est plus de 50 millimètres d'eau qui sont tombés en quelques heures. On a vu des maisons, des commerces et des entreprises complètement inondés et saccagés, ce qui a provoqué le désarroi de la population. Il a fallu évacuer en catastrophe les campings et les bases de loisirs. Des routes se sont affaissées. Les champs de céréales, dont la récolte avait à peine débuté, se sont retrouvés sous l'eau, au détriment des rendements et de la qualité.

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Dans les vignes, des parcelles entières ont glissé. C'est le cas, par exemple, dans la circonscription de ma collègue Danielle Brulebois, dans le vignoble de Château-Chalon, que nous avions d'ailleurs visité ensemble quelques jours avant la catastrophe.

Dans de pareilles circonstances, nous disons notre reconnaissance aux sapeurs-pompiers de notre pays pour leur dévouement extraordinaire et nous saluons notamment ceux du Jura, qui, entre autres prouesses, sont allés chercher des troupeaux encerclés par les eaux.

Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe LaREM. – M. Dominique Potier applaudit également.

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Nous exprimons aussi notre compassion à celles et ceux qui ont perdu tout ou partie de leur patrimoine, de leur outil de travail ou de leur revenu.

L'État doit être conscient de la gravité de la situation, reconnaître l'état de catastrophe naturelle et veiller à la totale mobilisation des compagnies d'assurance.

Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous assurer de la mobilisation pleine et entière de l'État pour venir en aide aux sinistrés ? Allez-vous prendre les mesures nécessaires pour que nos compatriotes durement touchés par cette catastrophe soient indemnisés pour leurs pertes ?

Applaudissements sur les bancs du groupe LR.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur

Soyez assuré, monsieur Sermier – je m'adresse également à Mme Brulebois, que vous avez citée –, que le Gouvernement est aux côtés des habitants, des exploitants agricoles, des services publics et des entreprises du Jura. J'ai une pensée pour les deux personnes légèrement blessées lors des inondations qui ont touché votre département et je salue à mon tour l'action des services de l'État, en particulier celle des 471 sapeurs-pompiers du Jura, mobilisés dans près de 1 250 interventions pour faire face aux inondations et aux dégâts causés par les abondantes précipitations – il est tombé, dans votre département, un mois de pluie en quelques heures.

Le 22 juillet prochain, c'est-à-dire en réalité dans quelques heures, nous recevrons, avec Barbara Pompili, ministre de la transition écologique, et Emmanuelle Wargon, ministre déléguée chargée du logement, la commission chargée d'établir l'état de catastrophe naturelle. Les préfets ont jusqu'au 21 juillet pour transmettre leurs premières demandes à la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises du ministère de l'intérieur. Si jamais des communes étaient oubliées, nous organiserions évidemment, je l'ai déjà dit, une commission de rattrapage.

S'agissant des exploitants agricoles touchés par des intempéries, vous le savez, Julien Denormandie, ministre de l'agriculture, porte une attention particulière à leur situation. Il se rendra dès demain dans l'Aisne rencontrer ceux qui ont subi il y a quinze jours de violents orages, au sujet desquels je me suis déjà exprimé dans cet hémicycle et que je rencontrerai également la semaine prochaine. Je ne doute pas que le ministre de l'agriculture portera une attention toute particulière aux agriculteurs du Jura et de l'Est de la France et qu'il leur apportera son entier soutien.

Enfin, dès lors que l'état de catastrophe naturelle aura été déclaré pour les communes du Jura touchées par les inondations, Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la relance, et moi-même engagerons une discussion avec la Fédération française de l'assurance afin que les habitants de votre circonscription bénéficient du régime assurantiel adapté.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.

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Monsieur le Premier ministre, la semaine dernière, des crues phénoménales ont ravagé le Nord de l'Europe, une centaine de personnes sont décédées et des milliers ont été évacuées. Chaque jour, désormais, apporte son lot de mauvaises nouvelles climatiques : températures historiquement douces au pôle Nord, qui fond à toute allure ; famine à Madagascar après trois années de sécheresse ; forêt amazonienne devenue émettrice de carbone ; le Canada assommé par des températures jamais enregistrées jusqu'à ce jour ; mais aussi l'Espagne, le Maroc, les États-Unis, où des centaines de citoyens se sont réfugiés dans des salles de refroidissement…

Que nous disaient les scientifiques du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) dès leur premier rapport en 1990 ? « L'effet de serre accentuera les deux extrêmes du cycle hydrologique, c'est-à-dire qu'il y aura plus d'épisodes de pluies extrêmement abondantes et plus de sécheresses prononcées. »

Nous y sommes, et la France ne sera pas épargnée. Un gel d'avril après un mars trop chaud, dévastateur pour les récoltes et suivi des inondations de juillet : nous sommes vite passés de prévisions effrayantes à une réalité effrayante. Chers collègues, ce sujet, plus que tout autre, devrait nous tenir éveillés la nuit.

Et nous, que faisons-nous face à cela ? Nous étions plusieurs à défendre ici des mesures fortes et de bon sens sur la publicité, les avions ou l'agriculture. Qu'avons-nous entendu ? « Écologie punitive ! », « Déraisonnable ! », « Amish ! »…

De quel côté sont les punitions, quand nous commençons seulement à compter les morts ? De quel côté est le dogmatisme

Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et FI. – Mme Delphine Batho, Mme Yolaine de Courson et M. Hubert Julien-Laferrière applaudissent également

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quand votre gouvernement reste sourd aux constats scientifiques sans appel et aux alertes du Haut Conseil pour le climat (HCC), que vous avez vous-mêmes installé ?

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Vous étiez « En marche ! » aussi, avant !

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De quel côté est la déraison quand nous continuons, face au gouffre, à produire et à consommer toujours davantage – toujours plus d'énergie, toujours plus de matière –, accros à la croissance comme un toxicomane persuadé que rien ne peut remplacer sa drogue ?

Applaudissements sur les bancs du groupe FI. – Mme Delphine Batho et M. Hubert Julien-Laferrière applaudissent également.

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La loi qui sera adoptée tout à l'heure n'est qu'un catalogue d'ajustements, qui contient si peu pour réduire les émissions et presque rien pour répondre aux bouleversements en cours. Quand réaliserez-vous enfin que le monde à construire n'est pas une simple adaptation de l'actuel, mais doit procéder d'un changement radical ?

Mêmes mouvements.

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La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du logement.

Debut de section - Permalien
Emmanuelle Wargon, ministre déléguée chargée du logement

Oui, la transition écologique est nécessaire et oui, l'urgence climatique est là. Mais quel pays, en dehors de la France, a mis 30 milliards d'euros dans son plan de relance pour la transformation écologique …

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM

Debut de section - Permalien
Plusieurs députés du groupe LaREM

Eh oui !

Debut de section - Permalien
Emmanuelle Wargon, ministre déléguée chargée du logement

…en finançant des investissements lourds en matière d'énergie, d'agriculture et de rénovation énergétique des bâtiments ? Rien que cette année, 800 000 dossiers MaPrimeRénov' vont être déposés par nos concitoyens ! C'est très concret, nous agissons ! Quel pays a travaillé, à partir d'une convention citoyenne pour le climat, à l'instauration de mesures concrètes, inscrites dans la loi « climat et résilience » ? Celle-ci a donné lieu à un accord entre les députés et les sénateurs, accord examiné en ce moment même au Sénat !

Les mesures prises sont très concrètes : en matière de lutte contre l'artificialisation des sols, toujours demandée mais jamais réalisée, un objectif a enfin été fixé pour 2050 ; s'y ajoutent des mesures diverses relatives aux repas végétariens, aux transports et aux zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m).

Nous agissons aussi dans le monde : quel autre pays a soutenu une diplomatie climatique telle que celle défendue par le Président de la République, dans le cadre de la COP – la conférence des parties, dont la vingt-sixième édition va avoir lieu à Glasgow – ou des One Planet Summits ? Quel autre pays s'est engagé dans l'Union européenne pour défendre le paquet énergie-climat, qui vise à réduire de 55 % les émissions de gaz à effet de serre ? La présidence française nous permettra de faire aboutir ce paquet législatif ; elle montrera notre détermination et celle des autres États membres à prendre à bras-le-corps le changement climatique.

Alors oui, les inondations sont là ; oui, elles nous rappellent l'urgence qu'il y a à agir, et oui, le climat se dérègle. Mais nous ne sommes pas simplement spectateurs : nous agissons.

Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Monsieur le ministre, vous annonciez ce week-end la fin de l'élimination des poussins mâles en France dès 2022.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ainsi, au 1er janvier 2022, tous les couvoirs devront avoir installé ou commandé des machines de sexage in ovo permettant de développer des solutions permettant de mettre fin à l'élimination des poussins, car celle-ci s'effectue par des méthodes qui doivent être bannies.

La filière est d'ores et déjà pleinement engagée dans la démarche d'innovation nécessaire à l'installation de telles machines. C'est d'ailleurs sur cette base que vous avez mené avec elle une concertation visant à valoriser les méthodes employées.

Cependant, si vous avez en effet prévu un plan de relance et si les innovations existent, celles-ci se font au prix d'un coût important pour les opérateurs et les producteurs. Depuis le début de notre mandat, tout d'abord avec la loi EGALIM – pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous –, puis très récemment encore avec la proposition de loi de mon collègue Grégory Besson-Moreau visant à protéger la rémunération des agriculteurs, nous avons souhaité améliorer le revenu de nos producteurs, et plus largement assurer une juste rémunération des opérateurs de l'ensemble de la filière.

Si nous devons évidemment promouvoir de meilleures pratiques en matière de bien-être animal, nous devons aussi assurer à la filière concernée que ces évolutions, aussi légitimes soient-elles, ne se fassent pas au détriment des revenus des opérateurs.

Aussi, monsieur le ministre, pourriez-vous nous préciser quels accompagnements seront mis en place pour que les revenus des producteurs et des opérateurs, déjà lourdement affectés par l'influenza aviaire et par la fermeture des restaurants au cours des derniers mois, ainsi que par l'exigence de mise aux normes, ne soient pas à nouveau touchés par une hausse de leurs coûts de production ? Celle-ci devient intolérable.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

Debut de section - Permalien
Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation

Comme vous l'avez dit, depuis de nombreuses années, la société demande qu'il soit mis fin à cette pratique consistant à éliminer les poussins mâles à leur naissance, soit en les broyant, soit en les gazant. Pourquoi n'étions-nous pas parvenus, jusqu'à présent, à abandonner cette technique ? Tout simplement parce qu'il fallait définir des techniques de remplacement, consistant notamment à identifier dans l'œuf le sexe du futur poussin. En collaboration avec un consortium allemand, nous avons mis deux ans à développer cette méthode. C'est donc avec beaucoup de conviction et de fierté que je vous l'annonce : la France sera, avec l'Allemagne, le premier pays au monde

Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur plusieurs bancs du groupe Dem

Debut de section - Permalien
Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation

à mettre fin au broyage et au gazage des poussins ; l'année 2022 sera donc celle où s'arrête l'élimination des poussins mâles.

Comment allons-nous réussir cela ? De trois manières. Nous avons d'abord élaboré la technique ; ensuite, je vais prendre un texte réglementaire qui imposera, au 1er janvier 2022, d'avoir installé ou au moins commandé les machines permettant de détecter le sexe dans l'œuf, donc d'utiliser une autre technique que celle du broyage ; enfin, nous allons accompagner financièrement la filière – ce sont plus de 10 millions d'euros que l'État, dans le cadre du plan de relance, mettra sur la table pour ce faire. Je voudrais vraiment féliciter la filière qui a consenti des investissements importants ; il faut mettre ces évolutions à son crédit pour montrer à quel point elle veut avancer sur le sujet. À la fin, il faudra que l'ensemble de la filière, y compris le consommateur, accepte de financer ces nouvelles techniques.

Enfin, il faut maintenant que nous portions le sujet au niveau européen. C'est ce que j'ai fait dès hier à Bruxelles et j'appelle l'ensemble des pays européens à se joindre à la France et à mettre fin au broyage et au gazage des poussins mâles.

Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation. Madame la ministre, le 8 juillet, le Conseil d'État a annulé une partie de l'arrêté fixant le nombre d'étudiants de première année commune aux études de santé (PACES) autorisés à poursuivre leurs études dans ce secteur à la rentrée universitaire 2021-2022. Je vous avais interrogée le 15 juin sur les ratés de la réforme des études de santé, ayant notamment pour objet de remplacer la fameuse PACES par le PASS – parcours d'accès spécifique santé – et la LAS – licence accès santé.

Après la suspension d'un premier arrêté par le juge des référés du Conseil d'État, vous avez à nouveau fixé, le 5 mai dernier, le nombre d'étudiants de PACES autorisés à passer en deuxième année à la rentrée universitaire 2021. Vous nous aviez annoncé que la répartition entre le PASS et la LAS ne léserait personne, et vous aviez assuré que le Gouvernement tiendrait ses engagements. Or le Conseil d'État a constaté que quinze universités n'ont pas créé suffisamment de places en deuxième année pour assurer que la réforme ne se fasse pas au détriment des PASS et des LAS.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

En conséquence, les universités visées vont devoir augmenter de 20 % leurs capacités d'accueil en faveur des actuels étudiants inscrits dans ces formations.

Madame la ministre, vous engagez-vous, cette fois, à ce que les universités concernées soient en mesure d'ouvrir des places supplémentaires pour accueillir à la rentrée des étudiants qui se sentent lésés par la réforme des études de santé ?

Applaudissements sur les bancs du groupe LR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.

Debut de section - Permalien
Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Tout d'abord, je souhaite féliciter les 16 750 jeunes qui ont été admis en deuxième année d'études de santé ; ils sont 2 753 de plus que l'année dernière, et je crois que les jeunes qui s'engagent dans ces métiers difficiles auront besoin de toute notre considération.

Vous mentionnez la décision du Conseil d'État, mais que dit-elle ? D'abord, que les critères utilisés pour calculer les capacités d'accueil pendant cette année de transition sont corrects ; ils se trouvent donc confortés. Le Conseil d'État ne remet pas non plus en cause les décisions d'admission en deuxième année déjà notifiées aux étudiants. Il constate que les places offertes en deuxième année ont été accrues, en moyenne, au niveau souhaité par le projet de loi relatif à l'organisation et à la transformation du système de santé, et que certaines universités ont fait l'effort de consentir à une augmentation allant jusqu'à 30 % du nombre de places, tandis que d'autres ne l'ont pas fait.

Pour accompagner ces établissements,…

Debut de section - Permalien
Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

…nous allons, avec le ministre des solidarités et de la santé, continuer à financer de nouvelles places en deuxième année, et nous allons surtout faire en sorte – c'était l'objet de la réforme – que des maîtres de stage soient présents partout sur le territoire, de manière à lutter réellement contre les déserts médicaux qui, vous le savez, ne sont pas uniquement dus au manque de places, auquel nous avons remédié ; ils sont aussi liés à la localisation des lieux de stages et à la capacité à accueillir des internes dans l'ensemble des territoires.

Le Gouvernement ne peut donc que se réjouir de voir le nombre d'étudiants admis en deuxième année d'études de santé dépasser les prévisions.

Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame la ministre, pensez-vous que vous pourrez appliquer sans tarder la décision du Conseil d'État et augmenter le nombre de places dans les quinze facultés visées par sa décision ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C'est exactement ça, la question ! Et il y a urgence !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C'est la question que se posent les étudiants des cursus concernés.

Debut de section - Permalien
Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Monsieur le député, je pense que j'ai été très claire.

Protestations sur les bancs du groupe LR.

Debut de section - Permalien
Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Le Gouvernement va accompagner les établissements qui sont en train de voter une augmentation de leur capacité d'accueil, comme le souhaite le Conseil d'État – ils n'ont pas le choix, c'est effectivement une obligation. Par exemple, à Tours, on vient de voter une augmentation de la capacité d'accueil de 86 places, dont 58 en médecine, et il en sera ainsi partout.

Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame la ministre déléguée, le soutien au redressement du fret ferroviaire semble – je dis bien : « semble » – être une préoccupation enfin partagée. La loi de finances pour 2021 contient de premières mesures qui ont été consolidées par des engagements du plan de relance arrivant à échéance en 2023.

Ainsi, on peut apprendre, ici et là, que les quatre principaux triages sur le sol national – Woippy, Le Bourget, Miramas et Sibelin – disposeront d'une enveloppe de 8 millions d'euros cette année. Mais, compte tenu de l'objectif de doublement de la part du ferroviaire dans le fret national d'ici 2030, c'est bien à cet horizon qu'il convient d'avoir une visibilité, pour développer ce qu'il faut appeler un véritable plan de reconquête du fret ferroviaire.

Prévue par la loi d'orientation des mobilités (LOM), cette stratégie devait être soumise au Parlement au plus tard au début de l'année 2021. Or nous n'avons toujours pas connaissance de ces orientations, des grandes enveloppes financières qu'elles impliqueraient, de la nature des infrastructures ciblées et territorialisées qu'il faudrait mettre à niveau ou créer. Lignes capillaires et voies de service, triages, installations terminales embranchées, terminaux combinés rail-route : vous comprendrez que les parlementaires attendent avec impatience de pouvoir disposer d'un rapport précis engageant cette politique publique, mais aussi l'avenir de nos régions, métropoles, ports et jusqu'aux portes de nos villes moyennes et de nos bassins agricoles. Alors, madame la ministre déléguée, quand auront lieu cette présentation et ce débat ?

Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SOC.

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La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du logement.

Debut de section - Permalien
Emmanuelle Wargon, ministre déléguée chargée du logement

Vous avez raison, monsieur le député, le fret ferroviaire est un mode de transport absolument essentiel pour répondre à deux défis qui se dressent devant nous, à savoir d'une part le verdissement du transport de marchandises, d'autre part le maintien d'une chaîne logistique partout sur notre territoire.

À notre arrivée en 2017, nous avons trouvé un réseau vieillissant, peu développé – la part modale du fret ferroviaire s'élève à 9 % seulement en France, contre 30 % dans certains pays situés plus à l'est en Europe. Mal connecté au réseau fluvial et à nos grands ports – que vous connaissez bien –, il subit une concurrence forte de la route.

Le Gouvernement a pris le sujet à bras-le-corps et s'est doté des moyens de ses ambitions : 3 milliards d'euros seront consacrés chaque année à la régénération du réseau, c'est-à-dire deux fois plus qu'il y a dix ans.

Le fret ferroviaire est aussi au cœur du plan de relance : 250 millions d'euros sont prévus pour réaliser au total un milliard d'investissements d'ici à 2024, et trois nouvelles autoroutes de fret ferroviaire, l'une allant de Calais à Sète, la deuxième reliant Barcelone, Perpignan, Rungis et Dunkerque, et la dernière Cherbourg et Bayonne.

La stratégie sur le fret ferroviaire, prévue par la loi d'orientation des mobilités (LOM), sera bien présentée au Parlement d'ici à la fin de l'été. Elle permettra de définir une feuille de route stratégique pour les prochaines années et répondra précisément à l'objectif, fixé dans le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, de doublement de la part du fret d'ici à 2030. Le Parlement sera donc saisi, conformément à ce qui était prévu après l'adoption de la LOM.

Enfin, la présidence française du Conseil de l'Union européenne offrira une opportunité inédite d'impulser une dynamique à l'échelle européenne, en continuité avec l'année du rail, afin que cette reconquête du fret ait lieu en France et partout en Europe.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ma question relative aux paris sportifs s'adresse à Mme la secrétaire d'État chargée de la jeunesse et de l'engagement. J'y associe Cécile Rilhac, députée du Val-d'Oise, qui a effectué un travail d'alerte sur le sujet, ainsi que les membres des groupes d'étude sur le sport et l'économie du sport de notre assemblée.

L'Euro 2020 de football a mis en lumière un phénomène qui se développe depuis plusieurs années et qui me préoccupe beaucoup : les paris sportifs à destination des jeunes. Plusieurs plateformes de paris en ligne visent directement notre jeunesse par le biais de campagnes de publicité en faveur du jeu, sous-entendant qu'il contribue à la réussite sociale.

Ces campagnes attirent les jeunes en mettant en scène des personnes publiques influentes et des gens qui se seraient sortis de difficultés grâce au jeu. Quelque 2,5 millions de Français sont considérés comme des joueurs. En 2011, les 18-24 ans représentaient 17 % des joueurs ; dix ans plus tard, ce pourcentage a doublé.

S'agissant des jeux d'argent en général, Santé publique France relève que 300 000 Français souffrent d'un risque modéré ou excessif d'addiction, que les jeunes sont six fois plus susceptibles de développer une addiction, que 40 % du chiffre d'affaires des opérateurs de jeux provient de personnes aux pratiques excessives. Au vu de ces données, je ne crois pas que l'on devienne « riche sur un coup de tête », que l'on obtienne un « gros respect » ou que l'on « dépoussière son compte en banque » quand on est endetté comme 70 % des joueurs.

Le code de la sécurité intérieure prévoit pourtant que les mineurs, même émancipés, ne peuvent prendre part à des jeux d'argent et de hasard dont l'offre publique est autorisée par la loi. Un décret du 4 novembre 2020 précise que « sont interdites les publicités qui banalisent le jeu, qui indiquent que le jeu valorise la réussite sociale, ou qu'en jouant, on peut gagner sa vie. » Ces dispositions n'ont, semble-t-il, donné lieu à aucune enquête ou poursuite.

Je sais, madame la secrétaire d'État, que vous partagez notre attachement à protéger notre jeunesse. Comment comptez-vous mieux encadrer la promotion de ces plateformes de paris afin d'éviter les dérives actuelles ?

Nombreux applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.

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La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la jeunesse et de l'engagement.

Debut de section - Permalien
Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et de l'engagement

Votre question, monsieur le député Roussel, me permet de dire à quel point le Gouvernement est attaché à la protection de nos jeunes, à chaque moment de leur vie, et de rappeler à la représentation nationale les travaux entrepris.

Comme vous l'avez justement souligné, l'Euro 2020 de football a été une sorte d'accélérateur de campagnes de communication des plateformes en faveur des paris sportifs. Nous nous en sommes alarmés pour plusieurs raisons : 75 % des parieurs avaient moins de 34 ans ; plus de 435 millions d'euros ont été misés auprès des opérateurs de jeu français durant cette période ; c'est la compétition qui a suscité le plus de trafic depuis l'autorisation des paris en ligne.

Ce matin encore, je recevais la présidente de l'Autorité nationale des jeux (ANJ), que j'avais alertée dès le 9 juillet dernier, afin de faire en sorte que les deux échéances sportives qui vous tiennent à cœur – les Jeux olympiques de 2021 et la Coupe du monde de football de 2022 – se passent dans les meilleures conditions.

Dès cet après-midi, la présidente de l'ANJ va recevoir tous les opérateurs, afin de leur rappeler leurs obligations et leurs engagements. Je le dis avec une grande fermeté, des sanctions seront prises en cas de non-respect de ces engagements. Ces consultations visent à faire revenir les opérateurs dans le giron du décret du 4 novembre dernier, que vous avez cité, sans exclure des évolutions inspirées des modèles anglais ou espagnol – je pense à la réduction des volumes et des horaires de diffusion de ce type de publicité.

Notre prochaine étape sera de recevoir l'Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP) et de nous assurer que l'encadrement soit suffisamment ferme pour que ces paris ne nuisent pas à notre jeunesse. Monsieur le député, soyez sûr que notre priorité est de protéger notre jeunesse, de favoriser son éducation et son accompagnement.

Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe Dem.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre. Cinquante degrés au Canada et au Maroc, inondations dévastatrices en Allemagne et en Belgique, sécheresse et famine à Madagascar : ces phénomènes météorologiques extrêmes se multiplient, coûtant la vie aux hommes et femmes des territoires touchés.

Face à ces épisodes, des phénomènes profonds de destruction de notre environnement sont en cours : fonte des glaciers, hausse du niveau des océans, destruction de la biodiversité et des écosystèmes, crises sanitaires, sans parler des dangers qui pourraient menacer le vivant en raison de la fonte du permafrost. Comme le rappelle Jean Jouzel, la hausse d'au moins un degré des températures est déjà irréversible.

Notre rôle est maintenant double. Il faut d'abord limiter le réchauffement de la planète et donc l'impact humain. La loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets aurait pu et dû être à la hauteur. Or le texte, tel qu'issu de la commission mixte paritaire, tire un trait sur les propositions ambitieuses de la Convention citoyenne pour le climat (CCC) et ne répond pas aux attentes de nos concitoyens.

Il faut ensuite nous adapter à ces changements et protéger les plus exposés. Pour cela, toutes les mesures à prendre doivent être écologiques et sociales. Sur ce point, le texte issu de la commission mixte paritaire est très insuffisant. Les débats ont dissocié la lutte contre le changement climatique de la prise en compte de la réalité sociale, c'est-à-dire la fin du monde de la fin du mois. En acceptant cette dichotomie, vous avez renoncé à répondre aux deux.

Pour lutter contre le réchauffement climatique, une seule solution : un changement de notre modèle de développement, traduit dans de profondes réformes économiques et sociales, allant vers une société plus sobre, protégeant les plus fragiles et où ne coexistent plus ceux qui font du tourisme spatial et ceux qui souffrent encore de faim.

Quand prendrez-vous en compte les préconisations du GIEC, du Haut Conseil pour le climat et des autres organismes qui ne cessent de nous alerter sur les catastrophes à venir ?

Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du logement.

Debut de section - Permalien
Emmanuelle Wargon, ministre déléguée chargée du logement

Les débats qui ont eu lieu à la suite de la Convention citoyenne pour le climat dans le cadre de l'examen de la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets ont précisément eu comme objectif de ne pas opposer l'écologie et le social, la fin du monde et la fin du mois.

Nous avons essayé de trouver la juste mesure entre la nécessaire transformation de notre modèle économique – de production et de consommation – et l'accompagnement des ménages. Jusqu'où aller dans les interdictions ? Jusqu'à quel point devons-nous ou pouvons-nous interdire sans accompagner ? Nous avons choisi d'accompagner d'abord et toujours, et de n'interdire qu'une fois les solutions trouvées.

C'est ainsi que nous avons trouvé des compromis qui, je le crois, nous honorent. En matière de rénovation thermique, nous avons choisi d'interdire la mise en location de certains logements, mais pas d'obliger tous les propriétaires concernés à faire des travaux. En ce qui concerne les ZFE-m, nous avons décidé d'avancer de façon volontaire, mais en permettant le changement de véhicule grâce à la prime à la conversion. Pour les menus végétariens, nous avons opté pour la possibilité de généraliser en offrant une solution de remplacement, ce qui permet de changer des habitudes alimentaires. Pour que le changement de modèle ait lieu, il ne s'agit pas de le décréter, mais d'accompagner les Français au quotidien dans cette direction.

Nous n'avons pas beaucoup parlé du nécessaire travail d'adaptation au changement climatique qui, malheureusement, est déjà là. Cette loi comprend des mesures d'adaptation que nous allons appliquer sans tarder pour faire face aux inondations. À cet égard, je voudrais aussi m'associer à la douleur des familles des victimes, notamment des victimes européennes.

Exclamations sur les bancs du groupe FI.

Debut de section - Permalien
Emmanuelle Wargon, ministre déléguée chargée du logement

Citons ces mesures d'adaptation : les programmes d'actions de prévention des inondations (PAPI) ; la capacité à prévoir de Météo-France ; la sensibilisation aux comportements à adopter face à ces difficultés. Nous agissons concrètement et c'est ainsi que nous saurons concilier l'écologie et le social.

Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Depuis des mois, La France insoumise se bagarre pour qu'il y ait des licences libres sur les vaccins. Depuis des mois, nous réclamons un plan d'urgence à destination des hôpitaux. Depuis des mois, nous réclamons l'installation de purificateurs d'air dans les lieux publics et la mise en œuvre d'une société par roulement pour lisser l'effort collectif. Depuis le mois de mai, nous alertons sur l'imminence d'une quatrième vague. Qu'avez-vous fait ? Quasiment rien.

Protestations sur les bancs du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

En décembre, le président Macron assurait que le vaccin ne serait pas obligatoire.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

En avril, il déclarait : « Le passe sanitaire ne sera jamais un droit d'accès qui différencie les Français. »

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, vous affirmiez à votre tour : « La vaccination contre le coronavirus ne sera pas obligatoire ni pour prendre un transport en commun ni pour entrer dans un restaurant. » Parlant du passe sanitaire, Mme Braun-Pivet renchérissait : « J'ai tenu à inscrire noir sur blanc dans la loi qu'un restaurant, un cinéma ou un théâtre ne pourrait pas l'exiger. C'est une question de libertés publiques. »

Pourtant, il y a dix jours, le président Macron, dans l'obscurité des débats du conseil de défense sanitaire, reniait toutes ses promesses. Cette succession de semi-vérités et de mensonges éhontés ne peut que jeter le trouble et susciter une légitime inquiétude dans l'opinion publique.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Comment comprendre, en effet, que l'on rende la vaccination obligatoire pour les soignants et les pompiers, mais pas pour les policiers ? Comment comprendre que l'on puisse prendre un RER bondé pour aller travailler, mais pas le train pour profiter de ses congés ? Voilà quelques-unes de vos contradictions, parmi tant d'autres, sans réponse convaincante.

Votre politique sanitaire est d'ailleurs un véritable échec. La France est le dernier pays de l'Europe de l'Ouest pour la couverture vaccinale des personnes à risque. Comment appliquer votre projet de loi qui, après la concurrence de tous contre tous, organise la terrible surveillance de tous par chacun ?

Monsieur le ministre, au-delà de votre politique vaccinale, plus qu'arbitraire, quelle est votre stratégie sanitaire globale pour notre pays ?

Applaudissements sur les bancs du groupe FI.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

Madame la députée Sabine Rubin, une chose ne vous arrivera jamais : vous contredire. Il n'y a aucun risque que vous vous contredisiez, puisque tout ce qui ne vient pas de vous est forcément un échec.

Protestations sur les bancs du groupe FI.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

Vous nous reprochez de nous contredire, mais vous n'étiez pas d'accord avec nous avant, et vous ne l'êtes pas davantage après. N'y voyez-vous pas un paradoxe ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Admettre que vous vous êtes trompé, c'est si compliqué ?

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

Croyez-vous que c'est avec des paradoxes que l'on déploie une politique vaccinale et des soins hospitaliers, que l'on protège les Français ?

Exclamations sur les bancs du groupe FI.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

Nous prenons des décisions qui ne font pas toujours plaisir, même à nous-mêmes. C'est aussi cela prendre ses responsabilités et agir pour protéger les Français : prendre les décisions qui vous semblent les plus justes au moment où vous les prenez et les assumer.

Mêmes mouvements.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

Vous et les membres du groupe La France insoumise avez été invités plusieurs fois à la table du Premier ministre pour faire des propositions.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

Vous avez été consultés à l'écrit et à l'oral. Chaise vide, papier vide.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

En revanche, vous êtes extrêmement prompts à venir nous expliquer que rien ne fonctionnera. Le pays n'a pas besoin d'une méthode « anti-Coué », il n'a pas besoin qu'on lui dise que rien ne fonctionnera et qu'il est mal gouverné.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

Depuis un an et demi, le pays est courageux, résilient, fort, solidaire.

Protestations sur les bancs du groupe FI.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

Il attend de sa représentation nationale qu'elle soit à la hauteur de ses responsabilités. Dans sa quasi-totalité, elle l'est et le sera encore cette semaine. Madame la députée, il n'est jamais trop tard pour changer.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

Pour une fois, il serait bon que vous vous contredisiez.

Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe Dem.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous n'avez pas répondu à ma question sur la vaccination des plus fragiles. Qu'allez-vous faire pour revenir au rang qui convient ?

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

Je peux répondre, monsieur le président ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Sans préjuger du prochain vote de l'Assemblée nationale, je souhaite ici soulever l'une des difficultés liées au passe sanitaire : comment prendre en compte les contre-indications vaccinales formulées par les médecins à l'égard de certains de leurs patients ?

Depuis les annonces du Président de la République, certains médecins et conseils départementaux de l'Ordre des médecins font part de leur inquiétude. Alors que pour les vaccins obligatoires traditionnels ou les nouvelles obligations vaccinales professionnelles, les certificats médicaux de contre-indication vaccinale priment sur les impératifs administratifs – lors de l'entrée d'un enfant à l'école, par exemple –, rien de tel ne semble prévu pour le passe sanitaire.

Nos médecins participent pleinement à la vaccination de nos concitoyens, et les médecins de famille sont ceux qui connaissent le mieux l'état de santé de leurs patients. Or, dans certaines situations, selon les pathologies dont souffrent les uns ou les autres, la vaccination peut ne pas être souhaitable, car le risque pourrait être au moins équivalent à celui que fait courir la covid. Quid des femmes enceintes auxquelles le vaccin pourrait être déconseillé ?

Aussi, c'est avec discernement et en responsabilité que nos médecins peuvent choisir de ne pas vacciner certains patients. Ces derniers pourront-ils tout de même valider leur passe sanitaire ? La contre-indication médicale suffira-t-elle pour cela ?

Enfin, j'appelle votre attention sur les difficultés que pourront rencontrer un grand nombre de personnes pour obtenir le passe ou un duplicata. Qu'avez-vous prévu pour celles et ceux qui ne disposent pas de smartphone, qui n'ont pas internet, qui sont désarçonnés par l'administration numérique, et pour les personnes isolées, âgées ou souffrant de handicap ?

Monsieur le ministre, alors que les tensions sont fortes et que notre société a fondamentalement besoin d'être apaisée, pouvez-vous, sur ces points précis tout du moins, rassurer les patients et leurs médecins, rassurer nos concitoyens ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

Je veux apporter une réponse précise à la question importante que vous venez de poser. J'ai saisi à nouveau l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, le Conseil d'orientation de la stratégie vaccinale que préside Alain Fischer, et le Conseil scientifique pour faire la part des choses entre ce qui, comme vous l'avez exprimé à juste titre, serait déconseillé par des médecins, et ce qui relève réellement de contre-indications au vaccin à ARN messager.

Je vous invite à bien écouter la liste que je vais vous donner. Elle est consignée par écrit, elle est validée, et elle fera office de loi dans la perspective de la vaccination. Avec le recul dont nous disposons depuis maintenant des mois, pour des dizaines de millions de personnes vaccinées en France et des milliards de vaccinés sur terre, les seules contre-indications au vaccin à ARN messager sont : ce qu'on appelle le syndrome PIMS – inflammatoire multisystémique pédiatrique – qui parlera aux connaisseurs, syndrome extrêmement rare qui a pu toucher des enfants ; les réactions de type myocardite, péricardite et hépatite sévère ayant nécessité une hospitalisation et faisant suite à une première injection de vaccin à ARN messager ; l'allergie à ce qu'on appelle le PEG 2000 – cela ne vous parlera sans doute pas, mais il s'agit d'une allergie à une structure de type polyéthylène glycol spécifique que l'on trouve dans le vaccin, qui doit concerner à peu près dix personnes dans notre pays.

Vous l'aurez compris, en dehors de ces situations qui concernent donc potentiellement quelques centaines de Français, il n'y a aucune contre-indication au vaccin à ARN messager.

Mme Maud Petit applaudit.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

Ni la grossesse lors du premier semestre, ni la grossesse lors du dernier trimestre, ni les antécédents d'allergie à un antibiotique ou à une piqûre d'abeille ne constituent des contre-indications. Chaque personne peut être orientée vers son médecin généraliste, qui peut ensuite orienter vers un allergologue lorsqu'il y a des antécédents allergiques, avec des procédures particulières. Personne ne doit être contre-indiqué à la vaccination en dehors des motifs que j'ai cités.

C'est sur cette base que des certificats médicaux en bonne et due forme peuvent être reconnus comme établissant des contre-indications, et non pas sur un simple avis médical ou pharmaceutique sur le fondement d'antécédents allergiques ou autres – le professeur Fischer a confirmé que le vaccin n'était pas contre-indiqué durant le premier trimestre de grossesse. Je me répète parce que tout cela est très important.

Enfin si vous avez été testé positif au covid il a plus de onze jours et moins de six mois, vous ne pouvez pas être vacciné, vous obtenez donc une équivalence de passe sanitaire, et si vous n'avez pas internet, vous vous rendrez chez votre pharmacien qui vous l'imprimera.

Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.

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Avant de lui donner la parole pour sa dernière question au Gouvernement, je tiens à saluer les dix-neuf années de mandat de député effectuées par M. Martial Saddier.

Applaudissements sur tous les bancs.

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Élu président du conseil départemental de la Haute-Savoie le 1er juillet dernier, il s'apprête à quitter l'Assemblée nationale, et je lui adresse tous nos vœux de succès dans ses nouvelles fonctions.

Mêmes mouvements.

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Le 19 juin 2002, les électeurs de la troisième circonscription de la Haute-Savoie m'avaient fait l'honneur de m'élire député. J'ai ainsi succédé à M. Michel Meylan, député-maire de Bonneville, qui restera pour moi la commune où tout a commencé.

Parmi les plus jeunes députés de l'hémicycle – à l'époque

Sourires

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–, c'est avec une immense fierté que j'ai exercé, durant près de vingt ans, le mandat de député de la République. À quatre reprises, la Haute-Savoie m'a élu dans deux circonscriptions différentes, suite au redécoupage de 2012. J'ai ainsi travaillé avec tous, dans la majorité comme dans l'opposition.

Durant ces vingt années, j'ai défendu l'industrie et l'écologie. Je reste persuadé que l'on peut être à la fois le député du Mont-Blanc et celui de l'industrie du décolletage ; que l'on peut à la fois défendre la protection et le développement de nos magnifiques montagnes ; que l'on peut être le député qui promeut l'abaissement des délais de paiement dans l'industrie et celui qui défend l'agriculture biologique, les abeilles, la qualité de l'air et celle de l'eau, tout en étant l'un des deux rapporteurs de la Charte de l'environnement.

Applaudissements sur les bancs des groupes LR, Dem et Agir ens.

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Merci à toutes et à tous, aux différents présidents de l'Assemblée nationale, dont vous, monsieur le président, et également à Bernard Accoyer, un Haut-Savoyard, aux Premiers ministres, ministres et collègues députés – plus particulièrement aux députés de Haute-Savoie et aussi à ceux de ma famille politique, la même depuis 2002, car je n'en ai jamais changé depuis lors.

À travers votre personne, monsieur le président, je rends hommage à l'ensemble des collaborateurs de notre institution qui œuvrent jour et nuit, dans la plus grande discrétion, durant nos longues séances dans l'hémicycle comme en commission.

Applaudissements sur tous les bancs.

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Je rends aussi hommage aux collaborateurs de députés, en particulier à tous ceux qui ont travaillé avec moi, à mes différentes équipes, mais aussi à mes suppléants – j'en ai eu quatre, dont mon actuelle suppléante, Mme Christelle Petex. Je pense également à ma famille, à nos familles ,

Applaudissements sur de nombreux bancs

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souvent sacrifiées sur l'autel de l'engagement des élus de ce pays.

Élu président de conseil départemental le 1er juillet, je vais désormais consacrer mon énergie au magnifique département de la Haute-Savoie – à cet échelon départemental, donc, qui a beaucoup participé à la gestion de la crise du covid-19.

Monsieur le Premier ministre, ma question est donc la suivante : quelle place comptez-vous accorder à l'avenir aux départements dans notre si belle République et notre si beau pays, la France ?

Applaudissements sur tous les bancs.

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La parole est à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Debut de section - Permalien
Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales

Monsieur le député, permettez-moi à mon tour de vous féliciter chaleureusement avec autant de sincérité que d'amitié pour votre élection à la présidence du conseil départemental de Haute-Savoie. Vous le devez, vous l'avez rappelé, à votre engagement de longue date au service de votre territoire. Je veux également saluer votre investissement de près de vingt ans sur ces bancs où j'ai toujours pu apprécier votre attitude constructive.

Vous m'interrogez sur l'avenir des départements dans l'organisation institutionnelle de la France. Depuis plus de deux siècles, ils ont structuré la vie politique et administrative de notre pays, et ils ont su évoluer pour prendre le train de la décentralisation et pour s'adapter à la montée en puissance de nouveaux échelons – je pense notamment aux intercommunalités et aux régions. Ils jouent aujourd'hui un rôle majeur dans la conduite des politiques sociales, dans la gestion du réseau routier ou encore dans celle des collèges, sans oublier, cher Martial, le service départemental d'incendie et de secours.

Je suis convaincue que la lisibilité des compétences départementales constitue une force. Les Français ont besoin de proximité, qu'il s'agisse de l'organisation des collectivités ou de celle de l'État. C'est pour cela que le Gouvernement propose de conforter les compétences des départements dans le projet de loi dit 4D – décentralisation, déconcentration, différenciation et décomplexification – dont nous terminons ce soir l'examen au Sénat, et qu'il renforce l'État local au niveau du département dans la figure du préfet.

Mme Maud Petit applaudit.

Debut de section - Permalien
Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales

Les départements sont forts, ils ont une histoire, des compétences, une légitimité. C'est avec ces atouts qu'ils doivent se tourner vers l'avenir et contribuer activement à l'effort de transformation et de modernisation du pays. Je sais à cet égard pouvoir compter sur vous, monsieur le président Saddier.

Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et LR.

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Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, voilà précisément un an que vous-même et le Premier ministre avez signé les accords du Ségur avec les partenaires sociaux et les professionnels de la santé afin de reconnaître ou plutôt de revaloriser – il faut dire les choses clairement – les métiers du secteur de la santé, du secteur médico-social.

Au terme de cette année, je souhaite relayer des questionnements, des inquiétudes, des préoccupations, et vous offrir la possibilité de rassurer les personnels concernés. En effet, bien souvent, dans nos circonscriptions, depuis un an, ces personnels nous disent qu'il faudrait, à métier égal, une revalorisation salariale égale. La revalorisation de 183 euros nets mensuels doit être identique pour les infirmières ou les aides-soignants dans le secteur de la santé ou dans le secteur médico-social. Les chefs d'établissement et de structures s'interrogent aussi, car ils souhaitent s'assurer que l'État nous permettra bien de voter les crédits nécessaires à cette revalorisation sans que les structures aient besoin de puiser dans leurs fonds propres. C'est un sujet d'inquiétude au moment où nous demandons à juste titre, disons-le, à chacun de ces professionnels de santé de se vacciner.

La signature du Ségur, il y a un an, a eu lieu au terme d'une cinquantaine de jours de concertation. Plus de 8 milliards d'euros sont mobilisés. Je veux, par ma question, vous conforter dans l'orientation prise et surtout vous permettre de rassurer et de sécuriser les professionnels et les agents concernés.

Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-I et sur plusieurs bancs du groupe Dem.

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La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

Monsieur le député, nous célébrons aujourd'hui le premier anniversaire des accords du Ségur. J'ai convié ce soir en visioconférence des soignants de nos établissements de santé et médico-sociaux pour faire le point avec eux – en cette période, je n'ose pas vous dire combien ils seront.

Sachez tout d'abord que 75 % des engagements que nous avions pris ont été tenus ou sont en voie de l'être, et que nous avons même pris un peu d'avance grâce à l'aide déterminée et au soutien constant de Matignon et du Premier ministre en particulier. Nous avons réussi à boucler les accords de Ségur et nous avons maintenu l'accord majoritaire avec les organismes syndicaux. J'ai passé ce matin près de deux heures avec eux : un an après, les organismes signataires maintiennent leur signature et je dirais même que les échos étaient très positifs.

Plus de 118 000 contributions ont été recueillies dans le cadre de la concertation des soignants, plus de 300 réunions ont eu lieu dont une centaine au ministère. Vous l'avez dit : un effort sans précédent est consenti en faveur de l'hôpital. En matière de revalorisation, non seulement tout l'argent qui a été promis est versé ou le sera lors des dernières étapes, mais en plus, il est budgété – on ne prend pas sur le budget des hôpitaux, il n'y a pas de petites lignes au bas de l'accord, il n'y a pas de piège, il n'y a pas de loup. Au total, il y a bien 8,8 milliards de hausses de salaires financées par an pour plus de 1,5 million de soignants dont 85 % de femmes. Je ne le répéterai jamais assez, mais comme je m'exprime en face d'Élisabeth Moreno, je ne peux pas ne pas dire de nouveau que le Ségur de la santé constitue la plus forte réduction d'écarts de salaire entre les hommes et les femmes de l'histoire de notre pays.

Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

Il y a eu les 183 euros nets, il y a la revalorisation des grilles en cours de transposition dans le secteur privé lucratif et non lucratif – j'ai demandé un accord majoritaire pour respecter le dialogue social avec les organismes syndicaux. Il faut que j'ajoute la fonction publique territoriale, me souffle Amélie de Montchalin, et elle a bien raison de le rappeler. Bref, l'ensemble des soignants des structures ce pays sont concernés.

Un dernier volet dans la revalorisation, à hauteur tout de même d'un milliard d'euros par an, concerne ce qu'on appelle l'engagement collectif. Il s'agit d'encourager les équipes à mieux soigner, à faire de la qualité, à travailler ensemble. Cela leur permettra de bénéficier d'un complément allant jusqu'à 100 euros nets par mois et par soignant, d'un montant identique que l'on soit médecin, aide-soignant ou infirmier.

Le Ségur de la santé, c'est tout cela et je vous remercie de me donner l'occasion de le célébrer avec vous dans l'hémicycle.

Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.

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Je profite des dix secondes qui me restent pour remercier le ministre et l'encourager à rester vigilant jusqu'à ce que ce dossier soit clos, car les députés sont sollicités dans leur circonscription, que ce soit par les hôpitaux, les maisons de retraite, les établissements médico-sociaux, les services de soins à domicile. Soyez rigoureux et vigilant ! Je compte sur vous.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ma question, à laquelle j'associe Mme Stella Dupont, députée du Maine-et-Loire, s'adresse à M. le ministre de l'intérieur. En tant que ministre de l'intérieur, mais plus encore en tant qu'élu et citoyen des Hauts-de-France, vous n'êtes pas sans connaître les drames qui se déroulent constamment sur notre littoral. Chaque semaine, la Côte d'Opale est témoin des tentatives de traversée de centaines de migrants vers le Royaume-Uni, témoin de leurs réussites comme de leurs échecs. Depuis le début des années 2000, nous n'avons pas trouvé de solution pour dissuader les migrants de rêver à « l'eldorado britannique ».

Depuis la fermeture du centre d'accueil de Sangatte, en 2002, des camps de fortune se succèdent. Les migrants sont hébergés dans des conditions plus que précaires, voire inhumaines, à Calais et Grande-Synthe notamment. Leurs camps sont démantelés quasi quotidiennement, et des arrêtés préfectoraux sont pris pour interdire les distributions de denrées alimentaires afin d'éviter les rixes. Malgré cette dégradation permanente et dangereuse de leurs conditions de vie déjà précaires, les migrants restent et continuent de s'installer, parce que l'espoir d'une vie meilleure est plus fort que la misère.

Face aux négociations à venir entre l'Union européenne et le Royaume-Uni en matière de politique d'asile et d'immigration, face à l'efficacité plus que limitée des mesures législatives et réglementaires prises jusqu'ici, face à la fatigue des riverains et des élus véritablement prisonniers des accords du Touquet, il nous faut agir !

L'objectif de la majorité présidentielle était de reconstruire un système qui assume sa juste part dans l'accueil des réfugiés, dans le respect de ses valeurs, tout en reconduisant plus efficacement aux frontières ceux qui ne sont pas acceptés. Un dispositif juste, lisible et équilibré.

Monsieur le ministre, quelle est la feuille de route de votre ministère ? La réponse devant être globale, quelles sont les revendications de notre pays à l'échelle européenne ?

Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur

Je connais votre humanisme, madame la députée, et je sais que vous êtes présente depuis longtemps dans ce beau département du Pas-de-Calais qui a dû subir depuis de très nombreuses années, vous l'avez rappelé, les conséquences de sa belle position géographique qui en fait, nous le savons depuis César et Napoléon, le point permettant l'accès le plus court par la mer à la Grande-Bretagne – d'autant qu'aujourd'hui, en plus du port et de la mer, il y a un tunnel que nous sommes les seuls à avoir en Europe pour nous rendre chez nos amis britanniques. Je ne reviens pas sur les difficultés que connaissent les riverains, les élus et les migrants eux-mêmes depuis fort longtemps, vous les avez rappelées, ni sur le fait que s'ils veulent aller en Angleterre, c'est notamment en raison de la législation du travail, vous le savez bien, mais votre question appelle trois types de réponse.

Tout d'abord, il y a la sécurisation des abords du Pas-de-Calais, mais aussi du Nord – vous avez d'ailleurs cité Grande-Synthe –, à laquelle nous demandons à nos amis britanniques de participer. J'aurai ce soir, avec la ministre de l'intérieur britannique, une dernière conférence avant de pouvoir annoncer avec elle, je l'espère, une nouvelle sécurisation massive pour empêcher les migrants de courir les plus grands dangers en tentant de traverser. Chaque jour en effet, et encore ce week-end, des familles entières sont sauvées par les pêcheurs français ou empêchées par les gendarmes de mettre leur vie en danger en essayant de passer de l'autre côté. Mais ces actions ne peuvent à elles seules résoudre la question migratoire : il faut savoir que 60 % des migrants qui sont dans le Pas-de-Calais viennent de Belgique et des Pays-Bas, d'où ils descendent jusqu'à la côte boulonnaise, jusqu'à la côte calaisienne, pour pouvoir traverser.

C'est bien pourquoi la deuxième réponse se trouve dans la politique de migrations menée en Europe, et c'est en tenant les frontières de l'Italie et de l'Espagne que nous arriverons indirectement à limiter la pression migratoire dans votre département.

Troisièmement, il nous appartient de négocier, nous, Union européenne, ensemble et pas dans un cadre bilatéral, la Grande-Bretagne étant sortie de l'Union, pour arriver à un nouvel accord qui permette des liens équilibrés en termes d'immigration afin que la France n'ait plus à subir ce qu'elle endure depuis vingt ans.

Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il y a un peu plus d'un an désormais, lorsque vous aviez annoncé la mise en œuvre du Ségur de la santé, je vous avais interpellé, monsieur le ministre des solidarités et de la santé, pour vous exhorter à concevoir un plan de sauvegarde de notre système de santé à la hauteur des enjeux qui sont les siens. Car j'étais inquiet à l'époque de voir un projet si ambitieux être mis en œuvre si rapidement, de surcroît au cœur de la crise sanitaire, au risque de manquer sa cible.

S'il est indéniable que le Ségur a permis d'atteindre certains objectifs, force est de constater que, comme je le craignais, il y a des trous dans la raquette. Les professionnels de santé réclamaient des mesures fortes et concrètes : revalorisation du salaire des soignants, amélioration des conditions de travail, fin de la logique désastreuse de fermetures des lits et des hôpitaux de proximité. Or certains de ces professionnels de santé se considèrent aujourd'hui comme des oubliés du Ségur, notamment les employés de laboratoire ou encore les ambulanciers hospitaliers, ces derniers étant pourtant au service de nos malades, veillant à leur confort et intervenant pour leur prodiguer les premiers secours.

En effet, les ambulanciers hospitaliers ne sont pas seulement des conducteurs, mais avant tout des professionnels de santé, formés pour réaliser des gestes d'urgence. Maillon indispensable dans la chaîne hospitalière, ils sont pourtant aujourd'hui des agents de catégorie C, au même titre que les personnels de certaines filières techniques de l'hôpital, alors qu'eux sont en contact avec les patients. Le statut des ambulanciers de la fonction publique doit évoluer afin de revaloriser leur profession. C'est pourquoi, monsieur le ministre, il faut accéder à leur revendication de réforme statutaire, qui comprend trois points : l'intégration dans la filière soignante, afin de reconnaître leur rôle auprès des soignants ; la classification de leur métier en catégorie active du fait de la pénibilité liée à leurs missions ; le passage en catégorie B, faisant ainsi écho aux revalorisations salariales des accords du Ségur de la santé.

Applaudissements sur les bancs du groupe LT.

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La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

Monsieur le député, tout d'abord, il est indispensable de rappeler que les ambulanciers hospitaliers sont déjà bel et bien reconnus comme des professionnels de santé et, à ce titre, inscrits sous cette appellation dans le code de santé publique. Mais puisque vous parlez d'« oubliés du Ségur », je vais vous indiquer ce qu'on a fait pour les ambulanciers hospitaliers, et vous me direz ensuite si vous continuez à considérer qu'ils ont été oubliés : on a monté des groupes de travail associant la direction générale de l'offre de soins (DGOS), les représentants des fédérations des entreprises de transports sanitaires, une association représentant les ambulanciers SMUR – structure mobile d'urgence et de réanimation –, les organisations syndicales et bien d'autres encore, et nous avons établi avec eux, en concertation, un référentiel d'activités et de compétences dans une logique de construction en blocs de compétences pour revoir le référentiel de formation.

Les travaux engagés ont permis d'aboutir à une nouvelle définition du métier, laquelle souligne la double appartenance à la santé et aux transports, et la réalisation de soins relevant de l'urgence. Voilà déjà un acquis. On a également pu revoir leur formation : les évolutions actées dans les groupes de travail vont conduire à une augmentation de trois semaines, soit 556 heures au total, et de deux semaines de la durée de formation clinique, soit 245 heures au total ; l'ensemble de la formation durera désormais 801 heures, soit un petit peu moins de six mois. Cela restera néanmoins à un niveau de diplôme infra-bac, je le rappelle pour répondre complètement à votre question sur leur passage en catégorie B.

Monsieur le député, comment dire que les ambulanciers sont les oubliés du Ségur alors qu'ils ont tous obtenu 183 euros mensuels nets d'augmentation de salaire ? Je pense qu'il n'y a pas grand monde qui peut se considérer oublié avec 2 000 euros nets de plus par an… S'y ajoutent la mesure de revalorisation dite « bas salaires » en date du 8 avril 2021 pour les catégories C du fait de l'évolution du SMIC, et les annonces faites par Amélie de Montchalin, le 6 juillet 2020, pour revaloriser la grille et les carrières des agents de catégorie C.

Non, on ne les a vraiment pas oubliés : on revoit leur formation et leur statut, et ils ont perçu la plus grosse augmentation de leur carrière, soit même l'équivalent de vingt ans d'augmentations cumulées en une fois.

Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM.

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Tout ce que vous avez dit est exact, monsieur le ministre… Il ne reste plus maintenant qu'à intégrer les ambulanciers à la catégorie B.

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Ma question s'adresse à M. le ministre des outre-mer.

Le 30 mars dernier, à l'occasion de la célébration du dixième anniversaire de la départementalisation de Mayotte, le Gouvernement a invité les Mahorais à la coconstruction d'un projet de loi spécifique pour cette île confrontée à tous les défis afin de la sortir de son sous-développement chronique. Les objectifs de la loi de programme sont l'égalité sociale, le renforcement de l'État régalien, l'accélération du développement, le renforcement du conseil départemental ainsi que l'insertion professionnelle, sportive et culturelle de la jeunesse. Certains, y compris dans les rangs des élus locaux de La République en marche, y ont vu une manœuvre politicienne de préparation de la prochaine campagne présidentielle alors que de nombreux Mahorais, croyant en la parole de l'État, ont participé aux différents ateliers animés par le préfet, délégué du Gouvernement.

En ce qui me concerne, j'ai pris toute ma part au dialogue et à la concertation. Plusieurs centaines de propositions ont été adressées au ministre des outre-mer par les personnes et par les institutions qui se sont impliquées dans cette réflexion. Le Gouvernement s'était engagé à nous communiquer les résultats de ses arbitrages au plus tard le 15 juillet courant… Nous sommes le 20, monsieur le Premier ministre !

Ma question est donc claire, et les Mahorais souhaitent qu'il y soit répondu devant la représentation nationale : quelles mesures le Gouvernement a-t-il retenues pour atteindre les objectifs qu'il s'était fixés, et va-t-il faire droit à la demande unanime des Mahorais et de leurs représentants visant à ce que le problème de l'égalité sociale dont souffre ce territoire par rapport au reste de la France soit réglé d'ici la fin de l'année par voie d'ordonnance ?

Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – Mme Maina Sage et M. Jean Lassalle applaudissent également.

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La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement

Le Gouvernement prépare un projet de loi spécifique à Mayotte pour le développement du territoire et pour la vie quotidienne de ses habitants : il répondra à de très nombreux enjeux propres à cette île. Comme vous l'avez indiqué, une large concertation a été lancée, vous-même y avez participé tout comme les autres parlementaires de Mayotte, très impliqués sur ces questions – je pense à la députée Ramlati Ali et au sénateur Thani Mohamed Soilihi –, il y a eu vingt réunions publiques, des centaines de citoyens et d'associations se sont mobilisés, et près de 700 propositions ont été formulées. C'est donc une réussite que cette concertation citoyenne, et il faut le saluer.

Cinq axes principaux en ressortent : renforcer certains droits pour permettre à Mayotte de devenir un département à part entière, poursuivre la lutte contre l'immigration clandestine, moderniser l'institution départementale, permettre un développement plus rapide et mieux adapté du territoire et, enfin, soutenir la jeunesse et l'insertion. Par ailleurs, des actions nationales et locales vont déjà dans le sens de ces orientations : je pense, par exemple, aux retraits des titres de séjour pour les étrangers délinquants ou encore à la lutte contre l'habitat informel.

Vous avez abordé la question de l'égalité sociale et je peux vous annoncer ici même que la mission sur la convergence sociale sera lancée dans les jours qui viennent. C'est la brique qui nous manque pour terminer la rédaction de la future loi Mayotte.

Enfin, s'agissant du calendrier, il est vrai qu'en juin, en raison des élections locales et du covid, les choses se sont un peu ralenties, mais le Gouvernement reste bien sûr pleinement mobilisé, étant précisé qu'il s'agit du Gouvernement dans son ensemble puisque, à la demande du Premier ministre, chaque ministre a un référent loi Mayotte dans son cabinet pour préparer ce texte. L'objectif est de transmettre le projet de loi au Conseil d'État à l'automne pour une présentation en Conseil des ministres au premier trimestre 2022. Nous allons évidemment continuer les échanges d'ici là et je peux vous annoncer que Sébastien Lecornu, le ministre des outre-mer, se rendra à Mayotte à la fin du mois d'août pour préciser devant les Mahorais les grandes orientations du projet de loi.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.

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Monsieur le secrétaire d'État, je regrette que quand nous cherchons à rencontrer notre ministre, il ne soit jamais présent – c'est malheureusement encore le cas cet après-midi.

La deuxième observation, c'est que vous répondez à côté de la question qui vous a été posée alors qu'elle est simple – quels sont les arbitrages qui ont été décidés alors que, de notre côté, nous avons fait notre part en participant au débat.

Enfin, je constate qu'à chaque fois qu'il s'agit de Mayotte, le Gouvernement louvoie au lieu d'aller droit au but. C'est un profond regret.

Suspension et reprise de la séance

La séance, suspendue à seize heures cinquante-cinq, est reprise à dix-sept heures cinq, sous la présidence de M. David Habib.

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L'ordre du jour appelle la discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (4302, 4336).

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La parole est à M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur de la commission mixte paritaire.

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Le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dit climat et résilience, est définitivement le texte de tous les records : 217 heures d'examen à l'Assemblée nationale, un millier d'amendements adoptés dans notre hémicycle et autant au Sénat, neuf heures de discussions en commission mixte paritaire… Le débat sur la transition écologique a été âpre, il a été animé, mais il a bien eu lieu, n'en déplaise aux champions de l'autovictimisation qui nous ont refait le coup éternel de la confiscation du débat. Ces chiffres attestent de l'ampleur du projet de loi. Il s'agit d'un texte qui fera date, d'un texte majeur, parce qu'il fait entrer l'écologie dans le quotidien des Français et qu'il va profondément modifier notre façon de consommer, de travailler, de nous nourrir, de nous déplacer ou encore de nous loger.

Je voudrais commencer par remercier les Français de la Convention citoyenne pour le climat. Pour la première fois dans l'histoire de la Ve République, une loi est directement inspirée par nos concitoyens et va voir le jour. Une cinquantaine des propositions des conventionnels se concrétisera grâce à ce projet de loi. Certes, le Parlement les a, pour certaines, modifiées ou complétées – c'est son rôle ; mais elles sont là et vont devenir réalité. Verdissement de la commande publique, affichage d'un écoscore, instauration du choix végétarien dans les cantines, création de l'écocide : toutes ces avancées majeures sont directement inspirées de leur travail.

Ce texte aurait dû nous rassembler. Quelle meilleure cause que la préservation de la planète justifie que nous mettions de côté nos divergences ? Quoi de plus important que l'urgence climatique pour nous mettre tous d'accord ? Nous avions là l'occasion de dépasser les clivages politiciens pour rechercher l'intérêt général, mais ce projet de loi a, au contraire, révélé de profondes fractures.

À gauche de l'hémicycle se trouvent ceux qui voulaient faire de ce texte un manuel de la décroissance pour les nuls ,

Mme Delphine Batho proteste

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une litanie d'interdits et de punitions. À les écouter, il fallait prendre des décisions brutales, quitte à entraîner des fermetures massives d'entreprises et une casse sociale sans commune mesure. Votre écologie est celle d'un retour trente ans en arrière en matière de développement des territoires. Fondamentalement, vous ne faites pas confiance aux Français, vous les infantilisez en voulant leur dicter quelle nourriture manger, quelle publicité regarder et quels transports utiliser.

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À droite de l'hémicycle comme au Sénat, vingt ans après que le président Jacques Chirac nous a alarmés sur notre maison qui brûle, vous continuez à regarder ailleurs, vous continuez à minimiser l'ampleur de la crise.

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On vous doit 239 amendements de suppression d'articles en première lecture à l'Assemblée, et des reculs sur tous les sujets au Sénat. La rénovation des passoires thermiques ? On n'a qu'à la retarder de six ans ! La création des zones à faibles émissions mobilité ? Ça peut attendre cinq ans de plus ! Les menus végétariens ? Continuons l'expérimentation ad vitam aeternam ! Réduire de 50 % l'artificialisation des sols ? Supprimons l'objectif et excluons les infrastructures ou les projets économiques ! En résumé : l'écologie, oui, mais pas chez nous et pas maintenant.

Je voudrais remercier pour leur travail considérable les rapporteurs Aurore Bergé, Cendra Motin, Damien Adam, Jean-Marc Zulesi, Mickaël Nogal, Lionel Causse, Célia de Lavergne et Erwan Balanant. Nous, députés de la majorité, faisons le pari de l'intelligence collective, de la mutation technologique, des changements de comportement par l'incitation, de l'accompagnement massif et de la volonté commune de relever ce défi.

Le projet de loi « climat et résilience », c'est le texte de la mobilisation de tous les Français, des entreprises et des collectivités territoriales, autour d'un projet commun, d'une obligation qui s'impose à nous. Il donne une trajectoire, des objectifs et des échéances. Il bat la cadence d'une transformation à marche forcée. Il définit des moyens considérables pour soutenir cette transition nécessaire et accompagner les changements profonds de la société. Ce projet de loi est celui de la responsabilité de notre pays envers nos partenaires internationaux et envers les générations futures. Alors, j'en appelle à votre responsabilité à vous, élus de la République : soyez à la hauteur des enjeux en adoptant le projet de loi « climat et résilience ».

Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem, Agir ens et UDI-I.

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La parole est à Mme la ministre de la transition écologique.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Quel chemin parcouru jusqu'ici, jusqu'à ce moment très précis où les représentants de la nation réunis vont faire faire un grand pas à notre pays ! Cette journée est le symbole d'une République audacieuse, qui sait regarder le monde en face, prendre ses responsabilités devant l'histoire et agir pour conserver une Terre vivable.

Je vous le disais en commission, je vous le disais dans l'hémicycle : l'urgence est là, dans nos villes et nos villages menacés de submersion et d'inondations. Évidemment, je pense en cet instant à nos amis belges et allemands qui vivent un véritable drame. Elle est là l'urgence, dans les canicules et les sécheresses qui détruisent des vies et des récoltes. Elle est là, dans chaque coin et recoin de nos vies personnelles, professionnelles et collectives. Face à ce défi, plus grand que tout ce que nous avons pu connaître, je ne vois qu'un seul moyen d'y arriver : avancer unis, soudés, ensemble. Avancer avec au cœur cette belle idée républicaine de fraternité, de liberté et d'égalité.

C'est exactement ce que nous faisons aujourd'hui, alors que vous vous apprêtez à voter un projet de loi unique au monde. Unique par sa méthode de construction : jamais aucun gouvernement n'avait fait ce choix si simple, si juste et si essentiel, consistant à faire confiance aux citoyennes et aux citoyens pour relever le défi écologique. Ils sont venus de métropole et d'outre-mer, de partout dans le pays ; ils sont venus des grandes agglomérations, des petites villes et des zones rurales ; ils sont venus sans être au départ des experts, des sachants ou même des convaincus ; mais ils sont venus avec l'envie de voir le pays progresser et la certitude d'œuvrer pour un meilleur avenir pour eux et leurs enfants.

C'est cela même, la politique au sens noble du terme, loin des polémiques stériles, des petits mots et des promesses déçues. C'est cette force irrépressible d'engagement, de changement et de transformation qui fait bouger les peuples et les nations à travers l'histoire. Je veux redire ma fierté devant le travail de ces 150 citoyennes et citoyens, qui ont travaillé d'arrache-pied durant neuf mois. Ils ont montré combien les processus de participation citoyenne pouvaient contribuer à revivifier la démocratie. Ils ont rempli haut la main le mandat qui leur avait été confié par le Président de la République.

Et en cet instant précis, je pense à chacune et à chacun d'entre eux. Je sais que beaucoup nous regardent. Certains estiment que nous n'allons pas toujours aussi loin et aussi vite qu'ils le souhaiteraient. Mais je veux leur dire du haut de cette tribune que chaque avancée, chaque progrès, chaque pas en avant que nous accomplissons aujourd'hui est le fruit de leur travail. Qu'ils en soient remerciés.

Mesdames et messieurs les députés, ce projet de loi est aussi le fruit de votre travail. Démocratie délibérative et démocratie représentative ne s'affrontent pas ; elles s'enrichissent mutuellement. Vous avez débattu des centaines d'heures, proposé des milliers d'amendements, eu des échanges, parfois vifs, toujours exigeants, toujours nécessaires. Ainsi bat le cœur de notre démocratie.

Je salue l'immense qualité des débats. Ils révèlent une situation simple, mais dont la résonance est forte : sur plus aucun banc de cet hémicycle, la nécessité de lutter contre le changement climatique ne fait débat. L'écologie n'est plus l'apanage d'un parti – je m'en réjouis.

Je salue et je remercie la présidente de la commission spéciale, le rapporteur général et les rapporteurs pour les différents titres pour le travail minutieux qu'ils ont mené et le dialogue exigeant que nous avons eu. Bien sûr, je remercie également mes collègues du Gouvernement qui se sont succédé au banc.

Je remercie encore les groupes de la majorité pour leur soutien et leurs propositions, ainsi que les groupes d'opposition qui ont pleinement joué le jeu du débat démocratique en contribuant, en proposant, en amendant. J'ai une pensée pour le personnel de l'Assemblée nationale et les collaborateurs d'élus, ainsi que pour les services de mon ministère et les membres de mon cabinet, sans qui tous ces travaux auraient été impossibles.

Enfin, je salue l'aboutissement de la commission mixte paritaire, fait assez rare concernant un texte riche de plus de 300 articles. Les débats ont duré neuf heures : il faudrait vérifier dans les annales du Parlement pour savoir s'il était déjà arrivé qu'une CMP soit si longue – comme ancienne députée, je n'en ai pas le souvenir. Cela témoigne d'une large prise de conscience de l'urgence à agir et à embarquer l'ensemble de la société dans la transition écologique.

Le texte que vous allez voter est profondément différent de celui présenté par le Gouvernement. Il conforte et précise les ambitions initiales qui étaient les siennes et comporte de nombreuses avancées, qui sont le fruit de vos travaux. Vous pouvez en être fiers.

Depuis le cœur de la République, nous faisons entrer le pays de plain-pied dans le siècle nouveau. Il vous revient de graver dans le marbre de la loi les moyens dont disposera la France pour être souveraine, résiliente et capable de relever les défis qui s'annoncent ; il vous revient d'établir un lien entre les propositions de 150 citoyens et le quotidien de 67 millions de Françaises et de Français. Notre génération n'a plus l'excuse de l'ignorance pour cautionner l'inaction. Chaque pan de notre existence comporte un défi, aussi faut-il mener la bataille de la transformation dans tous les domaines : économie, travail, habitat, alimentation, déplacement.

Avec ce projet de loi point un autre monde, où l'air que l'on respire sera plus pur, où la nature et l'humain se réconcilieront, où la transition écologique apaisera bien des maux qui tourmentent le pays. Au fond, c'est assez simple : ce monde-là ne peut exister que si nous faisons face ensemble, avec le goût de l'avenir partagé. Quel que soit l'endroit où nous vivons, où nous travaillons, d'où nous venons, soyons ensemble ! Devant le péril, il ne peut y avoir de distinctions, de divisions, de déchirements. Il n'y a qu'un pays, qu'une nation, qui doit inventer son chemin. Nous le traçons aujourd'hui en nous engageant sur une véritable bascule culturelle.

Demain, l'écologie sera dans toutes les classes des écoles de la République, pour former les écocitoyens du siècle nouveau. Chacune et chacun aura les moyens d'être acteur du changement, en adoptant une consommation responsable et vertueuse, grâce à une signalétique qui indiquera les effets des produits sur le climat, sur la biodiversité et sur la consommation des ressources naturelles. Dans ce pays, la promotion des énergies fossiles disparaîtra et, grâce aux travaux parlementaires, l'écoblanchiment sera sévèrement puni pour ce qu'il est : une tromperie du consommateur.

La consommation responsable implique de se passer des innombrables emballages qui enrobent les produits du quotidien, consomment d'énormes quantités de matière et souvent polluent l'environnement. Ce texte fixe le cap d'une nette amélioration, avec la généralisation de la vente en vrac dans les grandes surfaces.

Tous ces aspects donnent au titre Ier du projet loi que vous allez voter dans quelques instants sa force et sa portée. Je remercie la rapporteure Aurore Bergé et les groupes de la majorité pour les compromis effectués sur l'ensemble.

Ce texte ne se contente pas d'engager une grande – et nécessaire – bascule culturelle. Il existe des problèmes majeurs auxquels il faut s'attaquer ici et maintenant : nous n'avons plus les moyens d'attendre. Pour y parvenir, il faut d'abord transformer notre économie. C'est l'esprit du titre II, pour lequel vous étiez rapporteure, chère Cendra Motin. Les marchés publics comporteront des clauses environnementales et sociales ; les instances des entreprises auront les moyens de prendre en considération le développement durable.

Enfin, le titre II dotera la France du cadre juridique nécessaire pour adapter l'exploitation minière à notre temps : nous ne pouvons plus autoriser des projets datés, aux conséquences hasardeuses, voire néfastes. Le texte initial prévoyait de conduire cette réforme essentiellement par ordonnances, mais les travaux de Damien Adam, rapporteur pour les articles 20 et 21, ont permis d'en transcrire d'ores et déjà une grande partie dans la loi. Le texte réforme donc le code minier et donne au Gouvernement les moyens légaux de refuser l'octroi d'un titre pour raison environnementale, grâce à des amendements défendus par les groupes de la majorité. Il était temps !

Vous comme moi savons que nous n'atteindrons nos objectifs qu'avec la confiance des territoires ; ce titre décline donc notre programmation pluriannuelle de l'énergie à l'échelle de chaque région. Cela constitue également une grande avancée pour l'écologie.

S'attaquer aux problèmes qui gangrènent le pays et construire une grande république écologique et solidaire, cela implique d'avoir le courage de prendre des mesures d'avant-garde. Le bilan humain de la pollution de l'air dans notre pays ne peut qu'inciter à l'action. Chaque année, 40 000 personnes décèdent prématurément des conséquences d'un air pollué. Combien souffrent de maladies chroniques qui viennent détruire les promesses d'une vie paisible ? Ce sont des deuils, des pertes irremplaçables, des familles brisées, souvent chez nos concitoyens les plus modestes. Nous pouvons épargner la souffrance de femmes et d'hommes. Il est absolument indispensable de prendre nos responsabilités et de résoudre cette urgence sanitaire, sociale, écologique. Avec ce projet de loi, les agglomérations de plus de 150 000 habitants disposeront demain d'une zone à faibles émissions mobilité (ZFE-m). Ce seront autant de maladies respiratoires évitées, autant de vies sauvées.

Le texte prévoit également la fin des ventes de véhicules thermiques d'ici moins de vingt ans pour les poids lourds, les autobus et les autocars neufs. Nous faisons entrer en transition la quasi-totalité des véhicules roulants de ce pays. Cela va de pair avec l'accélération de la trajectoire de verdissement des flottes d'entreprises, des collectivités et de l'État, grâce au rapporteur Jean-Marc Zulesi.

Pour agir de manière responsable et prendre des mesures d'avant-garde, il faut aussi savoir tourner la page de certaines pratiques : par exemple, prendre l'avion alors que l'on peut prendre le train pour effectuer un trajet qui dure moins de deux heures et demie, ce qui constitue une aberration.

Être à l'avant-garde, c'est faire différemment, faire mieux, faire preuve de bon sens. Tel est l'esprit du titre III. Construire des centres commerciaux au milieu des champs est une hérésie. Couler la nature sous le béton revient à nous condamner. Ces réflexions de bon sens nous amènent à diviser par deux la vitesse d'artificialisation des sols en moins de dix ans, parce que l'écologie naît et vit dans les territoires, parce qu'on ne peut plus croire que les villes peuvent s'étendre à l'infini sans noyer le lien social, ni enfermer les Français dans la dépendance à la voiture, ni ravager la biodiversité dont nous avons tant besoin pour survivre. Grâce à l'objectif de diviser par deux l'artificialisation des sols et grâce à la planification dans les documents d'urbanisme, nous pouvons inverser la tendance et laisser enfin la nature respirer.

Beaucoup d'entre vous voulaient mieux réguler la construction des entrepôts. Le rapporteur Lionel Causse l'a fait ; il a procédé intelligemment, sans tomber dans la caricature, en définissant mieux les endroits d'implantation dans les documents d'urbanisme.

Le bon sens veut aussi que l'on s'attaque à une terrible injustice sociale et climatique, sur laquelle les dirigeants ont fermé les yeux pendant beaucoup trop longtemps. Depuis des décennies, des Français étouffent en été et gèlent en hiver ; c'est le cas aujourd'hui de 2 millions de foyers. C'est une honte pour notre pays – je pèse mes mots en le disant. La lutte contre les passoires thermiques est indispensable pour construire la république écologique et solidaire dont je vous parle. Le travail parlementaire a permis, en particulier grâce au rapporteur Mickaël Nogal, de définir une trajectoire nette et précise vers l'interdiction de leur mise en location – c'est le gage de notre succès. Au-delà des effets d'annonces et de marketing, la confiance dépendra de la lisibilité, de la clarté et de la prévisibilité des mesures qui provoqueront des transformations durables.

Nos concitoyens peuvent également avoir confiance dans le soutien de l'État. C'est ici, dans cette assemblée, que sont nés les accompagnateurs Rénov', qui aideront les Français à effectuer leurs travaux, du début du projet au dernier clou posé. Le prêt avance mutation constitue une autre avancée obtenue dans cet hémicycle – je sais combien ces travaux pèsent lourd dans le petit budget de milliers de propriétaires. Les débats à l'Assemblée ont également fixé dans le marbre de la loi le principe d'un engagement financier de l'État pour garantir un reste à charge faible, notamment pour les ménages les plus modestes.

Mesdames et messieurs les députés, le projet de loi que vous vous apprêtez à voter excède très largement nos responsabilités présentes, à vous comme à moi. En effet, il n'engage pas avec le pays un rapport de force, il scelle un pacte de confiance, qui respecte l'équilibre entre la nécessaire part de contrainte et l'impérative liberté de l'initiative. Je le sais d'expérience : c'est ce qui marche.

Avec le titre V, madame la rapporteure Célia de Lavergne, chaque enfant se verra proposer un menu végétarien hebdomadaire dans son école. Au début du quinquennat, vous aviez voté l'expérimentation de cette mesure – je l'avais votée aussi. Vous la généralisez aujourd'hui, car c'est un succès. La preuve par l'exemple fait partie de notre méthode de gouvernement. Il s'agit d'expérimenter afin de généraliser dans les meilleures conditions – car on ne brusque pas la transition, on la construit pierre après pierre. Plutôt que d'imposer une taxe sur les engrais azotés dont on ne sait pas mesurer l'efficacité, il faut faire le choix de la confiance, c'est-à-dire donner aux agriculteurs un objectif de réduction et ne prévoir la taxe que s'ils ne l'atteignent pas. Confiance, accompagnement, contrôle : telle est aussi notre méthode. Le titre V constitue un jalon vers une ère d'agroécologie, bénéfique pour les territoires et pour la santé humaine.

Se projeter au-delà de nos mandats implique également de doter le pays d'un droit conforme à son temps. Chaque époque se donne des règles pour lutter contre ce qu'elle considère comme inacceptable, criminel, dangereux. Pour des millions et des millions de Français, comme pour moi, il est intolérable qu'on pollue et détruise la nature en toute connaissance de cause. Avec le titre VI, la justice rendue au nom du peuple français aura les moyens de condamner sévèrement les pollueurs. Les travaux parlementaires ont renforcé la robustesse juridique de ce passage, notamment grâce à M. le rapporteur Erwan Balanant.

Se doter de règles propres à notre époque revient aussi à nous assurer que nous garderons le cap au long cours. La République se meurt des grandes lois sans lien avec la vraie vie : elles n'existent que dans l'esprit de ceux qui les écrivent et les citoyens n'en voient jamais les effets sur le terrain. Avec la maturité politique d'une vieille démocratie qui a tant à offrir, nous nous donnons les moyens de veiller à l'effectivité de nos décisions.

Le titre VII promet plus qu'une transformation de notre gouvernance climatique. Madame la présidente – chère Laurence –, monsieur le rapporteur – cher Jean-René –, nous vous le devons. Il constitue le moyen d'assurer au long cours la pérennité de la transformation, de garantir que ce texte changera ce qui doit l'être sur le terrain. C'est une avancée dont votre hémicycle peut être particulièrement fier.

Mesdames et messieurs les députés, nous écrivons une nouvelle page de la république écologique. Elle a été rédigée par des femmes et des hommes, humbles citoyens comme parlementaires, pour chacun de nos territoires. Elle ne met pas le point final à notre action en faveur de la transition écologique : celle-ci continuera, afin de relever tous les défis auxquels nous sommes confrontés. Elle complète les pages que nous avons déjà écrites et celles que nous continuons à rédiger, mais elle est essentielle, car les fondements de la république écologique pour tous et par tous y sont posés. C'est le sens de notre histoire et c'est notre responsabilité. Je sais que vous répondrez présents, comme toujours, avec force et passion.

Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Agir ens.

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Eh bien dites donc, le monde va changer avec cette loi !

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La parole est à Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, présidente de la commission mixte paritaire.

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Nous voici enfin arrivés au terme de plusieurs mois de travaux parlementaires. Le projet de loi « climat et résilience » a connu un parcours inédit et hors normes. D'abord, il a été élaboré sur le fondement des travaux d'une convention de 150 citoyens, chargés de formuler des propositions pour lutter contre le réchauffement climatique – un enjeu essentiel –, notamment en réduisant nos émissions de gaz à effet de serre, tout en respectant un objectif de cohésion et de justice sociale.

Le présent texte vise, il ne faut pas craindre de le répéter, à compléter et à approfondir un arsenal de mesures adoptées depuis 2017, grâce à la loi EGALIM – loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous –, à la loi ELAN – loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique –, à la loi relative à l'énergie et au climat, à la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, ou à la loi d'orientation des mobilités, afin d'accélérer la transition écologique et d'accompagner la nécessaire décarbonation de notre économie.

Il s'agit d'un texte hors norme, comme en témoigne l'ampleur des travaux parlementaires qu'il a suscités, tant à l'Assemblée nationale, qui a examiné près de 9 000 amendements, qu'au Sénat, avec plus de 4 200 amendements discutés : au final, plus de 2 000 amendements ont été adoptés afin de l'enrichir. Si nos débats n'ont pas été exempts de divergences, je salue le travail colossal accompli par l'ensemble des rapporteurs, ainsi que l'esprit de responsabilité qui a guidé les travaux au sein de la commission mixte paritaire, permettant d'aboutir, au terme de neuf heures de discussions, à un texte commun, sans rien renier de l'ambition initiale, bien au contraire.

Comme le rapporteur vient de le rappeler, nos travaux ont ainsi permis d'approfondir tous les sujets et de renforcer l'ambition du texte, grâce à des avancées importantes : information des consommateurs sur l'empreinte carbone des produits et des services, verdissement de la commande publique, promotion de mobilités plus vertueuses, rénovation énergétique, alimentation durable et de qualité, transition agroécologique, promotion des énergies renouvelables, lutte contre l'artificialisation des sols ou contre la pollution de l'air, adaptation au dérèglement climatique, justice environnementale.

Sur tous ces enjeux, nous avons été, à l'Assemblée nationale comme au Sénat, force de proposition, contribuant ainsi à enrichir considérablement le projet de loi, comme en témoigne l'évolution du nombre d'articles, passés de 69 à plus de 300. Nous pouvons être collectivement fiers du travail accompli : nous avons su dépasser les clivages et les divergences pour aboutir à un texte pragmatique et ambitieux, qui permettra de mettre en œuvre une transition juste et soutenable pour l'ensemble de nos concitoyens.

Nous le savons, il y a urgence à agir pour faire face aux conséquences dramatiques du réchauffement climatique. Il est donc impératif de mettre en application au plus vite l'ensemble des dispositions du présent texte, afin de pouvoir en mesurer les effets, et de les ajuster autant que nécessaire pour atteindre le nouvel objectif européen de réduction d'au moins 55 % des émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030.

Nous avons à ce titre décidé de compléter le texte en matière d'évaluation climatique de nos politiques publiques et de suivi des engagements pris par les collectivités et les secteurs les plus émetteurs, comme le recommande le Haut Conseil pour le climat, ce qui est une véritable nécessité. Le HCC verra ainsi son rôle d'évaluation renforcé, ce qui devra nécessairement s'accompagner d'un renforcement de ses moyens.

Avec le présent projet de loi, dit climat et résilience, la France confirme une nouvelle fois son rôle moteur, au niveau européen, dans la lutte contre le dérèglement climatique : elle sera ainsi le premier pays au sein de l'Union européenne à interdire la location de passoires thermiques à partir de 2028, le premier pays à aller aussi loin en matière d'affichage environnemental et d'encadrement de la publicité pour les produits les plus polluants, l'un des seuls pays à supprimer les vols court-courriers lorsqu'il existe une possibilité d'effectuer le même trajet en train, etc. Si les politiques environnementales et climatiques nécessitent de parvenir à un consensus avec nos concitoyens, il en va de même au niveau européen et international. Nous savons que les défis environnementaux nécessitent une réponse collective, coordonnée et solidaire.

La présidence française de l'Union européenne au premier semestre 2022 permettra d'aller encore plus loin dans un certain nombre de dossiers fondamentaux. La France sera en première ligne pour défendre l'instauration d'un mécanisme d'ajustement carbone aux frontières, autrement dit un mécanisme antidumping environnemental permettant de mettre en œuvre l'European Green Deal – le pacte vert pour l'Europe – et la loi européenne sur le climat : plus de cinquante textes législatifs européens seront créés ou améliorés d'ici fin 2022. Jusqu'à cette date, nous devons continuer à amplifier notre action à tous les niveaux et à rehausser nos objectifs. Tel est notre défi collectif pour les mois et les années à venir.

Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.

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J'ai reçu de Mme Valérie Rabault et des membres du groupe Socialistes et apparentés une motion de rejet préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 5, du règlement.

La parole est à M. Dominique Potier.

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J'observe que cette motion de rejet préalable suscite l'agacement de personnes avec lesquelles nous avons, par ailleurs, des relations amicales, de confiance, parfois même des coopérations politiques : soyez attentifs à la fin de mon propos, qui expliquera pourquoi une telle motion. En préambule, je tiens également à souligner, avec une courtoisie non feinte, la qualité des débats que nous avons eus avec les rapporteurs et les ministres, malgré des dialogues parfois vifs, et même très vifs, madame la ministre, mais toujours d'une grande tenue, et je vous en remercie, car ils honorent notre assemblée.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.

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Le groupe Socialistes et apparentés et moi-même, puisque ma question au Gouvernement la semaine dernière avait déjà le même objet, considérons qu'il faudrait vraiment être de mauvaise foi pour considérer que le présent projet loi n'est rien.

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Mais il faudrait être intellectuellement malhonnête pour penser qu'il est à la hauteur des enjeux auxquels il est censé répondre.

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La mauvaise foi consisterait à ne pas reconnaître que, pour la première fois depuis la loi SRU – solidarité et renouvellement urbains –, autour de la ministre déléguée Emmanuelle Wargon, un dispositif, que certains considèrent comme trop long et trop constructif, met fin, à terme, à l'artificialisation des sols, avec une effectivité et des moyens inédits. Il faudrait être de mauvaise foi pour considérer que les obligations relatives à l'affichage sur les produits ou les nouvelles conditions auxquelles sont soumis les marchés publics ne sont rien du tout.

Nous saluons de telles dispositions, ainsi qu'une dizaine d'autres que je n'ai pas citées : nous les avons d'ailleurs non seulement saluées, mais aussi amendées et nous avons voté en leur faveur. Les socialistes ont en effet pris toute leur part à ce débat, en déposant 645 amendements, non pas dictés par des lobbies ou par des plaidoyers divers, mais fruits d'un long travail. D'ailleurs, beaucoup des propositions de la Convention citoyenne pour le climat reprenaient des amendements que nous avions défendus au cours des quatre dernières années, qui n'avaient reçu que mépris de la part la majorité et du Gouvernement, mais qui, venant des citoyens, ont subitement été considérés comme pertinents ! Dans un souci de cohérence, nous les avons soutenus, amendés et renforcés.

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Nous sommes particulièrement fiers, alors qu'une trentaine de nos amendements ont permis d'étoffer les dispositions du présent texte, d'être à l'origine de celui qui élargit l'achat public à la délégation de service public, ce qui permet un triplement du volume concerné et constitue un levier pour les secteurs de l'économie française susceptibles d'obtenir des marchés et des délégations de service public : nous sommes passés de 40 milliards d'euros à 120 milliards d'euros, ce qui est tout sauf insignifiant. Je l'ai dit récemment avec humour, les socialistes n'avaient pas réussi à faire adopter un amendement ayant une incidence pour un montant de 80 milliards d'euros depuis longtemps ! Celui-ci avait reçu la bénédiction de la corapporteure, avec laquelle nous avions travaillé à une rédaction commune.

Ainsi, nous avons parfois consolidé le présent projet de loi d'un commun accord. Tout le malentendu porte sur le périmètre de ce texte, très étroit, puisque seules certaines dispositions de la Convention citoyenne ont été retenues. Je ne fais nullement allusion à une volonté de censure ou d'ambiguïté, contrairement à certains de mes collègues : il ne s'agit pas de mettre en cause l'Assemblée nationale, puisque c'est le Gouvernement qui a décidé du périmètre initial du texte, nous privant d'envisager des leviers et des moyens d'action pourtant essentiels et d'un débat extrêmement important.

Nous avons donc débattu dans un périmètre restreint,…

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…ce qui a eu pour effet de gonfler artificiellement la communication sur des sujets qui ne le méritaient pas toujours, avec ce que je qualifierai d'effet lampadaire, nous amenant à débattre des points se trouvant dans la zone éclairée, en oubliant d'autres sujets restant dans l'obscurité. Lors de ces travaux en clair-obscur, nous avons été des débatteurs loyaux et force de proposition, notamment sur les questions d'alimentation, de transport et d'habitat.

Il faudrait être de mauvaise foi pour considérer que ce qui a été fait n'est rien : je sais que vous allez nous répondre, puisque vous l'avez dit plusieurs fois lors des questions au Gouvernement cet après-midi, qu'une proportion équivalente à 30 % du plan de relance comporte une dimension verte et environnementale, ce qui est indéniable.

Je ne vous reproche bien évidemment pas d'être intellectuellement malhonnêtes, même s'il existe un vice initial dans la construction de ce projet de loi. Si vous avez, madame la ministre, rendu hommage à la Convention citoyenne pour le climat, la réciproque n'est pas vraie. En effet, à l'issue de la première lecture, la note attribuée à ce texte était de 2,5 sur 10, et je ne pense pas que celle-ci évoluerait énormément – j'imagine qu'elle passerait tout au plus à 2,6 ou à 2,4 – si les 150 citoyens qui se sont livrés à un exercice inédit et très intéressant de démocratie participative et d'éducation populaire et citoyenne devaient se livrer à une nouvelle évaluation à l'issue de la CMP. Il n'est pas possible de les louanger sans recevoir la note qu'ils ont attribuée à ce projet gouvernemental, qui, même amendé, n'est pas à la hauteur des enjeux.

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Ils sont tous politisés, avec les oppositions !

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L'honnêteté intellectuelle consiste non seulement à entendre la vérité énoncée par les citoyens, mais surtout, dans une démocratie moderne, à entendre ce que disent la science et les comités que vous avez en partie contribué à créer, ce que je salue, notamment le Haut Conseil pour le climat, dont l'avis ne souffre aucune ambiguïté quant aux insuffisances de la portée de ce texte. Le report à 2026, 2028 ou 2032 de dispositions qui auraient pu, sans générer de conséquences économiques et sociales, être mises en œuvre plus tôt si elles ne s'étaient heurtées à la résistance de certains secteurs économiques, témoigne d'une tendance à la procrastination et à la légèreté, ainsi que d'un manque d'ampleur des mesures.

Si l'on veut être honnête intellectuellement, il faut entendre les alertes du GIEC – groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat –, qui, dans les premières moutures de son rapport, nous signale qu'au-delà d'un réchauffement de 1,5 degré Celsius, certaines conséquences seront irréversibles, et nous y allons tout droit.

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Il ne faut pas être aveugles et sourds à la décision des tribunaux qui, suite à la plainte de la commune de Grande-Synthe pour inaction climatique, enjoignent à l'État de prendre des mesures d'adaptation au risque climatique, puisque les dispositions actuelles ne le permettent pas.

Tout cela pourrait être relativisé si la Commission européenne n'avait pas décidé – et je sais que la France y a contribué sur le plan idéologique – d'augmenter l'objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 40 %, à au moins 55 % en 2030 par rapport à 1990 : le présent texte ne s'inscrit pas en cohérence avec cette nouvelle cible.

Sans être dans l'affect, comment rester indifférents aux dramatiques épisodes de chaleur qui ont frappé l'Amérique du Nord, aux sécheresses en Espagne, à la famine qui touche Madagascar, et, je le dis avec une grande émotion en tant que Lorrain, proche de nos voisins européens allemands, luxembourgeois et belges, aux tragédies qui ont endeuillé ces pays ces derniers jours.

Alertes météo, alertes de la science, avancée incroyable de la Commission européenne : tout cela aurait dû, chers collègues, chers amis, nous pousser à poursuivre le débat et à amplifier nos efforts.

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Cette motion de rejet préalable vise à signifier qu'il ne fallait pas stopper, au rabais, suite à un accord à droite, la discussion sur ce projet de loi, mais, au contraire, la poursuivre et l'amplifier.

M. Guillaume Garot applaudit.

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Il fallait accélérer et ouvrir le périmètre de ce texte, dernière possibilité d'une loi sur le climat dans cette législature.

Nous nous inscrivons dans la décennie des Nations unies pour l'action et pour des résultats en faveur du développement durable, une décennie capitale, où chaque mois et chaque année comptent. Nous avions l'occasion, cet été, jusqu'au 31 juillet, puis à nouveau en septembre, de nous parler, de nous écouter, d'élargir les périmètres, d'aller plus loin et plus vite.

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Nous n'aurions pas perdu six mois, puisque les dispositions auraient pu en partie être mises en œuvre sans attendre, ce que vous savez très bien, et, dès septembre, nous aurions pu nous doter d'une loi véritablement ambitieuse…

Tel est le sens même de notre motion de rejet préalable. Si le temps ne leur avait manqué, les députés socialistes auraient aimé, comme d'autres forces de gauche, voire certaines forces de la majorité et, sur certaines dispositions, avec l'appui de membres du groupe Les Républicains ou de centristes, aborder des questions systémiques et capitales telles que la conditionnalité sociale des marchés publics ou l'affichage sur certains produits, non seulement à caractère environnemental, mais aussi social : à cet égard, nous sommes, comme vous le savez, attachés à combattre le travail des enfants dans le secteur du textile.

Nous aurions pu engager la réforme des institutions permettant d'organiser la fantastique transition des métiers qui va advenir, pour que la peur des reconversions industrielles se transforme en épopée industrielle et de l'emploi, à l'instar de la mutation de l'agriculture dans les années 1950, et instaurer des dispositions de transition pour les métiers, comme nous l'avions proposé. Nous aurions pu regarder avec plus de considération les propositions de nos collègues Boris Vallaud et Jean-Louis Bricout, portant sur le secteur du bâtiment.

Nous aurions maintenu le taux de TVA au niveau attendu pour les transports alternatifs. Nous aurions vraiment adopté le crime d'écocide. Nous aurions engagé dans notre industrie un grand plan de recherche et de développement pour encourager l'accélération de la recherche de solutions. Nous aurions instauré dans le plan de relance une véritable écoconditionnalité et une conditionnalité sociale des aides aux entreprises. Nous aurions créé, à l'instar de nos amis britanniques, une véritable autorité pour évaluer et pour contrôler ce que nous avons voté dans le projet de loi. Bref, nous serions allés plus vite et plus loin.

C'est le sens de cette motion de rejet : le refus d'un compromis au rabais, d'un compromis à droite qui, aujourd'hui, nous prive d'un débat crucial dans un moment où nous devons changer de vitesse, accélérer et faire d'une transition écologique une transition sociale fondée sur la justice. La question qui justifie cette motion de rejet, c'est celle que je posais la semaine dernière dans l'hémicycle : quel est aujourd'hui le coût humain de notre inaction ?

Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – M. François Michel-Lambert applaudit également.

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Sur la motion de rejet préalable, je suis saisi par les groupes La République en marche et Socialistes et apparentés d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. le rapporteur.

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Votre intervention me surprend pour deux raisons. D'abord, vous avez loué de bonne foi le travail collectif réalisé par l'ensemble des parlementaires pour arriver à ce texte. Puis, d'un seul coup, vous considérez que la CMP qui, pourtant, poursuit cet effort de travail collectif, constitue une catastrophe en proposant un texte qui n'est pas à la hauteur. J'y vois une contradiction forte.

Ensuite, sur le fond, je voudrais que vous me donniez un seul exemple de recul du texte issu de la CMP par rapport à celui que nous avons adopté.

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Le travail que nous avons réalisé avec tous les rapporteurs, c'est donner plus d'ampleur au texte que nous avions voté.

Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM. – MM. Guillaume Garot et Dominique Potier protestent.

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Je vous mets au défi de trouver un seul exemple de recul.

Ne me dites pas que c'est un compromis avec la droite, comme si c'était une insulte – les députés présents apprécieront. Nous avons réalisé un travail qui honore le bicamérisme. Tout en restant fermes sur les positions que nous avions annoncées, nous avons cherché à améliorer le texte grâce aux propositions des sénateurs qui vont toutes dans le même sens : une ambition plus importante en matière de transition énergétique et aucun recul par rapport au texte que nous avions voté.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Ce que le Haut Conseil pour le climat et le Conseil d'État nous demandent, c'est d'agir vite…

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Le Conseil d'État nous donne neuf mois. Nous pouvons continuer à tergiverser, à dire qu'on a tout le temps qu'on veut ; pour ma part, j'ai plus de cent décrets d'application à rédiger, qui ne pourront être publiés qu'une fois la loi votée et promulguée. Leur rédaction sera longue ; nous avons déjà commencé à les préparer, bien évidemment, mais prendre du temps est absolument nécessaire.

Ensuite, de toute façon, personne ne sera satisfait par ce texte. Certains commencent déjà à me dire sur telle ou telle mesure : « Mais vous n'y pensez pas, comment ferons-nous pour l'appliquer ? » Du reste, j'espère que tous ceux qui pensent que le texte ne va pas assez loin seront à mes côtés pour m'aider à affronter tous ceux qui me diront que cette loi est inapplicable.

Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Je pense, exemple pris au hasard, aux zones à faibles émissions mobilité, pour lesquelles nous instaurons de nombreuses mesures d'accompagnement, qui ont d'ailleurs été améliorées grâce au travail que vous avez réalisé, mesdames et messieurs les parlementaires.

Je pense à toutes les mesures nécessaires et cruciales prises dans le cadre du mix énergétique afin de développer les énergies renouvelables. J'espère vous voir tous à mes côtés dans les territoires pour convaincre tout le monde de se mettre autour de la table, afin de trouver les meilleurs endroits pour installer des éoliennes ,

Exclamations sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe UDI-I

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Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

car il faudra en implanter à la fois dans les terres et en mer. Il faudra poser des panneaux photovoltaïques et faire de la méthanisation. C'est du concret, contrairement au constat selon lequel un pourcentage manque ici ou là.

Par rapport aux textes européens qui ont été présentés le 14 juillet, le travail que nous réalisons ici est complémentaire. Vous le savez, des négociations seront menées entre la Commission et les autres États européens et prendront du temps. En effet, ce sera long et difficile pour que tout le monde tombe d'accord. Pendant ce temps-là, attendrons-nous ? Non, nous avançons et nous engagerons encore l'application d'autres mesures au fur et à mesure.

Or la lutte contre le changement climatique, la transition écologique, c'est un marathon. Cela signifie qu'on court à la vitesse à laquelle on peut courir ; si l'on court trop vite, à un moment, on tombe et on n'avance plus. On sait que le 21e kilomètre sera plus dur, mais qu'une fois ce cap dépassé, cela ira mieux. Ce marathon-là, soit on le court en acceptant ses difficultés, soit on reste sur la ligne de départ et on attend de voir. Eh bien nous, nous avons décidé de le courir. C'est pour cette raison que cette motion de rejet préalable n'a pas de sens, mais il revient aux députés d'en décider.

Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.

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Dans les explications de vote sur la motion de rejet préalable, la parole est à M. François-Michel Lambert.

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En préambule, je tiens à remercier vivement le groupe Socialistes et apparentés de proposer de sortir par le haut de l'examen du projet de loi qui ne sera pas à la hauteur de l'enjeu climatique.

Madame la ministre, vous expliquiez ce matin au micro de France Info que le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets ferait entrer l'écologie dans le quotidien des Français. Aujourd'hui, l'enjeu n'est plus de convaincre nos concitoyens,…

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Ah si !

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…très majoritairement conscients des dangers suscités par le dérèglement climatique, mais bien de changer notre modèle économique. À cet égard, votre texte est largement insuffisant et se contente de porter quelques mesures influant à la marge sur le comportement de consommation sans même évoquer les modes de production.

Je le dis d'emblée : l'interdiction des terrasses chauffées et la publicité sur les énergies fossiles ne suffiront pas à faire face aux enjeux de demain. La sixième extinction de masse, les déluges meurtriers, les chaleurs extrêmes nous imposent de porter notre ambition écologique plus haut, plus fort. La Commission européenne, qui a présenté le 14 juillet dernier un paquet législatif prévoyant un ensemble de mesures ambitieuses afin de réduire de 55 % nos émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2030 – c'est-à-dire dans un délai de huit ans et demi –, nous invite à faire mieux.

D'autre part, il ne peut être acceptable de transformer le code minier par de simples ordonnances – vous le savez très bien pour avoir longuement travaillé sur ce sujet. C'est pourquoi la majorité du groupe Libertés et territoires, conscient que le grand texte écologique du quinquennat est d'ores et déjà ringardisé par le Pacte vert pour l'Europe, votera la motion de rejet préalable. Le seul moyen d'être à la hauteur des enjeux, c'est de poursuivre les débats, comme l'a très bien dit Dominique Potier. L'urgence ne nous oblige pas à la précipitation, l'urgence nous oblige à la coconstruction qui manque terriblement.

Chers collègues, vous avez toutes et tous la possibilité de redonner au projet de loi sa force, afin de ne pas reporter à 2023 – voire à plus tard – les bonnes décisions que nous devons appliquer.

Applaudissements sur les bancs du groupe LT. – M. Dominique Potier applaudit également.

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Cette motion de rejet préalable est tout à fait surréaliste. Les débats ont duré cent heures au Sénat, plus de quatre cents heures à l'Assemblée nationale ; 1 002 amendements ont été adoptés à l'Assemblée nationale, 1 172 au Sénat. Le texte qui, initialement, comportait 65 articles, en comprend 376, dont 138 corédigés avec les sénateurs.

Nous créons le délit de greenwashing ; nous instaurons une commande publique beaucoup plus responsable ; nous installons, en suivant un calendrier soutenu, les ZFE-m, qui sont attendues, vous le savez, notamment pour des raisons sanitaires ; nous accélérons le verdissement des parcs automobiles ; nous accompagnons les ménages, notamment après un accord avec les sénateurs sur le sujet social, en instaurant une expérimentation sur le prêt à taux zéro – PTZ – pour l'automobile ; nous accompagnons également les entreprises en leur donnant non seulement de la visibilité, avec une feuille de route, mais aussi la capacité financière de s'équiper en véhicules plus propres grâce au suramortissement.

Je ne comprends donc pas la raison d'être de cette motion, à moins qu'elle ne soit tout simplement politicienne. Si je résume : pour vous, l'urgence climatique, c'est d'attendre. Or nous refusons, nous prenons nos responsabilités, nous agissons. Bien sûr, cette loi ne constituera peut-être pas l'alpha et l'oméga, il faudra la reprendre. Mais, à un moment donné, il y a urgence, il faut agir. C'est pourquoi nous rejetterons avec force et vigueur votre motion de rejet préalable, parce qu'aujourd'hui ni le climat ni l'environnement n'attendent. Il faut y aller, nous votons un texte qui nous permet d'agir. Je dirai toujours, si vous me le permettez : un marcheur ira toujours plus loin qu'un intellectuel qui reste assis à blablater.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.

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Mes chers collègues Dominique Potier et François-Michel Lambert, je suis désolé de ne pas partager votre avis. Nous sommes d'accord sur beaucoup de choses…

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…mais là, franchement, je ne comprends pas votre attitude et cette motion de rejet. En effet, quelle que soit la loi – j'insiste – qu'on aurait votée sur le climat, elle aurait semblé imparfaite à certains, parce que nous ne serions jamais allés tout au bout de ce qu'il faudrait faire et qu'il faut également prendre en considération l'acceptation sociale – vous avez vu avec les gilets jaunes ce que nous a coûté la taxe sur les carburants.

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La mission confiée à des citoyens, c'était de rendre acceptable socialement la lutte contre le changement climatique. Mon collègue Vincent Thiébaut l'a rappelé : toutes les heures que nous avons passées dans cet hémicycle, tout comme les sénateurs au Sénat, ont eu uniquement pour but de rendre aussi acceptable socialement que possible le projet de loi.

Je n'évoquerai qu'un secteur – je ne parlerai pas de tous les autres, parce que je ne les maîtrise pas tous –, celui du logement, qui fait l'objet d'une grande avancée par rapport à ce que nous avons fait jusqu'à maintenant. Depuis des dizaines d'années, nous avons dépensé des milliards et des milliards de manière inefficace. Nous allons enfin permettre aux plus précaires d'entre nous de rénover leur maison. Monsieur Potier, rien que cette mesure, qui servira la cause climatique, vaut le coup de voter ce texte. De nombreuses autres dispositions sont très positives. Nous voterons donc contre votre motion de rejet préalable.

Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur quelques bancs du groupe LaREM.

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Madame la ministre, nous arrivons plus rapidement qu'espéré à la fin de l'examen du projet de loi. Comme il a été dit, le texte issu de la CMP est un coup d'arrêt porté aussi bien à la coconstruction démocratique qu'aux ambitions écologiques.

Tout d'abord, le débat démocratique a été malmené. Le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets devait traduire une partie des propositions de la Convention citoyenne pour le climat et ce, « sans filtre », comme le Président de la République s'y était engagé. Le 29 juin 2020, il faisait pourtant déjà valoir trois jokers, premiers renoncements qui ne seront malheureusement pas les derniers.

Ensuite, le projet de loi fut très sévèrement jugé par la Convention citoyenne pour le climat, les organisations non gouvernementales (ONG) et même le Haut Conseil pour le climat. Malgré le travail de proposition du groupe Socialistes et apparentés, qui a déposé plusieurs centaines d'amendements, le texte était loin d'être suffisant à l'issue de la première lecture. Pour finir, après le passage au Sénat et l'accord en CMP, celui-ci nous paraît aujourd'hui trop modeste par rapport aux enjeux auxquels nous devons faire face.

Le projet de loi aurait pu être une première, celle d'une meilleure construction législative par le dialogue démocratique entre des citoyens et des élus. Malheureusement, cela se termine par le refoulement de nombreuses propositions de la société civile, un débat parlementaire écourté, une erreur sur les mesures écologiques à prendre et l'absence de débat sur un nouveau modèle de développement essentiel.

Notre collègue Dominique Potier a rappelé les avancées que nous reconnaissons, mais aussi l'ensemble des manquements du texte issu de la CMP. Alors que le Conseil d'État vient de mettre en demeure le Gouvernement, que le Haut Conseil pour le climat continue à tirer la sonnette d'alarme et que nos concitoyens se mobilisent, les majorités parlementaires s'arrêtent à des demi-mesures. Comme le disait Jürgen Dahl : « Placer son espoir dans l'addition progressive de petites améliorations, c'est se mentir à soi-même aussi longtemps que continue la destruction quotidienne ». Ainsi, face à la politique des petits pas pour répondre à l'urgence écologique et sociale, il nous faut, dès maintenant, la grande loi climat attendue.

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Cher collègue Potier, en vous écoutant avec attention, j'ai eu pitié de vous. Il vous a tout de même été compliqué de dire du bien du projet de loi, tout en proposant de le rejeter, pour finalement dire qu'il ne va pas assez loin… Je m'étonne d'ailleurs que vous ayez jamais voté un texte dans cet hémicycle, car nous savons que toutes les lois sont imparfaites.

Lorsque vous étiez dans la majorité, vous avez défendu le concept d'agroécologie. Déjà, à l'époque, se posait la question de la rémunération des agriculteurs. Vous ne l'avez pas réglée : il a fallu une autre loi pour s'attaquer à ce problème. Il en va de même de l'écologie et de la question du changement climatique. J'étais déjà député lors du discours de Jacques Chirac à Johannesburg. J'ai ensuite participé au Grenelle de l'environnement, avant d'être votre opposant lors des débats sur certains textes proposés par la gauche. Aujourd'hui, je soutiens la démarche de cette majorité, qui ajoute une pierre de plus à l'édifice. L'essentiel est de garder le cap et de ne jamais s'arrêter d'avancer.

Applaudissements sur les bancs du groupe Agir ens et sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.

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Vous avez évoqué l'Allemagne. Pour ma part, je siège à l'assemblée parlementaire franco-allemande, ce qui me donne l'occasion de discuter à bâtons rompus avec mes collègues allemands. Quand je leur dis dans quelles proportions nous avons déjà réussi à réduire notre production de déchets plastiques, je vois qu'ils sont admiratifs. Alors que nous avons pris la décision résolue d'interdire la voiture thermique, cette question fait polémique chez eux. Et alors que nous réduisons le nombre de vols intérieurs en France, je sais, pour regarder la télévision allemande au cours de la campagne électorale qui s'y déroule actuellement, que cette question suscite également la polémique dans leur pays. Je fais d'ailleurs le pari qu'après les événements climatiques que vous avez évoqués et les morts qu'ils ont engendrés, la question de l'artificialisation des sols, qui n'était pas d'actualité, sera la priorité du prochain gouvernement allemand.

Ce projet de loi a le mérite de nous projeter vers l'avant, sur la base des connaissances dont nous disposons actuellement, de l'injonction de la Convention citoyenne pour le climat et dans une volonté – partagée dans cet hémicycle – de préparer un avenir meilleur pour les générations futures.

Applaudissements sur les bancs du groupe Agir ens et sur quelques bancs du groupe LaREM.

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Nous sommes tout de même très loin du grand soir, et nous le sommes encore plus des conclusions de la Convention citoyenne pour le climat ! Mais nous ne sommes pas là pour reprendre le débat, ni pour reparler du fond. Je regrette d'ailleurs, madame la ministre, que vous ayez rouvert la discussion sur les éoliennes, dont vous savez très bien qu'elle fait polémique dans notre pays.

Le texte qui se trouve aujourd'hui devant nous a été enrichi par le Sénat et a fait l'objet d'une commission mixte paritaire conclusive. Vous souhaitez, monsieur Potier, qu'il soit revu – et donc que nous votions une motion de rejet préalable. Pour ma part, j'estime que quand un texte n'est pas pleinement réussi, quand il est bancal, il vaut mieux en finir. Il me semble préférable d'ouvrir la discussion générale et de nous prononcer sur ce texte, sachant qu'il est certain que ces enjeux reviendront au centre des débats au cours des mois à venir. Il y a fort à parier que la majorité élue en 2022 devra reprendre l'ensemble des éléments figurant dans le projet de loi pour, cette fois, réellement travailler.

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Dans cet esprit, nous rejetterons donc la motion de rejet préalable, afin de nous prononcer au plus vite sur le texte.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 177

Nombre de suffrages exprimés 177

Majorité absolue 89

Pour l'adoption 21

Contre 156

La motion de rejet préalable n'est pas adoptée.

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Dans la discussion générale, la parole est à M. François-Michel Lambert.

Je rappelle que chaque orateur dispose de cinq minutes et que je serai attentif au respect du temps imparti.

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Au moment même où nos voisins allemands et belges sont frappés par des inondations d'une rare ampleur, aux conséquences dramatiques et incommensurables, où nos amis espagnols et canadiens subissent des températures qu'aucun être actuellement en vie n'a connu sous ces latitudes, et alors que les agriculteurs français peinent encore à se remettre des gelées noires d'avril dernier, qui ont jeté un véritable voile de mort sur une part importante de notre agriculture, le projet de loi « climat et résilience » est expédié en catimini.

Publiée hier par un collectif, une étude – la dernière en date – annonce que la biodiversité a baissé de 20 % au cours des trente dernières années en Méditerranée et, pire encore, de 51 % – oui, 51 %, soit donc la moitié – s'agissant des espèces marines.

Profitant de l'été, le Gouvernement, avec le plein soutien de la majorité, fait ainsi passer la loi « climat et résilience » amputée de toute ambition. Vous auriez fait preuve de courage en poursuivant le débat – c'était tout l'objet de la motion de rejet préalable de nos collègues socialistes –, permettant ainsi l'enrichissement mutuel et l'expression d'une conviction partagée avec nos concitoyens et les élus locaux, qui sont bien les grands oubliés de ce texte.

Nous le savons, nous ne pourrons plus agir avant 2023, voire 2024, pour hisser notre droit à la hauteur des enjeux écologiques et enclencher un autre modèle de développement.

Nous pouvons le dire : pas encore promulguée, la loi « climat et résilience » est déjà dépassée face au réchauffement climatique, à la raréfaction des ressources naturelles, aux pollutions – à commencer par celle du plastique, qui tue nos mers – et à l'effondrement de la biodiversité. Je le répète, cette loi est dépassée !

Avant même d'être rédigé, le projet de loi manquait d'ambition. Nous vous avions alertés lors des débats : alors que la Commission européenne préparait un nouvel objectif de 55 % de réduction des émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2030, qui a depuis été adopté, vous refusiez le débat et restiez sur un objectif de 40 %. Tout figure au compte rendu, chacun pourra le vérifier : vous n'avez avancé aucun argument. Mais la réalité des faits, les morts et les catastrophes nous poussent à aller plus loin, plus vite, plus fort !

Le 14 juillet dernier, alors que nous célébrions notre fête de la fraternité, l'Union européenne amorçait sa révolution. La fraternité, c'est la défense d'un bien commun, d'une planète unique, la survivance de l'espèce humaine. Nous n'y sommes pas dans ce texte et je suis très inquiet à l'heure où la France s'apprête à prendre la présidence du Conseil de l'Union européenne en janvier 2022. Alors que nous devrions tirer toute l'Union européenne vers le haut sur l'urgence climatique, nous ferons probablement l'inverse, en étant encore en retard.

La loi « climat et résilience » est dénuée de logique d'ensemble, de vue globale. De nombreux sujets n'y sont qu'effleurés. Elle est par exemple timide sur la question des forêts, alors qu'il s'agit d'un puits de carbone majeur. La Commission européenne souhaite d'ailleurs utiliser forêts et tourbières pour absorber environ 7 % des émissions de gaz à effet de serre. Votre réflexion sur ce sujet est au mieux incomplète au vu de la baisse des effectifs des agents de l'ONF – Office national des forêts –, mesure contraire à toute logique de responsabilité. La forêt, pour vous, ce sont les 800 000 tonnes de bois qui alimentent la méga-centrale de Gardanne chaque année pour produire de l'électricité, alors même que 500 scientifiques du monde entier nous alertent sur cette aberration écologique. Voilà la réalité !

Autre étrangeté de ce texte : alors que la Commission européenne souhaite la fin des voitures thermiques en 2035, nous fixons l'échéance à 2040. Dans les ZFE, les voitures très lourdes, faussement électriques grâce à une hybridation – sorte de cache-sexe écologique – de leur puissance et de leur démence, pourront continuer de rouler alors qu'elles émettent énormément de particules fines. Par exemple, aucune action n'est entreprise concernant les particules fines dues aux pneumatiques et aux freins – le débat a été évité. Dans certaines villes, ceux-ci sont pourtant la principale source de cette pollution mortelle qui cause le décès prématuré de 100 000 personnes par an en France. Voilà l'une des conséquences de votre décision de ne pas poursuivre le débat sur ce projet de loi.

Vous nous présentez l'écoscore et l'affichage environnemental comme étant révolutionnaires, mais comme M. le rapporteur général l'a lui-même avoué dans l'hémicycle, l'écoscore ne prendra pas en compte l'impact du transport des produits. Un paquet de biscuits aura donc le même score, qu'il soit vendu à 10 kilomètres de l'usine de fabrication ou en outre-mer. Comment créer plus de défiance chez nos concitoyens ?

Le problème originel de votre projet de loi est qu'il est dénué de vision sur la démographie et ses conséquences sur l'aménagement du territoire. Il n'aborde jamais la question des mobilités contraintes des personnes et des mobilités désordonnées des marchandises.

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Vous restez dans l'illusion du tout TGV, du tout nucléaire, du tout technologique qui nous sauveraient de cataclysmes !

Rappelons que le simple fait de baisser de 25 % la mobilité des personnes réduirait d'autant les émissions de gaz à effet de serre : c'est la théorie de la ville du quart d'heure, appliquée partout dans le monde, mais ignorée dans le projet de loi.

Le simple fait d'appliquer la stratégie « France logistique 2025 », présentée en 2016 par le ministre Macron avant d'être liquidée en 2018 par le président Macron, aurait permis de gagner 60 milliards d'euros en performance économique et de baisser les émissions de gaz à effet de serre en arrêtant de trimbaler des marchandises dans tous les sens.

Faute de temps, je ne parlerai pas du délit d'écocide, qui n'est pas à la hauteur des enjeux et qui risque d'engendrer de nombreuses délocalisations.

Je terminerai en indiquant qu'une majorité des membres du groupe Libertés et territoires voteront contre ce texte, tandis que les autres s'abstiendront – une abstention très critique, soyez-en conscients. L'ensemble du groupe vous appelle à la responsabilité, celle de revenir sans délai avec un texte à la hauteur de l'urgence écologique.

Applaudissements sur les bancs du groupe LT. – M. Gérard Leseul applaudit aussi.

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C'est l'élu rouennais qui s'adresse à vous, madame la ministre, en même temps que l'élu communiste bien sûr, en évoquant plus particulièrement les ZFE, qui concernent la métropole de Rouen. En effet, le rapport de nos deux collègues des groupes LaREM et LR que vous avez évoqué tout à l'heure m'a profondément intéressé. Il contient en effet des préconisations qu'il conviendrait de retrouver dans les décrets d'application du projet de loi et dans le projet de loi de finances pour 2022. J'en citerai quelques-unes.

S'agissant de l'information et de la communication, le rapport recommande de porter à six mois la consultation des habitants – des usagers – en vue de la création d'une ZFE. Le rapport évoque aussi l'instauration obligatoire, pour les métropoles, de guichets d'informations et de services aux usagers. Il parle de la constitution d'un conseil national d'évaluation, afin de voir ce que les ZFE produisent concrètement sur le terrain.

Plus intéressant encore, concernant l'accompagnement, ou plutôt les moyens financiers pour les usagers de la route, le rapport recommande de doubler – je dis bien doubler – les subventions et primes à la conversion permettant de se doter d'une voiture propre, et d'étendre les aides destinées aux particuliers aux petites et moyennes entreprises, notamment celles disposant de moins de quatre véhicules professionnels. Au total, neuf préconisations sont faites s'agissant des moyens financiers qu'il conviendrait de mobiliser.

Quant au fonctionnement des ZFE, des recommandations sont également émises en ce qui concerne les dérogations, les périodes d'avertissement préventif, ainsi que, bien sûr, les solutions de remplacement à la mobilité individuelle comme les transports en commun.

Le contenu de ce rapport, rendu public il y a quinze jours, se retrouvera-t-il dans vos décrets et dans la loi de finances pour 2022 ? J'attends une réponse de votre part, car ne serait-ce que sur ce point, je doute de l'applicabilité de ce qui a été adopté dans ce texte – et que je n'ai d'ailleurs pas voté au conseil métropolitain de Rouen il y a quinze jours. Quand on lit un tel rapport, il y a en effet de quoi s'inquiéter sur ce sujet très sensible pour les Français : certains d'entre nous l'ont rappelé et tout le monde le sait.

J'y ajouterais l'enjeu économique : élu rouennais dont la circonscription est proche de l'usine Renault de Cléon et pas loin de celle de Sandouville, je tiens à souligner que le passage du thermique à l'électrique pourrait potentiellement détruire 100 000 emplois d'ici à 2035 selon l'Observatoire de la métallurgie.

Oui, 100 000 emplois sur les 190 000 que compte cette filière de constructeurs et d'équipementiers !

Si on laisse la clef de la transition au lobby de la construction et de l'équipement d'automobiles et qu'on n'écoute pas les salariés, la facture risque d'être salée. Je vous avais déjà fait remarquer que votre projet de loi était vide sur la question capitale de l'emploi ; force est de constater qu'il n'y a rien de plus dans la version finale. Vous ignorez la contribution des salariés et de leurs organisations syndicales à la transition écologique et aux enjeux de l'emploi. En Allemagne, le grand syndicat IG Metall propose de prélever 500 millions d'euros de ressources privées pour alimenter un fonds d'investissement pouvant entrer au capital des PME produisant des pièces pour moteur électrique, donc menacées de disparaître, afin de soutenir l'emploi. Voilà une idée intéressante – je pourrais en citer d'autres – à laquelle il conviendrait de prêter attention !

Je mets également sur la table la question des infrastructures, madame la ministre, car je suis un élu rouennais : au-delà de votre programme législatif, vous maintenez depuis plusieurs années le projet de contournement de Rouen, dont le coût est estimé à 1 milliard d'euros pour 30 kilomètres d'autoroute concédés et payants. Les élus de la métropole de Rouen rejettent désormais ce projet qui artificialiserait 200 hectares de sols et qui polluerait des quartiers où résident les classes laborieuses – classes dangereuses ! –, celles qui ne comptent pas pour certaines personnes résidant au centre-ville de Rouen. Votre ministère conserve pourtant ce projet antédiluvien.

Je ne reviendrai pas sur la question que je vous ai posée cet après-midi sur votre procrastination sur le fret ferroviaire.

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Cette loi immature créera une fracture sociale qui contraint l'élu communiste et rouennais que je suis à vous dire : « Nous ne voterons pas ce texte ! »

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C'est un grand jour pour l'écologie et pour notre démocratie. La France renforce encore son arsenal contre le changement climatique, après un processus démocratique inédit pour atteindre nos objectifs nationaux et lutter collectivement contre le dérèglement déjà à l'œuvre du climat. Après des mois de travail parlementaire, plus de 1 000 amendements adoptés à l'Assemblée nationale et neuf longues heures de travaux en commission mixte paritaire, nous aboutissons à un texte fort et ambitieux pour l'environnement.

Nous avons été intransigeants sur le haut niveau d'exigence écologique du texte et sur la réintroduction des mesures nécessaires pour opérer la transition du pays. Ce texte ne peut en aucun cas être considéré comme une loi au rabais. À ce titre, je salue le travail remarquable de nos rapporteurs qui ont su être à la fois inflexibles et constructifs avec les sénateurs pour faire avancer l'écologie.

Les inondations tragiques en Allemagne et en Belgique nous rappellent à nouveau combien il est impératif d'agir. Aussi cette loi répond-elle d'abord et avant tout à l'urgence climatique par des mesures puissantes : 200 milliards d'euros de commandes publiques seront orientés vers l'environnement ; 4 millions de logements mal isolés seront rénovés dans un calendrier ambitieux ; la réduction de moitié du rythme d'artificialisation des sols est décidée et planifiée ; 300 millions de repas dans la restauration collective privée contiendront 50 % de produits durables et biologiques ; les zones à faibles émissions seront bien généralisées selon le calendrier prévu par notre assemblée ; la transition du transport routier sera tenue ; enfin, notre engagement de doublement du fret ferroviaire d'ici à 2030 sera désormais inscrit dans la loi.

Avec 376 articles, la loi fera entrer toujours plus vite et plus fort l'écologie dans la vie quotidienne des Français grâce à des mesures concrètes et efficaces.

La création d'un affichage environnemental des produits sera un levier majeur pour orienter les consommateurs et évincer les productions les moins respectueuses. Je pense aussi au développement du vélo, qui est pleinement consacré : demain, les Français pourront bénéficier de la prime à la conversion de leur véhicule polluant afin d'acheter un vélo électrique, ce qui était impossible jusqu'alors, et les pièces détachées seront disponibles pour faciliter la réparation. Voilà des mesures concrètes et de bon sens, très attendues par les Français, qui ont été plus de 2 millions à bénéficier du dernier « coup de pouce vélo ».

L'accompagnement social des Français dans la transition était aussi un impératif pour notre majorité. L'écologie ne peut signifier l'exclusion ou la paupérisation des plus fragiles. C'est pourquoi la trajectoire de rénovation thermique des bâtiments ira de pair avec les aides aux ménages pour la réalisation des travaux ; la création d'un chèque alimentation durable avancera également grâce à ce texte ; enfin, nous inscrivons une hausse du plafond du forfait mobilités durables à 600 euros par an et par salarié, cumulé à un abonnement de transport public. Ce sont des avancées concrètes pour les Français.

Une écologie de terrain, telle que nous la concevons, place les élus locaux au cœur de l'action dans les territoires. Les travaux conjoints entre députés et sénateurs sur ce volet ont considérablement enrichi le texte, particulièrement sur la question de l'artificialisation des sols.

Chers collègues, l'aboutissement de cette loi est un succès incontestable pour le Président de la République…

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…car il souhaitait rassembler les Français dans la lutte contre le changement climatique en alliant démocratie délibérative et démocratie représentative : c'est chose faite !

Après la mobilisation de la Convention citoyenne pour le climat, le Parlement participe à son tour au rassemblement des Français et à la recherche d'un consensus national. En trouvant un accord, nos deux assemblées ont pris leurs responsabilités pour agir ensemble face à l'urgence climatique, après un travail parlementaire considérable qui honore nos deux chambres. Cette unité devrait tous nous inspirer à l'heure où notre pays doit encore prendre des décisions cruciales face à la crise sanitaire.

Malheureusement, sur ce texte fondamental pour l'avenir de la planète et de nos enfants, la gauche et la droite de cet hémicycle ont persisté dans des postures politiciennes, incompréhensibles pour les Français. Les Républicains rejoindront-ils leurs collègues du Sénat pour enfin contribuer au rassemblement de la société pour l'écologie initié par le Président de la République, ou s'abstiendront-ils comme en première lecture ? Comment des députés des Alpes-Maritimes pourraient-ils refuser d'adopter ce texte après le drame des vallées de la Roya et de la Vésubie ?

Protestations sur quelques bancs du groupe LR.

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Comment la gauche dite de gouvernement peut-elle balayer d'un revers de main près de 400 articles qui accélèrent la transition écologique et consolident l'engagement des Français à relever cet immense défi ? L'impératif environnemental nécessitait de dépasser les clivages pour le bien commun, mais une course à la radicalité écologiste est hélas lancée, avec l'élection présidentielle en ligne de mire. Or les Français refusent autant cette radicalité contre-productive que les incantations destinées à flatter tel ou tel groupuscule et à fracturer la société sur des enjeux aussi cruciaux. Ils ne veulent pas détruire notre prospérité nationale et mettre en péril les moyens de notre transition. Ils veulent du sérieux et des solutions concrètes, efficaces et justes. C'est ce que fait notre majorité pour atteindre nos objectifs et transformer rapidement, collectivement et durablement notre modèle.

Cette loi vient compléter un bilan déjà historique pour le climat depuis 2017, beaucoup ayant été accompli sur la mobilité, l'économie circulaire, la finance verte ou l'alimentation. En France avec le plan de relance écologique, en Europe avec le pacte vert et à l'international, la mobilisation du Président de la République et de notre majorité porte ses fruits.

Le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets est une nouvelle étape importante de la transformation écologique du pays. C'est pourquoi le groupe La République en marche l'adoptera.

Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.

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Nous y sommes ! Après des milliers d'amendements et des dizaines d'heures d'examen dans les deux assemblées, voici le moment de nous prononcer sur ce texte : pour prendre une métaphore spatiale, très à la mode, la mise en orbite est proche !

Naturellement, nous devrions ou pourrions espérer nous féliciter d'un tel travail, mais au moment de se prononcer sur ce texte, le groupe Les Républicains a le sentiment d'un grand désordre. En effet, la lisibilité de la stratégie est faible au milieu d'une batterie de mesures dont la cohérence d'ensemble n'est pas évidente – c'est un euphémisme ! –, puisqu'elles vont du petit symbole à une certaine audace. Ce manque de lisibilité apparaît encore plus criant avec le télescopage calendaire, puisque le dévoilement du paquet climatique de la Commission européenne risque de rendre ce projet de loi obsolète avant même sa promulgation.

Ce paquet climatique repose, lui, sur une stratégie très claire qui conduira à d'importantes négociations et probablement à des adaptations de notre droit national pour se conformer aux objectifs fixés : il faudra donc retravailler les sujets que nous venons de traiter depuis mars.

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Mais tout ce qui a été fait n'est plus à faire !

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Le désordre résulte également du fait que le dogmatisme a trop souvent primé sur le réalisme, et certaines mesures introduites par la droite ont été évacuées, empêchant d'obtenir un consensus. Les exemples en sont multiples : alors que la rénovation énergétique des logements représente un gisement massif de réduction des émissions de gaz à effet de serre dans notre pays, il a été mis fin au dispositif d'accompagnement financier qu'avait prévu le Sénat avec la hausse importante des prix de gros pour l'électricité pour contrer la massive précarité énergétique de l'hiver prochain, qui sera au cœur de nos débats ; alors que le Sénat avait introduit la prise en compte de l'avis des maires pour l'installation d'un parc éolien, le texte de la CMP a transformé cette étape en simple consultation obligatoire –…

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…c'est la mode avec la vaccination : on connaissait la vaccination facultativement obligatoire, voilà son pendant pour l'éolien avec cet entre-deux, ce « en même temps ». C'est bien la preuve que vous voulez poursuivre la même politique sur l'éolien, sans tenir compte des arguments budgétaires ou écologiques qui plaident pour mettre fin à cette gabegie industrielle et financière.

Au milieu de ce désordre, soyons équitables et reconnaissons que des avancées sont à saluer – je vous vois respirer, monsieur le rapporteur général : oui, il y a des points positifs ! La création d'un prêt à taux zéro nous semblait un corollaire indispensable et minimal au déploiement des zones à faibles émissions. Nous ne pouvons pas exclure des centres-villes les classes moyennes et populaires qui n'ont pas les moyens d'investir dans des véhicules plus propres. Vous y avez consenti du bout des lèvres en CMP, à une heure du matin : il a fallu faire un peu de bouche-à-bouche, mais nous y sommes parvenus !

Félicitons-nous également des progrès sur le fret fluvial et ferroviaire ou sur la prise en compte des objectifs de sécurité d'approvisionnement et de réduction des émissions de gaz à effet de serre avant l'arrêt d'un réacteur nucléaire, sujet à l'origine absent de ce texte : madame la ministre, je vous remercie d'accepter que le projet de loi aborde le nucléaire, vous qui en parlez si rarement et dans des termes beaucoup moins fleuris que ceux que le texte retient.

Pour autant, ce projet de loi contient des mesures qui feront plus de dommages qu'elles ne serviront la cause environnementale et qui nous empêchent de le soutenir. Ainsi en est-il de l'instauration d'une écotaxe qui ne dit pas son nom, ce à quoi nous ne pouvons nous résoudre,…

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…d'autant que vous prévoyez sa mise en place par ordonnance après l'élection présidentielle : le procédé, monsieur Balanant, est d'une hypocrisie sans nom ! Si vous souhaitez rétablir l'écotaxe, ayez le courage de le dire aux Français et faites-le avant que ne vienne la sanction des urnes !

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L'article 69 ter pose également un vrai problème à cause de la création d'un véritable référé spécial en matière environnementale : alors qu'il existe déjà une procédure de police administrative, ce référé fera peser un risque juridique majeur sur les entreprises : sur simple saisine d'une organisation non gouvernementale environnementale, un juge pourra ainsi, en parallèle d'une procédure administrative, mettre à l'arrêt l'activité d'une entreprise pour une durée allant jusqu'à un an, quand bien même celle-ci serait de bonne foi. Il s'agit d'un risque juridique non négligeable que les investisseurs ne manqueront pas d'intégrer à leurs calculs : il est étonnant de constater que vous supprimez les recours contre les éoliennes quand vous les multipliez pour d'autres activités.

Nous avons été le groupe parlementaire d'opposition ayant déposé le plus d'amendements et nous avons élaboré un véritable contre-projet de cinquante-sept mesures fortes en faveur d'une écologie positive. Il s'agissait d'un projet équilibré, dont nous aurions aimé retrouver les avancées dans votre texte, ce qui n'est malheureusement pas le cas.

Pour ces raisons, le groupe Les Républicains a décidé de s'abstenir sur ce texte : pour prendre une métaphore spatiale, décidément à la mode, ce n'est pas la mise à feu qui nous inquiète…

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…mais le retour à la vie réelle ; tel un satellite rentrant dans l'atmosphère terrestre et se disloquant par petits morceaux, votre texte idéologique a perdu beaucoup de ses éléments les plus néfastes. Nous craignons cependant qu'au contact du sol, c'est-à-dire de la réalité, il ne finisse par exploser en laissant un gros cratère derrière lui.

Applaudissements sur les bancs du groupe LR.

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Le texte que nous nous apprêtons à voter est l'aboutissement d'un exercice démocratique inédit, au cours duquel 150 Français tirés au sort se sont réunis pour formuler des propositions visant à atteindre notre objectif de réduction de 40 % des émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2030.

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Je souhaite saluer ici, au nom du groupe Mouvement démocrate (MODEM) et démocrates apparentés, leur implication constante tout au long de leurs travaux, en dépit d'un contexte sanitaire qui les a contraints à se montrer inventifs pour continuer à avancer.

Comme en témoignent les centaines d'heures de travail et de discussion dans les deux chambres, les parlementaires ont accueilli ce projet de loi avec la solennité et la gravité qu'appelle l'urgence climatique à laquelle nous sommes confrontés. Les mesures prévues dans ce texte s'inscrivent dans la droite ligne de la politique menée par la majorité depuis 2017, qui a donné une place de choix à la cause écologique au sein de nos actions.

Pour notre groupe, le potentiel de réduction des émissions de gaz à effet de serre que va permettre l'ensemble des titres du texte en discussion est à la hauteur de nos engagements à l'horizon 2030.

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Pour ce qui est de la modification des habitudes de consommation, une de nos priorités est de mieux informer le consommateur – qui souhaite aujourd'hui savoir avant d'acheter, quitte à ce que cela signifie acheter moins, mais mieux.

Si nous regrettons que notre proposition de mettre un terme aux usages du polystyrène n'ait pas été reprise, nous sommes particulièrement fiers que le Parlement ait fait sien le combat de notre groupe visant à interdire l'écoblanchiment, qui figure désormais dans le texte. Il ne sera plus possible pour une entreprise de vanter l'impact environnemental de son produit sans que celui-ci ait été prouvé scientifiquement.

Par ailleurs, vous connaissez l'attachement de notre groupe à la décentralisation et, avec lui, l'attention toute particulière que nous portons au fait de donner aux territoires les moyens d'être acteurs de la transition écologique. C'est pourquoi nous saluons l'adoption de mesures telles que la décentralisation du pouvoir de police de la publicité, le renforcement du rôle des élus locaux vis-à-vis de l'implantation d'éoliennes, la régionalisation des objectifs nationaux de la programmation pluriannuelle de l'énergie ou encore la possibilité d'une contribution spécifique assise sur le transport.

Avec l'adoption des dispositions du titre IV du projet de loi, réécrites pour être plus efficaces, nous agissons également sur la manière d'occuper l'espace et sur notre habitat, avec comme mot d'ordre l'accompagnement des ménages. En effet, l'État accompagnera tous les foyers français dans la rénovation thermique de leur logement afin de simplifier l'accès aux aides et de leur assurer un reste à charge minime, voire nul pour les ménages les plus modestes.

Le texte que nous discutons aujourd'hui est également un texte historique dans la mesure où, pour la première fois, nous inscrivons dans la loi l'ambition de parvenir à zéro artificialisation nette des sols d'ici à 2050 afin d'empêcher l'artificialisation des milliers d'hectares d'espaces naturels, agricoles ou forestiers, qui disparaissent chaque année. Cependant, nous avons veillé à ce que la protection des terres ne se fasse pas au détriment de la production de logements, qui constitue une priorité eu égard aux difficultés que de plus en plus de Français rencontrent pour trouver un logement décent à un prix raisonnable.

Avant de conclure mon intervention, je voudrais m'arrêter quelques instants sur les dispositions relatives à la protection judiciaire de l'environnement, qui ont été fortement enrichies grâce à l'engagement de notre collègue et rapporteur Erwan Balanant. Ses travaux ont permis de doter notre justice d'outils qui lui permettront de contribuer plus efficacement à la lutte contre le réchauffement climatique, ainsi que d'inscrire dans la loi un titre VII relatif à l'évaluation climatique et environnementale. À l'avenir, chaque article des textes qui seront examinés bénéficiera d'une évaluation environnementale afin de permettre au législateur de prendre une décision éclairée.

Malgré ce qui a pu être dit, nous nous félicitons de l'esprit constructif qui a présidé à nos travaux sur un texte qui n'est pas le fruit d'un compromis, mais bien celui d'une ambition commune : celle d'agir face à l'urgence environnementale. Le groupe Mouvement démocrate (MODEM) et démocrates apparentés votera ce texte, en espérant qu'il en sera de même sur tous les bancs de l'hémicycle.

Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur quelques bancs du groupe LaREM.

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À la fin du mois de juin, des vagues de chaleur extrême ont touché les États-Unis et le Canada ; les dômes de chaleur qui se sont abattus sur plusieurs villes ont provoqué des dizaines de morts. La forêt amazonienne est devenue émettrice de carbone. Madagascar est frappé par la famine. Il y a quelques jours, c'est le continent européen qui a été touché ; cela s'est produit en France, en Allemagne, en Belgique et aux Pays-Bas : les fortes pluies, couplées à une artificialisation des sols bien souvent excessive, ont provoqué de véritables torrents de boue qui ont tout détruit sur leur passage.

La vérité est crue, mes chers collègues : les catastrophes climatiques tuent et mettent en cause la sécurité des populations. Chaque dixième de degré supplémentaire accentuera l'intensité des phénomènes climatiques. Les chercheurs ont déjà du mal à prévoir ce genre de phénomènes. Qu'en sera-t-il demain si nous n'arrivons pas à réduire drastiquement nos émissions de gaz à effet de serre pour limiter le réchauffement à 2o C ? À quel endroit le texte traite-t-il concrètement de l'adaptation et de la résilience de notre pays face aux phénomènes naturels ?

Le projet de loi s'inscrivait dans une démarche audacieuse de démocratie participative, avec la réunion d'une Convention citoyenne pour le climat à laquelle je rends hommage. L'occasion était belle de mettre définitivement notre pays sur les rails de la neutralité carbone pour tenir réellement les engagements pris dans l'accord de Paris de 2015. Alors, ces derniers jours, comme vous, je me suis demandé si le texte adopté par la commission mixte paritaire à laquelle j'ai participé était réellement à la hauteur des enjeux auxquels nous et nos enfants serons confrontés au cours des prochaines décennies.

La réponse nous vient, tout d'abord, des différents rapports du GIEC, lequel nous alerte depuis plus de trente ans par des conclusions prémonitoires : l'effet de serre accentuera les deux extrêmes du cycle hydrologique, c'est-à-dire qu'il y aura plus d'épisodes de pluies extrêmement abondantes et plus de sécheresses – c'est ce à quoi nous assistons aujourd'hui. Si nous ne diminuons pas les émissions de gaz à effet de serre de façon drastique, ces phénomènes vont encore s'amplifier après 2030 et après 2040, nous alertent ces différents rapports.

La réponse à mon interrogation vient aussi du Haut Conseil pour le climat, instance indépendante voulue par le Président de la République ayant pour but d'analyser si nous sommes capables, au vu des normes législatives et réglementaires adoptées, de tenir les engagements que nous nous sommes fixés. Son constat est sans détour : la France devra procéder à un ajustement immédiat des calendriers et des efforts maintenant que l'Union européenne s'est fixé un objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre plus ambitieux de 55 % en 2030.

Enfin, une autre partie de la réponse se trouve dans l'arrêt Grande-Synthe du Conseil d'État, dans lequel la plus haute juridiction administrative a récemment donné neuf mois à l'État pour prendre des mesures de lutte contre le réchauffement climatique. Vous avez voulu gagner deux mois de débats, nous perdrons deux ans d'action concrète.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.

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Ces réponses viennent des plus hautes institutions scientifiques et juridiques et d'organismes indépendants dont le sérieux et l'autorité sont reconnus de toutes et tous.

Alors, que restera-t-il de ce texte qui manque d'ambition ? Après sa promulgation, nous continuerons d'être abreuvés de publicité, y compris pour des produits polluants. Les aides prévues pour le fret fluvial sont insuffisantes. Les transports en commun ne bénéficieront pas d'un taux réduit de TVA. Les zones à faibles émissions entreront en vigueur dans onze métropoles et trente-cinq agglomérations sans que nous en ayons anticipé tous les effets, et notamment d'importants effets sociaux. Le prêt à taux zéro dont vous avez rappelé l'adoption en CMP sera limité dans le temps et dans l'espace ; il ne permettra pas à l'ensemble de nos concitoyens, et notamment aux plus modestes, d'acquérir un véhicule plus propre.

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Il faut mesurer la portée de cette disposition, car c'est la liberté d'aller et venir qui sera remise en cause, avec le risque de créer une France à deux vitesses. Il faut ajouter à cela un manque d'ambition sur la rénovation thermique, l'absence de réelle interdiction de location des passoires thermiques, aucun changement agricole structurel important et une protection judiciaire de l'environnement qui se contente d'effets d'annonce comme le délit d'écocide qui, au vu des conditions fixées, ne sera sans doute quasiment jamais prononcé et démonétise le terme même d'écocide.

Nous avons, bien sûr, une responsabilité collective. Il y a aussi la responsabilité personnelle des parlementaires. Qui peut dire que nous en faisons assez pour le climat en adoptant cette loi de compromis ? Qui pourra vraiment dire à ses voisins, à ses enfants, à ses petits-enfants, que tout est réellement mis en œuvre pour les protéger et pour leur garantir un monde qui soit, demain, vivable et paisible ? Le texte est incomplet, insuffisant et contient beaucoup de demi-mesures. Il aurait mérité d'être repris, amélioré et complété en seconde lecture. Il aurait fallu intégrer davantage de nos amendements et des propositions du Haut Conseil pour le climat.

Vous l'aurez compris, nous voterons contre ce texte qui n'apportera pas de changements concrets pour le climat et pour l'environnement.

Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.

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Dans la vie de nos concitoyens, il risque au contraire de créer de grandes frustrations. Nous avons besoin de gages de cohésion sociale.

Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.

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Comme vous n'avez rien fait entre 2012 et 2017, vous êtes fidèles à vous-mêmes !

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Le texte que nous examinons aujourd'hui est d'abord un texte qui change le quotidien des Français. Issu d'une expérience démocratique inédite, celle de la Convention citoyenne pour le climat, le projet de loi vise à lutter contre le dérèglement climatique et à renforcer la résilience de notre pays face à ses effets. Il constitue une loi fondatrice pour l'environnement. Avec ce texte, la France démontre qu'elle est au rendez-vous des engagements internationaux qu'elle a pris en matière de climat et de biodiversité. Notre majorité fait ainsi entrer définitivement et positivement l'écologie dans le quotidien des Français à l'heure où, plus que jamais, celui-ci est marqué par des catastrophes naturelles dramatiques qui nous rappellent qu'il est temps, pour chacun, d'agir.

Avec ce projet de loi, beaucoup de choses vont changer dans notre façon de consommer, de produire, de travailler, de nous déplacer, de nous loger et d'habiter, de nous nourrir, aussi. D'aucuns pourront dire que nous n'allons pas assez loin ou pas assez vite, mais personne ne pourra nier qu'il y aura un avant et un après et que nous ne reviendrons pas en arrière en matière d'écologie. C'est une stratégie des petits pas, certes, mais elle avance sans reculer en s'assurant que personne ne reste au bord de la route. Cette stratégie, vous l'avez toujours défendue, madame la ministre, et je salue votre courage et votre constance en la matière.

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Le texte fait honneur au Parlement. Un an de travail depuis la Convention citoyenne pour le climat, douze jours de débats en commission spéciale, trois semaines en séance publique et un mois de débats au Sénat : ce texte est bien un enfant qui a été bercé dans les bras de notre démocratie. Il est important de le rappeler compte tenu du changement qu'il apporte dans nos vies.

Lundi 12 juillet, après neuf heures de négociations et l'examen de 378 articles, députés et sénateurs se sont mis d'accord pour maintenir l'ambition du texte et sont parvenus à une CMP conclusive. De 69 articles au départ, le projet de loi est passé à 378 après l'examen au Sénat, où le texte a été consolidé et enrichi de nouvelles avancées. Le groupe Agir ensemble, attaché au rôle du Parlement, ne peut que se réjouir de voir le travail des deux chambres aboutir positivement. Ce travail commun sur un sujet essentiel qui doit nous rassembler, celui du climat et de l'environnement, fait honneur à nos assemblées. Comme mes collègues, j'adresse mes félicitations aux rapporteurs qui ont permis cette conclusion.

Le texte répond à la plupart des attentes exprimées par le groupe Agir ensemble. Nous avions trois combats à l'ouverture du débat. Le premier était celui du réalisme environnemental : il s'agissait notamment d'inscrire la préservation de la biodiversité dans un projet de loi à l'origine trop exclusivement centré sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre et sur la lutte contre le réchauffement climatique. Ce combat nous semble gagné, et nous nous en félicitons : dans chaque titre, depuis l'éducation des plus jeunes jusqu'à l'évaluation de la loi, en passant par les projets d'aménagement et la protection des forêts et des chemins, les enjeux de la biodiversité sont toujours associés à ceux du climat.

Notre deuxième combat était celui du réalisme social. La transition écologique ne peut se faire sans justice sociale, ni sans le souci des plus modestes. Nous avions insisté sur la nécessaire simplification des aides à la rénovation et sur la réduction au minimum du reste à charge pour une rénovation globale. Sur ce point, madame la ministre, tout n'est pas acquis, et nous resterons vigilants ; nous tenons néanmoins à saluer une belle mesure de justice sociale apportée par le Sénat, celle du prêt à taux zéro pour l'achat d'un véhicule propre pour les Français les plus modestes vivant à proximité des ZFE.

Notre troisième combat était celui du réalisme économique, notamment à travers la question de la compensation pour les entreprises. Nous avions milité pour que des mécanismes de marché vertueux intégrant une compensation carbone, mais aussi une compensation en matière de biodiversité, soient mis en place. Sur ce point, nous avons commencé à être entendus, mais beaucoup reste à faire et d'immenses chantiers sont à venir, notamment celui de l'efficience du marché carbone européen et la création d'un mécanisme d'ajustement carbone aux frontières de l'Union européenne.

Je ne doute pas que ces chantiers, celui de la justice sociale et celui de la compensation, seront parmi les combats que vous mènerez aux côtés du Président de la République dans le cadre de la prochaine présidence française de l'Union européenne. Sachez que pour cette loi, mais aussi pour porter haut le projet écologique de la France à la tête de l'Union européenne, vous pourrez compter sur les membres du groupe Agir ensemble. Vous l'aurez compris, notre groupe votera le texte issu de la CMP et, fidèle à ses valeurs libérales, sociales et européennes, il continuera à soutenir l'initiative française en matière de transition écologique.

Applaudissements sur les bancs du groupe Agir ens et sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.

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Eh bien, nous, nous nous abstiendrons. C'est la position que j'ai proposée à notre groupe avec mon collègue Guy Bricout, car nous étions tous deux les porteurs de message sur ce texte, et je vais m'en expliquer.

Vous avez dû mesurer, madame la ministre, combien il est difficile de proposer, en tant que ministre, des textes qui traitent d'écologie et de transition écologique. Je me souviens de vous comme si c'était hier, lorsque vous étiez députée et que vous ferrailliez dans l'hémicycle pour défendre vos convictions et vos idées, notamment lors de la loi EGALIM.

Il y a de bonnes choses dans votre texte ; c'est bien pour cela que j'ai proposé ce matin aux autres membres du groupe UDI et indépendants de nous abstenir sur ce projet de loi plutôt que de nous y opposer.

Votre texte est lacunaire sur plusieurs de nos sujets de préoccupation, dont l'éolien. En effet, nous regrettons que ce texte ne rétablisse pas les zones de développement éolien. Je le dis et le redis : actuellement, certains promoteurs de l'éolien sont mus par l'appât du gain davantage que par le souci de la transition écologique.

MM François-Michel Lambert et Jean-Paul Dufrègne applaudissent.

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Quand ils approchent les propriétaires de terrains, les exploitants agricoles et les élus locaux, c'est pour les « sensibiliser » à la question à coups de financements. C'est comme cela qu'ils obtiennent l'accord pour implanter des éoliennes ! Les zones de développement éolien permettraient au contraire de planifier en toute transparence les projets.

Nous avons un autre regret, madame la ministre. Malgré un bon débat dans l'hémicycle, nous n'appliquons pas le moratoire sur l'implantation de mètres carrés commerciaux en périphérie des villes annoncé par Édouard Philippe quand il était Premier ministre. Le moratoire ne concernera finalement que les surfaces supérieures ou égales à 10 000 mètres carrés ; en dessous de cette surface, le texte prévoit des dérogations à tout va. Résultat des courses : rien ne changera dans les projets d'urbanisme commercial des villes moyennes et des grandes villes. Or on sait très bien que les grandes surfaces sont le moteur des zones d'activité commerciale situées en périphérie et l'emblème d'un mode de consommation, celui des années 1960 et 1970 : le consumérisme à outrance. Si vous voulez changer les comportements, il aurait fallu un moratoire de trois ans sur l'implantation de mètres carrés par la grande distribution.

Nous avions également débattu de l'instauration de clauses environnementales et sociales. Je compte parmi les vingt et quelques députés élus en Bretagne et j'aurais aimé que pour le granit, comme pour le textile, un affichage social soit prévu, en sus d'un affichage environnemental. On saurait ainsi quels granits sont extraits dans des régions où les enfants doivent taper sur des cailloux et quels textiles sont produits par des enfants, au Bangladesh ou autre.

Applaudissements sur les bancs du groupe GDR. – MM. Dominique Potier et Bertrand Pancher applaudissent également.

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J'ai trouvé ce débat important ; cela aurait dû être prévu.

Je regrette en outre que vous et votre majorité, madame la ministre, ayez jugé utile d'obliger la restauration collective à proposer des plats végétariens – même si cela restera une option parmi d'autres. En France, nous ne sommes pas suffisamment attentifs aux initiatives des territoires. Je suis député d'Ille-et-Vilaine, comme la présidente de la commission mixte paritaire, Mme Laurence Maillart-Méhaignerie. Celle-ci connaît donc l'association Bleu-Blanc-Cœur, qui travaille depuis vingt ans sur la mesure des émissions de méthane à partir des rations des animaux et sait aujourd'hui les calculer, ce qui importe, sachant que 1 tonne de méthane équivaut à 30 tonnes de CO2. Le dispositif de mesure de cette association, dont le siège se trouve en Ille-et-Vilaine, est le seul au monde agréé par les Nations unies.

Je regrette que nos débats, en commission spéciale comme dans l'hémicycle, aient continué d'alimenter la querelle entre filières animales et végétales.

Pour toutes ces raisons, au-delà des éléments positifs de votre projet de loi, le groupe UDI et indépendants s'abstiendra.

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Madame la ministre, madame la présidente de la commission, mesdames et messieurs les rapporteurs – puisque vous vous êtes mis à plusieurs pour commettre ce texte –, collègues parlementaires, l'inondation de la vallée de la Roya a causé neuf morts et neuf disparus ; les coulées de boue au Japon, quinze morts et quatorze disparus ; la bulle de chaleur au Canada a entraîné une centaine de morts et entièrement rayé un village de la carte ; au moins 191 morts sont à déplorer après les inondations dans l'Est de la France, en Belgique et en Allemagne.

Le texte que vous soumettez à un vote définitif est un affront pour ces victimes et pour nous tous. Appelé abusivement projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, il n'intègre même pas l'essentiel. Exemple criant : la gestion de nos forêts est entièrement absente du texte. Pourtant, elles jouent un rôle incontournable dans le cycle de l'eau et dans la régulation du climat ; c'est encore plus vrai maintenant qu'il s'agit d'amortir les effets dévastateurs des épisodes climatiques épouvantables – pics de chaleur ou précipitations extrêmes. Mais de tout cela, vous ne voulez pas parler, car vous ne voulez pas sortir de votre inaction coupable. Si nous ne plantons pas de haies, d'arbres, et ne restaurons pas les zones humides, c'est inévitable : nous verrons encore des torrents dévaler les pentes pour emporter des villes entières et briser des vies.

Votre texte ne prévoit rien non plus concernant l'arrêt de la bétonisation massive des sols,…

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…alors que ceux-ci doivent retrouver leur fonction initiale : permettre l'infiltration de l'eau et son stockage dans les nappes souterraines. Mais il est vrai que depuis quelques années, vous confiez l'aménagement du territoire à Vinci, Bouygues, Auchan, Carrefour ou Leclerc.

Je note quand même que, fidèles à votre dogme de la concurrence et de la compétitivité, vous avez accompagné un nouvel acteur économique pour nous aider à lutter contre le réchauffement climatique et la bétonisation : Amazon. Oui, Amazon et son patron Jeff Bezos, un ami du président Macron.

Exclamations sur les bancs des groupes LaREM et Dem.

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Jeff Bezos lutte jour et nuit pour nous épargner le chaos climatique, avec ses entrepôts qui recouvrent des milliers de mètres carrés de terres, avec ses avions et ses camions qui émettent des tonnes de CO2 pour livrer en vingt-quatre heures depuis Taïwan un grille-pain connecté, ou encore avec ce tourisme spatial pour celles et ceux qui veulent voir depuis l'espace l'état dans lequel ils ont mis notre planète. Vous déroulez le tapis rouge à ces géants qui détruisent non seulement l'environnement, mais aussi le tissu économique et social local.

Concernant la production alimentaire, soyez tranquilles, les lobbyistes s'occupent de tout. Inutile de se poser mille questions, tout va continuer comme avant, sans accélération de la relocalisation et de la transition de notre agriculture vers des pratiques écologiquement soutenables et rémunératrices pour nos agriculteurs. Pas un pas ne sera fait pour imposer des alternatives végétariennes dans les menus de la restauration collective.

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Celles-ci constituent pourtant un outil puissant pour redynamiser la production maraîchère locale et la rendre rémunératrice.

Concernant les secteurs les plus énergivores et donc émetteurs de gaz à effet de serre, tout le monde espérait que vous aviez intégré une logique simple : l'énergie la moins polluante est celle que l'on ne consomme pas. La sobriété énergétique aurait donc dû être au cœur des mesures permettant une bifurcation de nos modes d'organisation. C'était sans compter que Total, roi du pétrole, ou encore MM. Bolloré, Niel, Pinault, et j'en oublie, princes du superflu publicitaire, ont sans doute tenu le stylo et surtout la gomme du Gouvernement. Les investissements massifs dans les transports ferroviaires ont été oubliés. La rénovation thermique ambitieuse des bâtiments a été repoussée à après le déluge. On propose d'encadrer la publicité pour les produits les plus polluants ? Même pas en rêve ! Quant à la fin des navettes aériennes intérieures, c'est un crash avant même le décollage ! Quand on regarde le tableau final, il apparaît clairement que les entreprises du CAC40 ont mené un puissant travail de lobbying sur ce projet de loi, pour en réduire la portée. Ils ont bien sûr atteint leur objectif.

Enfin, l'accord que vous avez conclu en douce avec la droite sénatoriale permet au président Macron de clore sa séquence de communication « écolo » et de s'éviter, à la rentrée, un nouveau débat parlementaire

M. Dominique Potier applaudit

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qui aurait permis de démontrer une fois de plus votre inaction climatique.

Applaudissements sur les bancs du groupe FI.

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…ont causé neuf morts et neuf disparus, les coulées de boue au Japon, quinze morts et quatorze disparus ; la bulle de chaleur au Canada a entraîné une centaine de morts…

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Monsieur Prud'homme, s'il vous plaît, le temps est écoulé !

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…et entièrement rayé un village de la carte. Je termine, monsieur le Président.

Exclamations continues sur divers bancs.

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Les inondations dans l'Est de la France, en Belgique et en Allemagne ont au moins causé 191 morts.

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Mes chers collègues, s'il vous plaît : M. Prud'homme s'apprête à conclure.

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Votre greenwashing stérile a un coût qui se compte en vies humaines.

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Il est assez désagréable que vous coupiez la parole à un collègue qui a été légitimement élu et qui était prêt à conclure. Monsieur Millienne, vous n'aviez pas à provoquer cette agitation…

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Eux, ils n'en provoquent jamais, peut-être ? C'est leur habitude !

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C'est à moi qu'il revient de présider et non à vous.

Applaudissements sur les bancs du groupe FI.

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J'appelle maintenant le texte de la commission mixte paritaire.

Conformément à l'article 113, alinéa 3, du règlement, je vais appeler l'Assemblée à statuer d'abord sur les amendements dont je suis saisi.

Sur l'ensemble du projet de loi, je suis saisi par le groupe La République en marche d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Le Gouvernement présente vingt-neuf amendements. Après en avoir discuté avec Mme la ministre, je vous propose de lui donner la parole pour qu'elle présente leur philosophie globale. M. le rapporteur s'exprimera ensuite ; j'accorderai enfin une intervention pour chaque groupe qui souhaitera intervenir, puis nous procéderons aux votes successifs.

La parole est à Mme la ministre, pour soutenir les amendements n° 7 , 19 , 20 , 4 , 3 , 8 , 9 , 1 , 26 , 25 , 10 , 18 , 2 , 5 , 6 , 23 , 11 , 24 , 27 , 30 , 31 , 22 , 21 , 12 , 13 , 29 , 14 , 15 et 16 , qui peuvent faire l'objet d'une présentation groupée.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Je serai brève. Il s'agit d'amendements rédactionnels, d'amendements de levée des gages qui avaient été intégrés au texte ou d'amendements de coordination et de cohérence, qui ont été étudiés avec les représentants des deux chambres et visent seulement à rendre pleinement effectives les dispositions adoptées en CMP. Il ne s'agit en rien du fond, seulement de la forme.

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Quel est l'avis de la commission sur ces amendements ?

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Je donnerai un avis favorable. Nous avons étudié avec les sénateurs ces amendements rédactionnels, qui ne changent absolument pas le fond du texte adopté en CMP.

Les amendements n° 7 , modifiant l'article 5 ter ; 19 et 20, modifiant l'article 15 ; 4 et 3, modifiant l'article 19 quater ; 8, modifiant l'article 20 bis AA ; 9, modifiant l'article 22 A ; 1, modifiant l'article 22 ; 26, modifiant l'article 22 bis K ; 25, modifiant l'article 22 bis ; 10, modifiant l'article 24 ; 18, modifiant l'article 26 A ; 2, modifiant l'article 27 ; 5, modifiant l'article 29 bis AC ; 6, modifiant l'article 31 B ; 23, modifiant l'article 40 ; 11, modifiant l'article 41 ; 24, modifiant l'article 45 quinquies E ; 27, modifiant l'article 46 bis ; 30, modifiant l'article 48 ; 31, modifiant l'article 49 ; 22, modifiant l'article 52 ; 21, modifiant l'article 54 bis ; 12, modifiant l'article 58 A ; 13, modifiant l'article 58 J ; 29, modifiant l'article 59 ; 14, modifiant l'article 62 bis ; 15, modifiant l'article 64 ter ; et 16, modifiant l'article 69 bis, sont successivement adoptés.

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Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire modifié par les amendements qui viennent d'être adoptés.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 342

Nombre de suffrages exprimés 268

Majorité absolue 135

Pour l'adoption 233

Contre 35

Le projet de loi, amendé, est adopté. – Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem et Agir ens.

Suspension et reprise de la séance

La séance, suspendue à dix-neuf heures cinq, est reprise à dix-neuf heures dix.

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L'ordre du jour appelle la discussion en nouvelle lecture du projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2020 (4377, 4384).

La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.

Debut de section - Permalien
Olivier Dussopt, ministre délégué chargé des comptes publics

Nous nous retrouvons pour une nouvelle lecture du projet de loi de règlement pour 2020, à la suite du rejet du texte par le Sénat en première lecture et de l'incapacité de la commission mixte paritaire à trouver un terrain d'entente. Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire devant vous, l'exécution 2020 est exceptionnelle, du fait de l'importance des écarts constatés entre les chiffres exécutés et les chiffres prévus en loi de finances initiale pour 2020. Ces écarts tiennent à la récession, évaluée à 7,9 % du PIB, et à des dépenses exceptionnelles – le tout ayant creusé le déficit public jusqu'à atteindre 9,2 % du PIB.

Vous avez tous en tête les principaux dispositifs impliqués dans le creusement de ce déficit par les dépenses induites : l'activité partielle, pour plus de 35 milliards d'euros, dont 26 milliards d'euros en 2020 ; le fonds de solidarité pour les entreprises, indépendants, entrepreneurs, pour 31 milliards d'euros ; ou encore les prêts garantis par l'État, bien que ces derniers n'entraînent pas de dépenses à effet immédiat. D'autres soutiens sont intervenus, notamment les exonérations de cotisations.

Nous avons toujours veillé, au cours de cet exercice 2020, à disposer des ressources nécessaires pour financer les mesures d'aide aux entreprises et disposer de la trésorerie requise par le paiement des aides. Les montants des crédits prévus se sont d'ailleurs parfois avérés plus importants que les montants réellement consommés, l'activité économique s'étant maintenue à un meilleur niveau que ce que nous craignions. Ces dispositifs ont été efficaces pour la prévention des faillites, le maintien du pouvoir d'achat des Français – qui a augmenté de 0,4 % en 2020 –, ou encore la préservation de la capacité de financement des collectivités locales.

C'est cette exécution que je vous propose d'approuver, comme vous l'aviez fait en première lecture. Ce déficit historique, à hauteur de 9,2 % du PIB, témoigne à la fois de la perte de recettes liée à la crise et des dépenses exceptionnelles engagées. Ces dépenses ont été rendues possibles par un recours aux marchés financiers, effectué dans des conditions favorables grâce aux efforts de redressement engagés précédemment : respect de la règle des 3 %, baisse du taux de prélèvements obligatoires, diminution de la part de la dépense publique dans le PIB.

Pour l'avenir, il nous faudra évidemment tenir compte de ce déficit et nous inscrire dans une trajectoire de redressement des finances publiques. Pour y parvenir, notre action se déploiera sur quatre axes : la croissance, que nous souhaitons maximiser au moyen du plan de relance ; la sortie progressive des dispositifs d'urgence, moyennant une attention constante à la situation sanitaire ; le sérieux dans la gestion des dépenses ordinaires et une amélioration du pilotage et de la gouvernance des finances publiques. C'est le sens des propositions de loi organique adoptées hier soir par votre assemblée à l'initiative de M. Thomas Mesnier, pour la commission des affaires sociales, et de M. Éric Woerth et M. Laurent Saint-Martin pour la commission des finances – textes qui nous seront utiles pour améliorer cette gouvernance.

Je suis particulièrement bref, car vous connaissez tous le contenu de la loi de règlement que nous avons examinée ensemble il y a un mois. Après l'échec de la CMP et le rejet du Sénat, je vous appelle à confirmer l'approbation des comptes pour l'année 2020.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.

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La parole est à M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.

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Nous nous retrouvons pour examiner le projet de loi de règlement pour 2020, après l'échec de la commission mixte paritaire que nous avons accueillie à l'Assemblée il y a quelques jours. Nous n'avons pas pu trouver avec le Sénat le compromis dont nous avions pris l'habitude pour les cinq projets de loi de finances rectificative adoptés depuis le début de la crise.

La Chambre haute a choisi de rejeter chaque article du projet de loi, donc le texte dans son ensemble. Il s'agit pour le Sénat de souligner la situation déséquilibrée de nos finances publiques et, peut-être plus encore, de critiquer certains aspects de leur gestion en 2020 et 2021, notamment au titre des reports massifs de crédits effectués entre ces deux exercices au service des programmes d'urgence.

Comme je l'ai évoqué à de nombreuses reprises, je comprends certaines réserves relatives à cette gestion. Cependant, nous devons tous reconnaître, de façon responsable, la particularité de la période et la difficulté que nous éprouvons, aujourd'hui encore, à nous projeter au-delà de quelques mois pour la gestion de nos finances publiques. L'essentiel est à mes yeux qu'en 2020, comme en 2021, pas un centime autorisé par le Parlement n'a manqué aux Français – ni pour leurs revenus, ni pour leur emploi, ni pour l'activité économique.

Vous connaissez le contenu du texte. Il a peu à voir avec la loi de finances initiale de 2020, et tout à voir avec les lois de finances rectificatives successives de l'année dernière. C'était une réponse politique, technique, nécessaire face à la crise.

Pour rappeler les grands chiffres de l'année, le déficit public atteint 211,5 milliards d'euros – soit un niveau inédit depuis la création des comptes nationaux en 1949. Le déficit de l'État est un peu moins élevé, à hauteur de 178,1 milliards d'euros. Cela tient au fait que le budget de la sécurité sociale s'est retrouvé en première ligne de la réponse apportée à la crise. Les dépenses publiques ont atteint à l'évidence un niveau jusqu'alors inconnu, le montant total dépensé en 2020 – pour l'urgence, et pour la relance – s'élevant à 74 milliards d'euros. Il faut se rendre compte de l'ampleur du bouleversement que cela représente. Ce chiffre est juste un peu moins élevé que le montant du déficit des administrations publiques en 2019. Le niveau devrait être encore plus élevé en 2021, à hauteur de 107,5 milliards d'euros. C'est aussi le signe que la crise et la relance sont, en 2021 comme en 2020, notre pain quotidien.

L'exercice 2020 a permis d'expérimenter, puis d'affiner la double démarche qui est la nôtre et celle du Gouvernement avec, après la gestion de l'urgence, l'impulsion donnée à la relance de l'économie. L'évolution sanitaire nous a imposé une réponse pragmatique – c'est toujours le cas aujourd'hui –, adaptée et sur mesure, qui n'a ni freiné la relance ni empêché le sauvetage d'urgence.

La séance d'aujourd'hui intervient à un moment de réflexion intense autour de nos finances publiques, entre le débat d'orientation des finances publiques qui s'est tenu à l'Assemblée jeudi dernier et les textes organiques que nous avons adoptés hier en première lecture.

Les évolutions sans précédent de nos finances publiques imposent une réflexion exigeante sur la stratégie qui sera la nôtre en sortie de crise. Nous devrons nous assurer de la soutenabilité de notre dette publique, avec des choix qui seront assez fondamentaux.

La prochaine loi de programmation des finances publiques sera l'occasion de porter ces choix. Toutes les options sont sur la table ; je pense pour ma part qu'il nous faudra accélérer la relance de l'économie, peut-être dès la rentrée, afin de nourrir le plus possible la croissance qui nous permettra de dégager des recettes supplémentaires.

Après le saut massif que nous avons connu en 2020 et 2021, l'évolution de la dépense publique devra être mieux comprise et mieux encadrée. L'année 2022 devrait marquer la fin du « quoi qu'il en coûte » – nous le souhaitons tous – et la mise en place d'une politique budgétaire qui, à moyen terme, aura pour but de maîtriser la dépense pour faire diminuer notre endettement public.

Les Français savent à quel point nous avons mobilisé l'outil de la dette pour faire face à la crise, et d'ailleurs un grand nombre s'en inquiètent – c'est très légitime. La dette publique s'élevait à un peu plus de 2 000 milliards d'euros à la fin de l'année 2020 ; c'est un niveau inconnu dans notre histoire récente.

Dès lors, notre rôle sera de proposer une stratégie de finances publiques réaliste, cohérente et pragmatique afin d'alimenter la confiance essentielle à notre vie démocratique et économique dans les années à venir.

Je ne reviendrai pas sur les avancées que nous avons adoptées hier soir dans le cadre de l'examen de la proposition de loi organique relative à la modernisation de la gestion des finances publiques.

Après avoir rappelé ces quelques éléments fondamentaux, je vous propose d'adopter le projet de loi de règlement dans sa version issue de l'Assemblée nationale, le Sénat l'ayant rejeté en bloc.

Tous les groupes ont reconnu, tant en 2020 qu'au cours des derniers mois, que la nécessaire réponse publique qui devait être apportée à la crise a été, au moins partiellement, la bonne. Votre soutien collectif au présent texte, au-delà des clivages politiques, permettra de clore les comptes d'une année exceptionnelle.

En tant que rapporteur général, je mesure toute la complexité à laquelle nous avons dû faire face, mais également toute la fierté qui fut la mienne de vous accompagner au cours de l'année 2020. .

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM, Dem et Agir ens

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La parole est à M. le président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.

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J'évoquerai quelques faits saillants concernant ce projet de loi de règlement qui, au fond, nous fait regarder vers le passé tout en nous fournissant quelques éléments pour mieux affronter l'avenir.

Tout d'abord, l'année 2020 a évidemment été très exceptionnelle. En loi de finances initiale, le déficit budgétaire était prévu à 93 milliards d'euros ; il s'établit finalement à 178 milliards – pour mémoire, après la crise de 2008, le déficit public de l'année 2009 était inférieur de 30 milliards.

Le deuxième fait saillant, ce sont les reports massifs de crédits de 2020 sur 2021 : 36 milliards d'euros. C'est tout de même un élément très marquant du projet de loi de règlement et des phénomènes budgétaires de l'année 2020 – c'est d'ailleurs pour cela que le Sénat a considéré que le budget n'était pas sincère.

Troisièmement, la crise n'explique pas l'ensemble des dépenses. Comme la Cour des comptes, je l'avais déjà indiqué : 7 milliards correspondent à des dépenses supplémentaires qui ne sont imputables ni à la crise, ni à la relance, ni surtout au plan d'urgence. Cinq missions du budget général connaissent une hausse de dépenses hors crise supérieure à 1 milliard d'euros. La crise ne peut pas être un prétexte pour dépenser sur toutes les lignes – chacun le comprendra bien, mais malheureusement cela ne semble pas être le cas aujourd'hui. Dans le cadre du débat d'orientation des finances publiques, en regardant un peu devant nous cette fois-ci, nous avons d'ailleurs eu la confirmation que la réduction des dépenses publiques n'était pas vraiment à l'ordre du jour, ni celle d'ailleurs des emplois publics sans laquelle il ne peut y avoir de contrôle et de maîtrise de la dépense publique.

Dernier point très saillant, le rapporteur l'a indiqué, c'est l'évolution de l'endettement. Poussé par la crise, il s'établit à un niveau très élevé. Comme chacun le sait, cet endettement est évidemment une pierre dans le jardin de la France – il sera très compliqué de le réduire. Rien dans la stratégie du Gouvernement pour les années qui viennent n'est de nature à nous rassurer. La vérité, c'est que la France est vulnérable à toute hausse, voire à tout frémissement de la courbe des taux d'intérêt.

Hier, nous avons pu adopter une proposition de loi organique que le rapporteur général et moi-même avions déposée et nous avons eu un bon débat. Elle permettra une modernisation de nos outils de gestion des finances publiques, mais cela n'aura d'intérêt que si on y met une bonne politique – les bons outils fonctionnent bien quand ils permettent d'éclairer une bonne politique. Nous aurons besoin, durant l'année 2022, de signes très forts pour montrer que la France n'est pas abonnée aux déficits et qu'il n'y a pas de fatalité pour que la France vive au-dessus de ses moyens, quitte à en payer, à un moment donné, les lourdes conséquences.

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Dans la discussion générale, la parole est à Mme Véronique Louwagie.

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L'échec de la commission mixte paritaire a confirmé l'ampleur des désaccords qui perdurent entre la vision des finances publiques que nous partageons avec la droite sénatoriale et celle du Gouvernement depuis 2017. Nous faisons de notre souveraineté budgétaire une priorité pour l'avenir des générations futures et nous défendons une gestion courageuse des deniers publics, tandis que vous vous désintéressez très largement du sujet, le reléguant au second plan.

Dans ce projet de loi de règlement, je tiens d'ailleurs à dénoncer moi aussi, comme l'a fait le président de la commission des finances, les montants très importants des crédits non consommés et donc les reports massifs de 2020 sur 2021 qui en découlent, à hauteur de 36 milliards d'euros. Dès lors, nous ne pouvons que nous interroger sur la sincérité budgétaire du texte. Enfin, nous dénonçons une nouvelle fois l'illisibilité de la répartition des crédits entre urgence, relance et budget ordinaire.

Certes, l'année 2020 restera dans les annales comme l'année de la pire récession du XXIe siècle. Notre PIB s'est contracté de plus de 8 points, bien plus qu'ailleurs en Europe. En conséquence, nos finances publiques se sont brutalement et considérablement dégradées. Notre déficit budgétaire s'envole pour atteindre 178 milliards d'euros, et notre dette explose à 115 % du PIB.

Face à cette crise inédite, l'État a joué son rôle d'amortisseur conjoncturel et nous le saluons. C'était indispensable pour préserver, autant que possible, les ménages et les entreprises durant la tempête. C'est la raison pour laquelle, avec mes collègues députés Les Républicains, nous avons soutenu l'impératif du « quoi qu'il en coûte », et défendu les mesures de soutien à l'activité économique. Nous avons d'ailleurs, en responsabilité, voté les quatre projets de loi de finances rectificative de l'année 2020, tout en réaffirmant qu'il faudra assumer les conséquences des mesures budgétaires que nous avons votées.

Mais le problème, ce n'est pas tellement la gestion des finances publiques en 2020. Non, ce que nous dénonçons sans relâche, c'est l'absence totale de maîtrise des comptes publics lors des trois années de croissance qui ont précédé l'émergence du covid-19.

En effet, contrairement à l'Allemagne, la France a été incapable, ces dernières années, de profiter de la croissance pour engager des réformes structurelles courageuses et rétablir ainsi l'équilibre de nos finances. La réforme des retraites est complètement à l'arrêt et votre ambition réformatrice n'est plus désormais qu'un vieux souvenir. Bien au contraire, depuis 2017, les dépenses publiques n'ont cessé d'augmenter, nous plaçant en situation de fragilité relative au moment d'aborder la crise.

Alors qu'en 2019, vingt-trois des vingt-huit pays de l'Union européenne se sont désendettés, la France faisait, quant à elle, partie des cinq pays qui continuaient d'augmenter leur dette. On l'a dit – et nous continuerons –, la crise ne peut pas et ne doit pas servir d'excuse à tous vos renoncements.

Avant la crise, la France était déjà championne d'Europe de la dépense publique ; avant la crise, la France détenait déjà le record européen des prélèvements obligatoires ; avant la crise, la France avait déjà l'un des pires déficits de la zone euro, 3 % du PIB, contre 0,9 % en moyenne dans la zone euro ; avant la crise, la dette française frôlait déjà les 100 % du PIB, contre 60 % en Allemagne, et 80 % dans l'Union Européenne. Même votre promesse de réduire les effectifs de l'État de 50 000 fonctionnaires a été abandonnée, bien avant l'émergence du covid.

C'est la raison pour laquelle les députés Les Républicains s'inscriront dans les pas de la majorité du Sénat et voteront contre le projet de loi de règlement en nouvelle lecture.

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Je pensais que ma prise de parole serait l'occasion de faire mon discours concernant la lecture définitive du projet de loi de règlement et d'approbation des comptes de l'année 2020. Mais, comme on dit chez moi, que nenni ! Le Sénat n'a pas adopté le projet de loi, avec seulement 50 voix pour sur 345 votants. Nous avons eu une commission mixte paritaire assez lunaire et, de fait, non conclusive. Je cherche encore à comprendre comment et pourquoi.

Oui, plusieurs choses auraient pu être mieux faites et les chiffres que nous examinons aujourd'hui peuvent donner un sentiment de vertige. D'aucuns – et notamment nos collègues sénateurs – formulent des critiques sur les surbudgétisations opérées notamment dans le cadre de la quatrième loi de finances rectificative. Rétrospectivement, il est vrai qu'elles apparaissent très importantes et interpellent le législateur budgétaire que nous sommes. Nous l'avons nous-mêmes dit en première lecture. Toutefois, elles ne paraissent pas illogiques : fondées sur les estimations du coût du premier confinement, elles réclamaient d'importants crédits, notamment en faveur de l'activité partielle et du fonds de solidarité. À l'époque, il était difficile de prévoir que les conséquences économiques du deuxième confinement seraient nettement atténuées, comme il était difficile d'en avoir une estimation fiable.

Je voudrais d'ailleurs rappeler à nos collègues sénateurs qu'à l'époque, même si cela paraît lointain, ils avaient voté les quatre projets de loi de finances rectificative. Aujourd'hui, il m'apparaît étonnant – voire désolant – de voir le Sénat rejeter en bloc la loi de règlement. En clair, nous ne sommes même pas capables de nous entendre sur le bilan de l'année précédente. Pour moi, c'est un instant de vide sidéral au Parlement.

Par ailleurs, comme vous le savez, une procédure accélérée est engagée sur le projet de loi ; c'est tout à fait logique sur ce type de texte. Mais là encore, accélérer et passer au lendemain, on ne sait vraiment pas faire. Faut-il ralentir, au motif que certains ne voudraient pas suivre ? Cela me sidère également au vu des enjeux auxquels nous sommes désormais confrontés. Monsieur le ministre délégué, permettez-moi de vous rassurer : jeudi, nous serons encore présents pour la lecture définitive et vous donner notre quitus concernant l'exercice budgétaire 2020.

Enfin, sur le fond, je formulerai quelques remarques sur l'année 2020. J'aurais pensé qu'elles convaincraient nos amis sénateurs pour voter la loi de règlement. D'abord, l'exercice 2020 pour lequel nous sommes invités ce soir à donner quitus au Gouvernement a été exceptionnel à tout point de vue : tant concernant son déroulement, les chiffres que je ne vais pas rappeler, que concernant l'engagement de l'État, qui a été au rendez-vous pour protéger les Français contre la crise sanitaire et faire face à ses conséquences économiques et sociales.

Pour une année exceptionnelle, oui, il fallait être exceptionnel. Nous le disions d'ailleurs tous l'an passé à la même époque : ces mesures étaient indispensables. Indispensables, tout d'abord, parce qu'il a fallu, pour préserver la santé de nos concitoyens, prendre des décisions très fortes ; indispensables aussi, pour le pendant économique, car une entreprise qui disparaît, c'est un tissu de relations, un savoir-faire, une culture, une communauté perdus à jamais. Rappelons ce que nous avons fait : le prêt garanti par l'État, le fonds de solidarité, l'activité partielle et les reports de charges sociales et fiscales.

Deux mille vingt fut aussi l'année de la résilience des recettes – non pas, bien évidemment, par rapport à la loi de finance initiale, mais surtout, comme l'a souligné le rapporteur général, au vu de l'impact économique des premiers mois de la pandémie. Les prévisions ont été bien plus difficiles à établir que nous ne le pensions.

Enfin, sur le plan européen, grâce à l'action du Président de la République, nous sommes bien engagés car les dirigeants européens ont décidé de répondre ensemble à la crise et d'accompagner ensemble ceux d'entre eux qui en ont le plus souffert.

En fait, les sénateurs n'ont pas retenu que c'était cela, l'année 2020. Et, contrairement à eux, la population française, elle, a bien compris ce que nous avons fait sur les plans économique et budgétaire. C'est cela l'essentiel, chers collègues : les Français ont conscience des efforts budgétaires qui ont été faits.

Le groupe Mouvement démocrate (MODEM) et démocrates apparentés votera évidemment le projet de loi de règlement – et jeudi sera un autre jour, un autre discours…

Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Agir ens.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous ne devrions pas appeler ce texte un projet de loi de règlement, puisque nous n'avons pas la possibilité d'en modifier quoi que ce soit. Une loi de règlement porte en effet sur le passé et il est difficile, par définition, de modifier le passé. Par ailleurs, nous n'avons même pas le droit de modifier les montants des reports ou des annulations de crédits. Nous ne servons donc à rien et sommes réduits à l'état de spectateurs. Je commenterai donc le texte en tant que spectatrice.

Je commencerai par le solde structurel. Il reflète la part du déficit qui provient des difficultés structurelles de l'économie – du fait, par exemple, que nous n'avons pas assez d'industries. Vous l'évaluez à 1,3 point de PIB et avez ainsi décidé d'allouer la plus grande partie du déficit public à sa composante conjoncturelle, comme si, dans le fond, tout le déficit résultait de la crise. C'est d'autant plus étrange que, dans la loi de finances initiale pour 2020, vous aviez fait exactement le contraire, en faisant porter tout le déficit sur la partie structurelle. Tout au long des débats, vous n'avez jamais expliqué ce qui vous a fait changer d'avis. Reste que votre modification porte sur plus de 20 milliards d'euros. Je dis bien « votre modification », puisque le déficit structurel n'est jamais observable et résulte d'une construction théorique macroéconomique qui permet d'appréhender l'état de l'économie.

Ce choix, non expliqué, est d'autant plus curieux que la Commission européenne, qui a recalculé notre déficit structurel pour 2020, l'évalue pour sa part à 5,3 points de PIB. Autrement dit, elle pense que les trois quarts de notre déficit pour 2020 proviennent du fait que notre économie est durablement abîmée, alors que vous pensez le contraire puisque vous avez réduit le niveau de déficit structurel dans la loi de règlement. Un tel écart entre les calculs de Bercy et ceux de la Commission européenne, monsieur le ministre délégué, c'est du jamais vu. Cette divergence d'appréciation sur l'état de notre économie m'interpelle. J'attends donc votre réponse sur ce point.

Ensuite, en ce qui concerne le montant des reports de crédits, nous en sommes à 36 milliards d'euros, dont 28,8 proviennent de la mission "Plan d'urgence face à la crise sanitaire" . Là encore, il s'agit d'un montant inédit, mais qui correspond à une situation tout aussi inédite. Reste qu'on peut s'interroger sur le PLFR 4, qui a ouvert 20 milliards d'euros de crédits pour en reporter 28,8 ; mais je veux bien concevoir que pour une année comme 2020, c'est un peu compliqué.

J'en viens aux crédits annulés. On peut comprendre que, du fait de la crise du covid-19, certains le soient – le ministère des affaires étrangères a ainsi dû financer beaucoup moins de voyages. Mais certaines annulations sont surprenantes. C'est le cas de 172 millions d'euros de crédits à l'enseignement scolaire, dont 104 millions pour le second degré. Je vous avoue en être très étonnée : cet argent aurait pu être utilisé pour améliorer l'équipement informatique des enseignants. Vous annulez par ailleurs 60 millions d'euros de crédits sur le budget de la justice, dont 43 millions initialement destinés à l'administration pénitentiaire, dont chacun sait qu'elle doit gérer des établissements surpeuplés. Vous annulez encore 42 millions d'euros de crédits sur la mission "Travail et emploi" , ce qui est un comble au vu des difficultés rencontrées au cours de l'année 2020. Vous annulez enfin 99 millions d'euros de crédits sur la mission "Sécurités" , dont 53 millions pour la police et 43 millions pour la gendarmerie ; là aussi, il y a de quoi être quelque peu étonné.

Je dirai un mot sur la relance. En 2020, contrairement aux autres pays, il n'y a pas eu, en France, de plan de relance, d'argent consacré à la relance, alors que pour l'urgence, oui. Le plan de relance a en effet été présenté début septembre 2020, soit plus de trois mois après celui de l'Allemagne ou encore trois mois après celui présenté par le parti socialiste. Il n'a donc trouvé sa traduction que dans le budget pour 2021, ce qui signifie que nous avons pris un peu de retard à l'allumage.

Enfin, il y a ce que le projet de loi de règlement ne dit pas. Je reviens ainsi sur un point sur lequel j'ai interrogé le Premier ministre tout à l'heure : le texte ne montre pas que nous sommes passés à côté de l'investissement dans la vaccination. En 2020, nous avons investi 17,4 millions d'euros dans la recherche vaccinale contre le covid-19, contre 2,17 milliards pour les États-Unis, 1,5 milliard pour l'Allemagne, 500 millions pour le Royaume-Uni, 280 pour le Canada ou encore 260 pour la Norvège. Eh bien, monsieur le ministre délégué, je crains que nous ne continuions à payer pendant un certain temps ce manque si crucial d'investissement.

Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous voilà réunis pour la nouvelle lecture du projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2020. Permettez-moi tout d'abord de regretter que nos collègues sénateurs n'aient pas emprunté la même voie de sagesse qui les avait conduits à trouver un accord en commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances rectificative, il y a quelques semaines. Le présent texte est pourtant un texte formel, une photographie qui permet de constater l'exécution d'un budget passé. Évitons de faire de la mauvaise politique en cette période où l'on attend de nous un surcroît d'unité pour affronter les vents mauvais.

Cela dit, l'examen en nouvelle lecture de ce projet de loi nous donne l'occasion de porter, à nouveau, un regard rétrospectif sur la politique économique d'urgence et de relance menée l'année passée et sur son impact sur les finances publiques. Beaucoup a déjà été dit. Nous avons eu l'occasion à de nombreuses reprises de rappeler combien la doctrine du « quoi qu'il en coûte » était nécessaire et était la seule politique à même de protéger nos concitoyens. Elle a montré sa solidité et son efficacité. Elle est à l'honneur de notre pays, qui n'a voulu laisser personne sur le bord du chemin, car derrière les chiffres il y a de l'humain, des angoisses devant un assombrissement des perspectives créé par la crise, mais aussi des stratégies à définir.

Nous répétons à nos soignants, nos pompiers, nos policiers, nos agents du service public, nos caissiers, nos agents de propreté, bref tous ceux qui, depuis un an et demi, sont en première ligne face au virus, combien nous sommes reconnaissants et fiers d'eux. À l'heure où la discussion sur le passe sanitaire enflamme quelques esprits parfois mal intentionnés, la nouvelle lecture de ce projet de loi de règlement tombe à pic pour nous rappeler la violence de la crise, tant sur les plans sanitaire, moral, social que sur le plan économique. Du point de vue humain, psychologique ou économique, nous ne pourrions supporter de revivre encore de longs mois les situations de confinement que nous avons vécues en 2020. Pour éviter cela, il y a une solution simple : la vaccination. Elle est notre porte de sortie de cette épidémie qui s'éternise.

Et puisque ce sont les finances publiques qui retiennent ici notre attention, il faut le dire avec clarté : l'État ne pourra connaître éternellement un niveau de dépenses similaire à celui de 2020. Nous n'en serions toutefois pas là si l'esprit résolument réformateur n'avait soufflé au cours des trois années précédant la crise. Nous sommes d'ailleurs satisfaits, au groupe Agir ensemble, que la réforme se poursuive malgré tout, en s'adaptant à un environnement modifié et en perpétuel mouvement. Ce sens de l'adaptation, cette capacité à agir n'est possible que parce qu'il y a eu un avant. Et cette capacité d'adaptation est à mettre au crédit du gouvernement que nous soutenons – les Français l'ont d'ailleurs bien compris.

Nous sommes désormais à la croisée des chemins, chers collègues. La crise a provoqué un électrochoc nous rappelant à nos devoirs de solidarité, à nos devoirs écologiques, mais également à nos devoirs de vertu financière. Est-ce à dire qu'il faut à tout prix établir une austérité financière qui risquerait de casser le rebond économique ? Non. Le rétablissement des comptes publics est une nécessité, mais qui doit s'accorder avec le soutien à l'appareil productif. Le travail de relocalisation des chaînes de production stratégiques doit se poursuivre. Le « Fabriqué en France » est une marque de qualité et d'indépendance qu'il nous faut développer pour faire rayonner notre pays.

Nous devons désormais mener de front deux objectifs qu'il faudra concilier avec doigté : d'une part la stimulation de la croissance, d'autre part la maîtrise de la dépense publique. J'en profite pour dire que nous saluons le choix du Gouvernement de ne pas augmenter les impôts, pour permettre aux entreprises de sortir la tête de l'eau et aux particuliers de ne pas perdre de pouvoir d'achat. Dans le même temps, il est nécessaire d'encourager les dépenses d'investissement et les dépenses d'avenir. Le plan de relance, dont 40 milliards d'euros sont déjà engagés, est un formidable outil. L'annonce du Président de la République d'un plan d'investissement à la rentrée conforte cette politique volontariste qui nous permettra de renouer avec une croissance forte et durable. Notre pays regorge de formidables talents, de compétences, d'idées, de jeunes et de moins jeunes prêts à construire ensemble la France de demain.

Il nous faut donc avoir une vision de l'avenir pour le pays, son économie et ses finances publiques. En ce sens, notre groupe est satisfait de l'orientation budgétaire présentée dans le programme de stabilité et lors du débat d'orientation des finances publiques : une orientation courageuse et réaliste pour amorcer la décrue du ratio de l'endettement rapporté au PIB d'ici à 2027, tout en maintenant ou même en renforçant le niveau d'investissement nécessaire.

Le groupe Agir ensemble votera donc en faveur du présent texte, qui traduit le soutien massif qu'a apporté l'État à tous les acteurs touchés dès le début de la crise. Et vous nous trouverez à vos côtés, monsieur le ministre délégué, pour relever cet immense défi : combiner rebond vigoureux de notre économie afin de bâtir une France plus prospère demain et rétablissement de nos finances publiques.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le budget de l'année 2020 a modifié significativement la trajectoire des finances publiques, avec une dette publique représentant désormais 117,2 % du PIB. En ce sens, nous comprenons, dans une certaine mesure, qu'on veuille éventuellement rejeter le texte à cause de la situation d'ensemble des finances publiques et du montant important – 36 milliards d'euros – de crédits non consommés en 2020 et reportés en 2021.

La gestion des crédits, en particulier ceux de la mission "Plan d'urgence face à la crise sanitaire" , a constitué un vrai défi dès lors qu'il n'était pas toujours possible d'anticiper les restrictions sanitaires ni leurs effets économiques. Soulignons que ces crédits reportés, issus de ladite mission pour abonder la même mission en 2021, n'ont pas changé d'objet ni de destination.

Au-delà des milliards d'euros que la crise sanitaire a coûtés à l'économie, les Français s'inquiètent légitimement pour les générations futures, qui devront payer une dette qui ne cesse de s'alourdir. Nous assistons ainsi à une dégradation inquiétante des finances publiques, et nous sommes convaincus que la question de la dette demeure l'un des principaux enjeux des prochaines années, pour ne pas dire des prochains mois. Quand sera enfin présenté un véritable plan stratégique de réduction de la dépense publique passant par une chasse au gaspillage et à la bureaucratie ?

Le groupe UDI et indépendants est convaincu que la dette sera l'un des principaux thèmes de la prochaine campagne pour l'élection présidentielle. Et il serait mensonger de soutenir qu'il n'y aura pas d'augmentation des impôts pour payer la crise du covid-19. Nous demandons ainsi au Gouvernement un plan de réduction de la dépense publique.

La situation financière du pays obligera à des arbitrages indispensables pour assurer le maintien d'une trajectoire de redressement. Un débat fondamental pour les années à venir portera sur l'efficience de la dépense publique, sur le rapport entre son coût et sa capacité à atteindre les objectifs fixés. Notre groupe a toujours soutenu la prolongation des dispositifs d'accompagnement jusqu'à l'été 2021, démarche qui reste vitale pour stimuler le redressement de l'activité alors que l'économie du pays se trouve en récession, en votant les quatre collectifs budgétaires en 2020 et le PLFR pour 2021.

Malgré la dégradation des finances publiques, notre groupe a considéré que les projets de lois de règlement pourraient s'apparenter aux comptes administratifs des collectivités territoriales, et s'y opposer n'a de sens qu'en cas d'insincérité du budget ou de variations excessives.

Après une année qui s'est écoulée au fil des différents collectifs budgétaires, et alors que nous avons voté les différents PLFR, notre groupe votera ce projet de loi de règlement pour 2020.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La loi de règlement, si elle ne passionne pas les foules, a au moins le mérite de permettre de juger sur pièce de la réalité de l'action gouvernementale au cours de l'année écoulée. Et quelle année, en effet ! Je ne compte plus le nombre de fois où j'ai dû me prêter à cet exercice de commentaire au gré des allers-retours de ce texte ; aussi, chers collègues, pardonnez-moi si je rabâche quelques chiffres pour planter le décor.

En 2020, on a dénombré un million de nouveaux demandeurs auprès des banques alimentaires. Un jeune sur six a dû abandonner ses études et un sur deux n'a pas mangé à sa faim. Avant même le mois de décembre, le pays comptait un million de pauvres en plus. Les 10 % de ménages les plus pauvres n'ont connu aucune augmentation de revenus et les milliardaires ont engrangé 170 milliards. L'investissement s'est contracté de 10 %, c'est normal. Mais l'ensemble est une débâcle – et le mot n'est pas galvaudé –, une débâcle que vous, Gouvernement et majorité, tâchez de repeindre en triomphe en nous serinant sur tous les tons que votre mobilisation est sans précédent, vos efforts sans précédent, pour limiter les conséquences d'une crise sans précédent elle aussi.

Car crise il y a eu, et vous avez beau arguer que d'autres pays ont souffert davantage que le nôtre, si d'autres s'en tirent mieux aussi, c'est qu'ils ont rompu avec l'orthodoxie néolibérale. D'ailleurs, il n'est pas jusqu'à des économistes tels M. Blanchard ou M. Pisani-Ferry qui n'aient réclamé des aides plus conséquentes et mieux ciblées, comme nous le préconisions. Pourtant, toute l'année, nous avons dû subir vos annonces, vivre à leur rythme et essuyer vos procès en mauvaise foi chaque fois que nous émettions la moindre critique. Voici venue l'heure des comptes, nous les avons sous les yeux et, une fois de plus, ne vous déplaise, ils nous donnent raison.

Eussiez-vous respecté vos propres engagements, la réponse de l'État à la crise n'aurait pas été à ce point misérable. Mais vous avez fait des effets de manche au gré des lois de finances rectificatives, pour finalement sous-exécuter ce que vous aviez promis.

Ce sont donc près de 36 milliards qui manquent par rapport à la quatrième loi de finances rectificative. On se figure mal ce que représentent des sommes pareilles. Ce sont 800 000 emplois au salaire médian, charges comprises, qui auraient pu être mis au service, par exemple, de la bifurcation écologique. Ces emplois auraient de plus produit une relance sans précédent de la consommation, plus populaire, c'est-à-dire une relance sans même un plan de relance. Et 36 milliards, c'est à peu près ce qu'il faut pour relever tous les minima sociaux au-dessus du seuil de pauvreté, automatiser leur versement et étendre le RSA aux moins de 25 ans.

Mais pendant que nos concitoyens les plus précaires attendaient votre secours, d'autres se sont vautrés dans vos largesses – j'en parlais tout à l'heure. La fortune cumulée des milliardaires a bondi de 40 % et le CAC40 a versé en dividendes l'équivalent de 140 % de ses profits. Voilà le beau bilan de vos efforts sans précédent.

À cela s'ajoute un crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) pérennisé et d'autres niches fiscales incontrôlées. Pour 222 de ces 475 niches, nous ignorons le nombre de bénéficiaires ; 67 d'entre elles ne sont pas chiffrées du tout ; la Cour des comptes relève d'ailleurs – pas seulement cette année – que certaines sont même en contradiction avec les objectifs des politiques publiques auxquelles elles sont rattachées. Et l'on en compte encore une trentaine qui favorisent le recours aux énergies fossiles, soit plus de 15 milliards d'euros par an, alors que nous venons de voter la fameuse loi « Climat ». En somme, vous nous avez promis un pognon de dingue, mais nous avons eu le droit de traverser la rue, et encore.

En synthèse, votre bilan 2020, c'est une sous-exécution budgétaire qui s'apparente à une diversion publicitaire : toutes vos offres sont, comme le dit la formule, « soumises à conditions », sauf pour le CAC40, « non cumulables avec d'autres promotions », sauf pour le CAC40, « voir conditions en magasins participants » pour tous les autres, « un crédit vous engage et doit être remboursé », en se serrant tous la ceinture, sauf le CAC40.

Voilà pourquoi, fidèles à nous-mêmes, nous voterons contre ce projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il peut sembler vain, en ces temps difficiles, de se pencher sur le passé, en particulier lorsque la situation sanitaire nous pousse à nous concentrer sur le présent et sur l'avenir. Cependant, je crois que l'examen de ce bilan 2020 conserve toute son utilité, surtout si le Gouvernement tire les leçons du passé pour mieux préparer 2022. Ne sous-estimons pas la loi de règlement du budget : elle contraint l'exécutif à rendre compte de sa gestion devant le Parlement et est aussi l'occasion de confronter les intentions et les promesses annoncées avec les résultats obtenus.

Qu'est-ce qui a justifié le rejet de ce texte par nos collègues du Sénat ? Contrairement à ce que l'on pourrait croire, ce n'est pas seulement le coût de l'« open bar » budgétaire et le niveau inédit de déficit. Le refus repose essentiellement sur l'insincérité du budget. La critique la plus forte, que notre groupe avait déjà formulée en première lecture, tient aux reports de crédits : 36,2 milliards de crédits reportés. Ces reports font perdre tout son sens à l'autorisation parlementaire. La sous-consommation est une chose, mais pourquoi des reports d'une telle ampleur ? La Cour des comptes rappelle qu'il vous aurait été possible d'annuler ces crédits et d'éviter ainsi une confusion entre l'ensemble des exercices budgétaires.

De manière générale, c'est tout le bilan du budget 2020 qui est difficile à apprécier. Les contours sont flous entre crédits du plan d'urgence, du plan de relance, et crédits ordinaires.

Le bilan que vous nous présentez est évidemment celui d'un État en grande difficulté budgétaire. La dette publique s'établit à 115,7 % du PIB et le déficit dépasse les 9 %. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : les dépenses nettes du budget général ont augmenté de 46 milliards d'euros par rapport à la prévision initiale en loi de finances.

Bien évidemment, nous avons tous conscience que ces résultats inédits sont liés au contexte particulier que nous vivons. La crise sanitaire a eu des conséquences imprévisibles et irrésistibles. Notre groupe a conscience des efforts engagés par le Gouvernement pour accompagner les entreprises, les collectivités et les citoyens. La fragilité des finances publiques, antérieure à la crise, a également contribué à accroître la gravité de la situation. Les échecs budgétaires accumulés ont lourdement pesé au moment de la crise et continuent de peser actuellement. Le défaut de tout gouvernement est de jouer le court terme et de proposer aux successeurs le soin de la nécessaire maîtrise.

Notre groupe l'a déjà rappelé lors du débat d'orientation des finances publiques, malgré les engagements, vous n'avez pas su non plus, ou pu, rétablir nos finances en début de quinquennat. L'effort structurel réalisé pendant les trois premières années du mandat s'est limité à 5 milliards par an, alors qu'il aurait été nécessaire de viser les 20 milliards d'euros pour réellement rétablir les finances de l'État. Nos finances publiques étaient donc déjà très affaiblies au moment où la crise est survenue. En outre, les mesures que vous avez déployées ont eu un coût substantiel : 40 milliards pour le seul plan d'urgence.

Autre sujet : cette réaction budgétaire exceptionnelle, justifiée et nécessaire, nous semble mal déployée. Notamment, nous avons eu l'occasion de le souligner à de nombreuses reprises, elle n'a pas ou elle a mal pris en compte la diversité des réalités territoriales.

En dehors des seuls effets de la pandémie, vous avez aussi fait le choix, qui peut se défendre et dont on peut discuter l'opportunité, d'abandonner l'effort de maîtrise au profit du soutien structurel. Cet envolement budgétaire se poursuit donc en 2021 et se poursuivra en 2022.

Le tiré à part qui nous a été transmis au dernier moment, la semaine dernière, confirme cet état de fait : 10,8 milliards supplémentaires pour les dépenses pilotables. Si certaines hausses vont dans le bon sens, la question essentielle demeure : comment financer ces mesures, comment maîtriser la courbe d'évolution ? Vu l'état des lieux, le niveau d'endettement, le niveau de pression fiscale, on comprend l'étroitesse des marges de manœuvre, pour ne pas dire leur inexistence. Il reste à espérer que les prévisions de croissance qui sous-tendent le budget futur se réalisent, que les taux d'intérêt demeurent ce qu'ils sont, que le déficit du commerce extérieur ne s'aggrave pas, faute de quoi la situation budgétaire pourrait devenir véritablement ingérable.

Sans vouloir nous ériger en donneurs de leçon, et tout en ayant conscience de la difficulté des choses, notre groupe ne votera pas ce projet de loi de règlement.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Après nous être opposés au PLF et aux derniers PLFR en 2020, nous nous opposerons de nouveau et en toute logique à ce projet de loi de règlement.

Au-delà de l'aspect purement politique, que je développerai juste après, je commencerai par dire un mot sur l'exécution du budget, je veux dire sa sous-exécution : 31,6 milliards d'euros non dépensés sur l'ensemble du budget, 28,75 milliards rien que pour la mission d'urgence face à la crise, c'est inédit et ce n'est pas sans poser quelques questions sur le fonctionnement démocratique de notre assemblée lors des discussions budgétaires.

Rappelons que ces crédits avaient été votés lors du PLFR 4, examiné en une nuit dans des conditions déplorables où les parlementaires ont dû se prononcer à l'aveugle sur de nouveaux crédits d'urgence.

Ces crédits massifs, que le Gouvernement n'avait pu justifier, n'ont, comme attendu, pas été dépensés et ont été reportés massivement sur l'année 2021, sans aucun contrôle du Parlement. Cette méthode n'est pas sans poser des questions sur la sincérité budgétaire ou sur la place du Parlement, qui n'avait, je le rappelle, voté que 6 milliards d'euros de crédits pour 2021 sur la mission d'urgence.

Sur l'aspect purement politique, nous avons régulièrement marqué notre opposition à la politique mise en place durant la crise sanitaire. Alors que le long exposé des motifs de ce projet de loi de règlement relève davantage d'un autosatisfecit pour le Gouvernement que d'une analyse de la politique menée en 2020, je me permets de rappeler quelques faits pour relativiser cela.

Que l'année 2020 ait été marquée par un déploiement inédit de moyens financiers massifs, nous nous entendrons sur ce point : c'est du jamais vu. Il était nécessaire d'accompagner l'économie, mais pas sans conditions et sans ciblage. Alors que les dispositifs minimalistes du début de la crise ont été progressivement remplacés par des dispositifs plus généreux, mais aussi plus généraux, ce sont les plus grandes entreprises qui ont capté l'essentiel des aides, sans avoir à s'engager, par exemple, à ne pas distribuer de dividendes ou à ne pas licencier.

Quelle est dès lors l'efficacité d'un tel déploiement massif de moyens financiers, s'ils ne sont conditionnés à rien ou ne sont pas ciblés sur ceux qui en ont le plus besoin ? Ce soutien massif, tout le monde n'y a pas eu droit. Je parle bien sûr des plus pauvres, qui ont le plus souffert de cette crise : perte de salaire de 16 % au moins, contrats non renouvelés ou personnes non indemnisées. Toutes ces personnes n'ont jamais vu, elles, la couleur de ce déploiement massif.

De la même manière, les jeunes qui ont rempli les banques alimentaires durant l'année passée, qui ont également été parmi les plus touchés par la crise, comme l'a mis en évidence ma collègue Marie-George Buffet dans son rapport, ceux-là aussi ont été laissés de côté.

Une situation sociale aussi dramatique aurait exigé une réaction forte et massive dans l'urgence, ce que vous avez refusé. Par ces choix, vous avez encore accru les inégalités et laissé le nombre de pauvres croître de plus d'un million de personnes. Une faute politique, mais aussi morale.

Je conclurai ce tableau politique en rappelant votre fil rouge depuis le début du mandat : le dorlotage des plus aisés. En 2020, cela a été dit à plusieurs reprises, la richesse des 500 plus grandes fortunes françaises a crû de 30 %. Malgré cette situation indécente, vous avez refusé de demander un effort à ces Français ; vous avez refusé de les faire participer à la solidarité nationale alors qu'une large majorité de Français le demandaient, ceux-là mêmes à qui vous demandiez des efforts.

Loin donc de la promenade de santé décrite par l'exposé des motifs de la loi de règlement, l'année 2020 a été marquée par une crise sociale durant laquelle l'État n'a pas toujours été à la hauteur. Nous déplorons les choix politiques qui ont été faits durant ce moment, raison pour laquelle nous réitérons notre opposition à la politique mise en œuvre en nous opposant à cette loi de règlement.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'examen d'une loi de règlement par les assemblées parlementaires n'est jamais un acte anodin, c'est le moins que l'on puisse dire. Alors que nous révisons actuellement, dans ces murs, notre constitution financière, la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), il est nécessaire de rappeler à quel point la procédure budgétaire, de la conception du PLF en amont à l'approbation de la loi de règlement en aval, est un exercice hautement démocratique.

Cette année, le projet de loi de règlement du budget permet au Parlement d'approuver les comptes de l'État à hauteur de 597 milliards de dépenses et un déficit public de 178 milliards. Ce « chaînage vertueux » du PLF au PLR, comme il est convenu de l'appeler dans la terminologie de la LOLF, donne pleinement son rôle de contrôle et d'évaluation aux deux assemblées et permet ainsi d'associer à l'exercice les citoyens par la voix de leurs représentants, élus de la nation.

De fait, les élus que nous sommes participent, depuis le début de la XVe législature, à la réalisation du Printemps de l'évaluation, qui permet à chaque commissaire aux finances d'instruire, d'évaluer et de formuler des recommandations sur une mission du budget de l'État. L'examen du projet de loi de règlement et le Printemps de l'évaluation sont deux procédures intimement liées, deux procédures jumelles, sur la base desquelles le Parlement doit assurément orienter le débat budgétaire pour l'année qui s'annonce.

L'exercice 2020 aura été sans conteste un exercice de crise, un budget d'urgence qui répondait à une situation pour le moins inédite, que personne – je dis bien personne – ne pouvait envisager.

Disons-le clairement, nous avons, avec cet exercice, triplé notre déficit public, augmenté de 15 points notre dette et perturbé durablement notre trajectoire de redressement des comptes publics. Nous ne devons jamais nous interdire de dire les vérités, si anxiogènes soient-elles, car de telles dépenses pourraient être reconduites. Imaginons les lourdes conséquences qu'aurait demain, sur notre économie, une flambée du variant delta…

Voilà pourquoi le Parlement, à travers cet exercice démocratique, doit prendre la mesure de la gravité de la situation du pays, quels que soient les bancs sur lesquels siègent les députés et les sénateurs. Nous devons avoir conscience qu'un endettement public excessif et qu'un déficit public continu sur plusieurs exercices pourraient ajouter une nouvelle crise à la crise. La reprise actuelle de l'inflation en Europe pourrait contraindre la Banque centrale européenne (BCE) à remonter ses taux et menacer notre soutenabilité et notre accès aux marchés financiers. Ces menaces, il faut les nommer dès maintenant pour mieux les éviter avant qu'elles ne nous coûtent cher, bien trop cher…

Deux perspectives me paraissent devoir être examinées à l'étude de ce projet de loi de règlement.

La première est que nous devons envisager des mesures urgentes pour rétablir notre équilibre budgétaire en nous appuyant sur le volet recettes, à l'aide, notamment, de l'accord trouvé au G20 sur la taxation minimale des multinationales et sur la lutte contre la localisation artificielle des bases taxables. Ces mesures nécessaires doivent également reposer sur une maîtrise contrôlée des dépenses de nos administrations publiques, qu'il s'agisse des dépenses sociales, du budget de l'État ou des dépenses des collectivités locales. Malgré la situation, nous ne devons surtout pas nous interdire de revenir au sacro-saint équilibre budgétaire.

Une telle approche n'exclut pas de savoir engager les bonnes dépenses dans les postes budgétaires prioritaires. La situation de nos finances publiques ne doit absolument pas dissimuler l'impérieuse nécessité de renforcer encore et davantage nos dépenses d'investissement. C'est notamment le cas dans le domaine de la santé : nous devons considérer la rémunération des personnels de santé comme une dépense d'investissement, car il est primordial de la valoriser. C'est d'ailleurs l'objet du Ségur de la santé, auquel je souscris pleinement et qui a su répondre en grande partie aux doléances de la profession, comme le soulignait encore ce matin M. le ministre des solidarités et de la santé.

En matière d'éducation, d'enseignement supérieur et de recherche, il est également essentiel que la France investisse afin de générer une activité dynamique et innovante. La loi de programmation de la recherche 2021-2030, adoptée en novembre 2020, répond en partie à cette ambition.

Enfin, et nous avons là une responsabilité historique, il nous faut investir massivement dans les dépenses environnementales, notamment en faveur de la transition énergétique. Rappelons que d'après l'Agence de la transition écologique (ADEME), 1 % de notre PIB devrait être consacré chaque année à la transition énergétique.

En notre qualité de parlementaires, malgré nos divergences politiques, nos positions idéologiques, nos convictions intimes, exhortons le pouvoir exécutif et souhaitons qu'il réponde toujours à cette exigence, année après année, exercice budgétaire après exercice budgétaire. C'est à cette condition que les conséquences de la crise sanitaire pourront n'être plus qu'un mauvais souvenir et que l'État saura tracer le plus bel avenir à notre pays.

Le groupe LaREM votera le projet de loi de règlement du budget 2020 et réitère son soutien au Gouvernement.

Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Hier était un jour symbolique. En effet, en France, un salarié moyen doit travailler entre le 1er janvier et le 19 juillet pour financer la dépense publique et payer ses cotisations sociales, impôts et taxes. Sur une année, les Français ne touchent le fruit de leur travail que cinq mois sur douze !

Il est dès lors légitime de se demander où va leur argent. En 2020, les finances publiques ont enregistré une dégradation inédite dans l'histoire de la Ve République : un déficit public de 178 milliards, une explosion de l'endettement public, qui a atteint 116 % du PIB fin 2020, et une dépense publique qui a largement dépassé les 60 % de la richesse nationale.

Vous me direz que la conjoncture sanitaire explique en grande partie la dégradation de nos comptes : les administrations publiques ont effectivement absorbé plus de 80 % des effets économiques de la crise et nous ne pouvons que saluer, malgré d'importantes lacunes, la mise en place de politiques de soutien aux entreprises.

Toutefois, la crise n'exonère en rien Emmanuel Macron et le Gouvernement de leur responsabilité quant au dérapage financier de 2020 : si les Français ont dû s'endetter pour sauver notre économie, c'est parce que vous avez été incapables d'anticiper et de gérer l'épidémie. Combien de dizaines de milliards d'euros aurions-nous pu économiser si vous aviez suivi les préconisations de bon sens du Rassemblement national dès janvier 2020 ?

Ces comptes reflètent l'ardoise que vous laissez aux générations futures pour avoir failli dans l'anticipation et la gestion de la crise sanitaire. Ils révèlent aussi un dérapage financier qui ne peut être imputé à la seule crise sanitaire ou à sa gestion calamiteuse, comme en atteste la hausse d'au moins 7 milliards des dépenses ordinaires.

Monsieur le ministre délégué, la France est le pays qui affiche le plus fort taux de prélèvements obligatoires. Pourtant, les services publics se dégradent, les injustices sociales s'accroissent, l'État s'affaiblit. Je répète donc ma question initiale : où va l'argent ?

En réalité, vous gaspillez nos impôts et financez vos lubies sans servir l'intérêt des Français. Je vais donc vous donner trois pistes d'économie afin d'identifier les dizaines de milliards d'euros qui, dans les prochains budgets, pourraient servir à rebâtir l'hôpital public, si important pour notre santé, à créer des places dans les prisons, si indispensables à notre sécurité, à investir dans les secteurs stratégiques, si précieux pour notre souveraineté, ou encore à baisser massivement les impôts des entreprises sur notre sol pour défendre nos emplois et réindustrialiser le pays.

Premièrement : la contribution de la France à l'Union européenne. En 2021, celle-ci s'élève à 26,9 milliards, soit 25 % de plus qu'en 2020, et nous ne percevons en retour qu'une dizaine de milliards d'euros. Quelle arnaque ! Aux frais du contribuable, votre idéologie européiste finance les délocalisations vers l'Europe de l'Est, les subventions à la Turquie et une technocratie hors sol qui méprise la démocratie.

Deuxièmement : le coût de l'immigration massive, que vous refusez toujours de chiffrer et qui pèse tant sur le budget de l'État, de la sécurité sociale ou encore des départements. Les impôts des Français n'ont pas à financer votre folie migratoire !

Troisièmement : les grandes fraudes fiscales et sociales, qui représentent entre 40 et 150 milliards par an ! Trouvez-vous normal de faire peser les impôts sur les Français qui bossent au quotidien plutôt que sur les évadés fiscaux et les multinationales qui usent de l'optimisation fiscale ? Trouvez-vous normal de vouloir imposer aux Français une réforme qui diminue leurs retraites et les fera travailler plus longtemps alors que 15 % des retraites versées à l'étranger sont frauduleuses ? Trouvez-vous normal de dérembourser toujours plus de médicaments alors qu'il y aurait près de 2 millions de fausses cartes vitales en circulation ? Vous êtes parvenus à instaurer un QR code, réputé inviolable, à l'entrée des cafés et restaurants : qu'attendez-vous pour faire de même avec nos cartes vitales afin de stopper cette fraude indécente ?

Il existe quantité d'autres propositions pour réaliser des économies. Alors, monsieur le ministre délégué, vous qui n'avez de cesse de donner des leçons d'économie à la terre entière,…

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…regardez d'abord votre bilan : les bons gestionnaires que vous êtes sont responsables d'un écroulement inédit de nos comptes publics et de l'aggravation de la crise sociale et économique que traverse notre pays.

Pour toutes ces raisons, nous voterons contre le projet de loi de règlement du budget 2020. Vous pouvez le constater : le Rassemblement national propose des solutions de bon sens pour assainir les comptes publics, pour récupérer l'argent des Français, qui a trop longtemps été gaspillé, et pour mettre enfin l'impôt des Français au service de leur quotidien et de leur avenir. Vous auriez pu vous en inspirer !

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La discussion générale est close.

Chers collègues, nous avons tous le souhait de nous préparer au mieux pour les journées à venir. Je propose donc que nous achevions rapidement la discussion de ce texte et je vous invite à ne pas alourdir inutilement nos débats.

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J'appelle maintenant les articles du projet de loi sur lesquels les deux assemblées n'ont pu parvenir à un texte identique.

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L'amendement n° 1 de M. Charles de Courson est défendu.

L'amendement n° 1 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.

L'article liminaire est adopté.

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L'amendement n° 6 de M. Charles de Courson est défendu.

L'amendement n° 6 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.

L'article 1er est adopté.

Les articles 2, 3, 4, 5, 6, 7 et 8 sont successivement adoptés.

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Nous avons achevé l'examen des articles du projet de loi.

Le projet de loi est adopté.

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Prochaine séance, demain, à quinze heures :

Discussion du projet de loi relatif à la gestion de la crise sanitaire.

La séance est levée.

La séance est levée à vingt heures quinze.

Le directeur des comptes rendus

Serge Ezdra