Commission des affaires sociales

Réunion du mercredi 31 mars 2021 à 15h00

Résumé de la réunion

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La réunion

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COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Mercredi 31 mars 2021

La séance est ouverte à quinze heures.

La commission des affaires sociales examine la proposition de loi donnant le droit à une fin de vie libre et choisie (n° 288) (M. Olivier Falorni, rapporteur).

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Mes chers collègues, cet après-midi, nous consacrerons nos travaux à l'examen de deux des textes dont le groupe Libertés et Territoires a proposé l'inscription à l'ordre du jour des séances publiques du jeudi 8 avril, qui lui sont réservées : la proposition de loi donnant le droit à une fin de vie libre et choisie et la proposition de loi relative à la légalisation contrôlée de la production, de la vente et de la consommation de cannabis.

Avant de donner la parole au rapporteur de la première, j'aimerais préciser l'état d'esprit dans lequel j'aborde nos travaux sur ce sujet, dont nous convenons tous qu'il est éminemment grave et sensible. Chacun s'exprimera et se prononcera à l'aune de ce qu'il a de plus personnel, et même de plus intime. Je sais pouvoir compter sur vous pour que chaque propos soit accueilli et écouté avec tout le respect et l'attention requis.

Ce débat est attendu et observé par de nombreux citoyens. Je ne doute pas que nous aurons tous à cœur de nous montrer à la hauteur de ce moment. Pour ma part, je m'efforcerai de distribuer la parole aussi largement que possible, s'agissant d'un texte à propos duquel la représentation des groupes politiques ne coïncide pas aussi clairement que d'habitude avec les prises de position individuelles.

Par ailleurs, je rappelle que nos débats ne peuvent faire abstraction de la situation sanitaire, qui nous impose la prudence dans nos comportements et dans la façon dont ils sont perçus. Le Président Ferrand ne s'est pas opposé à ce que nous délaissions notre salle habituelle pour nous réunir en salle Lamartine, même si son agencement est moins propice au travail législatif. Compte tenu de sa capacité d'accueil et des sollicitations qui me sont parvenues, j'ai saisi cette opportunité, désireuse de ne pas laisser penser que tout n'a pas été fait pour permettre à autant de commissaires que possibles de prendre part au débat.

En tout état de cause, nous ne pouvons pas nous affranchir des règles désormais bien connues – hélas ! – de distanciation physique. Vous conviendrez avec moi qu'il ne serait pas opportun, dans la période actuelle, que nos concitoyens constatent que la commission des affaires sociales s'autorise un relâchement dans l'application des mesures sanitaires.

La capacité de cette salle, qui est moins importante qu'on ne le croit, ne nous exonère pas des limitations propres à ces temps de covid-19 et ne permet pas d'assurer la présence de tous les membres de la commission. Il m'a donc fallu ajuster à sa taille la demi-jauge en vigueur depuis près d'un an. Je vous remercie de respecter les emplacements prévus pour les différents groupes.

Je précise que seuls les membres de la commission pourront participer au vote, dans la limite du contingent attribué à chaque groupe, qui a été calculé proportionnellement à l'effectif total de notre commission. Les whips de chaque groupe, que je remercie par avance, feront en sorte que tout se passe correctement.

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Le 4 mars dernier, Paulette Guinchard, qui fut secrétaire d'État chargée des personnes âgées du 28 mars 2001 au 6 mai 2002, a décidé de mettre fin à ses jours, à l'âge de 71 ans, en recourant au suicide assisté en Suisse. Elle était atteinte d'une maladie neurodégénérative. Sa pathologie l'a amenée à prendre une décision qu'elle n'aurait sans doute pas imaginée quelques années plus tôt. Ainsi, en avril 2005, elle signait une tribune dans Le Monde pour défendre le choix de la France d'écarter la légalisation de l'euthanasie, contrairement aux Pays-Bas et à la Belgique. Cette décision a sans aucun doute été le fruit d'une longue réflexion personnelle sur le sens de la vie.

Pourquoi vouloir rester jusqu'au bout quand vous savez que vous êtes condamné à court terme, et que vos souffrances physiques et psychiques seront, en dépit des progrès de la médecine et du dévouement des soignants, réfractaires à tout traitement thérapeutique ? Pourquoi endurer une cruelle agonie quand la mort peut vous délivrer d'une vie qui n'est plus qu'une survie douloureuse sans espoir de guérison ? Ces questions existentielles, nous sommes tous amenés à nous les poser un jour, pour nous-mêmes ou pour nos proches.

La crise sanitaire que nous traversons, malheureusement, depuis plus d'un an, a encore accentué cette réflexion de fond parmi une large majorité de nos concitoyens. Dès lors, en quoi ne serait-il pas opportun pour nous, représentants de la nation, de nous interroger sur les conditions et les modalités de la fin de vie des Français ? Bien au contraire, cela me semble plus que jamais nécessaire. Une réponse ici et maintenant s'impose comme une impérieuse nécessité.

Depuis une vingtaine d'années, plusieurs évolutions législatives ont eu lieu. La loi Leonetti du 22 avril 2005, relative aux droits des malades et à la fin de vie, a interdit l'obstination déraisonnable, afin d'éviter tout acharnement thérapeutique. Elle a aussi reconnu le droit de toute personne en fin de vie de décider d'arrêter ou de limiter ses traitements. La loi du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie, dite « loi Claeys-Leonetti », a reconnu la possibilité de recourir, dans certaines conditions, à une sédation profonde et continue jusqu'au décès, par le biais de l'arrêt de la nutrition et de l'hydratation.

Contrairement à ce que l'on entend dire çà et là, ces lois ont fait l'objet d'un suivi ou d'une évaluation par divers organismes, tels que l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS), le Comité consultatif national d'éthique et des sciences de la vie (CCNE), le Conseil économique, social et environnemental (CESE) et le Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie (CNSPFV), ainsi que par l'Assemblée nationale, dans le cadre du groupe d'études sur la fin de vie, qui réalise depuis trois ans un travail remarquable.

Certes, on peut saluer certaines avancées permises par ces lois. La prise en compte de la volonté des patients par les équipes médicales a été améliorée, tout comme celle de la parole de l'entourage, notamment de la personne de confiance s'il s'agit d'un patient inconscient.

Toutefois, notre droit souffre toujours de plusieurs failles et insuffisances majeures. Certaines notions, telles que l'obstination déraisonnable, ne sont pas toujours appréhendées à l'identique par les équipes soignantes. Il en va de même de certains critères déterminant la mise en œuvre de la sédation profonde et continue jusqu'au décès. Surtout, cette technique soulève des questions. Dès lors que l'arrêt de la nutrition et de l'hydratation du patient peut le placer dans une situation susceptible de durer plusieurs jours, voire plusieurs semaines, peut-on sincèrement considérer cela comme humainement tolérable ? Dans ces conditions, comment ne pas comprendre que certains de nos concitoyens, parce qu'ils sont atteints d'un cancer généralisé, d'une sclérose en plaques ou de la maladie de Charcot en phase avancée, souhaitent abréger leur vie ? Pourquoi leur refuser le droit de mourir sereinement de façon apaisée ?

En refusant jusqu'à présent de légaliser toute aide active à mourir, la France a fait preuve d'une grande hypocrisie. Face à l'absence de solution institutionnelle, deux types de réponse ont vu le jour : l'exil dans les pays frontaliers pour y mourir et la pratique d'euthanasies clandestines dans notre pays.

Tout d'abord, de plus en plus de malades décident de se tourner vers la Belgique ou la Suisse pour mettre un terme à leur vie. Ces départs à l'étranger constituent indéniablement une souffrance supplémentaire pour ces personnes et pour leur entourage. Il s'agit en quelque sorte d'une double peine. J'ai auditionné la semaine dernière le docteur belge Yves de Locht, qui reçoit quotidiennement des patients français demandant une euthanasie. En raison de l'afflux de patients étrangers, de plus en plus de médecins et d'établissements belges refusent les demandes d'euthanasie de patients français.

Ensuite, il n'est pas rare que des médecins français procèdent à des euthanasies clandestines pour mettre fin aux souffrances de leurs patients, parfois à l'insu de ces derniers et de leurs proches. Selon une étude de l'Institut national d'études démographiques, on en compterait entre 2 000 et 4 000 par an. Pire : les deux tiers de ces euthanasies clandestines seraient réalisés à l'insu des patients et de leurs proches. Pour reprendre les mots du CESE, cette pratique est totalement inacceptable.

Les législations relatives à l'aide à mourir en vigueur dans des pays étrangers n'incitent pas les personnes atteintes d'affections graves et incurables à se résigner à la mort en l'anticipant à l'excès. Ainsi, la légalisation de l'euthanasie en Belgique n'a pas entraîné sa prolifération. En revanche, elle a permis d'en améliorer le suivi et le contrôle, car elle avait déjà cours, là-bas aussi, de façon illégale.

En matière d'accompagnement des patients en fin de vie, la Belgique, contrairement à la France, n'a pas fait le choix d'opposer les soins palliatifs et l'aide active à mourir. En 2002, elle a adopté successivement trois lois : une première pour légaliser l'euthanasie, une deuxième pour développer les soins palliatifs et une troisième pour préciser les relations entre les patients et le corps médical. Vingt ans après, on ne peut que constater que la légalisation de l'euthanasie n'a pas empêché l'instauration d'un système de soins palliatifs performant en Belgique. Le législateur belge a conçu les soins palliatifs et l'euthanasie comme deux solutions complémentaires : d'un côté, des moyens pour soulager les patients souhaitant laisser arriver la mort ; de l'autre, une solution permettant aux patients qui le demandent d'en déclencher l'arrivée.

En France, nous n'avons guère avancé sur les soins palliatifs. Les moyens financiers et humains qui leur ont été alloués n'ont jamais été à la hauteur de l'ambition affichée. Entre 20 % et 25 % des mourants seulement y ont accès ; un département sur quatre ne compte aucune unité de soins palliatifs. On ne peut qu'être dans l'expectative à l'annonce d'un nouveau plan national d'accompagnement de la fin de vie et des soins palliatifs.

Que devons-nous faire ? Développer les soins palliatifs, à l'évidence. Le Gouvernement aura sans doute l'occasion de dire, en séance publique, ce qu'il compte faire à cette fin. Toutefois, tel n'est pas l'objet du présent texte, qui vise à répondre à une très forte attente des Français : choisir librement sa fin de vie.

Depuis plusieurs années, les enquêtes d'opinion montrent avec constance, et de façon claire, que l'immense majorité des Français – 96 % d'après un sondage publié par Ipsos en 2019 – qu'ils sont favorables à la légalisation de l'euthanasie, toutes sensibilités politiques et catégorie d'âge ou socioprofessionnelles confondues. Sur cette question, il existe très peu de différences entre les sympathisants de La République en Marche – 99 % d'opinions favorables –, ceux des Républicains – 95 % –, ceux du Rassemblement national – 98 % –, ceux du Parti socialiste – 96 % – et ceux de La France insoumise – 94 %. Cela ne signifie pas que neuf Français sur dix veulent être euthanasiés, mais qu'ils souhaitent, dans leur écrasante majorité, maîtriser leur destin jusqu'au bout.

Cette aspiration, on la retrouve également de l'autre côté de nos frontières, y compris dans des pays à forte tradition catholique. Il ne vous a pas échappé que l'Espagne vient de légaliser l'euthanasie et le suicide assisté. Demain, ce sera au tour du Portugal, qui est dans la même démarche. L'Irlande a engagé un processus législatif pour légaliser le suicide assisté. Là où le législateur ne prend pas les devants, la justice s'en charge. Ainsi, la Cour constitutionnelle italienne a dépénalisé l'aide au suicide en 2019. Au même moment, en Allemagne, le Tribunal constitutionnel fédéral a considéré que le droit à l'autodétermination du patient prime sur le devoir du médecin de lui porter assistance. Plus loin de chez nous, plusieurs pays anglo-saxons, tels que le Canada en 2016 et la Nouvelle-Zélande en 2020, ainsi que des États fédérés australiens – la Tasmanie au début de l'année – et américains – onze en tout, dont le Nouveau‑Mexique – ont légalisé l'aide active à mourir ou sont sur le point de le faire.

Ce qui se passe à nos frontières ne peut nous laisser indifférents. Demain, les Français pourront se rendre toujours plus nombreux dans plusieurs pays voisins pour mettre fin à leurs jours en étant accompagnés sur le plan médical. Pourquoi ne pourrions-nous pas accorder à nos concitoyens ce droit de mourir que demandait Vincent Humbert au Président de la République il y a déjà vingt ans ? Plus récemment, l'écrivaine Anne Bert, qui était atteinte de la maladie de Charcot et qui a rédigé avec moi l'exposé des motifs de la présente proposition de loi, décédée en Belgique le 2 octobre 2017, s'est battue pendant les dernières années de sa vie pour obtenir cette ultime liberté.

Plus de trois ans après, nous nous apprêtons à examiner ce texte, dans le cadre de la niche parlementaire du groupe Libertés et Territoires. Je remercie mes collègues du groupe d'avoir accepté qu'il soit inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. Ce texte n'est pas l'apanage d'un groupe politique. Il rejoint d'autres propositions de loi similaires, issues de tous les bancs de cette assemblée, déposées notamment par Jean‑Louis Touraine, Caroline Fiat, Marine Brenier et, au Sénat, Marie-Pierre de La Gontrie, pour ne citer que leurs auteurs. Tous portent cette cause avec autant de conviction et de détermination que moi.

Compte tenu de ces observations, de l'attente très forte des Français et des évolutions en cours à l'étranger, j'affirme que l'heure n'est plus à la procrastination, mais à l'action. Mes chers collègues, ce texte n'est déjà plus le mien. Il sera le nôtre, si vous le voulez. Il sera celui de tous les députés qui l'enrichiront, le soutiendront et le voteront. Ce texte, s'il est adopté, sera la loi de tous les parlementaires qui auront permis, par leur vote, que les Français obtiennent le droit à une fin de vie libre et choisie, et puissent enfin accéder à leur ultime liberté.

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Le sujet de la fin de vie renvoie chacun d'entre nous à l'intimité de sa propre expérience. Il nous oblige à une profonde humilité s'agissant du vécu tout aussi singulier de chacun de nos concitoyens.

Sur les sujets éthiques et sociétaux qui ne font pas consensus, nous avons adopté, au sein du groupe La République en Marche, un principe de liberté de conscience et de vote empêchant toute certitude et toute orientation a priori. Au sujet de la fin de vie, compte tenu du contexte que nous connaissons, les discours sont particulièrement riches, ce qui nous amène à l'appliquer.

Certains considèrent qu'il est urgent et nécessaire de donner aux Français la possibilité de choisir les modalités de leur fin de vie, en y incluant l'aide active à mourir, qui constitue à leurs yeux un dernier soin, complémentaire des soins palliatifs, ayant pour objet d'humaniser l'agonie, comme le dit souvent notre collègue Jean-Louis Touraine. Il s'agirait d'une ultime liberté permettant de garantir le principe d'autonomie de la personne et de placer le patient au cœur des décisions médicales qui le concernent.

D'autres considèrent au contraire que l'aide active à mourir est une ligne rouge que les médecins, les patients et leurs familles ne doivent pas franchir, en raison de la vision de la société qu'elle sous-tend et des dérives qui pourraient en résulter. Ils craignent aussi que les demandes d'euthanasie résultent d'un manque d'appropriation et d'application de la législation relative à la sédation profonde, ainsi que des carences de notre offre de soins palliatifs et d'accompagnement de la fin de vie. Dans cette hypothèse, il serait de notre devoir de ne pas nous y résoudre et d'offrir à nos concitoyens les moyens de soulager les souffrances les amenant à demander une aide à mourir uniquement par peur, désinformation ou dépit.

D'autres encore ont une position intermédiaire ou indéterminée. Ils s'interrogent sur l'opportunité d'une telle mesure dans le contexte que nous connaissons, et sur la nécessité d'ouvrir un débat plus large dans la société.

Je souscris donc aux propos de notre présidente au sujet de l'importance d'entendre et de respecter toutes les nuances exprimées. À l'invitation du groupe Libertés et Territoires, notre groupe débattra très librement de ce sujet essentiel.

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S'il est un sujet qui convoque l'attention de tous et le respect du point de vue d'autrui, c'est bien celui dont nous débattons cet après-midi en commission des affaires sociales. Avant toute chose, de la prudence : telle est la ligne de conduite qui doit nous guider dans l'examen du texte, assortie de modération dans nos positions et nos propos. Je suis de ceux qui sont convaincus qu'il existe autant de positions sur le sujet que d'individus.

La présente proposition de loi vise à créer un droit à obtenir une aide médicale à mourir. Nous l'examinons dans un contexte particulier, provoqué par l'épidémie qui bouleverse nos vies depuis plus d'un an. Du confinement au tri des patients, de la fin de vie à la liberté vaccinale, les dilemmes éthiques se sont succédé sans relâche ni répit. Notre rapport au grand âge et à la mort a tout particulièrement été interrogé par l'isolement et la solitude imposés aux personnes âgées, ainsi que par la suspension des rites funéraires.

Comme l'a rappelé avec justesse et pertinence Jean Leonetti, il ne s'agit pas d'un conflit entre le bien et le mal, mais d'un conflit entre deux aspects du bien, qui prend la forme d'une tension entre l'éthique de l'autonomie et l'éthique de la vulnérabilité. Les questions dont nous traitons ici relèvent de l'intime et de l'histoire personnelle, ainsi que des valeurs philosophiques et des convictions, religieuses ou non, de chacun.

En l'état actuel du droit, la loi permet de répondre à l'essentiel des demandes sociales relatives à la fin de vie, dans la mesure où elle donne la possibilité aux malades de bénéficier de soins palliatifs. Toutefois, comme l'indique l'objet du texte que nous allons examiner, la loi française ne permet pas de répondre aux demandes d'aide à mourir formulées par des patients qui ne sont pas en situation de fin de vie, dès lors que leur pronostic vital n'est pas engagé à court terme, mais auxquels leur maladie ne laisse aucun espoir.

Le groupe Les Républicains est attaché à la liberté de vote sur ce sujet. À l'issue de nos débats, chacun adoptera une position, qui ne saurait être dictée par personne.

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Pour le groupe que j'ai l'honneur de présider, s'agissant d'un sujet si profond et si intime, qui ressortit à notre émotion, à nos projections, à nos expériences personnelles souvent, la règle sera la liberté de vote – il ne peut pas en être autrement. Tout en reconnaissant la légitimité individuelle à se forger une position sur un tel sujet, je reconnais aussi la légitimité parlementaire à le faire, et salue le travail réalisé par notre collègue Falorni. Il est légitime que le Parlement s'exprime sur des sujets comme celui‑ci, même si on peut contester les formes et les conditions dans lesquelles il le fait.

Il existe une forme de singularité parlementaire, malheureusement récurrente au sein de notre assemblée, qui consiste à légiférer alors même que la loi est imparfaitement appliquée. Depuis l'adoption de la loi Claeys-Leonetti, les gouvernements successifs ont péché par insuffisance du développement des soins palliatifs, inexistants dans une bonne vingtaine de départements, et ont laissé les Français dans l'ignorance de leur droit à rédiger une directive anticipée.

À ce sujet, nous examinerons plusieurs amendements visant à étendre le champ d'application des dispositions proposées par le rapporteur Falorni, notamment en modifiant les modalités de désignation de la personne de confiance. Nous pouvons avoir des opinions distinctes sur le suicide assisté, mais sommes-nous prêts à ouvrir un droit à choisir la mort d'autrui, susceptible de surcroît de se transformer en devoir sous l'effet de la pression sociale ? Débattre du droit à choisir librement sa fin de vie est légitime ; ouvrir un droit à choisir la mort d'un proche soulève des questions éthiques susceptibles de modifier la nature même des relations au sein de notre société.

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Le 11 mars dernier, le Sénat a débattu de la proposition de loi visant à établir le droit à mourir dans la dignité, déposée par le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. Malheureusement, la majorité sénatoriale a adopté un amendement vidant le texte de sa substance, ce qui a contraint ses auteurs à le retirer.

Il est urgent de garantir le choix de sa fin de vie. Nous nous réjouissons donc de poursuivre le débat et remercions M. le rapporteur de nous en offrir l'occasion. Bénéficier d'une fin de vie apaisée et digne est un souhait partagé par la quasi-totalité de nos concitoyens. D'après un sondage publié par IPSOS en avril 2019, 96 % des Français y sont favorables. Le dépôt de plusieurs propositions de loi en ce sens démontre qu'il existe un consensus social et transpartisan sur ce point. La récente disparition de Paulette Guinchard, qui a dû s'exiler pour décider de sa fin de vie, rappelle qu'il est nécessaire d'avancer sur ce sujet.

L'évolution de la législation en la matière a commencé dans d'autres pays d'Europe, notamment les Pays-Bas, la Belgique, le Luxembourg, la Suisse. L'Espagne et le Portugal sont sur le point de les rejoindre. Certes, depuis le début des années 2000, la législation française a connu des évolutions législatives à plusieurs reprises. Pourtant, les questions soulevées par la fin de vie n'ont pas toutes trouvé des réponses. De nombreuses personnes en fin de vie décèdent à l'hôpital dans des conditions souvent très éloignées de ce qu'elles avaient espéré. La dernière loi adoptée demeure insuffisante.

La législation encadrant la fin de vie est mal connue des patients et des soignants, et la rédaction de directives anticipées demeure rare. Cette triste réalité est complétée chaque année, dans le plus grand secret, par les 2 000 à 4 000 injections de cocktail létal réalisées pour abréger les souffrances et la vie, parfois sans que les malades concernés ne l'aient expressément souhaité.

Dans l'état actuel du droit, de nombreuses personnes sont amenées à partir à l'étranger, si elles en ont les moyens, pour y finir leur vie conformément à leurs souhaits. D'autres parviennent à obtenir d'un médecin une assistance active à mourir, ce qui induit des inégalités considérables en matière de fin de vie. Nous proposerons donc, en concertation avec plusieurs de nos collègues ici présents, plusieurs amendements visant à préciser le texte et à rendre effectif le droit à mourir dans la dignité.

Le groupe Socialistes et apparentés, dans sa très grande majorité, votera le texte.

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Respect de la vie et de la mort : il s'agit toujours de notre humanité. Le sujet de société qui nous réunit relève de l'intime, ce qui explique qu'il transcende les clivages politiques. Le travail transpartisan que nous avons réalisé est aussi un beau symbole de ce que notre assemblée est capable de faire lorsqu'il le faut.

Le droit à une fin de vie libre et choisie est la dernière de nos libertés à conquérir. Plus de 96 % des Français sont favorables à la reconnaissance d'un droit à l'euthanasie. Je remercie notre collègue Olivier Falorni d'avoir inscrit la présente proposition de loi à notre ordre du jour. Nous avons la possibilité de légiférer en faveur de ce nouveau droit et, ce faisant, de mettre notre pays au niveau de nombreux autres pays européens, donc de permettre à nos concitoyens de ne pas fuir à l'étranger pour y mourir. Il s'agit aussi d'une question d'égalité.

La présente proposition de loi est une loi de liberté et d'humanité. Elle ne retire rien aux personnes en fin de vie. Elle ne fait pas obstacle aux soins palliatifs, dont M. Falorni a rappelé qu'ils devront continuer à se développer dans tous les territoires. Le groupe Agir ensemble en aborde l'examen avec humilité, prudence, modération et respect des opinions de chacun.

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Le sujet de la fin de vie relève de questionnements individuels et essentiels pour chacun d'entre nous. Il place aussi la société face à des choix aux larges enjeux éthiques et d'une importance considérable pour celles et ceux dont les demandes ne trouvent pas encore satisfaction. C'est pourquoi je vous remercie, monsieur le rapporteur, pour la qualité de vos travaux. Mais le cadre de la proposition de loi nous paraît un peu étroit pour examiner une telle question. C'est pourquoi le vote du groupe UDI et Indépendants sera nécessairement partagé et lié aux évolutions de nos débats.

Toutefois, une chose nous rassemble : la nécessité d'améliorer la prise en charge de la fin de vie en France. Les lois sur la fin de vie ont beaucoup évolué ces dernières années. La loi Claeys-Leonetti de 2016 a conduit à d'importants progrès dans l'amélioration de la prise en charge palliative des personnes en fin de vie. Elle a en effet apporté des clarifications importantes sur l'évolution de l'obstination déraisonnable, introduit le droit à la sédation profonde et continue jusqu'au décès et consacré l'opposabilité des directives anticipées rédigées par le patient qui se retrouve hors d'état d'exprimer sa volonté. Cependant, en réalité, trop de patients qui en auraient besoin n'ont pas accès à une équipe de soins palliatifs et à un accompagnement adapté – vingt-six départements n'ont aucune unité de soins palliatifs.

Ainsi, je suis, à titre personnel, opposée à une évolution de la législation sur la fin de vie, alors que les droits ouverts aujourd'hui ne sont pas garantis sur l'ensemble de notre territoire et que les différents plans de développement des soins palliatifs rencontrent des limites par manque de moyens humains et financiers. Sur ce point, ma position rejoint celle issue de la contribution de septembre 2018 à la révision de la loi de bioéthique du Comité consultatif national d'éthique, qui a indiqué ne pas être en faveur d'une modification de la loi existante et a insisté sur l'impérieuse nécessité que la loi actuelle soit mieux connue, mieux appliquée et mieux respectée.

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Il me reste une ultime liberté : celle de choisir la façon dont je vais mourir. » Ces mots sont ceux de l'écrivaine Anne Bert avec qui notre collègue a coécrit l'exposé des motifs de sa proposition de loi. Elle les a écrits se sachant condamnée, avant de rejoindre la Belgique pour mourir dignement. Cette impuissance dans la souffrance et la neurodégénérescence, elle est loin d'être la seule à l'avoir vécue. À chaque fois, nous déplorons l'insuffisance de nos infrastructures de soins palliatifs et les lacunes de notre législation sur la fin de vie. La plupart du temps, celles et ceux qui s'opposent à une telle proposition invoquent le fait que nous n'aurions pas encore pleinement pu appliquer la loi Claeys-Leonetti et qu'il faut se donner les moyens humains et financiers de le faire correctement.

Si cette loi est insuffisante, ce n'est pas seulement pour cette raison. Opposer soins palliatifs et aide active à mourir n'est non seulement pas juste, mais ne sert qu'à éluder la question et à la repousser toujours plus loin. L'annonce par le Gouvernement d'un nouveau plan de développement de soins palliatifs est une très bonne chose, s'il est effectif et de qualité. Mais le choix de laisser mourir n'est en rien le choix actif de mourir dignement, lorsque le diagnostic vital n'est pas engagé à court terme. Mes chers collègues, j'entends des arguments : ce texte n'est pas le bon véhicule législatif ; il faut lancer une nouvelle concertation. Et pourtant que de textes du Gouvernement qui n'étaient ni le bon véhicule législatif ni l'aboutissement d'une véritable concertation !

Notre groupe pense, au contraire, que le temps de légiférer est venu et nous soutenons l'initiative de notre collègue. Pour ma part, j'ai cosigné toutes les initiatives qui ont été prises dans ce sens depuis le début de la législature. Il est plus que temps d'avancer et de mettre fin à l'hypocrisie. La société est prête à conquérir cette ultime liberté, celle de choisir sa fin de vie. Nous savons que cette conviction est majoritaire, comme elle l'est parmi nous et au sein de l'Assemblée. J'avais pris l'engagement moral auprès d'Anne Bert que cette question fasse l'objet d'un débat dans l'hémicycle avant la fin de la législature. Je remercie donc Olivier Falorni et mon groupe, qui vous donnent, chers collègues, l'occasion d'exercer votre mandat en toute conscience.

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Je remercie Olivier Falorni de proposer ce texte qui nous tient à cœur. Le 1er février 2018, pour notre première niche, nous avions présenté une proposition de loi relative à l'euthanasie et au suicide assisté pour une fin de vie digne. À l'époque, les députés de la majorité nous avaient expliqué que notre texte était très bien mais qu'il arrivait beaucoup trop tôt, puisque nous parlerions de l'euthanasie lors de la révision des lois de bioéthique. Peu après la suspension de notre proposition de loi, cent cinquante‑six députés de la majorité avaient signé une tribune en faveur de l'euthanasie. Il faut avoir le cœur bien accroché à l'Assemblée ! Ces cent cinquante-six parlementaires doivent être ravis de votre proposition de loi, monsieur Falorni...

Chacun a sa propre conception de ce qu'est une fin de vie digne. Il y en a sans doute autant de définitions que d'individus. Je vous remercie vraiment de nous permettre d'en parler enfin, parce que les Français attendent ce débat. J'espère qu'ils ne seront pas trop passionnés et que nous pourrons discuter dignement et simplement. On entend souvent opposer euthanasie et soins palliatifs. Or les deux sont indispensables. Ils sont complémentaires. J'espère que votre proposition de loi sera votée.

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Chacun dans notre groupe se prononcera personnellement avec humilité. La question qui nous occupe, politique et sensible, est sans doute plus complexe qu'il n'y paraît. Depuis 1999, la législation a évolué à quatre reprises pour mieux garantir le droit des malades. Si un droit au suicide assisté n'y a jamais été intégré, il existe un cadre méconnu à la prise en charge de la douleur et de la fin de vie. Entouré de garde-fous, le droit à la sédation profonde et continue, institué en 2016, mérite d'être évalué dans sa mise en œuvre. Nous pointions déjà, à l'époque, la question des moyens effectivement consacrés à ces soins qui permettent d'être accompagnés dans une fin de vie apaisée. La tendance générale à la réduction des moyens hospitaliers n'a sans doute pas permis de produire les efforts nécessaires que la société doit à chacune et chacun : la lutte résolue contre la douleur et l'accompagnement humain. La sédation profonde n'est pas faite pour donner la mort mais les substances injectées l'entraînent à une certaine dose.

Faut-il aller au-delà ? Faut-il produire cette rupture symbolique ? C'est la question posée par le texte qui appelle un débat éthique approfondi, car l'autorisation de donner la mort n'est pas une décision qui va de soi. Le fait que cela existe ailleurs n'est pas suffisant, sans quoi nous nous rendrions vulnérables à de possibles dumpings éthiques. Si l'on peut discuter la justesse de certaines règles, ce sont aussi elles qui fondent les droits et les protections. Les interrogations auxquelles nous devons faire face sont plus profondes. Elles touchent au sens, à la fragilité de l'existence, à la conception de la dignité humaine, qui n'est pas liée à un état physique ou psychique. Il est toujours dur de se voir diminuer et partir ou de voir un proche affronter cette épreuve. Il existe parfois une forme de pression sociale, de culpabilisation, que nous devons aussi interroger et qui renvoie la responsabilité sur l'individu. Enfin, une telle perspective engage toute une conception de la médecine et requiert l'engagement de la société par l'entremise de tiers. La persistance de cette question, qui mérite le débat, est aussi le témoignage d'une société qui peine à être au rendez-vous de ses responsabilités.

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Je tenais à saluer la grande force et la grande dignité des interventions des orateurs de groupe. Dignité, c'est un mot qui sera souvent employé dans notre débat. À titre personnel, concernant la fin de vie, j'utilise plus le mot de liberté, parce que la définition de la dignité, comme l'a dit Caroline Fiat, appartient à chacun d'entre nous. En revanche, la liberté, c'est permettre à chacune et à chacun de disposer de sa vie et de sa fin de vie. Le combat que je mène et que nous sommes beaucoup ici à mener, c'est le droit de choisir, dans certaines conditions définies par la loi, son destin. C'est un combat de vie. Autant la dignité dans la fin de vie appartient à chacun, autant la dignité du débat public nous appartient. Les diverses interventions ont bien montré l'importance d'un débat apaisé. C'est évidemment mon souhait au commencement de l'examen du texte.

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Nous sommes nombreux à nous réjouir que cette question de la fin de vie et du droit des malades arrive enfin dans notre commission, après les multiples évaluations des lois précédentes, après les tergiversations des mandats passés, après plus de trois ans d'un groupe d'études très suivi et ayant effectué beaucoup d'auditions afin de combler quelques lacunes dans les textes antérieurs. En ce moment, il est plus impérieux que jamais de développer en même temps les soins palliatifs et l'aide active à mourir, et surtout l'écoute attentive des malades en fin de vie. La pandémie de covid‑19 a révélé à tous les Français les problèmes non résolus des conditions de fin de vie, en dépit d'un dévouement exceptionnel et sans faille des professionnels en charge des patients.

C'est une loi visant à garantir le droit des malades : droit à attendre la fin naturelle plutôt que de subir des euthanasies clandestines, sans avoir été consultés ; droit à être dispensé d'agonie pour ceux qui récusent les souffrances de cette phase ultime. Je précise que ce droit n'impose à aucun malade ni à aucun médecin un choix qui n'est pas le sien. Au contraire, il offre la liberté de choix à tous. Chacun sait bien qu'avec l'aide active à mourir aucun médecin ne tue un malade. Comme l'écrivaient Anne Bert et Chantal Sébire, c'est la maladie qui nous tue, pas le médecin, pas le juste qui apporte un geste d'amour, de compassion qui humanise l'agonie.

J'ai conscience que certains d'entre nous, hostiles à ce progrès, proposent une fois encore de s'adonner à la procrastination, invoquant la nécessité d'évaluer les textes antérieurs. Je respecte parfaitement la diversité des opinions, surtout sur un tel sujet, éminemment personnel et relevant de convictions intimes, mais cet argument ne peut pas être entendu. Jamais loi n'a été autant évaluée que la loi Claeys‑Leonetti, qui confortait le décret Fillon de janvier 2010. L'IGAS l'a évaluée, le CESE a effectué une évaluation très complète et poussée, suivie d'un excellent rapport. Plusieurs études ont été conduites par le CNSPFV. Une loi peu appliquée est habituellement une loi peu applicable. Tout va dans le sens de l'urgence de la compléter.

Surtout, les Français l'ont évaluée. Nombreux sont ceux qui se rendent chaque année dans les divers pays limitrophes qui nous ont précédés dans ce progrès. Inversement, aucun habitant de ces pays ne vient terminer sa vie en France, où les insuffisances n'ont pas encore été corrigées. Mes chers collègues, entendons la demande des Français. Ne nommons pas encore une commission pour enterrer le problème, comme le disait Clemenceau. Le général de Gaulle rappelait en 1963 que l'essentiel n'était pas ce que pensaient le comité Gustave, le comité Théodule ou le comité Hippolyte, mais ce qui était utile au peuple français.

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C'est un sujet lourd de sens qui nous réunit, car il touche à notre approche de la condition humaine, à l'idée que nous nous faisons de la vie. Cela relève du profondément intime. C'est parce que l'homme est en tant que tel un être digne que notre devoir est de penser à sa fin de vie et d'accompagner du mieux possible les personnes les plus vulnérables. Il faut bien admettre que les conditions dans lesquelles on meurt aujourd'hui en France ne sont pas bonnes. La crise du covid nous l'a durement prouvé et nous appelle à l'humilité. Mais faut-il aujourd'hui créer un droit pour obtenir une aide médicale à mourir, ce qui revient en d'autres termes à légaliser l'euthanasie, le suicide assisté ?

Si certaines personnes épuisées réclament parfois que tout s'arrête, quelques jours passés avec une équipe de soins palliatifs suffisent à voir ces demandes disparaître dans la grande majorité des cas. Pour certains cas extrêmes, qui ont ému l'opinion ces dernières années, nous savons que d'autres solutions ont été élaborées et inscrites dans la loi Claeys‑Leonetti, qui prévoit une sédation profonde et continue pour soulager le patient et la mise en œuvre à cette fin de directives anticipées. Mais moins de cinq ans après le vote de cette loi, les retours du terrain font état d'obstacles pratiques et éthiques à sa bonne application : 20 % seulement des personnes ayant besoin d'un accompagnement en soins palliatifs en bénéficient ; les deux tiers des Français ignorent l'existence de la loi ; plus grave encore, la majorité des soignants la méconnaissent également. Incontestablement, la culture palliative reste à développer.

Je ne pense pas que c'est une loi sur l'euthanasie qui permettra de s'atteler à ce problème de fond. Ne serait-il pas possible de faire un bilan approfondi des conditions dans lesquelles on meurt en France ? Alors que certains demandent une nouvelle loi, il conviendrait de mieux appréhender comment les Français meurent. Isolés ou entourés ? À leur domicile ou en institution ? Avec ou sans souffrance ? Subitement ou d'une longue maladie ? Avec ou sans assistance médicale ? De même importe-t-il d'évaluer l'action des pouvoirs publics pour accompagner la mort de nos concitoyens et faire en sorte que celle-ci advienne dans les meilleures conditions pour le défunt comme pour son entourage. Ne faut-il pas finaliser en priorité une loi grand âge et autonomie qui irait jusqu'à évoquer cette fin de vie et mettre très rapidement en œuvre le nouveau plan pluriannuel de développement des soins palliatifs pour la période 2021-2024 ?

Je proposerai pour ma part que nous en restions à la loi Claeys-Leonetti, qui a été longuement discutée au sein de notre assemblée. Cet après-midi, nous discutons cette proposition de loi dans des conditions trop rapides pour en tirer un enseignement.

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Le point positif de la proposition de loi est de nous permettre de débattre de nos conditions de mortels et des conditions dans lesquelles nous accompagnons les personnes en fin de vie. Toutes les expressions sont légitimes et méritent d'être entendues. À titre personnel, je ne peux me satisfaire d'une telle proposition de loi. Avec la loi Claeys-Leonetti, mûrement concertée, notre pays s'est engagé sur une voie hautement éthique : interdiction de l'acharnement thérapeutique, recueil et respect des directives anticipées, prise en charge de la douleur, sédation profonde et continue. Cette loi, si les moyens lui étaient alloués, permettrait de régler 99 % des situations de fin de vie, alors qu'actuellement un tiers à peine des personnes ont accès aux soins palliatifs.

Faudrait-il légiférer pour le 1 % restant ? Oui, sûrement, car toutes les personnes méritent une réponse appropriée à leurs douleurs physiques ou psychologiques. Faut-il le faire aujourd'hui et dans les termes proposés ? Je ne le pense pas. J'aurai la possibilité de m'exprimer au fil des amendements étudiés. Mais je veux pointer ici quelques inconvénients majeurs. Le premier, sur le fond, c'est le risque de marginaliser l'accompagnement proposé par les soins palliatifs au profit d'une réponse plus aisée. Le deuxième, c'est la vulnérabilité de la personne souffrante face à la situation dont elle voudrait parfois soulager ses proches. Sur la forme, si nous devions, après avoir évalué la loi Claeys‑Leonetti, nous pencher sur la situation des personnes dont la loi ne règle pas la situation, les mieux placées pour mettre en pratique une extension du domaine de la loi seraient sans doute les équipes pluridisciplinaires dans la collégialité en vigueur actuellement.

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Sur un tel sujet, ne pas avoir de certitudes est légitime. Il faut admettre le doute, la réflexion et l'évolution de notre système juridique. Un député ne doit pas être sensible à l'opinion publique, dont nous ne sommes pas les greffiers. Je fais donc fi des enquêtes qui montrent que notre pays devrait évoluer. Un député ne doit pas davantage réagir à l'émotion. Nous devons raisonner et faire des propositions en fonction de ce que l'on considère comme bon pour la population. La France a déjà une réponse à la question de la fin de vie. Faut-il en apporter d'autres, notamment celle de l'aide à mourir ? Faut-il ouvrir un nouveau droit ?

J'ai cosigné, avec conviction, la proposition de loi de notre collègue Marine Brenier en décembre 2020, car elle apportait une réponse à la nécessité d'un accès universel aux soins palliatifs tout en allant directement et clairement vers la reconnaissance de l'aide active à mourir. Le groupe d'études sur la fin de vie a beaucoup travaillé pendant trois ans. J'aurais préféré que ce soit la majorité qui nous propose un projet de loi, avec toutes les études d'impact et les avis nécessaires. Cela aurait permis à notre assemblée de délibérer avec plus de sérénité encore sur un sujet aussi sensible. Je regrette que le parcours législatif soit celui d'une initiative parlementaire, même si je me félicite que le sujet soit porté à nos débats. Pour ma part, je suis partisan de la liberté, de la liberté de choisir de mourir sereinement, de rendre effective l'aide active à mourir dans des conditions bien précises, selon des règles claires. Je suis favorable à la création de ce droit et je souscris à la réponse proposée par le texte.

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C'est une question grave qui nous est posée. Je voudrais témoigner de mon cheminement sur ce sujet. Pour être dans cette maison depuis quelques années, j'ai suivi de nombreux travaux, notamment ceux sur la loi Claeys-Leonetti. Chacun doit voir que le texte ouvre l'accès à une nouvelle liberté. N'opposez pas les soins palliatifs et l'euthanasie, car ce n'est pas du tout la même chose. Pensez une seconde à tous ces personnels soignants qui accompagnent nos aînés et ceux qui malheureusement souffrent d'une maladie incurable au moment où nous parlons. La dignité est-elle au rendez-vous ? Ce n'est pas la sensibilité d'un seul député qui s'exprime : nous avons tous été confrontés à ces situations pour savoir qu'elle ne l'est pas. Est-ce que l'humanité est au rendez-vous ? Je ne le crois pas. Savoir que nos concitoyens vont à l'étranger... Cela me rappelle le combat de Simone Veil pour la légalisation de l'avortement. Cela me rappelle également ceux qui vont à l'étranger pour réaliser une procréation médicalement assistée.

C'est un droit, certes, mais il s'accompagne de tant de contraintes. Il faut un avis médical, un collège de médecins, un contrôle qui n'existe pas à l'heure actuelle. Lorsqu'une personne n'est plus en capacité physique de s'exprimer, elle a un tiers de confiance. Mais ce tiers ne décide pas pour elle. Il soumet son cas à un examen médical approfondi. Enfin, les médecins ont le même droit de retrait que pour l'avortement. Le serment d'Hippocrate est respecté. Réfléchissons ensemble.

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La manière dont nous est présenté ce texte n'est pas à la hauteur des enjeux éthiques, moraux et sociétaux relatifs à la liberté de sa fin de vie. Cette question aussi délicate que cruciale aurait mérité de faire partie de l'examen d'un projet de loi relatif à la bioéthique et non pas d'une niche parlementaire. Ce texte touche à l'intime. C'est l'histoire personnelle de chacun d'entre nous. Le débat sur la fin de vie nécessite une approche d'écoute, de prudence et demande beaucoup d'humilité. Il est particulièrement revenu sur le devant de la scène politique et médiatique depuis le début de la crise sanitaire. De nombreux questionnements éthiques ont émergé : notre rapport à la mort, le tri des patients, le grand âge, l'autonomie, l'isolement, la solitude, le choix de se faire vacciner ou non, la suspension des rites funéraires. La question de l'acharnement thérapeutique est au cœur des débats. C'est une souffrance pour le patient et sa famille.

Beaucoup de patients ont une fin de vie qu'ils n'ont pas choisie. Nous ne pouvons pas opposer soins palliatifs, sédation profonde et euthanasie : ce sont des moyens différents pour accompagner la fin de vie. Le soin palliatif est très inégalement réparti sur le territoire. Ne faudrait-il pas envisager de lui allouer plus de moyens ? Comment envisager que l'ensemble des Français ne sont pas ou ne seront pas égaux face à la mort et face à la fin de vie ? Comment pouvons-nous fermer les yeux sur le souhait d'une grande majorité de Français favorables à l'euthanasie ? Comment vouloir ignorer que certains de nos compatriotes partent en Suisse ou en Belgique pour avoir une fin de vie plus digne ? Pour ma part, je suis favorable à ce que chacun puisse choisir.

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La question de la fin de vie fait débat de longue date. Elle a été l'objet de nombreux travaux successifs, de l'IGAS, du CCNE ou encore de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale. Je veux remercier à mon tour Olivier Falorni et les collègues qui ont œuvré avec lui pour nous permettre de discuter de ce sujet attendu par la société. Le droit d'accéder aux soins palliatifs n'est pas respecté, comme l'a montré le CCNE. Cela est inacceptable. Mais c'est une question différente de l'aide active à mourir. Je veux saluer les professionnels des unités de soins palliatifs pour leur travail et leur dire que l'euthanasie n'est pas un substitut ou une solution par manque d'accès aux soins palliatifs. C'est une option.

L'assistance médicale active à mourir représente une liberté à laquelle chacune et chacun dans des situations de détresse et de souffrance sans issue doit pouvoir accéder. Nous ne pouvons plus accepter le cynisme avec lequel nous abandonnons une partie de nos professionnels de santé, en les conduisant à pratiquer, hors de tout cadre légal, des euthanasies. Cela représente plusieurs milliers de décès chaque année. Il faut pouvoir offrir un encadrement légal aux professionnels de santé. Il y va de la liberté de tout un chacun. Jamais je n'aurai la prétention de dire à telle ou telle personne quelle est la meilleure option pour elle. Jamais je n'aurai la prétention d'expliquer à tel ou tel en souffrance qu'il ne devrait pas recourir à ce droit. La seule chose que je peux faire, c'est lui donner la liberté de faire son choix sur le territoire national.

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Nous avons une occasion historique d'offrir l'ultime liberté de choisir sa mort à des malades en extrême souffrance. Simone Veil disait qu'aucune femme ne recourait de gaieté de cœur à l'avortement. Pensez-vous qu'un seul malade demande à recourir à l'aide active à mourir de gaieté de cœur ? La proposition de loi est soutenue de manière transpartisane, tant le sujet touche à des convictions personnelles profondes. D'ailleurs, 96 % des Français y sont favorables selon un sondage Ipsos. La Croix reconnaissait que 89 % des Français y étaient favorables. Certains diront que le moment est mal choisi. L'argument n'est pas audible pour ceux qui, malades, attendent désespérément ce droit dans le pays des droits de l'homme.

Les lois Leonetti et Claeys-Leonetti ont été de réelles avancées. Mais la fin de l'acharnement thérapeutique, les directives anticipées, les soins palliatifs restent trop peu fréquents. La sédation profonde et continue répond à de nombreuses situations. Mais pourquoi opposer ces solutions ? Pourquoi ne rien permettre à ceux qui, comme Paulette Guinchard, ont dû partir mourir à l'étranger ? Sur ce sujet, il n'y a ni sachants ni non-sachants. Il n'y a que des malades et des citoyens. La proposition de loi nous engage et entraîne dans son sillage des questions fortes qui seront débattues, je l'espère, dans le respect des convictions de chacun, en encadrant un dispositif clair et protecteur des malades. Mes chers collègues, légiférer sur l'aide active à mourir, c'est offrir un ultime geste d'humanité à ceux de nos concitoyens qui le réclament.

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Les lois d'avril 2005 et février 2016 relatives aux droits des malades et à la fin de vie ont fixé un cadre dont l'objet est d'éviter le recours à l'euthanasie, tout en faisant en sorte d'empêcher l'acharnement thérapeutique jugé déraisonnable. À la demande du patient, mais dans le cadre de directives anticipées et avec le concours de personnes de confiance, elles permettent l'arrêt d'un traitement médical trop lourd et, depuis 2016, la mise en œuvre d'une sédation profonde et continue jusqu'au décès.

Il est toujours possible d'évoquer des situations dramatiques qui sortent du champ de ces deux lois pour demander d'aller jusqu'à la légalisation de l'euthanasie et l'assistance au suicide. Les drames dont rendent largement compte les médias, et qui nous bouleversent, expliquent probablement en partie les sondages favorables à l'euthanasie dont vous faites état.

Nous les prenons en considération, mais certaines dispositions de cette proposition de loi sont problématiques. Les hommes et les femmes qui s'occupent des soins palliatifs expliquent que la loi actuelle est peu ou mal appliquée parce qu'ils n'ont pas les moyens requis. On estime que seulement 20 à 30 % des personnes qui pourraient avoir recours aux soins palliatifs y ont effectivement accès.

Je pense également que l'État n'a pas à se mêler de tout. Il est des domaines – celui-ci plus que tout autre – pour lesquels il faut savoir se contenter de fixer un cadre sans prétendre résoudre tous les cas de figure. Ce cadre existe, il est précieux, même s'il n'est sûrement pas parfait. N'y touchons qu'avec la plus grande prudence.

Ne vous méprenez pas, si je suis partisane de la retenue en la matière, ce n'est pas en me drapant dans de grands principes, mais en gardant en mémoire les déchirements qui sont les nôtres quand un pareil drame vient frapper nos familles. Je me garderai bien de donner des leçons de morale, je serai plus modeste. Un cadre est fixé, faisons confiance à la conscience des médecins et à l'amour des proches et renforçons les soins palliatifs pour soulager les personnes en fin de vie.

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Chers collègues, je suis fier de pouvoir débattre avec vous de cette proposition de loi. Ce débat honore la France, pays des droits de l'homme. Notre assemblée, et votre groupe politique en particulier, monsieur le rapporteur, fait preuve de courage pour aborder un sujet si délicat et douloureux.

Nous avons tous évoqué cette réalité : chaque année, de nombreux Français sont obligés de s'exiler pour connaître une mort digne et sans souffrance. Il est de notre devoir, en tant qu'élus de la nation, de mettre fin à ces situations grotesques en permettant enfin à nos compatriotes de bénéficier de cette option de fin de vie. Il est grand temps que la France avance sur ce sujet afin de répondre à une attente forte et légitime de nos concitoyens.

La position que je défends ne fera pas l'unanimité au sein de ma famille politique, mais je l'assume, comme je l'ai déjà fait lors d'autres débats, pour d'autres combats, notamment au sujet de la bioéthique. J'ai pris des coups, nous en recevrons certainement aujourd'hui, mais soyons fiers de ne pas renier nos convictions afin de plaire à l'un ou l'autre.

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Le sujet que nous abordons fait écho à des expériences individuelles intimes, mais elles ne doivent pas justifier des choix aussi lourds, qui engagent l'ensemble de la société. Nous devons faire fi de nos expériences personnelles et nous placer derrière le voile d'ignorance suggéré par John Rawls pour déterminer l'intérêt général lorsque nous légiférons.

Si la société doit garantir le droit de chacun à la dignité, à l'autonomie et à la liberté, il ne faut pas oublier qu'elle n'est pas qu'une somme d'individus sans lien les uns avec les autres. Nos choix individuels ont un impact collectif et la société ne peut rester silencieuse sur la façon dont elle accompagne cette période qui rapprochera chacun de nous de la mort, et les situations qu'elle considère comme supportables ou insupportables, et finalement dignes ou non d'être vécues.

Monsieur le rapporteur, vous avez parlé de survie douloureuse. Je m'inquiète d'imaginer que la société puisse déterminer, même de façon implicite, que certaines situations ne méritent pas d'être vécues, et que la mort soit collectivement pensée comme la seule issue digne dans ces cas. C'est pourquoi je considère que le cadre fixé par la loi Claeys-Leonetti permet de répondre à un certain nombre de situations que nous savons incurables, et qu'aller plus loin serait faire un choix collectif dangereux.

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Je rappelle que la loi Claeys‑Leonetti est issue d'une proposition de loi, ce n'était pas un projet de loi du Gouvernement, contrairement à ce que certains ont avancé.

Ce n'est pas la première fois que l'avis des citoyens s'impose à leurs représentants et qu'une loi de société divise la représentation nationale. C'est la marque de nos sociétés démocratiques évoluées. La volonté de disposer de son libre arbitre est ancrée dans la grande majorité des Français. Nous devrions nous réjouir de cette évolution, c'est le sens de l'histoire.

Nous créons un droit dont l'exercice est encadré par l'intervention de médecins, il ne relève pas du seul désir de l'individu. Nous devons faire confiance aux médecins, créer un droit n'enlève rien à personne et permet d'exercer un choix. Nous répondons à une demande des Français, conformément à notre vocation d'élus chargés de représenter les citoyens.

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Notre débat évoque pour beaucoup d'entre nous des situations personnelles, intimes, qui suscitent l'émotion. En tant que parlementaires, nous devons nous hisser au-delà de ces situations pour prendre collectivement une décision qui nous engage.

Pour notre part, ce sujet nous tient à cœur depuis longtemps puisque ma camarade Martine Billard avait signé en 2009 une proposition de loi pour le droit à mourir dans la dignité. Je me réjouis que des années plus tard, Caroline Fiat ait pris le relais. Nous devons éviter les postures, la question n'est pas de savoir qui propose cette réforme, et par quelle procédure parlementaire.

Dans son histoire, l'humanité a franchi de nombreuses frontières. Elle a franchi la frontière du temps quand la transmission orale a été supplantée par l'écrit. Des aptitudes ont cessé d'être des destins quand nous avons conquis le droit à la contraception et à l'avortement.

La mort, c'est d'abord l'idée que l'on s'en fait. Il nous reste une ultime liberté à conquérir : décider de notre propre fin de vie. C'est l'aboutissement de l'émancipation : je décide par moi-même, d'un bout à l'autre de mon existence, et dans tous ses aspects. De plus en plus de Français choisissent chaque année de franchir les frontières pour décider de leur fin de vie. Pour moi, pour chacun d'entre nous et pour chacun des Français, je forme le vœu que nous puissions disposer de ce droit en France.

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Le droit que nous proposons de créer n'enlève absolument rien à ceux qui existent déjà. S'il nous faut tout mettre en œuvre pour que l'exercice des droits existants soit facilité pour l'ensemble de nos compatriotes, cela n'empêche pas de réfléchir à des solutions novatrices, car nous ne sommes pas à la hauteur des exigences en ce domaine. Nous respectons les différentes opinions de chacun de nous, mais il nous faut franchir le gué au milieu duquel nous nous trouvons et avancer vers quelque chose de beaucoup plus ambitieux.

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La diversité des interventions, suscitant un certain nombre de remarques et de réponses, me facilite la tâche.

Madame Janvier, je me refuse à jeter un voile d'ignorance sur les situations individuelles. Notre devoir est de ne pas ignorer la réalité de ce qui se passe dans notre pays, et d'offrir un droit à l'aide active à mourir, qui ne s'oppose en rien aux soins palliatifs, je le dis et le répète.

La France n'est pas seule au monde : à nos frontières, la Belgique a adopté il y a vingt ans une législation dont le texte que je vous propose s'inspire largement. Après vingt années d'expérience, plus personne ne veut remettre cette loi en cause. Elle a permis de développer les soins palliatifs tout en apportant une réponse à certaines demandes d'aide active à mourir.

Certains estiment que la responsabilité de la décision qui serait laissée à la personne de confiance serait écrasante. Dans la majorité des cas, le malade sera capable d'exprimer sa volonté de façon explicite et réfléchie jusqu'au dernier moment. Et comme Philippe Vigier l'a souligné, dans les cas où la personne de confiance aura été désignée, elle ne décidera pas mais sera uniquement la porte-parole d'une volonté. Et cette parole sera confrontée à la décision collégiale de trois médecins. Je ne peux donc pas laisser dire que l'on donne à la personne de confiance la responsabilité de décider de la vie ou de la mort.

S'agissant de la nécessité d'étudier encore la loi Claeys-Leonetti, Jean-Louis Touraine est bien placé pour nous rappeler qu'elle l'a été abondamment, sous tous les angles. Mes armoires débordent de bilans, d'études, d'analyses et de commentaires. Cette loi a été évaluée par les experts, mais aussi par les Français.

Quant à l'argument selon lequel il ne s'agirait pas du bon véhicule législatif, je suis toujours gêné de l'entendre de la part de députés. Si une volonté commune doit nous unir, c'est celle de défendre notre rôle et notre droit à l'initiative parlementaire. Nous ne sommes pas que des contrôleurs du Gouvernement. Certes, nos institutions donnent une importante primauté à l'exécutif, mais nous gardons notre capacité de nous exprimer, et les interventions précédentes ont montré que chacun en ferait usage selon sa conscience.

Nous avons la faculté de proposer des lois sur de grands enjeux. Monique Iborra l'a rappelé : la loi Claeys-Leonetti est issue d'une proposition de loi, ainsi que la loi Leonetti de 2005. L'histoire a montré que le Gouvernement n'était pas seul à pouvoir défendre de tels textes. D'ailleurs, en 2018, lors des débats sur la loi de bioéthique, beaucoup d'entre nous ont demandé à aborder la question de la fin de vie. On nous avait alors répondu que le sujet relevait d'une proposition de loi. Chers collègues, nous y voici.

La commission en vient à l'examen des articles de la proposition de loi.

Article 1er : Personnes pouvant accéder à l'assistance médicalisée active à mourir

La commission est saisie des amendements de suppression AS1 de M. Marc Delatte, AS8 de Mme Caroline Janvier, AS13 de M. Thomas Mesnier, AS95 de Mme Emmanuelle Ménard, AS107 de Mme Bénédicte Pételle, AS127 de Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe, AS146 de M. Thibault Bazin et AS194 de M. Didier Martin.

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En 2018, le CCNE a décidé de ne pas remettre sur le métier le sujet de la fin de vie, et il a rappelé que certaines situations de fin de vie posent la question du sens de la vie.

Cette proposition de loi met en exergue les carences dans l'accompagnement en soins palliatifs et souligne les inégalités géographiques. Si la Société française d'accompagnement et de soins palliatifs – qui regroupe 10 000 soignants en soins palliatifs et 5 000 bénévoles de l'accompagnement – se prononce de manière très défavorable contre cette proposition et la légalisation de l'euthanasie, il faut nous interroger.

J'ai été pendant trente ans médecin de famille, j'ai accompagné des patients en fin de vie avec des services mobiles de soins palliatifs, et je peux témoigner que ces fins de vie sont des instants précieux. Alors que le patient est en situation de souffrance, donc de dépendance, est-il libre de choisir ? Les patients traversent des moments d'ambivalence, de labilité. Cette proposition de loi impose aux personnes de faire un choix alors qu'ils ne sont pas en situation de le faire, c'est une restriction de liberté.

Quant à l'exemple de la Belgique, la Commission fédérale de contrôle et d'évaluation de l'euthanasie commence à rétropédaler sur la définition large de la maladie grave et incurable, qui inclut les symptômes liés au vieillissement. Vous comprenez les nombreuses dérives éthiques possibles.

C'est pourquoi je propose la suppression de cet article. La loi Claeys-Leonetti nous fournit les outils nécessaires, nous avons l'impérieuse nécessité de mieux l'appliquer. Le plan pour diffuser la culture des soins palliatifs en France doit être déployé.

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En effet, la loi Claeys-Leonetti permet non seulement de soulager la douleur, mais aussi de répondre aux situations incurables par une sédation profonde et continue. Elle est mal appliquée, mal connue, et les moyens pour sa mise en œuvre sont insuffisants.

L'un des intérêts de notre débat est de partager ce constat, si le Gouvernement y répondait en consacrant aux soins palliatifs les moyens dont ils ont manqué jusqu'à présent, nous aurions obtenu une avancée significative.

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Permettez-moi de saluer le travail et l'engagement du rapporteur, ainsi que la mesure dans ses propos. Nous ne devons pas entrer dans ce débat pétris de certitudes, tant il s'avère complexe.

La loi Claeys-Leonetti, votée à l'unanimité en 2016, a trouvé un équilibre absolument remarquable. Le droit de choisir la fin de sa vie, invoqué par plusieurs intervenants, existe déjà par l'effet des directives anticipées. Le droit d'être accompagné en fin de vie dans la dignité existe aussi, et l'accompagnement final est apporté par la sédation profonde et continue.

Cette loi n'est pas appliquée, car insuffisamment connue de la population et des soignants. Les recommandations de bonnes pratiques pour les soignants à l'hôpital datent seulement de 2018, et pour la sédation à domicile, elles ont été publiées l'année dernière. Et nous devrions légiférer à nouveau ?

L'urgence est de fournir les moyens d'appliquer la loi. Avec cette proposition de loi, nous n'allons pas plus loin, nous allons ailleurs. Cela doit nous amener à interroger notre idée individuelle de la dignité, et de la place du projet individuel et de ses implications pour la société, aussi bien d'un point de vue éthique, moral que culturel.

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En 2012, Bernard Debré écrivait : « On invoque toujours le droit de mourir dans la dignité, mais on est digne quand ceux qui nous entourent, nous soignent, nous aident et nous accueillent décident que vous êtes digne par le regard qu'ils posent sur vous ou l'amour qu'ils vous portent. Au contraire, comment une loi sur l'euthanasie active ne serait pas ambiguë quand on connaît l'ambivalence même du mot dignité, ce sésame servi à tout va pour justifier qu'un jour ou l'autre, on puisse le plus légalement du monde pousser vers la sortie ceux qui ne s'y rendent pas assez vite. C'est une barrière invisible entre le fait de combattre la souffrance et le risque de mourir qui fait la grandeur et l'effroyable complexité de l'acte médical. La définition de cette barrière ne peut pas être confiée à la loi. »

J'ai été très troublée par ces propos, de l'homme politique et du médecin, mais finalement assez d'accord. À l'heure où notre pays consent d'immenses sacrifices pour sauver des vies, il me semble que les nouvelles dispositions que vous proposez bousculent tous les équilibres, notamment ceux qui ont été trouvés dans la loi Claeys-Leonetti. Cela ne me semble pas une bonne chose.

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Cet article ouvre la possibilité d'une aide médicale à la mort dans le cas d'une affection grave et incurable infligeant une souffrance physique ou psychique qui ne peut être apaisée, ou jugée insupportable.

Les conditions évoquées – une douleur insupportable ne pouvant être apaisée – ne se justifient pas car les soins palliatifs offrent aujourd'hui un moyen d'apaiser cette douleur. Dans les cas d'agonie, en France, la loi Claeys-Leonetti autorise depuis 2016 la sédation profonde et continue. Celle-ci plonge le mourant dans un état non conscient dans lequel il ne ressent plus la douleur jusqu'au décès. Lorsque la mort est plus lointaine mais la douleur insupportable et incurable, les soins palliatifs non curatifs viennent apporter au patient un soulagement par des sédatifs.

J'ai recueilli le témoignage de proches qui ont connu une mort douloureuse, j'ai entendu la peur face à des maladies neurodégénératives. Il faut reconnaître le problème d'accès aux soins palliatifs, dû au déficit de médecins formés et aux inégalités territoriales. Si la formation professionnelle en soins palliatifs a pris une place importante, on peut regretter l'insuffisance de la formation initiale et la rareté des stages pratiques.

Le constat de l'insuffisance du développement des soins palliatifs en France est partagé, même si les produits, les médicaments et toutes les méthodes nécessaires existent pour soulager les souffrances. Proposer l'euthanasie comme solution parce que les moyens sont insuffisants soulève des questions. La réponse apportée par l'euthanasie à la souffrance des patients pose également une question sociale et éthique. Ce n'est pas seulement une question de liberté individuelle, elle intéresse notre rapport à la vulnérabilité : les soins du corps malade ou dégradé ; la dépendance vis-à-vis des autres ; l'acceptation d'être aidé, soigné, lavé, nourri ; la rencontre entre faibles et moins faibles, malades et soignants, proches et accompagnés. Avec l'euthanasie, c'est la fraternité, valeur fondamentale de notre République, qui est fragilisée. Je ne suis pas sûre que les soins palliatifs et l'euthanasie soient complémentaires.

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Ce sujet éminemment difficile et sensible nous mobilise tous.

L'argument selon lequel l'opinion publique est déterminée est souvent avancé par nos collègues. Mais la loi Claeys-Leonetti de 2016 a été examinée après un long parcours de réflexion, engagé en 2012 par le Président François Hollande. Commissions de réflexions, conférences de citoyens, avis du CCNE et rapports ont alimenté un long débat. La proposition de loi a été rédigée ensuite, et pas seulement après quelques heures de débat.

La quasi-unanimité qui semble exister ne doit pas occulter les débats en cours dans les sociétés qui ont légalisé l'euthanasie, par exemple à propos de l'euthanasie des mineurs aux Pays-Bas. Ces mesures ne figurent pas dans ce texte, mais qu'en est-il de son potentiel élargissement dans les années futures ? À propos des souffrances psychiques, d'importants débats se tiennent en Belgique au sujet d'euthanasies de personnes souffrant de dépressions sévères.

La loi en la matière doit être rédigée à la suite d'un débat instruit, dans toute sa complexité, et en portant une attention aux plus vulnérables.

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La gravité et l'émotion qui règnent dans cette enceinte nous invitent à la prudence et à l'humilité. Que veulent les Français au moment de mourir ? En majorité, ils veulent ne pas souffrir, ils ne veulent pas faire l'objet d'un acharnement thérapeutique, ils veulent être accompagnés par des proches, par des soignants, éventuellement socialement et spirituellement. Et environ un quart des Français souhaite pouvoir bénéficier de l'euthanasie. Est-ce suffisant ?

Monsieur le rapporteur, vous nous avez dit avec solennité que nous avions l'impérieuse nécessité de légiférer en ce domaine et, pour le dire clairement, de légaliser l'euthanasie. Est-ce vraiment notre priorité à quelques heures d'une intervention du Président de la République, alors que la France est engagée dans un combat pour la vie, et qu'elle a fait le choix délibéré des soins palliatifs dans un passé récent ?

Cette proposition ne me semble adaptée ni aux lieux, ni aux circonstances. Je reviendrai sur différents éléments signalés précédemment, en particulier l'opposition entre une liberté individuelle et l'engagement de toute une société. L'euthanasie engage toute la société, ce n'est pas seulement un nouveau droit à conquérir. Nous devrons y revenir, en particulier au sujet du suicide médicalement assisté.

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Avis défavorable.

Nos soignants se battent pour sauver des vies, mais aucun ne dirait qu'il le ferait à n'importe quel prix. À cet égard, les dispositions votées à l'initiative de Jean Leonetti ont marqué une avancée, que je salue, dans la mesure où elles ont mis fin à l'acharnement thérapeutique. Dans la période terrible que nous vivons, la question de la vie et de la mort se pose plus que jamais. Emmanuel Hirsch a écrit qu'en laissant des personnes mourir seules, loin de leurs proches, et en ne permettant pas l'accomplissement des rites funéraires élémentaires, nous avons perdu une part de notre humanité. On peut toujours trouver de bonnes raisons pour procrastiner, mais les arguments qui ont été avancés ne résistent pas à l'examen.

Aucun médecin honnête ne peut dire que la sédation profonde et continue permet de mourir sans douleur. On ne sait pas ce que ressent une personne qui y est plongée pendant plusieurs jours, sans être hydratée ni alimentée. Le législateur a autorisé cette procédure en raison des limites auxquelles se heurtent les soins palliatifs, malgré la qualité de l'accompagnement assuré par les soignants, que je salue : je me bats depuis des années, en tant que député de La Rochelle, pour que mon hôpital abrite une unité de soins palliatifs. Monsieur Martin, vous affirmez que la France a fait le choix des soins palliatifs. Pourtant, seules 20 à 25 % des personnes éligibles peuvent en bénéficier. Les moyens sont loin d'être suffisants.

L'exemple belge montre que les soins palliatifs et l'aide active à mourir ne s'opposent pas. On sait bien que certaines douleurs ne peuvent être traitées par les soins palliatifs. La sédation profonde et continue n'est pas une réponse : c'est le choix du laisser-mourir, qui ne satisfait pas les médecins. Quand ils recourent à cette pratique, ceux-ci savent qu'ils engagent la personne dans un aller sans retour, parfois très long.

Les dispositions de la proposition de loi sont strictement encadrées et définissent des critères très précis.

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Je peux comprendre, chers collègues, que vous vous opposiez à la proposition de loi si vous avez la conviction profonde qu'il ne faut pas adopter ces dispositions mais, par pitié, ne le faites pas simplement parce que le texte n'est pas estampillé du sceau « Emmanuel Macron ». (Vives protestations). La loi Claeys-Leonetti, qui a constitué un véritable progrès, dispose – c'est le cœur du texte – que « toute personne a le droit d'avoir une fin de vie digne et accompagnée du meilleur apaisement possible de la souffrance ». Les professionnels de santé emploient tous les moyens à leur disposition pour que ce droit soit respecté. On est bien loin de l'aide active à mourir, qui est défendue – pour ne citer qu'elle – par l'Association pour le droit de mourir dans la dignité, et qui existe dans de nombreux pays européens, comme la Suisse et le Danemark.

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Je ne voterai pas ces amendements. On connaît les limites des soins palliatifs. J'ajoute, monsieur Martin, que 48 % des lits de soins palliatifs se trouvent en Île-de-France. J'imagine que Thomas Mesnier, en sa qualité de rapporteur général de la commission des affaires sociales, appelle de ses vœux un accroissement du financement des soins palliatifs dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2022.

Le Gouvernement devait soumettre au Parlement, chaque année, une évaluation de l'application de la loi Claeys-Leonetti, ce qui n'a pas été fait depuis cinq ans. Cela explique que tant de travaux aient été réalisés en dehors de notre enceinte.

Nul ne peut se mettre à la place des personnes en fin de vie. Il nous revient d'encadrer les pratiques illégales qui se déroulent sous nos yeux pour responsabiliser les acteurs. Il n'est pas acceptable de détourner le regard.

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Je m'opposerai naturellement aux amendements de suppression. Monsieur le rapporteur général, vous avez émis le vœu que les unités de soins palliatifs reçoivent davantage de moyens : on ne peut qu'aller dans votre sens. J'espère que le prochain PLFSS leur affectera des crédits en nette hausse.

Marc Delatte a déposé, sur chaque article, un amendement de suppression dont l'exposé sommaire indique que « l'orientation » de la proposition de loi est « équivoque et intrinsèquement pourrait conduire à une dérive éthique ». Je considère, pour ma part, que le texte offre un droit supplémentaire aux patients se trouvant en situation de détresse et de souffrance, et dont la maladie est incurable. Il leur permet d'accéder, de manière très encadrée, à la fin de vie qu'ils souhaitent. Il a donc un objet profondément éthique. Je ne comprends pas le jugement moral exprimé dans ces amendements.

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Je voudrais vous faire part de mon expérience personnelle. J'ai indiqué, dans mes directives anticipées – j'en ai parlé à mes enfants et à ma personne de confiance – que je ne souhaitais pas faire l'objet d'une sédation profonde ni de soins palliatifs ; j'ai fait le choix de l'euthanasie. J'estime – c'est un jugement très personnel – que, si j'étais placée plusieurs jours durant en sédation profonde, avec ma famille à mes côtés, je n'aurais pas une fin de vie digne. Cela étant, je défends chaque année des amendements visant à accroître les moyens destinés aux soins palliatifs, car je considère que les personnes désirant bénéficier de ces soins ou de la sédation profonde y ont parfaitement droit. C'est pourquoi je répète qu'il ne faut pas opposer ces soins à l'aide active à mourir. Chacun a sa conception d'une fin de vie digne. La proposition de loi a pour objet d'offrir une liberté supplémentaire, mais il faut en parallèle améliorer les soins palliatifs.

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J'invite à repousser les amendements de suppression. Il n'a jamais paru plus nécessaire qu'aujourd'hui de corriger, par des dispositions législatives, le mal‑mourir français. Les soins palliatifs et la sédation profonde sont essentiels, en ce qu'ils répondent à certains besoins. Ils ne s'opposent aucunement à l'aide active à mourir mais constituent des dispositifs complémentaires. Nous demandons simplement que l'on entende les demandes des malades. Une étude du docteur Édouard Ferrand, portant sur un grand nombre de patients, montre qu'après avoir bénéficié pendant plusieurs jours des meilleures conditions possibles de fin de vie – soins palliatifs, traitements antalgiques, accompagnement, visites de leur famille –, 61% d'entre eux réitéraient leur demande d'aide active à mourir. Dans la plupart des pays, cette aide est considérée comme un soin palliatif – le soin ultime.

La sédation profonde et continue, quant à elle, est moins employée depuis le vote de la loi Claeys-Leonetti. Son utilisation décroît chaque année, car elle est moins demandée par les malades et n'est pas non plus plébiscitée par les équipes soignantes. Le professeur Régis Aubry, qui est un des spécialistes des soins palliatifs, a affirmé qu'elle ne calmait peut‑être pas la perception de la douleur. On n'a pas de connaissances suffisantes. Comme l'a dit le docteur Corinne Van Oost, « celui qui va mourir en appelle parfois à la mort mais presque jamais au sommeil ».

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Il règne une certaine confusion dans ce débat. Il faut distinguer la sédation profonde et continue, le suicide médicalement assisté et l'euthanasie – laquelle semble être l'objet de la proposition de loi. La confusion vient aussi du fait que l'on n'a pas communiqué les résultats de l'évaluation de la loi Leonetti‑Claeys qui, contrairement à ce qui a été dit, a bien été réalisée. Les études de l'IGAS et du Conseil national d'évaluation des normes montrent que la loi du 2 février 2016 suffit à régler la très grande majorité des cas de fin de vie. Ces conclusions, écrites noir sur blanc, remontent à plus de deux ans.

La loi Leonetti‑Claeys permet de mourir mais non de faire mourir. En application de ce texte, on peut proposer une sédation profonde et continue, qui conduit au décès. La question est de savoir si on doit légiférer pour reconnaître le droit d'euthanasier un être humain. Lorsque le patient est conscient, il peut exprimer la volonté de mourir. Dans le cas contraire, les choses se compliquent. Les premières évaluations faites en Belgique montrent que, dans bon nombre de cas, la volonté du patient n'est pas prise en considération. (Exclamations.) C'est la pression de l'entourage qui est déterminante. Il y a un risque manifeste de dérive vers une euthanasie extensive, qui dépassera largement la volonté du patient.

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Les amendements de suppression partent du principe que la loi Claeys-Leonetti répond aux attentes de nos concitoyens. Or, il me semble que tel n'est pas le cas. La proposition de loi a pour objet d'instituer un droit nouveau : celui de choisir librement sa fin de vie et de mourir dans la dignité. Le débat est mûr. Le groupe d'études – transpartisan – de l'Assemblée nationale sur la fin de vie a effectué, depuis le début de la législature, un certain nombre de travaux. Dans ma circonscription, j'ai été interpellée dès 2017 sur ce sujet. Un groupe de travail citoyen a été constitué. Jean-Louis Touraine et moi-même avons organisé une conférence-débat. Le texte comblera une lacune de notre législation et conférera à nos concitoyens l'exercice d'un droit qu'ils attendent. Je voterai contre les amendements de suppression.

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Je m'opposerai également aux amendements pour l'ensemble des raisons qui ont été exposées. Je voudrais revenir sur les réflexions d'Emmanuel Hirsch relatives à la souffrance des malades mourant seuls, loin de leurs proches, sans que les rites funéraires puissent être accomplis. Nous devons avoir cette préoccupation à l'esprit dans le cadre de notre réflexion sur l'aide active à mourir. Beaucoup de Français souhaitent mourir chez eux, auprès de leurs proches. Madame Pételle, vous craignez qu'en autorisant l'aide active à mourir, on fragilise la fraternité. La légalisation de cette pratique témoignerait, à mes yeux, d'une prise de conscience collective. Elle permettrait de prendre de la hauteur, d'accompagner nos proches à un moment fondamental. Ce geste me paraît profondément humain et me semble ainsi relever de l'exigence de fraternité. Bien que ce ne soit pas facile pour les proches, le moment est venu d'entendre les personnes qui souhaitent recevoir une aide active à mourir. Nous devons être capables, collectivement, de les écouter.

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La distinction entre la sédation profonde et continue et l'aide active à mourir est au cœur de notre débat. La loi Claeys-Leonetti a permis une avancée extraordinaire mais conduit à jeter un voile pudique sur la fin de vie : lorsqu'on prescrit du midazolam ou de la morphine, on sait que le malade ne se réveillera pas. Par ailleurs, la prise en charge des patients est profondément inéquitable car elle ne s'exerce pas de la même manière sur l'ensemble du territoire. Enfin et surtout, ce n'est jamais le malade qui décide : c'est soit l'équipe, soit le médecin, soit la famille. Cette proposition de loi crée un droit, sans rien enlever à qui que ce soit. La disposition est encadrée : elle est réservée au contexte agonique. Elle ne s'oppose pas aux soins palliatifs. La décision sera prise par le malade ; s'il n'est pas en état de le faire, elle incombera à la personne de confiance. Cet ultime geste d'humanité nous élève. Je voterai contre les amendements de suppression.

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Je ne peux pas laisser dire que le malade ne décide jamais en matière de soins palliatifs. Lors de mes visites dans les unités de soins palliatifs, j'ai constaté que le temps était suspendu. Les médecins prennent le temps nécessaire à l'écoute et à la compréhension. La décision, collégiale, est prise avec le malade ; la parole de chacun – aide-soignante, infirmière ou médecin – a autant de poids.

Les soins palliatifs et l'euthanasie ne sont pas complémentaires. L'article 1er introduit un profond changement philosophique et éthique dans la mission du médecin. Pour la première fois, celui-ci ne devra plus soigner ou alléger les souffrances, mais mettre fin à la vie. Cela contredit frontalement les termes du serment d'Hippocrate – « Je ne provoquerai jamais la mort délibérément » – et de l'article 38 du code de déontologie de l'Ordre national des médecins, retranscrit à l'article R. 4127-38 du code de la santé publique, selon lequel « le médecin doit accompagner le mourant jusqu'à ses derniers moments, assurer par des soins et mesures appropriés la qualité d'une vie qui prend fin, sauvegarder la dignité du malade et réconforter son entourage. Il n'a pas le droit de provoquer délibérément la mort ».

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Je voterai contre les amendements de suppression. Est-ce le bon moment pour aborder ce sujet ? Il est toujours difficile de parler de la mort, mais j'ai la conviction que le temps est venu. Il nous faut saisir l'occasion qu'offre la proposition de loi. Si la loi Claeys-Leonetti permet à une très grande majorité de personnes de choisir la manière dont elles souhaitent mourir, cela n'est pas le cas pour l'ensemble des malades en fin de vie. La proposition de loi offre une liberté supplémentaire, tout en l'encadrant.

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Le ministre des solidarités et de la santé a exprimé il y a quelques jours, au Sénat, la volonté de développer les soins palliatifs et de leur affecter des crédits supplémentaires dans le PLFSS 2022. Je soutiens fortement cette ambition, qui devrait être appuyée par une large majorité.

Une étude belge récente montre, avec près de vingt ans de recul, que les organisations médicales professionnelles n'ont pas établi, dans ce pays, d'outil standardisé pour juger du caractère volontaire et réfléchi de la demande d'euthanasie. L'interprétation de ce critère peut donc se révéler très subjective.

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Je voterai également contre les amendements de suppression. À l'heure où nous parlons, l'hôpital opère un tri entre les patients et la qualité des soins se dégrade. Nous ne sommes donc pas toujours à la hauteur des principes éthiques que d'aucuns invoquent.

Le sujet dont nous débattons renvoie à des cas individuels de plus en plus nombreux. Dans sa lettre d'adieu, Anne Bert écrivait : « Forte de mon expérience de fin de vie en France et de mon choix de trouver une terre plus hospitalière, je déjoue les arguments fallacieux et les fantasmes serinés un peu partout. Non, la loi française n'assure pas au malade son autodétermination et elle n'est pas garante d'équité. Chaque équipe médicale agit, in fine , selon ses propres convictions et non selon les vôtres. » Elle ajoutait : « J'ai tenu à écrire un livre [...] pour dire autrement, sous le prisme du goût de la vie, comment je me suis réapproprié ma vision de la mort, bien au-delà du tabou de la fin de vie. » Cette lettre révèle une angoisse de la mort. Ceux qui croient en une vie après la mort sont souvent les plus réticents à appréhender ce passage.

Dans le film de Stéphane Brizé Quelques heures de printemps, le personnage joué par Vincent Lindon se réconcilie, à sa sortie de prison, avec sa mère, qui a pris la décision de mourir. C'est le moment où on peut parler et se réconcilier avec sa famille : on n'est pas surpris par la mort de la personne.

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On a eu parfois le sentiment que certains dressaient le constat des difficultés rencontrées par les soins palliatifs pour justifier la nécessité de l'euthanasie. Il faut être très prudent.

Le terme de procrastination qui a été employé laisse entendre que l'on voudrait éviter d'aborder le sujet. Il s'agit plus, à mes yeux, d'une question de maturation. Il faut assurer une consultation organisée, au moyen d'une méthode claire, qui reste à définir.

À l'appui de telle ou telle thèse, on cite diverses évaluations. Celles relatives à la Belgique ne sont pas tout à fait probantes ; elles ne permettent pas d'avoir une vision objective de ce qui s'y passe. Des dérives ont été signalées, qui doivent appeler notre attention.

Enfin, le terme de dignité soulève des interrogations : que recouvre cette notion ? Qu'est-ce que l'on entend par ne pas mourir dignement ? Nous sommes tous dignes.

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Puisque tout le monde fait référence à la loi Claeys‑Leonetti, je voudrais simplement rappeler le contexte dans lequel elle a été votée. François Hollande s'était engagé, pendant sa campagne pour la présidentielle, à légiférer sur la fin de vie. Or, ce texte est arrivé après le mariage pour tous, qui a provoqué un tohu-bohu à l'Assemblée nationale et en France dont vous devez vous souvenir. La loi Claeys‑Leonetti, d'une certaine manière, a fait figure de loi d'apaisement. Cependant, si elle a permis de calmer la représentation nationale, à droite comme à gauche, elle n'a convaincu ni les citoyens ni les médecins et c'est l'une des raisons pour lesquelles elle n'est pas appliquée. C'est pourquoi nous devons impérativement aller plus loin.

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La philosophie qui sous-tend la sédation n'est pas la même que celle de l'aide active à mourir mais pour un sujet aussi important que la mort, ne devrions-nous pas faire preuve d'un peu de pragmatisme ? C'est, en tout cas, ce qu'attendent certains de nos concitoyens.

Par ailleurs, beaucoup d'entre vous évoquent la Belgique. En janvier, j'ai organisé dans ce pays un voyage auquel ont participé, notamment, Jean-Louis Touraine et Maxime Minot. Je regrette que ceux qui décrient aujourd'hui le système belge n'aient pas été présents car ils se seraient rendu compte que les dérives qu'ils dénoncent n'existent pas. Le système, qui a vingt ans, est très encadré. Le dispositif législatif est clair et une commission est chargée de contrôler la pratique des euthanasies. Les procès sont très rares. Le pays des droits de l'homme devrait faire preuve d'humilité, écouter les médecins, les associations de patients, les juristes et les législateurs de Belgique pour apprendre de leur expérience plutôt que de se livrer à des réflexions très insultantes pour eux. N'oublions pas que nombre de nos concitoyens partent dans ce pays pour mourir.

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Les mots sont d'une chose, la réalité en est une autre. Nous avons sans doute tous vécu, dans nos familles, l'expérience d'un proche plongé en sédation profonde et continue et nous ne pouvons qu'avoir été émus par ce qui n'est rien d'autre qu'une lente agonie. La plupart du temps, la décision est prise par l'équipe et non par la personne elle-même. Il est assez hypocrite de ne pas reconnaître que cette décision est prise en vue d'un objectif que tout le monde admet : le décès de la personne. Il faudra bien, un jour, mettre en cohérence nos actes et nos mots. C'est pourquoi nous sommes contre ces amendements de suppression.

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Depuis la loi Kouchner du 4 mars 2002, les droits individuels du patient sont reconnus, à commencer par le droit à l'information. Le patient peut connaître le traitement et le diagnostic. Il peut refuser un traitement et choisir le type d'hospitalisation, à domicile ou conventionnelle. Nous proposons, aujourd'hui, d'ouvrir une sorte de droit ultime, de droit fondamental, afin qu'au moment le plus important de notre vie, nous ayons un autre choix que celui de la sédation profonde et continue ou de celui de vivre ses souffrances jusqu'au décès. Comment respecter le choix d'une personne si on n'élargit pas l'éventail des possibilités ? C'est pourquoi je ne voterai pas pour ces amendements de suppression.

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Je voterai contre ces amendements de suppression. Sur les 660 000 personnes qui meurent chaque année en France, entre 150 000 et 200 000 ont besoin de soins palliatifs, en raison, par exemple, de la découverte d'une maladie qui peut entraîner de profondes souffrances et une fin rapide. Un tiers d'entre elles n'auront pas accès à ces soins. Environ 2 000 personnes meurent de la main de personnels de santé qui pratiqueraient l'euthanasie de manière plus ou moins illicite et quelques centaines de personnes choisiraient, parce qu'elles en ont les moyens, de partir en Belgique, en Suisse ou au Pays-Bas pour se faire euthanasier. Doit-on légiférer en France pour ces quelques centaines, voire milliers de personnes, sachant que la mort, qui nous attend tous, interviendra, pour la plupart d'entre nous, dans des conditions plutôt déplorables parce que l'accompagnement vers la fin de la vie n'est pas en digne en France et que l'on y meurt mal ? Je vous le dis avec force et conviction : nous devons légiférer pour ces personnes qui souffrent terriblement et se voient dans une telle situation de déchéance qu'elles demandent, par dignité pour elles, à mourir. Notre pays doit ouvrir le droit à ce choix, pas seulement pour les personnes en fin de vie, mais pour tous les vivants, afin d'apaiser l'anxiété de chacun d'entre nous qui pourrait se retrouver un jour en très grande dépendance, dans une situation de déchéance, dépossédé de son autonomie et incapable de prendre cette ultime décision.

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Madame Dumas, vous considérez que la crise sanitaire que nous traversons justifie que nous abordions à nouveau ce sujet. Je ne suis pas d'accord. Ne confondons pas tout et ne cherchons pas des prétextes. Chaque personne doit pouvoir choisir sa fin de vie. Qui sommes-nous pour décider de permettre ou d'interdire à ceux qui refuseraient les soins palliatifs de choisir la manière dont ils veulent mourir ? Pourquoi, par exemple, leur refuser la possibilité d'être entourés de leur famille lorsqu'ils décideront de partir, ce qui est rarement le cas en soins palliatifs ? Savez-vous que la sédation profonde et continue peut durer quelques minutes comme plusieurs jours ? Je ne sais pas ce qui est le plus cruel. Cessons l'hypocrisie et ne jetons plus un voile sur la manière dont se déroule la fin de vie en France. Offrir le choix ne signifie pas qu'on remplacera un dispositif par un autre. Chacun restera libre de choisir la manière de mourir.

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Je vous l'avoue, j'ai abordé ce texte avec réserve, pour des raisons de fond qui tiennent à mes convictions personnelles, comme de forme puisqu'il s'agit d'une simple proposition de loi. Aujourd'hui, je suis frappé par la qualité de nos débats et l'écoute dont nous faisons preuve les uns envers les autres. La forme même de la proposition de loi ne me dérange plus car le cheminement parlementaire devrait nous permettre d'être pleinement éclairés.

Quant au fond, j'ai écouté avec attention les témoignages et je me suis rendu compte des nombreuses inégalités qui subsistaient dans l'accès aux soins palliatifs. Ainsi, dans la Vienne, les soins palliatifs proposés aux patients du centre hospitalier universitaire restent fermés aux personnes extérieures au territoire. J'en conviens, l'octroi d'un droit à une assistance médicalisée n'enlèverait rien à personne. Je voterai donc contre ces amendements de suppression.

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Nous ne voterons pas ces amendements. Ce texte n'a pas vocation à opposer les soins palliatifs à cette assistance médicalisée, ni même à les réduire. Au contraire, nous sommes nombreux, ici, à vouloir renforcer les moyens qui leur sont affectés pour les développer. Ce texte n'a pas été proposé parce que les soins palliatifs ne seraient pas efficaces mais parce qu'ils ne permettent pas de répondre à certaines situations. Des malades, aujourd'hui, n'ont pas la liberté de choisir et restent face à leur détresse et leur souffrance. Je le sais d'autant plus que j'ai organisé de nombreuses réunions publiques autour de ce thème. Permettez-moi ainsi de vous livrer le témoignage de cet homme de 45 ans, qui avait accompagné en Belgique son épouse de 43 ans, atteinte de la maladie de Charcot, qui, même si elle n'était pas en fin de vie, a choisi de ne pas vivre les souffrances inéluctablement liées à cette maladie.

Nous ne pouvons plus accepter que des Français soient contraints de se rendre en Belgique parce que notre pays n'est pas capable de leur offrir ce choix. Ce texte ne vise pas à opposer plusieurs manières de finir sa vie mais à créer un nouveau droit.

La commission rejette les amendements.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS263 et AS264 du rapporteur.

Elle en vient ensuite, en présentation commune, aux amendements AS189 et AS191 de Mme Annie Chapelier.

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La Belgique dépénalise l'acte d'euthanasie en cas de souffrance psychique insupportable qui ne peut être apaisée et qui résulte d'une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable. Des voix s'élèvent contre cette formulation car elle permettrait d'assister une personne qui voudrait mourir pour mettre fin à des souffrances psychiques intolérables. Durant ces dix dernières années, il est arrivé que des malades très jeunes, souffrant de dépression chronique, demandent à mourir après avoir tenté à plusieurs reprises de se suicider mais se rétractent au dernier moment. Il s'est alors avéré qu'un autre diagnostic posé sur leur maladie révélait une pathologie soignable, mais qui n'avait pas été détectée suffisamment tôt. Je propose par conséquent de retirer le terme « psychique » ou de l'associer au caractère physique en remplaçant « ou » par « et », afin que la cause psychique ne puisse être la seule invoquée.

Le rapporteur présentera un amendement, que nous avons été plusieurs à cosigner, pour qu'un médecin spécialiste de l'affection dont souffre le demandeur participe au collège de médecins chargé d'examiner la situation médicale de la personne. Cependant, même en présence d'un collège de psychiatres, ces cas-là pourraient être largement discutés, d'autant plus que personne n'a pu prouver, jusqu'à présent, qu'une maladie psychique était incurable.

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Le cadre de la loi est extrêmement précis. Il faut être atteint d'une affection grave, incurable, en phase avancée ou terminale pour pouvoir demander une assistance médicalisée active au décès. Les termes sont clairs. Vous soulevez à juste titre le cas de la dépression. Si le nombre de personnes qui en souffrent a, malheureusement, considérablement augmenté dernièrement, cette maladie n'est, en aucun cas, incurable. Le texte ne permet pas d'accéder à une demande d'assistance médicalisée active au décès dans le cas d'une maladie psychique, comme la dépression. J'espère vous avoir rassurée.

Avis défavorable.

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Je ne retire pas mes amendements car le rapporteur ne m'a pas totalement rassurée. J'ai bien compris ses explications mais n'a-t-il pas lui-même reconnu s'être largement inspiré de la rédaction de la loi belge, laquelle n'a pas empêché de retenir, dans certains cas de profonde dépression, la seule cause psychiatrique ? Et pourtant, les mêmes arguments que les siens avaient été avancés pour tenter de rassurer ceux qui pointaient ce risque.

En France, 9 000 personnes se suicident en moyenne chaque année et 90 000 sont hospitalisées pour tentative de suicide. Je me doute bien que votre proposition de loi n'ouvrira pas la voie à l'organisation de suicides en masse mais on n'est jamais à l'abri de quelques dérives. C'est pourquoi je vous proposais de lier physique et psychique. Je ne nie pas la douleur psychique mais je reste convaincue que l'on peut la soigner.

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Le débat est extrêmement intéressant. La notion de détresse psycho-sociale a été soulevée lors du dernier débat autour des lois de bioéthique. En l'espèce, le cas de la souffrance psychique insupportable pose question. Vous affirmez, monsieur le rapporteur, qu'une dépression nerveuse ne pourrait en aucun cas justifier la demande d'euthanasie parce qu'elle n'est pas une maladie incurable. Mais que se passe-t-il si une personne, atteinte d'une maladie durable et incurable, développe une dépression nerveuse qui lui fait voir « la vie en noir » et lui donne l'impression d'être en proie à une souffrance psychique insupportable ? Où placer le curseur ? Que faut-il prendre en compte ? La frontière est si ténue qu'il me semble délicat d'intégrer dès le premier article la notion de souffrance psychique insupportable. Je suis d'accord avec Mme Chapelier qui propose de lier le psychique au physique.

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À vous entendre, il serait toujours possible de soulager la souffrance psychique mais pas toujours la souffrance physique. C'est une contradiction et c'est pourquoi je m'oppose à ce texte. Il est toujours possible de soulager la souffrance psychique et la souffrance physique. Mme Chapelier a rappelé les chiffres du suicide, en France. Les personnes qui souhaitent mettre fin à leurs jours pourront-elles, demain, demander l'euthanasie ? Que leur répondrez-vous ? Ce texte pourrait grandement menacer l'équilibre de la société et, en particulier, la santé mentale des uns et des autres.

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Une souffrance physique entraîne, en général, une souffrance psychique. Il est d'ailleurs assez difficile de les distinguer car la souffrance est commandée par le cerveau. Je le répète, ce texte propose de n'accorder l'assistance médicale au décès qu'en cas de maladie grave, incurable. Il arrive tous les jours, hélas, que les médecins soient confrontés à une impasse thérapeutique et proposent des soins palliatifs. La dépression est une maladie grave mais pas incurable, bien au contraire. Par ailleurs, il est prévu qu'un collège de trois médecins entoure le malade. La maladie psychique n'entre pas dans ce dispositif.

Mme Chapelier a rappelé que je m'étais largement inspiré de la loi belge : c'est vrai, je ne m'en suis pas inspiré totalement. De toute manière, si ce texte était adopté, toute évolution ultérieure ne pourrait relever que du législateur qui, dans sa sagesse, prendra les dispositions qu'il estime nécessaires. Pour l'heure, il n'est pas question que des personnes dépressives aient accès à l'aide médicalisée au décès. Les médecins s'assureront de la bonne application de ce texte et il est prévu d'instituer une commission nationale de contrôle des pratiques.

La commission rejette successivement les amendements.

Puis elle est saisie, en présentation commune, des amendements AS70 et AS68 de Mme Caroline Fiat.

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Avis défavorable. Je comprends les motivations des signataires mais l'adoption de ces amendements romprait l'équilibre du texte.

La commission rejette successivement les amendements.

Puis elle adopte l'amendement rédactionnel AS265 du rapporteur. En conséquence, l'amendement AS147 de M. Thibault Bazin tombe.

La commission en vient à l'amendement CS231 de Mme Annie Vidal.

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Il s'agit de compléter l'article par l'alinéa suivant : « Les polypathologies chroniques liées à l'âge ne constituent pas à elles seules un motif justifiant une demande d'une assistance médicalisée pour mourir. » La vieillesse implique nécessairement un affaiblissement de la santé des personnes mais les problématiques médicales qu'elle engendre naturellement ne devraient pas conduire à une assistance médicalisée à mourir. Nous souhaitons lutter contre l'âgisme et toute forme d'influence sociale à laquelle certaines personnes âgées particulièrement vulnérables pourraient être soumises.

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Nous connaissons tous l'engagement de Mme Vidal auprès des personnes âgées. Bien évidemment, ce texte n'a pas pour objectif d'inviter les personnes âgées à demander l'euthanasie. La notion de « polypathologies chroniques liées à l'âge » me semble assez floue et ne saurait constituer un critère légal. Je vous propose de retirer l'amendement afin que nous puissions y travailler d'ici la séance. Sinon, avis défavorable.

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D'accord. Il me semble en effet important de protéger les plus vulnérables contre les pressions sociales.

L'amendement est retiré.

La commission est saisie des amendements identiques AS201 du rapporteur, AS19 de Mme Marine Brenier, AS44 de M. Jean-Louis Touraine, AS55 de M. Guillaume Chiche, AS77 de M. Philippe Vigier, AS129 de Mme Marie-Noëlle Battistel et AS154 de Mme Agnès Firmin Le Bodo.

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Il s'agit d'insérer à l'article 1er la clause de conscience des médecins.

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Comme pour l'interruption volontaire de grossesse (IVG), il est fondamental d'accorder une clause de conscience particulière aux médecins car un tel acte relève des convictions personnelles, philosophiques ou religieuses.

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L'amendement vise à préciser que le médecin refusant de pratiquer l'acte est tenu d'orienter immédiatement le malade vers un autre praticien susceptible d'accepter sa demande.

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Il nous paraît important d'insérer la clause de conscience dans cette loi de liberté, afin de donner aux praticiens la liberté de faire ou de ne pas faire.

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Si vous n'avez pas songé à obliger un médecin à pratiquer l'euthanasie – ce serait une monstruosité ! –, vous exercez sur lui une pression excessive en l'obligeant à trouver un autre praticien qui se chargera de l'acte d'euthanasie. Je crains que se développe petit à petit une spécialité médicale qui consisterait à accepter les patients des confrères ne souhaitant pas pratiquer l'euthanasie.

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Lorsque nous avons examiné la proposition de loi sur l'allongement des délais de l'IVG, certains d'entre vous estimaient qu'il n'était pas nécessaire d'ajouter une clause de conscience spécifique à l'IVG au motif qu'il existait déjà une clause générale. Or ces amendements visent justement à créer une clause spécifique à l'euthanasie. Les deux démarches me paraissent contradictoires et incohérentes.

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De nombreux professionnels de santé sont confrontés à la fin de vie sans être couverts par la clause de conscience générale. Il est donc important d'en élargir les bénéficiaires. C'est la raison pour laquelle j'ai cosigné cet amendement, même si cela fait des années que je me bats pour la suppression de la double clause de conscience dans l'IVG, qui ne me paraît plus utile.

Il est nécessaire de prévoir également une information et une réorientation immédiate : cela est prévu dans la double clause de conscience.

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Alors que le serment d'Hippocrate place les médecins dans une culture de vie, la présente proposition de loi confie aux professionnels la mission de donner la mort : culturellement, la confrontation est difficile. On leur laisse la possibilité d'y déroger en trouvant rapidement un autre confrère acceptant de le faire à leur place. J'aimerais savoir si le corps des professionnels concernés peut être consulté : qu'en disent ceux à qui la loi demandera de procéder à un acte qui pose problème au regard de l'éthique professionnelle et du serment d'Hippocrate ?

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Si cela posait un problème d'éthique, il faudrait alors supprimer la loi Claeys-Leonetti ou encore la phase d'arrêt des soins en réanimation. Les médecins appliquent des protocoles : quand on passe en sédation profonde, on donne la mort. Il en va de même lorsqu'on arrête la nutrition et l'hydratation, et les médecins le savent. Il faut raison garder : ce n'est pas parce que le processus est accéléré par l'administration d'une solution létale que l'éthique change. N'allons pas sur ce terrain car cela relèverait de la mauvaise foi.

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Le serment d'Hippocrate n'autorise pas la pratique d'avortements, ni le traitement de la lithiase de la vessie, ni d'être rétribué quand on enseigne la médecine aux enfants de ses confrères. Ces règles, établies il y a 2 500 ans, s'appliquaient à la médecine de cette époque. La médecine que l'on enseigne et que l'on pratique aujourd'hui est différente. Le serment d'Hippocrate doit être adapté au XXIe siècle. Rappelons que l'on n'est même pas sûr du contenu de ce serment car la version la plus ancienne que l'on connaisse date de plus de cinq siècles après Hippocrate.

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Je suis gêné quand j'entends ma collègue Caroline Fiat dire que la sédation profonde et continue serait un acte létal. Il n'en est rien : on soulage les souffrances et, si les drogues utilisées peuvent accélérer le processus, elles ne peuvent activer un processus qui n'a pas commencé.

Le serment d'Hippocrate a été revu par l'Ordre des médecins en 2012 et prend largement en considération l'éthique de notre temps : « Je ferai tout pour soulager les souffrances. Je ne prolongerai pas abusivement les agonies. Je ne provoquerai jamais la mort délibérément. » La proposition de loi va donc à l'encontre du serment d'Hippocrate.

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Selon M. Martin, il serait tout à fait possible d'abréger les souffrances physiques. Parfois, on ne peut pas le faire : chez les personnes très âgées, la morphine va induire la mort et non pas simplement réduire la souffrance. Par ailleurs, la sédation profonde et continue s'accompagne d'un arrêt de la nutrition et de l'hydratation : cela entraîne la mort, avec des souffrances. Je l'ai vécu personnellement, avec des personnes qui hurlaient pendant la sédation profonde et continue. Rappelez-vous le film Amour, de Michael Haneke, avec Jean-Louis Trintignant : c'est la réalité que vivent certaines personnes.

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Ces amendements sont de nature à rassurer tous ceux qui pensent que les professionnels de santé sont contraints d'apporter leur concours. Des garde‑fous sont mis en place. Je voudrais dire à Thomas Mesnier qu'il ne faut pas jouer sur les mots : lorsque l'hydratation et la nutrition s'arrêtent, les organes vitaux ne fonctionnent plus et la mort est au bout du chemin, très rapidement.

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Un médecin exerçant en soins palliatifs m'a expliqué qu'en sédation profonde, le décès était dû à l'arrêt de la nutrition et de l'hydratation, prévu dans la loi Claeys-Leonetti. J'ai beau n'être qu'une aide-soignante et ne pas avoir prêté le serment d'Hippocrate, je maintiens mes propos : c'est bien l'arrêt de l'hydratation et de la nutrition qui provoque la mort. Le médecin sait pertinemment qu'il donne la mort en prenant cette décision.

La commission adopte les amendements.

Elle en vient aux amendements identiques AS200 du rapporteur, AS18 de Mme Marine Brenier, AS36 de M. Jean-Louis Touraine, AS54 de M. Guillaume Chiche, AS76 de M. Philippe Vigier, AS128 de Mme Marie-Noëlle Battistel, AS153 de Mme Agnès Firmin Le Bodo et AS172 de Mme Caroline Fiat.

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Il s'agit de définir dans le code de la santé publique l'assistance médicalisée active à mourir réalisée par un médecin.

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Pour rassurer ceux qui craignent des dérives, l'amendement définit très précisément l'acte en question.

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Je remercie Marine Brenier, qui a insisté pour que l'on dispose d'une définition sans aucune ambiguïté.

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Cette précision est nécessaire car la définition concrète des modalités de cet acte assurera une plus grande effectivité du droit et garantira qu'il ne s'agit pas d'une ouverture au suicide assisté, hors cadre et sans condition.

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Il aurait été plus clair et plus honnête de parler directement d'euthanasie plutôt que d'assistance médicalisée active à mourir : il n'y aurait pas d'ambiguïté !

La commission adopte les amendements.

Puis elle adopte l'article 1er, modifié.

Article 2 : Conditions d'accès, mise en œuvre et contrôle de l'assistance médicalisée active à mourir

La commission est saisie des amendements de suppression AS2 de M. Marc Delatte, AS9 de Mme Caroline Janvier, AS14 de M. Thomas Mesnier, AS108 de Mme Bénédicte Pételle, AS126 de Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe, AS148 de M. Thibault Bazin et AS195 de M. Didier Martin.

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Je rappelle ce que j'ai dit en préambule : 10 000 soignants de soins palliatifs et 5 000 bénévoles de la Société française d'accompagnement et de soins palliatifs ont émis un avis largement négatif sur cette proposition de loi de légalisation de l'euthanasie – il faut appeler un chat un chat. La vie est bien plus complexe que cela, et la sédation profonde est l'un des moyens existant en soins palliatifs pour accompagner le patient. La fin de vie doit être décente ; la dignité concerne la personne, et non la fin de vie.

Par ailleurs, il faut parler des risques de dérive éthique, en Belgique mais aussi au Canada. Les clauses de conscience sont facilement contournées puisque les établissements canadiens sont soumis à des pressions financières s'ils ne respectent pas la volonté d'euthanasie d'un patient. Quant à la personne de confiance, elle n'a qu'un rôle de témoignage, pas de décision.

La loi Claeys-Leonetti répond à plus de 90 % des situations : il faut la laisser vivre !

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Je vous propose de rejeter cet article parce qu'il pose des problèmes d'application. Une étude parue en début d'année sur la situation en Belgique montre qu'aucun outil standardisé n'est fourni par les organisations médicales pour juger du caractère volontaire et réfléchi de la demande, faisant courir le risque d'une interprétation hautement subjective. La Commission fédérale de contrôle et d'évaluation de l'euthanasie semble retenir une acception assez large du terme « maladie », incluant notamment des malformations congénitales. Or, chez les patients âgés, l'euthanasie intervient le plus souvent dans un contexte de polypathologies. Dans ces conditions, lorsque la maladie est incurable et que la souffrance ne peut être soulagée, ou bien lorsqu'elle est jugée insupportable par le patient, celui-ci peut-il refuser un traitement pouvant le soulager et demander une aide médicalisée à mourir, autrement dit une euthanasie ? Plus nous creusons, plus nous mesurons la difficulté de ce sujet. Il n'est pas opportun de prendre ce chemin.

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L'article 2 ne permet pas de se prémunir du risque de commettre des erreurs. La mention du médecin traitant à l'alinéa 2 reste trop vague pour définir auprès de quel médecin cette demande peut être faite. Un médecin généraliste de famille, non spécialiste de la maladie incurable dont souffre la personne, peut ainsi être impliqué dans cette procédure sans pour autant connaître les différentes solutions.

À l'alinéa 3, la saisie par le médecin traitant de deux autres praticiens sans aucune mention de leur spécialité, laquelle devrait être en rapport avec la pathologie du patient, peut amener à une prise de décision non appropriée. Ceux-ci devront, de plus, vérifier le caractère libre, éclairé et réfléchi de la demande, alors qu'ils ne connaissent pas la personne. Enfin, à l'alinéa 4, le délai maximum de quatre jours pour remettre un rapport comportant les conclusions sur l'état de santé du malade et la pertinence ou non de l'euthanasie est insuffisant. C'est un délai très rapide, alors que le rapport au temps est très diffus en soins palliatifs.

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L'aide médicalisée active à mourir sous‑entend le concept médical de soins et de vie, alors qu'il s'agit d'une aide à mourir. Ce titre est à la fois paradoxal et contourne le fait qu'il s'agit de donner la mort de façon anticipée. Pourquoi n'osez-vous pas utiliser les mots qui désignent l'acte demandé au médecin ?

L'euthanasie remet en cause le rôle de la médecine, non seulement sur un plan déontologique, mais aussi dans la relation de confiance entre le patient et le soignant. De plus, elle rompt avec le principe fondamental qu'aucun homme n'a le droit de disposer de la vie d'un autre, même dans une situation d'exception. Cette proposition de loi, radicalement différente des lois de 2005 et de 2016, soulève donc nombre de questions quant à son application.

Enfin, le choix du mot « dignité » me paraît très préoccupant. Il interroge le regard que nous portons sur la vieillesse, sur les personnes en fin de vie, dont on pourrait décider que celle-ci n'est plus digne ou plus utile. N'y a-t-il pas un risque que le patient, même inconscient, subisse la pression d'une société qui considère sa vie comme inutile ou indigne ? La dignité ne peut pas se rapporter à l'état physique ou psychique d'une personne : toute personne est digne, quelle que soit sa condition physique, psychique, sociale ou médicale.

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L'article 2 définit la procédure pour les personnes en capacité d'exprimer leur volonté. Alors que la fonction médicale est de prendre soin, cet article opère une mutation : il ne s'agit plus de respecter la liberté du patient, de refuser un traitement et de l'accompagner dans cette décision, mais d'exiger du médecin un acte qui contrevient à l'un des engagements du serment de l'Ordre des médecins. C'est pourquoi l'amendement AS148 propose de supprimer cet article.

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L'article 2 est en quelque sorte un protocole d'euthanasie. De même que nous nous sommes opposés à la légalisation de l'euthanasie, je m'oppose à ce protocole. Il concerne les malades conscients, qui peuvent encore exprimer leur volonté. La mention d'une « souffrance physique ou psychique qui ne peut être apaisée » ou que la personne « juge insupportable » est ambiguë et subjective. Légiférer dans ces conditions me paraît franchement imprudent. Des solutions existent, comme les soins palliatifs et la sédation profonde et continue.

L'IGAS, je le rappelle même si vous ne souhaitez pas l'entendre, s'est penchée sur la loi Leonetti‑Claeys et a fait des préconisations pour l'améliorer. Elle constate que le nombre de personnes qui connaissent la législation est encore très insuffisant. Le droit au recours à la sédation profonde et continue jusqu'au décès est en train de s'instaurer peu à peu. Nous sommes encore loin des objectifs mais nous progressons. Les études sur la fin de vie, la conscience et la subconscience font largement défaut et la recherche dans ce domaine est encore trop pauvre. Il existe des pistes d'amélioration, y compris sur la formation initiale et continue du corps médical dans son ensemble.

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Les arguments avancés sont les mêmes que ceux qui ont été présentés pour la suppression de l'article 1er. Avis défavorable.

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Personne ne s'oppose à ce que l'on améliore la fin de vie via la loi Claeys-Leonetti. Celle-ci ne fait en aucune manière concurrence au texte que nous voulons voter : les malades auront un choix réel. Dans l'immédiat, la loi Claeys-Leonetti n'est pas appliquée et doit même être améliorée – fort bien ! Cela ne nous empêche pas de voter la proposition de loi.

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Monsieur le rapporteur, si un malade, qui juge sa souffrance insupportable, se voit proposer un traitement qui pourrait le soulager et le refuse, et s'il remplit par ailleurs les autres critères fixés par la proposition de loi pour demander l'assistance médicalisée, quels sont les garde-fous ? Je ne les vois pas et mon exemple est symptomatique d'une série de questions qui s'accumulent, soulignant les risques liés à ces dispositions.

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Je regrette que notre commission ait adopté l'article 1er. Et je comprends encore moins qu'on adopte le dispositif de l'article 2 alors que les équipes de soins palliatifs sont formées à la collégialité et au respect du temps nécessaire aux décisions. Si l'article 2 devait être adopté, il faudrait s'appuyer sur l'expérience acquise par ces équipes depuis le vote de la loi Claeys-Leonetti.

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Monsieur Mesnier, l'article 2 définit bien les conditions dans lesquelles une assistance médicalisée peut être demandée et il prévoit l'instruction des dossiers par un collège de médecins, en plus d'un contrôle a posteriori, qui n'existe pas à l'heure actuelle.

En outre, dans l'exposé des motifs, nous ne disons pas autre chose que vous : bien sûr, il faut développer les soins palliatifs partout, bien sûr, les citoyens doivent être mieux informés des dispositions de la loi Claeys-Leonetti, mais ce n'est pas contradictoire avec les dispositions de la présente proposition de loi. Notre constat est donc identique cet après-midi : nous serons tous unis pour obtenir un plan à la hauteur de nos ambitions dans le PLFSS 2022.

Enfin, si Olivier Falorni propose un encadrement, c'est bien que nous savons ce qui se passe. Manifestement, le législateur n'a pas fait son travail jusqu'à présent. Il nous appartient désormais de le faire pour éviter ces « dérives », parce qu'il y en a et vous le savez comme moi, cher Thomas Mesnier.

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Il ne s'agit pas d'une appréciation subjective mais d'un patient atteint d'une maladie incurable diagnostiquée par des médecins – on part donc de faits, réels, dont on connaît l'issue. La procédure débute certes par l'expression d'un souhait : celui de la personne atteinte de bénéficier d'une aide active à mourir. Mais elle est ensuite extrêmement bien encadrée puisque ce sont trois médecins, incluant le médecin traitant, qui vont étudier le dossier. Madame de Vaucouleurs, il y a donc bien collégialité et le médecin n'est pas seul pour prendre sa décision. Le protocole est parfaitement structuré et encadré.

En outre, seules les personnes adultes sont concernées, je tiens à le préciser.

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Vous parlez de subjectivité, mais rappelez-vous la loi Kouchner de 2002, qui visait à remettre le patient au cœur du système de soins : avant, on cherchait d'abord ce qu'avait le patient, puis on le soignait ; désormais, la première chose qu'on lui demande, c'est d'évaluer sa douleur, sur une échelle de un à dix. Qu'y a-t-il de plus subjectif que la douleur, et cette échelle ? Pourtant, on fait confiance au patient – même lorsqu'il s'agit d'un enfant – pour soulager sa douleur et je n'entends personne s'en offusquer. C'est seulement ensuite qu'on recherche à déterminer ce qu'a le patient.

Nos débats sont particulièrement écoutés et l'euthanasie ne concerne pas que les personnes âgées. Pas d'âgisme, s'il vous plaît ! Certaines personnes âgées vivent parfois beaucoup mieux que des personnes plus jeunes qui ont subi un accident de la vie. On peut avoir 18 ou 21 ans et souhaiter bénéficier de ce dispositif...

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L'exercice est bien collégial – ce sont trois médecins qui évaluent. En outre, la collégialité est aussi présente par le biais de l'équipe soignante qui assiste le patient agonique – infirmière ou équipe des services de soins infirmiers à domicile. Ces malades ne sont pas seuls chez eux avec leur conjoint. Vous avez raison, les soins palliatifs ne sont pas des actes isolés ; c'est toujours un travail d'équipe et les décisions y sont collégiales, associant soignants, non soignants et entourage. Le dispositif ici proposé réunit ces conditions.

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Monsieur le rapporteur, on évoque beaucoup l'accompagnement médical, la collégialité médicale, la prise en charge médicale, etc. La profession médicale est donc visée de façon itérative dans la proposition de loi.

Comment les médecins ont-ils été associés et comment ont-ils réagi à ce nouveau dispositif ? Qu'en disent ces professionnels à qui on demande – ou on impose, je ne sais pas – d'effectuer ce geste ? Parmi nos collègues, certains sont médecins et défendent le dispositif. Mais qu'en pense l'Ordre des médecins ? Qu'en pensent les fédérations médicales hospitalières ? Comment appréhendent-ils cette façon de légiférer ? Il s'agit de sujets fondamentaux, en lien avec la vie et la mort, qui peuvent entrer en conflit avec les convictions médicales des professionnels de santé, et en particulier des médecins, mandatés pour donner cette mort anticipée.

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Je n'ai pas entendu d'explication très claire sur les personnes très vulnérables, au risque de dérives. Vous avez évoqué les personnes présentant des polypathologies. J'ai entendu le mot « mineur ».

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On a aussi parlé des personnes atteintes d'Alzheimer, des polyhandicapés et des personnes en exclusion sociale .

(Protestations)

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Vous indiquez qu'il s'agira de la décision collégiale d'une équipe soignante. C'est parfait ! C'est exactement ce qu'il faut, en coordination avec les directives anticipées contraignantes, la famille, les proches et avec la personne de confiance. Mais à partir du moment où vous instituez un droit à mourir par l'euthanasie, qui va pouvoir s'y opposer ? L'équipe soignante n'aura pas cette possibilité...

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Mes collègues ont répondu à certaines des questions. J'ajouterai qu'à entretenir le flou, on engendre la peur. Il suffit de lire la proposition de loi pour être rassuré : monsieur Mesnier, tout médecin sait ce qu'est une maladie incurable. On ne peut être plus précis, ni plus clair. Le voilà, le garde-fou.

Ensuite, les médecins doivent se prononcer de manière collégiale et ils ne sont évidemment pas tenus de répondre favorablement à la demande. Enfin, si elle est acceptée, sur le modèle belge, une commission de contrôle, composée de juristes et de médecins, contrôlera ces actes. N'entretenons donc pas le flou !

J'étais surpris – presque déçu – que vous ne parliez pas des mineurs. C'est chose faite mais, là encore, il faut savoir lire le texte : l'article 1er vise uniquement les personnes capables majeures.

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Vous le savez comme moi, la maladie et la santé sont des notions évolutives – ainsi l'OMS englobe-t-elle la santé mentale dans la notion de santé.

À partir du moment où vous légalisez l'aide active à mourir en cas de maladie incurable – vous faites bien de le préciser – et confiez cette mission aux médecins, en donnant la possibilité à un malade de choisir sa fin de vie, la façon dont la décision va être prise et les critères d'accès peuvent parfaitement évoluer ultérieurement.

Il s'agit d'un changement fondamental et les dispositions que vous nous proposez de voter ne sont donc pas anodines : elles portent en elles des possibilités d'évolution futures, même si elles sont aujourd'hui circonscrites.

La commission rejette les amendements.

Puis elle adopte l'amendement rédactionnel AS242 du rapporteur.

Elle en vient ensuite à l'amendement AS109 de Mme Bénédicte Pételle.

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Avis défavorable.

Je propose de rester sur la notion de médecin traitant car celle de médecin référent n'est pas définie par la loi. L'article L. 162-5-3 du code de la sécurité sociale dispose que le médecin traitant peut être un généraliste ou un spécialiste – par exemple, celui qui suit l'infection incurable de la personne faisant la demande – ou qu'il peut être un médecin hospitalier. Je vous invite donc à retirer votre amendement.

La commission rejette l'amendement.

Puis elle adopte l'amendement rédactionnel AS266 du rapporteur.

Elle en vient ensuite à l'amendement AS232 de Mme Annie Vidal.

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Suite à une demande d'assistance médicalisée, il s'agit d'instaurer un délai maximal de sept jours pour la saisine de deux autres praticiens par le médecin traitant. Cette disposition vise à s'assurer que les médecins chargés d'évaluer la situation du patient sont convoqués dans un délai précis. En effet, l'absence de précisions sur le délai risque d'aboutir à une évaluation tardive de la demande du patient, dont l'état de santé et la situation pourraient, entre-temps, avoir évolué.

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Avis défavorable.

En l'état, l'article 2 dispose que le médecin traitant saisit sans délai deux autres praticiens. Votre proposition me semble moins-disante et risque d'allonger singulièrement le traitement de la demande, ce qui pourrait être dommageable dans beaucoup de cas. Je vous propose de retirer l'amendement.

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Je vais le retirer puisque nous avons le même objectif et que votre rédaction me satisfait : la demande doit être examinée rapidement. Vous avez raison, « sans délai » peut s'interpréter de deux manières : immédiatement ou dans un délai qui n'est pas contraint.

L'amendement est retiré.

La commission est saisie des amendements identiques AS202 du rapporteur, AS20 de Mme Marine Brenier, AS37 de M. Jean-Louis Touraine, AS56 de M. Guillaume Chiche, AS78 de M. Philippe Vigier, AS130 de Mme Marie-Noëlle Battistel, AS155 de Mme Agnès Firmin Le Bodo et AS173 de Mme Caroline Fiat.

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Il s'agit de préciser qu'au moins un des membres du collège de médecins chargé d'examiner la situation médicale de la personne est spécialiste de l'affection dont souffre le malade demandeur de l'assistance médicalisée.

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La demande d'aide active à mourir émane du malade, mais la décision est prise de manière collégiale, avec l'équipe médicale qui la soutient. Nous souhaitons que le collège comprenne un spécialiste de la pathologie à l'origine de la demande. C'est un garde-fou supplémentaire, et une garantie pour éviter les abus.

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L'amendement vise à rassurer : certains ont émis des doutes et fait part de leurs craintes quant à de possibles dérives.

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Qui est mieux placé qu'un spécialiste de la pathologie pour dire que le mal est vraiment incurable ?

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L'amendement AS130 prévoit la présence d'un spécialiste de l'affection, qui permettra de disposer de l'éclairage le plus complet possible sur la pathologie et sur cette fin de vie.

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L'amendement, comme ceux qui vont suivre, vise à encadrer au maximum cette liberté que nous allons voter.

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Il s'agit d'une fausse sécurité. Les patients en fin de vie souffrent de multiples pathologies – cardiaque, hépatique, rénale, etc. L'affection dont souffre le patient, c'est qu'il ne veut plus vivre ! Il n'existe pas de spécialiste d'une telle maladie.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l'amendement AS116 de Mme Bénédicte Pételle tombe.

La commission adopte l'amendement rédactionnel AS243 du rapporteur.

Elle est ensuite saisie de l'amendement AS233 de Mme Annie Vidal.

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Il s'agit de préciser qu'un des médecins chargés d'évaluer la situation du patient doit être un psychiatre ou un psychologue.

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J'entends votre demande, mais elle me semble satisfaite par l'adoption de l'amendement que nous venons de voter. Je vous propose de le retirer.

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Effectivement. Un tel encadrement est important pour les douleurs psychiques.

L'amendement est retiré.

La commission est saisie des amendements identiques AS203 du rapporteur, AS21 de Mme Marine Brenier, AS38 de M. Jean-Louis Touraine, AS57 de M. Guillaume Chiche, AS79 de M. Philippe Vigier, AS131 de Mme Marie-Noëlle Battistel, AS156 de Mme Agnès Firmin Le Bodo et AS174 de Mme Caroline Fiat.

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Il s'agit de préciser que la demande doit avoir un caractère explicite.

La commission adopte les amendements.

Elle est ensuite saisie de l'amendement AS110 de Mme Bénédicte Pételle.

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Mon avis sera le même que pour le précédent amendement de la même auteure. Je vous propose de rester sur la notion de médecin traitant.

La commission rejette l'amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS244, AS245 et AS246 du rapporteur.

Elle est ensuite saisie des amendements identiques AS204 du rapporteur, AS22 de Mme Marine Brenier, AS39 de M. Jean-Louis Touraine, AS58 de M. Guillaume Chiche, AS80 de M. Philippe Vigier, AS132 de Mme Marie-Noëlle Battistel, AS157 de Mme Agnès Firmin Le Bodo et AS175 de Mme Caroline Fiat.

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Il s'agit de préciser que les médecins chargés d'évaluer la demande de la personne malade vérifient qu'elle se trouve bien dans une « impasse thérapeutique ». L'ajout de cette expression est important. Malheureusement, chaque médecin la connaît dans sa pratique quotidienne.

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L'impasse thérapeutique a été définie dans un avis rendu par le CCNE en 1996 sur les nouveaux traitements du sida. Il s'agit d'une situation qui survient chez un patient lorsque tous les traitements envisageables de sa maladie se sont révélés inefficaces ou présentent des effets secondaires intolérables.

Avec la présence du spécialiste, qui va pouvoir déterminer l'impasse thérapeutique, cet amendement apporte toutes les garanties souhaitables.

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Le collège de médecins devra attester que le patient souffre d'une maladie grave et incurable, lui infligeant une souffrance qui ne peut être apaisée. Monsieur Martin, il ne s'agit donc pas pour ces patients de ne plus vivre, mais de mettre fin à des souffrances qui n'ont aucune issue thérapeutique. La différence est absolument fondamentale ! Sans cette pathologie, sans ces souffrances, bien sûr qu'ils voudraient continuer de vivre. Mais ils sont engagés dans une voie sans issue. C'est pourquoi il faut leur donner la liberté de recourir à une aide médicale active à mourir.

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L'expression « impasse thérapeutique » est claire, elle signifie qu'on a tout essayé. Cette garantie complémentaire est une bonne chose.

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Cela fait écho à l'exemple que je citais dans une précédente intervention.

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Dans la lignée des modifications déjà adoptées, il s'agit d'améliorer l'encadrement du dispositif, afin d'empêcher toute dérive.

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La définition de l'impasse thérapeutique ne me convient pas : quand on ne peut plus guérir, il faut soulager. Mais les soins palliatifs, c'est encore de la thérapeutique ; l'hydratation et l'alimentation, c'est encore de la thérapeutique.

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Le polyhandicap est-il considéré comme une situation d'impasse thérapeutique ? Comment le traite-t-on ? J'ai bien compris que les mineurs n'ont pas accès à cette aide active à mourir. Mais doit-on signifier à un mineur en situation de polyhandicap devenu majeur qu'il peut demander à recourir à cette aide ?

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Je veux rassurer Mme de Vaucouleurs : l'aide active à mourir concerne non pas des patients handicapés, mais des patients atteints d'une maladie incurable, qui va donc les tuer. D'ailleurs, c'est la maladie qui tue, et non le médecin qui pratique le geste, contrairement à ce qui a été dit. Le médecin ne fait que répondre à leur demande en les soulageant : c'est un geste de compassion.

La commission adopte les amendements.

Puis elle adopte les amendements rédactionnels AS247 et AS248 du rapporteur.

Elle en vient ensuite à l'amendement AS113 de Mme Bénédicte Pételle

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Il vise à ménager un délai raisonnable entre l'entretien et la remise du rapport comportant les conclusions sur l'état de santé du malade.

D'après les équipes soignantes rencontrées en centre de soins palliatifs, le délai de quatre jours est trop court pour explorer toutes les pistes susceptibles d'alléger les souffrances de la personne en fin de vie.

Aucun délai ne semble idéal pour permettre de prendre en compte tous les éléments, d'analyser précisément la situation du patient et de rechercher les différentes options qui peuvent lui être proposées pour mettre fin à sa douleur, dont des soins palliatifs à domicile. Cependant, un délai raisonnable est demandé par de nombreux soignants.

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Le texte prévoit un délai de quatre jours pour les patients conscients et de huit jours pour les patients inconscients, dont le cas impose aux médecins de consulter l'équipe médicale et l'entourage du patient, notamment sa personne de confiance.

J'estime – et je ne suis pas le seul – que le délai de quatre jours prévu dans le premier cas est amplement suffisant pour statuer sur la recevabilité de la demande eu égard aux critères très précis définis dans la proposition de loi.

Pour ces raisons, avis défavorable à cet amendement comme aux deux suivants.

La commission rejette l'amendement.

Puis elle est saisie, en discussion commune, des amendements AS114 de Mme Bénédicte Pételle et AS234 de Mme Annie Vidal.

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Mon amendement de repli propose un délai de huit jours, par souci de cohérence avec le délai prévu pour les personnes incapables d'exprimer une demande libre et éclairée.

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Je propose pour ma part sept jours, notamment pour tenir compte du cas des patients soignés à domicile.

La commission rejette successivement les amendements.

Puis elle adopte l'amendement rédactionnel AS249 du rapporteur.

Elle en vient ensuite à l'amendement AS235 de Mme Annie Vidal

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Il vise à ce que le rapport inclue des propositions d'autres solutions destinées à soulager, dans la mesure du possible, les douleurs du patient, et dont celui-ci puisse prendre connaissance avant de réitérer sa demande d'aide médicalisée à mourir.

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Cette demande légitime est satisfaite : l'alinéa 3 de l'article prévoit que, lors de l'entretien, les médecins informent le patient des possibilités de soins palliatifs. Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Puis elle adopte l'amendement rédactionnel AS250 du rapporteur.

Elle est ensuite saisie de l'amendement AS190 de Mme Annie Chapelier.

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Il reprend mon amendement à l'article 1er sur la notion de souffrance psychique, car je continue d'avoir un doute à ce sujet après mes échanges avec le rapporteur. Avec son accord, je me permettrai de revenir vers lui munie de nouveaux arguments afin d'écarter l'éventualité, si faible soit-elle, d'une dérive due à la mention du mot « psychique ».

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Je suis à votre disposition pour en parler d'ici à la séance et vous rassurer si besoin. Mais je maintiens, et je le dis solennellement, qu'il ne s'agit pas de traiter de cas de dépression. Je le répète, si la loi belge nous a inspirés, nous n'en avons pas repris cet aspect. Je ne défendrai jamais une telle démarche.

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Dans ce cas, pourquoi ne pas être favorable à l'amendement, qui rassurerait beaucoup d'opposants à la proposition de loi ? J'insiste sur la question de la santé mentale et sur les risques que le texte pourrait entraîner à l'avenir.

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Qu'est-ce que la définition de la dépression ? Une « douleur morale profonde ». Si vous écrivez qu'il s'agit de soulager une profonde douleur morale, ou psychique, vous incluez les dépressifs dans le champ de votre proposition de loi. Ce n'est pas ce que vous venez de dire, mais c'est ce que vous écrivez. La contradiction est totale.

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On entretient le flou, on agite les peurs. Je répète ce que dit le texte, et je ne me lasserai jamais, dans un combat comme celui-là, de le répéter : il parle d'une affection grave, incurable, en phase avancée ou terminale. Je ne sais pas comment le dire autrement, je manque de synonymes, je suis à court d'arguments. Mon argumentation s'appuie simplement sur une définition très précise, à laquelle nous avons ajouté la notion d'impasse thérapeutique, dont M. Touraine nous a rappelé la définition également très précise par les autorités médicales. Il n'y a aucun doute possible. Je le répète, n'entretenez pas le flou, car le texte est tout sauf flou : il encadre très rigoureusement la démarche – trop, estimeront peut-être même certains de nos concitoyens.

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Puisque vous en appelez aux autorités médicales, pourquoi ne pas respecter le code de déontologie médicale ? J'ai évidemment une confiance absolue dans les propos de notre collègue Touraine sur les notions d'impasse thérapeutique ou de maladie incurable ; mais pourquoi n'interrogez-vous pas les autorités médicales pour savoir si vous êtes dans le vrai ou non ?

Nous le disons depuis le début de la discussion, la proposition de loi n'est pas assortie de la démarche normale en matière de loi de bioéthique ; or il s'agit d'une loi sociétale, mais aussi, fondamentalement, d'une loi éthique, puisqu'elle parle de la vie et de la mort. Vous n'avez pas choisi cette voie ; je le regrette. En refusant votre proposition de loi, je demande que l'on ouvre la voie de la loi de bioéthique, car c'est la bonne, celle que la France a choisie pour réglementer les questions de vie et de mort.

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Je peux entendre que vous ne compreniez pas nos doutes et que vous ayez le sentiment qu'en en faisant part, nous cherchons à agiter des peurs. Constatez cependant avec moi que les conditions d'examen du texte ne sont pas idéales : pas d'étude d'impact, pas assez d'auditions. Dans ce contexte, nos questions sont tout à fait légitimes. Par exemple, Thomas Mesnier a demandé si un patient qui refuserait un traitement auquel il est éligible aurait accès à l'aide médicale à mourir. Pour répondre à des questions aussi fondamentales, nous ne pouvons nous fonder que sur la confiance que nous plaçons en vous ; avec tout le respect dû à votre travail et à votre engagement à ce sujet, cela ne me semble pas suffisant s'agissant d'une matière aussi essentielle.

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En ce qui concerne la loi de bioéthique, je laisserai répondre Mme Firmin Le Bodo, qui préside la commission spéciale chargée de son examen.

Pour répondre à Caroline Janvier, d'abord, c'est aussi une proposition de loi qui a débouché sur la loi Claeys-Leonetti. Ensuite, vous qui êtes une jeune parlementaire, chère collègue – je le dis avec affection –, sachez que la part d'intervention laissée aux parlementaires n'a justement cessé de se réduire au fil des ans. Nous envions tous le fonctionnement du Parlement allemand, la capacité d'initiative de ses membres, les moyens dont ils disposent. Enfin, n'allez pas imaginer que les textes gouvernementaux sont toujours assortis d'études d'impact formidables – je vous renvoie aux derniers textes que nous avons votés, mais le problème se pose depuis au moins trois quinquennats.

En outre, le texte ne vient pas de nulle part : un travail considérable a été accompli en la matière depuis vingt ans. Jean-Louis Touraine a rappelé fort justement qu'en dehors du Parlement, beaucoup d'instances y ont œuvré très sérieusement.

La voie choisie est la bonne, d'autant qu'elle est de nature à transcender les clivages politiques, sur un sujet qui en appelle précisément à la conscience de chacun.

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Monsieur Martin, le Gouvernement a justement choisi de ne pas inclure la question qui nous occupe dans le projet de loi relatif à la bioéthique ; Mme Fiat, qui avait déposé nombre d'amendements en sens contraire, peut en témoigner. Nous pouvons tous, quelle que soit notre position, être fiers de la possibilité que nous avons aujourd'hui de débattre et de légiférer sur un tel sujet ; c'est notre rôle de parlementaires et de législateur.

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Je soutiens entièrement la proposition de loi, dont le contenu est essentiel et qui permet de franchir une étape majeure en matière d'éthique.

J'entends en permanence comparer soins palliatifs et aide médicalisée, et non pas médicale, à mourir – il ne s'agit pas d'euthanasie, car celle-ci peut être pratiquée par n'importe qui et non par les seuls membres du corps médical. Mais l'aide médicalisée à mourir sera demandée par une personne atteinte de sclérose en plaques ou de la maladie de Charcot, qui se voit jour après jour diminuer, devenir totalement dépendante, et ne veut pas être une charge pour sa famille ni subir des souffrances qu'elle sait inéluctables ; alors que les soins palliatifs seront demandés et accordés à une personne à qui on vient de diagnostiquer un cancer évoluant très vite, ayant déjà créé des métastases, et qui souffre beaucoup mais n'a pas été préparée à la situation par une longue maladie – elle pourra ainsi vivre ses derniers moments, très courts, avec sa famille. Ce sont deux situations tout à fait différentes.

Malgré mon soutien au texte, je persiste à penser que le fait d'avoir repris presque mot pour mot la loi belge de 2002 risque de créer une difficulté. J'espère que nous en reparlerons, pour éviter le débordement que l'on peut observer en Belgique.

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Il n'est pas exact de dire que nous n'avons pas pris le temps nécessaire. Une proposition de loi similaire a été déposée il y a quarante-trois ans par le sénateur Caillavet et la question a été débattue à chaque mandat depuis. Les états généraux de la bioéthique se sont saisis du sujet, auquel énormément de réunions ont été consacrées, ce qui a abouti à la proposition de compléter la loi. Une conférence de citoyens tirés au sort avait auparavant plaidé pour la légalisation du suicide médicalement assisté et la création de l'exception d'euthanasie, comme l'a fait plus récemment un autre comité citoyen, également réuni à la demande du CCNE. En la matière, l'éthique a donc été évaluée à de nombreuses reprises par les différentes instances compétentes.

Pourquoi utiliser le terme non d'euthanasie, mais d'assistance médicalisée ? Parce que l'euthanasie est administrée indépendamment du consentement : on peut euthanasier un animal domestique ou, comme on le fait malheureusement 2 000 à 4 000 fois par an, par l'administration de produits à effet létal à une personne qui n'a pas toujours été consultée. Une assistance est une réponse à une demande du malade : l'équipe médicale l'assiste afin d'humaniser son agonie et de la rendre moins pénible.

Chaque mot, ici, a été choisi à bon escient. Il faut admettre qu'une personne qui va entrer en phase agonique éprouve toujours une souffrance psychique. Cela ne veut pas dire qu'elle présente une maladie psychiatrique. Il est naturel, et ce sera le cas pour chacun d'entre nous, que l'approche de l'échéance terminale suscite cette réaction à laquelle on n'a pour l'instant trouvé de solution par aucun moyen thérapeutique. Nous voulons entendre cette souffrance, qui s'ajoute éventuellement à des douleurs physiques calmées ou non par les traitements.

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Je suis d'accord avec mon collègue Vigier pour considérer que le Parlement doit retrouver davantage de capacité d'initiative et que les propositions de loi doivent occuper une plus grande place dans son ordre du jour. Toutefois, s'agissant d'un sujet aussi grave que la fin de vie, je regrette tout de même que nous légiférions de façon quasi subreptice et que les Français doivent découvrir, au lendemain des annonces à venir ce soir, que nous avons voté sans leur avoir permis de participer. Que nous soyons une minorité à défendre cette position ne doit pas nous empêcher de nous faire entendre. Je regrette l'absence de débat public et médiatique sur la proposition de loi, peu connue et peu anticipée dans l'opinion publique. En outre, le contexte sanitaire ne nous autorise pas à siéger tous, de sorte que la discussion n'aura pu être approfondie et que le vote de la commission ne reflétera pas le point de vue de chacun.

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C'est pour faire de telles lois que j'ai quitté la société civile pour devenir parlementaire, pour libérer et protéger – c'est bien de cela qu'il s'agit ici : on libère, mais on protège en encadrant. Si la loi Claeys‑Leonetti n'est pas totalement appliquée, c'est peut-être parce qu'elle n'est pas totalement applicable. Il n'y aurait pas eu de débat, dit-on ? Mais 97 % des Français veulent que nous ayons cette discussion. À ceux qui nous regardent, nous devons redire pourquoi nous sommes là : beaucoup de députés de la majorité ont quitté la société civile pour s'occuper des citoyens, y compris dans un tel domaine, en défendant un projet présidentiel mais aussi des lois, quelle qu'en soit l'origine et les initiateurs, du moment qu'elles ont du sens pour les Français.

La commission rejette l'amendement AS190.

Puis, suivant l'avis défavorable du rapporteur, elle rejette l'amendement AS192.

Elle adopte ensuite l'amendement rédactionnel AS251 du rapporteur.

Elle en vient alors à l'amendement AS236 de Mme Annie Vidal

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L'amendement vise à préciser l'alinéa 5 afin que la personne malade ayant demandé une assistance médicalisée à mourir puisse à tout moment révoquer sa demande auprès de l'équipe médicale, de la manière dont elle le souhaite, écrite ou orale. Il s'agit de garantir jusqu'au dernier moment la possibilité de revenir sur son choix.

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Je suis favorable à votre idée. Je vous propose que nous retravaillions ensemble à la formulation de l'amendement pour le simplifier, puis de le redéposer en séance ; je pourrai alors émettre un avis favorable. En attendant, je vous demande de le retirer.

L'amendement est retiré.

La commission est saisie des amendements identiques AS205 du rapporteur, AS23 de Mme Marine Brenier, AS40 de M. Jean-Louis Touraine, AS75 de M. Guillaume Chiche, AS81 de M. Philippe Vigier, AS133 de Mme Marie-Noëlle Battistel, AS158 de Mme Agnès Firmin Le Bodo et AS176 de Mme Caroline Fiat

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Il s'agit de simplifier les alinéas 6 et 7. Je laisse les auteurs d'amendements identiques préciser en quel sens.

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Visant un équilibre adapté aux situations de fin de vie en matière d'assistance médicalisée active à mourir, l'amendement AS23 tend à réécrire les alinéas 6 et 7 pour en simplifier la rédaction, notamment en ramenant le délai minimal précédant la réalisation de l'acte à vingt-quatre heures après la confirmation de la demande, et en supprimant en conséquence la possibilité de l'abréger.

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Mon amendement vise pareillement à simplifier le dispositif tout en conservant des garanties suffisantes.

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Je profite de l'occasion pour répondre aux personnes qui m'envoient des demandes d'explication à propos des directives anticipées : il s'agit d'un document officiel où l'on dit ce qu'on souhaite pour la fin de vie, et elles trouveront une page très bien faite et un modèle sur le site internet du ministère des solidarités et de la santé.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, les amendements AS111 de Mme Bénédicte Pételle, AS222 de Mme Véronique Hammerer, AS237 de Mme Annie Vidal, AS220 de M. Philippe Chalumeau et AS223 de Mme Véronique Hammerer ainsi que les amendements identiques AS112 de Mme Bénédicte Pételle et AS238 de Mme Annie Vidal et l'amendement AS149 de M. Thibault Bazin tombent.

La commission en vient aux amendements identiques AS206 du rapporteur, AS24 de Mme Marine Brenier, AS41 de M. Jean-Louis Touraine, AS60 de M. Guillaume Chiche, AS82 de M. Philippe Vigier, AS134 de Mme Marie-Noëlle Battistel, AS159 de Mme Agnès Firmin Le Bodo et AS177 de Mme Caroline Fiat

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Il s'agit d'apporter une précision importante : l'acte d'assistance médicalisée active à mourir peut être réalisé au domicile de la personne, dans un établissement de santé ou dans un établissement ou service accueillant des personnes âgées.

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En effet, la précision est très importante. Il existe des équipes de soins palliatifs mobiles qui peuvent prendre en charge la sédation profonde et continue. Lors de notre voyage en Belgique, nous nous sommes rendu compte que des personnes ayant reçu une aide médicalisée active à mourir décédaient chez elles, entourées de leurs proches. Or on souhaite être accompagné par ses proches dans ses derniers moments. Voilà pourquoi nous proposons d'ajouter la mention du domicile et de la faire figurer avant les autres.

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C'est tout aussi délibérément que la mention du domicile figure en premier dans notre amendement. Beaucoup de patients voudraient décéder chez eux, mais très peu le peuvent en France, contrairement à ce qui se passe dans beaucoup d'autres pays. Pourtant, c'est possible ; il faut simplement l'organiser, pour satisfaire la demande des personnes en fin de vie.

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De plus en plus de personnes, lorsqu'elles vieillissent, disent déjà vouloir mourir chez elles. On peut imaginer que la souffrance de la maladie et de la fin de vie, y compris psychique, ne fait que rendre plus nécessaire la satisfaction de cette demande.

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Tous les amendements permettant d'expliciter le texte sont importants. On sait que 85 % de nos concitoyens souhaitent que leur fin de vie puisse se passer à domicile. Il est essentiel de leur donner le choix.

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J'ai compris pourquoi mon amendement AS223 est tombé mais je trouve que c'est dommage : je souhaitais aborder la question de l'intervention des infirmiers en pratique avancée (IPA) – je le ferai en séance. Il aurait été intéressant de pouvoir échanger sur la possibilité, pour les IPA, de participer à l'aide active à mourir. À domicile, ce sont souvent les infirmiers qui se trouvent en première ligne.

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Il est question de se rendre au domicile d'une personne qui a émis le souhait qu'on l'assiste médicalement à mourir : une autre personne viendra gentiment lui administrer la potion magique...

Cela ne réglera pas le cas des 300 000 personnes qui vivent, en France, dans la plus grande solitude. Si elles sont confrontées, en fin de vie, à une souffrance, elles seront bien mieux accompagnées dans un service de soins palliatifs, où elles pourront prendre le temps de réactiver un peu une vie sociale.

C'est là qu'on est dans une forme d'humanité, et non lorsque quelqu'un vient cinq minutes en disant : « coucou, c'est moi, vous avez de la chance, vous n'allez pas mourir toute seule ». C'est bien, si jamais on adopte ce texte, que cela puisse aussi avoir lieu au domicile, mais cela ne remplacera jamais les journées ou les semaines passées aux côtés de la personne.

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Par mon amendement AS220, je voulais proposer une procédure d'agrément. On pourrait identifier, grâce à l'élaboration d'une liste, les médecins volontaires et disponibles dans les territoires pour appliquer la loi. Cela permettrait d'améliorer le maillage territorial et de développer la culture palliative, et cela présenterait aussi un intérêt pour la formation, la collégialité, la constitution d'associations et les échanges de pratiques. L'agrément serait délivré par l'agence régionale de santé sur simple demande. On obtiendrait automatiquement l'agrément, comme dans d'autres cas.

Par ailleurs, cela apporterait une réponse à la question de Didier Martin sur la clause de conscience. J'espère donc que nous pourrons en discuter par la suite.

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Les explications de mon confrère Chalumeau ne me rassurent pas du tout : elles m'effraient. Avec un tel agrément, on serait au bord du permis d'euthanasier médicalement à domicile. Je répète qu'il existe des équipes mobiles de soins palliatifs qui se rendent au domicile des personnes pour les accompagner et les soulager jusqu'au bout. Il me semble qu'il y a une antinomie entre l'agrément que vous proposez d'instaurer et un accompagnement humain à domicile, même dans les conditions les plus difficiles.

Quant à l'idée que des infirmiers pourraient délivrer le poison (Protestations), je pense que ce serait franchir encore un autre palier. La prescription et la délivrance sont des actes médicaux : seule une profession médicale pourrait être en charge de l'euthanasie médicale – c'est cette expression qui doit figurer dans le texte et non un euphémisme.

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Je rappelle, chers collègues, que ces amendements sont tombés.

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On ne sait pas, dans la rédaction qui nous est proposée, qui pourra choisir le lieu. Ne serait-il pas pertinent de préciser que ce sera en fonction de la demande de la personne concernée ?

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Des équipes mobiles de soins palliatifs vont déjà au domicile des gens. Que notre collègue soit rassurée : elles ne passent pas cinq minutes auprès des patients, même si on n'a pas beaucoup de temps pour s'occuper d'eux – je vous suggère de relire le très bon rapport Iborra-Fiat, qui devrait être appliqué très rapidement... Il faut raison garder et peser ses mots.

Ce sont des personnes en fin de vie et en souffrance qui recevront l'aide médicalisée à mourir. Elles ne sont pas toutes seules : elles ont au minimum une aide à domicile, elles sont accompagnées et entourées. Il y a au moins un médecin, une infirmière et des aides-soignantes qui vont les voir. Ne vous mettez pas en colère : tout va bien se passer.

La commission adopte les amendements.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS262 et AS252 du rapporteur.

Enfin, elle adopte l'article 2, modifié.

Article 3 : Accès à l'assistance médicalisée active à mourir pour les personnes devenues incapables d'exprimer leur demande

La commission est saisie des amendements de suppression AS3 de M. Marc Delatte, AS11 de Mme Caroline Janvier, AS15 de M. Thomas Mesnier, AS115 de Mme Bénédicte Pételle, AS125 de Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe, AS150 de M. Thibault Bazin et AS196 de M. Didier Martin.

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Si l'on demandait à nos concitoyens, dans le cadre d'un sondage, s'ils désirent une fin de vie décente, je crois qu'on aurait 100 % de réponses positives, mais il ne faut pas biaiser les questions.

Vous dites que cette proposition de loi instaurant un droit à l'euthanasie est un progrès et vous faites une comparaison avec la Belgique et le Canada, alors qu'on connaît les dérives éthiques possibles. Il y a loin de la coupe aux lèvres. La France, quant à elle, a choisi la voie de la solidarité...

Ce texte prive nos concitoyens d'un débat sur un sujet profondément sociétal et éthique, alors que nous sommes en train d'examiner, à la suite des travaux de la Convention citoyenne, le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets. Je rappelle aussi que des concertations dans les régions, les villages et les villes ont eu lieu pendant deux ans à propos de la révision de la loi de bioéthique. S'agissant d'un sujet aussi important que l'aide active à mourir, l'euthanasie, il ne faut pas priver nos concitoyens d'un débat. C'est une question de démocratie.

Je reviens également sur ce que le CCNE a dit : la responsabilité de la décision est clairement imputable aux acteurs – les acteurs de santé et les patients. Or les soignants ont prêté le serment d'Hippocrate. Faut-il aussi légiférer sur ce point ?

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Je trouve que les conditions dans lesquelles nous travaillons sur ce sujet sont très inadaptées et, sur le fond, je n'ai pas le sentiment que le rapporteur ou nos collègues qui ont déposé des amendements apportent les réponses nécessaires à certaines craintes. Je regrette qu'il n'y ait pas eu suffisamment de débat public sur cette question, même si j'entends ce qui a été dit à propos des sondages et sur le fait que ce sujet s'est invité lors des états généraux – il aurait fallu s'organiser d'une façon plus sereine et mieux anticiper.

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Nous demandons la suppression de cet article qui établit une procédure pour les personnes dans l'incapacité d'exprimer une demande d'une manière libre et éclairée, car il n'offre pas une sécurité suffisante – des erreurs sont possibles.

L'article 3 ne précise pas la procédure pour les personnes seules – dont le nombre est en augmentation – qui n'ont pas désigné des personnes de confiance. Par ailleurs, il faudra recourir à deux témoins n'ayant pas d'intérêt matériel et moral au décès, mais le présent article n'indique pas par qui ces témoins doivent être sélectionnés, et il sera difficile de prouver l'absence d'intérêt matériel avant l'ouverture du testament.

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Je voudrais insister sur la position des professionnels des soins palliatifs, qui sont confrontés au quotidien à des personnes en fin de vie dont ils doivent prendre en charge les difficultés et les souffrances. Ils disent explicitement qu'il est hors de question que des décisions de ce type leur reviennent.

S'agissant des sondages, la part des Français se disant pour l'euthanasie passe de 97 % à 24 % selon la forme que prend la question posée. Au fond, les attentes sont liées à la souffrance en fin de vie. La question est-elle veut-on mourir ou simplement ne plus vivre l'extrême souffrance dans laquelle on peut être ?

C'est, me semble-t-il, à cette dernière question que nous devons répondre, d'une manière plus pertinente. L'absence d'accès à des soins palliatifs qui prennent bien en charge les souffrances n'a-t-elle pas un rôle déterminant dans le souhait d'une euthanasie ? On ne peut pas ne pas se poser cette question. L'accompagnement est-il suffisant, permet-il de bien prendre en compte la souffrance, pour que cela ne conditionne pas la demande d'une mort prématurée ?

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Nous sommes évidemment opposés à un protocole d'euthanasie médicale pour les malades inconscients. Le CCNE, qui a fait part de réserves majeures à cet égard, a recommandé de ne pas modifier la loi Leonetti-Claeys parce qu'elle « opère une distinction essentielle et utile entre “laisser mourir” et “faire mourir”, même si cette distinction peut, dans certaines circonstances, apparaître floue ». Le CCNE a considéré que « le maintien de l'interdiction faite aux médecins de “provoquer délibérément la mort” protège les personnes en fin de vie, et qu'il serait dangereux pour la société que des médecins puissent participer à “donner la mort” ».

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J'émets un avis défavorable à ces amendements.

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J'ai l'impression que certains font semblant de découvrir ce sujet alors qu'il fait l'objet de travaux depuis des années et des années au sein de la communauté médicale mais aussi du côté des usagers, des associations de patients, de la société civile et de nos institutions. Des rapports ont été remis, des préconisations ont été faites, des témoignages ont été fournis, et beaucoup ont une expérience en la matière. Nos échanges ont lieu après des années de débat. Le législateur est en retard par rapport à ce qui se passe dans la société.

Je ne me résous pas à accepter l'argument selon lequel le serment d'Hippocrate serait transgressé. Chaque année, des professionnels de santé sont amenés à apporter une assistance médicale à mourir en dehors du champ légal. Allez donc leur dire qu'ils sont des clandestins qui trahissent leur engagement moral ! Pour ma part, je ne crois pas que ce soit le cas. Je trouve, en revanche, qu'il est insupportable de les abandonner et de fermer les yeux sur ce qui se passe. On doit offrir un cadre légal.

Le CESE, qui a été cité par M. Martin, relate des études d'opinion. Le CCNE le fait aussi depuis plus de quinze ans.

Enfin, on peut organiser des évaluations et renforcer les moyens mais cela n'enlève rien à la nécessité de traiter des situations qui durent depuis bien longtemps.

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Si des députés n'ont pas entendu parler de cette question, c'est peut-être parce qu'ils n'étaient pas députés... Dire qu'il n'y a pas eu de débat dans notre pays – et dans d'autres pays européens, qui viennent de se prononcer –, ce n'est pas sérieux, c'est même honteux. Je trouve également qu'il est scandaleux de dire que les conditions nécessaires pour avoir un débat dans cette commission ne sont pas réunies. Il y a une majorité et une minorité, c'est la démocratie.

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Je voudrais rassurer Mme Janvier et M. Delatte sur l'existence d'un débat public – abondant – sur ce thème.

J'ai assisté à quelques centaines de débats rien qu'au cours des cinq dernières années. Il y en a eu notamment, avec beaucoup de participants et d'une manière très apaisée, dans le cadre des états généraux de la bioéthique. La majorité a toujours été favorable au droit de choisir sa fin de vie, mais des points de vue contraires ont pu s'exprimer. Ce sujet s'est également imposé dans le cadre du Grand débat : c'est une préoccupation prioritaire pour nos concitoyens, qui exigent que l'on n'attende pas davantage pour répondre à leur demande.

Oui, les débats ont eu lieu et chacun a pu s'exprimer. Il est temps, maintenant, d'en tirer les conclusions.

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Ce sujet n'était pas inscrit à l'ordre du jour du Grand débat mais il a été abordé par 8 % des contributions. Cela veut bien dire que c'est une préoccupation pour nos concitoyens. Nous allons apporter une réponse. J'ajoute que 350 000 personnes ont contribué au rapport du CESE. Des travaux, bien réels, existent.

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Selon l'alinéa 4 du présent article, « la ou les personnes de confiance doivent confirmer le caractère libre, éclairé et réfléchi de la demande anticipée de la personne malade ». J'ai vraiment besoin de précisions sur ce point.

Il est évident, pour moi, que la demande doit avoir été formulée clairement dans le cadre d'une directive anticipée lorsque la personne était vraiment en état de le faire : il ne doit pas s'agir d'une simple demande. Ce n'est pas du recours à une personne de confiance pour une sédation profonde et continue qu'il est question : il s'agit d'une décision de mettre fin à une vie. La demande doit, au moins, émaner d'une personne capable de dire ce qu'elle veut ou qui l'a écrit très clairement.

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Le Pr Delfraissy a fait référence, lorsque nous l'avons auditionné la semaine dernière, à tous les débats qui ont eu lieu sur cette question. Je vous renvoie au compte rendu de la réunion.

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Je vais continuer mes explications sur les directives anticipées – j'ai déjà parlé du site internet. Il ne faut pas attendre d'être malade. J'invite tous les députés à donner l'exemple en rédigeant des directives anticipées. Il ne faudrait pas que nos débats induisent nos concitoyens en erreur.

Ce n'est pas un sujet tabou. On peut en parler avec sa personne de confiance ou avec ses enfants, on peut dire ce qu'on souhaite si quoi que ce soit arrive. Les accidents de la vie ne concernent pas que les personnes âgées : ils peuvent se produire n'importe quand.

Remplissez, s'il vous plaît, vos directives anticipées et choisissez une personne de confiance. Il n'y a pas assez de personnes qui le font. Cela ne porte pas la poisse... Allez sur le site internet du ministère des solidarités et de la santé. Le document proposé est très bien fait.

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Je remercie Caroline Fiat. Ce qu'elle a dit est évidemment ce qu'il y a de mieux à faire.

J'ai été assez convaincu, jusqu'à présent, par les explications qui nous ont été données. S'agissant de l'article 3, en revanche, j'ai des doutes.

Si on s'y prend bien à l'avance, en conscience, il n'y a pas de problème mais certaines situations seront dans une zone grise. Des personnes qui ont des maladies dégénératives peuvent commencer à se poser des questions. Néanmoins, je ne suis pas totalement sûr que la décision soit absolument libre, éclairée et indépendante dans certains contextes familiaux ou de proximité.

Je crois que je m'abstiendrai sur cet article.

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Après cette discussion et ces interrogations – je comprends qu'il y a notamment des doutes et c'est la raison pour laquelle le Pr Delfraissy, auquel M. Vigier a fait référence, a conseillé de faire preuve d'humilité –, nous allons passer au vote.

La commission rejette les amendements.

Elle est ensuite saisie des amendements identiques AS208 du rapporteur, AS26 de Mme Marine Brenier, AS43 de M. Jean-Louis Touraine, AS63 de M. Guillaume Chiche, AS84 de M. Philippe Vigier, AS136 de Mme Marie-Noëlle Battistel, AS161 de Mme Agnès Firmin Le Bodo et AS179 de Mme Caroline Fiat.

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Il s'agit de préciser que la volonté doit être exprimée d'une manière libre, éclairée et réfléchie mais aussi explicite : nous avons ajouté ce dernier terme à l'article 2 et il est normal de le faire aussi à l'article 3.

La commission adopte les amendements.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS253 et AS255 du rapporteur.

Elle en vient ensuite aux amendements identiques AS207 du rapporteur, AS25 de Mme Marine Brenier, AS42 de M. Jean-Louis Touraine, AS62 de M. Guillaume Chiche, AS83 de M. Philippe Vigier, AS135 de Mme Marie-Noëlle Battistel, AS160 de Mme Agnès Firmin Le Bodo et AS178 de Mme Caroline Fiat.

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Il est bien dommage que nous travaillions au galop en cette fin de séance. Nous avons fait fi de la question posée par le président Mignola : le droit d'obtenir la mort d'un proche ne vous inquiète-t-il pas ?

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Notre débat a été jusqu'ici digne et de qualité. Je ne peux pas laisser dire que nous travaillerions au galop : bien au contraire, la France est « au grand ralenti ». De grâce, défendez vos légitimes convictions mais ne nous accusez pas de tronquer un débat qui infuse dans la société depuis des années, comme l'a dit Mme Iborra ! Nous avons auditionné la semaine dernière un certain nombre d'acteurs, chez lesquels j'ai d'ailleurs perçu une certaine lassitude : en « off », ils m'ont confié qu'ils en ont un peu assez d'avoir à répéter la même chose et de tourner en rond. Les seuls à ne pas avoir délibéré à ce propos, nous confiaient-ils, ce sont les législateurs !

Tous les points de vue ont pu être exprimés, les positions des uns et des autres sont connues par cœur. Nous en venons à organiser des auditions dont tous les arguments ont d'ores et déjà été entendus... Dire que ce débat est mené au galop, ce n'est pas très respectueux pour le travail que nous menons.

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En tant que présidente, je considère que le débat a bien lieu et que nous pouvons être fiers de la qualité et de la sérénité de nos échanges. Les Français nous regardent : poursuivons dans ce sens !

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Comme nous le rappelons dans ces amendements, la personne de confiance ne donne pas son avis mais fait part de la volonté du malade. Elle est son porte-parole mais elle ne décide rien.

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Je rappelle tout de même que nous avons discuté le 1er février 2018 dans l'hémicycle d'une proposition de loi relative à l'euthanasie et au suicide assisté, pour une fin de vie digne, dont j'étais la rapporteure. Cette discussion est un peu vexante ! C'était une intervention « Calimero ».

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Mais non, ne le prenez pas ainsi ! Cela montre surtout combien il est nécessaire de prendre le temps de la réflexion et de la maturation.

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Monsieur Martin, accepter la décision d'un proche de partir, c'est aussi l'aimer.

La commission adopte les amendements.

La séance s'achève à dix-neuf heures quarante-cinq.