Commission d'enquête pour mesurer et prévenir les effets de la crise du covid-19 sur les enfants et la jeunesse

Réunion du mercredi 16 décembre 2020 à 15h00

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • enfance
  • jeunesse

La réunion

Source

Commission d'enquête pour mesurer et prévenir les effets de la crise du Covid-19 sur les enfants et la jeunesse

Mercredi 16 décembre 2020

La séance est ouverte à quinze heures.

Présidence de Mme Sandrine Mörch, présidente

La Commission d'enquête pour mesurer et prévenir les effets de la crise du Covid-19 sur les enfants et la jeunesse examine le rapport de Mme Marie-George Buffet.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Mes chers collègues, nous achevons ensemble les travaux de la commission d'enquête avec l'examen du projet de rapport de notre rapporteure Marie-George Buffet.

Le texte de ce projet a été mis en consultation au secrétariat de la commission en début de semaine : il vous a donc été loisible d'en prendre connaissance.

Nos travaux ont débuté formellement avant l'été mais n'ont pu effectivement démarrer qu'à la rentrée de septembre. Leur déroulement a été perturbé, puisque nous avons été contraints par les nouveaux protocoles sanitaires à tenir de nombreuses réunions à distance : si c'est nettement mieux qu'une suspension, ce n'est pas l'idéal pour des échanges dynamiques.

Nous avons tout de même pu procéder dans ce laps de temps raccourci à l'ensemble des auditions que nous estimions nécessaires, soit quarante-sept au total. Nous avons également effectué deux déplacements.

Le premier, à Toulouse, juste avant le reconfinement, nous a permis de constater l'engagement de tous : celui des personnels de l'éducation nationale rencontrés lors d'une table ronde avec des élèves d'un collège dans un quartier difficile comme celui des associations œuvrant au cœur des populations les plus fragiles, notamment dans les bidonvilles et les hôtels dits sociaux.

Nous avons surtout été témoins de la grande résilience et de la formidable énergie que les jeunes déploient face aux difficultés inhérentes à la crise, qui les touchent eux plus que d'autres.

La pandémie aura au moins servi de révélateur de toutes ces énergies et de tous ces talents : ces jeunes sont désormais, comme les associations qui les soutiennent, visibles aux yeux des décideurs et des administrations. Nous ferons en sorte qu'ils le restent.

L'insertion professionnelle, sans laquelle il n'y a pas d'avenir autonome possible pour notre jeunesse, a également été au menu de notre déplacement toulousain.

La commission s'est également déplacée en Seine-Saint-Denis, où nous avons pu entendre de nombreux jeunes nous parler de leur vécu, qu'il s'agisse d'un jeune en situation de handicap, d'un élève de lycée professionnel, ou d'un sportif. La rapporteure et moi-même tenons particulièrement à la continuité de la pratique physique et sportive : il en va en effet autant du bien-être physique et psychique de nos jeunes que de la construction de leur être. Je regrette que nous ayons dû annuler, en raison de l'accélération des contaminations au mois d'octobre, la visite prévue auprès des Apprentis d'Auteuil dans le Val-d'Oise alors qu'il s'agit d'interlocuteurs quasi-permanents concernant la jeunesse.

Si ces travaux nous ont fait toucher du doigt de grandes difficultés révélées ou aggravées par la crise, et ce dans tous les domaines de la vie de nos jeunes, ils ont aussi mis en évidence certaines opportunités. Je retiendrai plutôt les secondes, pour des raisons qui tiennent peut-être à mon tempérament, mais également à ma conception de l'action politique.

Il est absolument nécessaire de généraliser les initiatives vertueuses et de soutenir ceux qui ont œuvré au bien-être des autres et ceux qui ont inventé mille procédés pour que la vie continue malgré tout : c'est là le rôle de la collectivité tel que je le conçois. De nombreux jeunes s'y sont investis, notamment ceux des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), tordant ainsi le cou à tous les préjugés ordinaires : j'y vois un effet positif et constructif de cette crise.

Quoi qu'il en soit, nous serons particulièrement attentifs aux suites politiques qui seront données aux propositions formulées dans le rapport, qui encouragent le Gouvernement à aller plus loin dans certains domaines. Elles mettent parfois en lumière des angles morts dans lesquels se retrouve toute une partie de notre jeunesse ; quelques-unes enfin soulèvent certaines questions à même de nourrir un dialogue fructueux entre pouvoirs législatif et exécutif, toujours dans l'intérêt supérieur de l'enfant.

Notre discussion de cet après-midi se conclura par un vote sur l'adoption du rapport par la commission d'enquête.

Si le rapport est adopté, je rappelle que sa publication ne pourra avoir lieu que passé un délai de cinq jours francs après notre réunion d'aujourd'hui, afin de se conformer au dispositif prévu à l'avant-dernier alinéa de l'article 6 de l'ordonnance de 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires et au 3 de l'article 144-2 du règlement de l'Assemblée nationale.

Les rapports sur table ne sont d'ailleurs consultables que dans cette salle et ne peuvent être emportés.

Avec Mme la rapporteure, nous avons su travailler en bonne intelligence sur un sujet par essence transpartisan ; et si nous ne partageons pas toutes ses préconisations – mais tout de même bon nombre d'entre elles –, nous nous rejoignons sur le fond. Nous pouvons être fiers d'avoir, au travers de cette commission d'enquête, donné la parole à tout un panel de jeunes extrêmement divers. Nous n'avons pas l'intention de laisser cette jeunesse se taire à nouveau.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

En juin dernier, lorsque j'ai proposé la création de cette commission d'enquête, ma principale volonté était de donner à voir les conséquences multiples de la crise sanitaire et économique et du confinement lui-même sur les enfants, les adolescents et les jeunes adultes : un tel travail spécifique et au long cours me semblait en effet indispensable pour faire émerger les problématiques propres à ces catégories.

L'ensemble des groupes a soutenu la démarche et le travail que nous avons mené en commun montre à quel point il était nécessaire de mesurer, et surtout de prévenir, les effets de cette crise sur notre jeunesse dans sa diversité.

Je me félicite de la qualité de nos travaux lors des auditions et vous remercie, Madame la présidente, pour avoir largement contribué à élargir le champ du rapport en lien avec vos engagements, comme je remercie l'ensemble des commissaires pour la pertinence de leurs interventions et leurs apports.

Ce rapport vous propose de retenir quatre-vingts propositions d'ampleur, de nature et de portée diverses, mais toutes issues, sans a priori, des analyses et des données recueillies au cours de nos auditions.

D'abord, un constat : la parole des jeunes n'est pas suffisamment écoutée ni leurs propositions entendues, alors que leurs inquiétudes, comme leurs exigences, sont importantes pour le devenir de notre société. Nous avons été alertés tout au long de nos auditions, tant par les mouvements de jeunesse, par les syndicats étudiants que par les professionnels de l'enfance, sur ce déficit de représentation de la jeunesse dans les débats comme dans les politiques publiques. Pour reprendre le terme d'un des auditionnés, nous devons mettre de l'enfance partout.

Plusieurs propositions du rapport vont dans ce sens : renforcement du collège des jeunes dans plusieurs instances comme le Haut Conseil à la vie associative (HCVA), création d'une délégation permanente à l'enfance au sein de l'Assemblée nationale, renforcement de la clause d'impact jeune et participation d'un ou une pédiatre et d'un ou une pédopsychiatre au Conseil scientifique.

Premier axe de nos travaux : la santé des jeunes. Bien que sensiblement préservés, par rapport aux autres catégories d'âge, des effets dramatiques de la Covid-19, ses conséquences sanitaires sont cependant réelles tant pour les enfants que pour les adolescents.

En effet, les témoignages recueillis ne permettent pas d'écarter la perspective d'une dégradation de l'état physique de la jeunesse, à raison de deux grands facteurs de risques : la sédentarité et les déséquilibres alimentaires d'une part, et les retards possibles dans la prévention et le suivi des traitements curatifs d'autre part.

L'arrêt des activités physiques et sportives a eu des conséquences sur les capacités physiques des enfants ainsi que sur la prise de masse graisseuse : des études complémentaires devront être menées. L'absence de cantine scolaire a également eu, au cours du premier confinement, des conséquences sociales pour les familles précaires, mais également sur la santé de certains enfants privés du seul repas équilibré et complet de leur journée.

En outre, le suivi des traitements a alors également été rendu plus compliqué, comme la prévention, la vaccination ayant notamment connu une chute sensible. Nous devrons être particulièrement vigilants quant au rattrapage des soins et des vaccinations : d'où, la proposition d'une aide exceptionnelle aux centres de Protection maternelle et infantile (PMI).

Notre vigilance s'est particulièrement exercée à l'égard de la continuité de l'accompagnement des enfants en situation de handicap, qui a pu s'avérer compliqué au cours de la même période.

Les conséquences sur la santé psychique à court et long termes ne sont pas négligeables. Si le confinement a pu apporter du bien-être en permettant aux familles de se retrouver, la cohabitation, les inquiétudes liées au contexte angoissant, la gestion du sommeil et des écrans sont autant d'éléments qui justifient un renforcement des moyens de suivi de la santé psychique des enfants et des jeunes, et un investissement substantiel dans le soutien à la parentalité.

Des initiatives locales de coopérations inédites entre soignants et enseignants et entre parents et enseignants ont vu le jour : je préconise donc que les services de l'État concernés les analysent pour étudier comment les utiliser tant en période de crise qu'en temps normal.

Nous avons également constaté l'inadéquation des messages diffusés concernant le coronavirus, notamment sur les chaînes de télévision : les spots diffusés se sont, en l'absence de messages spécifiques dédiés aux enfants, avérés très anxiogènes. Le rapport propose donc, en cas de crise, la diffusion de messages ciblés sur les plus jeunes.

Notre pays souffre en outre d'un déficit très important en pédopsychiatrie. Le nombre de pédopsychiatres a ainsi fortement diminué au cours des dernières années : M. Michel Dugnat, pédopsychiatre, a indiqué à la commission qu'en 2006, près de 1 200 pédopsychiatres formés exerçaient leur activité en France, contre 600 actuellement, leur moyenne d'âge se situant entre 61 et 62 ans. Le rapport propose donc plusieurs pistes pour y remédier, notamment la revalorisation de cette spécialité.

Le soutien psychologique aux étudiants et à leur santé mentale est en outre extrêmement lacunaire, et notre pays très en retard dans ce domaine.

Le ratio du nombre d'étudiants par professionnel de santé apparaît particulièrement préoccupant : le nombre d'étudiants par équivalent temps plein (ETP) de médecin du service de santé universitaire atteint 15 813 ! Le même problème se pose pour les psychologues : on n'en compte qu'un pour près de 30 000 étudiants alors que les standards internationaux recommandent un ratio d'un pour 1 500. Ce rapport alerte donc une nouvelle fois sur le manque criant de médecins, d'infirmiers et de psychologues universitaires et scolaires : y remédier est donc une priorité absolue. Parfois, des postes ne sont pas pourvus, et beaucoup d'acteurs du secteur médico-social scolaire réclament une clarification de leurs missions ainsi qu'une reconnaissance à la hauteur de l'importance de leurs missions.

Le deuxième axe de nos travaux a été celui de la fermeture des établissements scolaires. À l'instar du Gouvernement, la commission d'enquête fait sien le principe selon lequel l'école doit, en temps de crise, rester a priori ouverte car les conséquences de sa fermeture sont lourdes pour de nombreux élèves et aboutissent, au final, à un creusement des inégalités.

Les disparités en termes de dotations matérielles, de connaissance du numérique et de conditions de vie ont eu un impact très significatif sur la possibilité ou non, pour les enfants, de continuer à avoir un lien régulier avec l'école et de connaître une véritable continuité pédagogique, bien que les équipes pédagogiques aient déployé l'ensemble des moyens mis à leur disposition pour le maintenir au travers d'outils qui se sont améliorés au fur et à mesure des semaines.

Les parents d'élèves se sont également mobilisés pour s'organiser : ce confinement a donc permis des progrès dans l'utilisation du numérique au sein des familles. Le rapport propose un renforcement des efforts dans l'identification des difficultés des élèves et des familles en termes de matériels, mais aussi d'illectronisme. Certaines familles hébergées dans des hôtels sociaux par le 115 et privées de connexion ont ainsi dû mener un combat quotidien pour que leurs enfants aient accès aux cours.

Enjeu majeur pour l'avenir, cette problématique de l'équipement doit également être résolue pour les personnels sociaux de l'éducation nationale ou de l'Aide sociale à l'enfance (ASE), qui doivent bénéficier de moyens suffisants pour assurer l'accompagnement des enfants et des familles, même à distance, leurs tâches étant primordiales.

Le retour à l'école sur la base du volontariat n'a pas été, avec le recul, une option évidente, car elle faisait peser sur de nombreux parents une trop lourde responsabilité. En outre, on a constaté d'importantes disparités entre établissements, révélatrices d'inégalités sociales et territoriales.

Notre vigilance, dans la période à venir, devra s'exercer particulièrement à l'égard des générations des classes charnières, c'est-à-dire le cours préparatoire (CP), la sixième, la seconde et la terminale.

Pour les élèves de terminale, les inquiétudes sont grandes, entre le baccalauréat qu'ils n'ont pu vivre comme un rite de passage et une entrée dans l'enseignement supérieur escamotée : de l'avis des spécialistes, cette génération doit faire l'objet d'un accompagnement renforcé.

Chers collègues, nous avons tenu collectivement à ce que nos travaux abordent en profondeur la situation des jeunes les plus vulnérables, avec leurs problématiques spécifiques, et notamment les questions relatives à la protection de l'enfance.

Les effets du confinement sur les jeunes relevant de l'ASE sont assez contrastés. Nous avons pu noter une polarisation entre les professionnels qui intervenaient au domicile et qui estimaient que les effets du confinement étaient majoritairement négatifs, et ceux qui accompagnaient des enfants vivant en établissement, ou chez des assistants familiaux, et qui faisaient plutôt état d'un apaisement.

La dégradation observée chez les enfants suivis par l'ASE à leur domicile semble résulter de plusieurs facteurs : les conditions de vie difficile des familles, et notamment l'exiguïté des logements et les problèmes financiers ; l'arrêt de la scolarisation et la diminution des accompagnements éducatifs et des visites et, enfin, l'arrêt ou la forte diminution de l'accueil dans les structures de soins ou spécialisées.

Nous avons été également alertés sur les conséquences parfois négatives de la suspension des droits de visite.

Les témoignages recueillis font d'état d'un fort engagement des personnes de l'ASE, notamment de la présence renforcée des éducateurs auprès des enfants pris en charge.

Pour les aider dans leurs missions, le rapport propose de renforcer le pilotage national et territorial de la politique de la protection de l'enfance en réaffirmant l'impératif d'une prise en charge équivalente des enfants sur l'ensemble des territoires.

Un tel objectif suppose de réaffirmer le rôle de l'État dans la définition des orientations de cette politique et dans le contrôle de leur mise en œuvre, comme nous l'a indiqué avec beaucoup de force le secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles.

Une attention particulière a été portée aux mineurs non accompagnés (MNA), dont la prise en charge pendant le confinement n'a pas toujours été assurée alors même que le principe d'une mise à l'abri inconditionnelle a bien été rappelé par l'État.

Cependant, les éléments recueillis par la commission d'enquête portent à conclure qu'un tel principe a pu demeurer inopérant ou être restreint du fait de difficultés d'application dans certains départements. De plus, beaucoup de jeunes mineurs accompagnés ont été logés dans des hôtels sociaux ou au sein de dispositifs dits de semi-autonomie. Or, dans ces lieux parfois insalubres, les conditions de vie sont très précaires et ne favorisent pas un accompagnement conforme aux exigences de la protection de l'enfance.

Le rapport propose donc une évolution des compétences entre l'État et les départements en matière de prise en charge des MNA afin de garantir un accueil identique sur l'ensemble du territoire ; et pour ce qui est de la répartition des financements, une révision profonde du protocole d'accord signé en 2018 s'impose.

Quelques mots enfin de la précarité chez les jeunes et des problématiques d'insertion dans l'emploi.

La pauvreté infantile atteint 21 % des enfants. La crise aggrave les inégalités mais surtout la pauvreté. Les associations caritatives nous ont ainsi alertés sur l'urgence de moyens supplémentaires pour aider les ménages pauvres et à amplifier la lutte contre la précarité, sachant que les enfants en sont les premières victimes.

De même, la précarité étudiante, exacerbée par la perte des jobs étudiants, ne pourra que perdurer si nous n'agissons pas structurellement sur l'accompagnement que proposent l'État et les établissements d'enseignement supérieur, l'actuel système de bourses peinant à y remédier efficacement.

De plus, l'absence de filet de sécurité pour notre jeunesse a été évoquée lors de toutes les auditions, si bien que la question des moyens visant à renforcer l'autonomie des jeunes doit être au cœur de notre action.

Le rapport propose à cet égard certaines pistes, notamment l'engagement d'une réflexion portant sur l'autonomie financière et matérielle des étudiants et sur l'ouverture du revenu de solidarité active (RSA) aux moins de 25 ans.

Les étudiantes et les étudiants éprouvent de fortes inquiétudes quant à leur insertion professionnelle. Les projections anticipent un chômage des jeunes aux alentours de 25 %, en prenant en compte le fait que le nombre de contrats à durée déterminée (CDD) et de contrats d'intérim – les plus proposés aux jeunes – a dramatiquement chuté.

De même, trouver un stage s'avère très compliqué, ce qui a des conséquences importantes en particulier pour les filières professionnelles. Dans certains secteurs, la prime d'alternance mise en place par le Gouvernement va permettre de sauver ces contrats, mais dans d'autres, comme la restauration, cela ne suffira peut-être pas. Nous avons pu rendre visite aux élèves d'un lycée hôtelier qui nous disaient ne pas trouver de stages pratiques, ce qui met en péril tant la valeur de leur diplôme que leur avenir professionnel.

Les mesures prises dans le cadre du plan « 1 jeune, 1 solution » devront permettre d'apporter des réponses concrètes à ces jeunes adultes : le rapport propose à cette fin d'assurer un versement accéléré des crédits aux acteurs de l'insertion au titre des dispositifs de ce plan, notamment la garantie jeunes et le parcours contractualisé d'accompagnement vers l'emploi et l'autonomie (PACEA), pour une mise en œuvre réactive.

Je conclus cette brève présentation du rapport, en remerciant, encore une fois, l'ensemble des personnes auditionnées pour la qualité de leurs contributions et des commissaires.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Durant près de six mois, nous avons tous participé de façon assidue à l'ensemble des auditions, dont je souligne la très grande qualité. C'était un véritable travail de salubrité publique : les conséquences de la crise sanitaire due à la pandémie de la covid-19 sur les jeunes générations – enfants, adolescents, étudiants – exigeaient une analyse particulièrement fine. Notre collègue Marie-George Buffet, qui a été ministre en charge de la jeunesse, est bien placée pour savoir la place que devraient tenir les jeunes dans les décisions et donc dans les politiques publiques : une de ses premières décisions avait été, en juin 1997, de créer le Conseil national de la jeunesse (CNJ). Je ne peux donc que rejoindre les propositions mentionnées à la fin du rapport et qui consistent à associer le plus souvent possible les organisations de jeunesse, et donc les représentants des jeunes dans leur diversité, aux décisions concernant très directement leur vie quotidienne.

Nous serons extrêmement vigilants s'agissant des moyens de l'autonomie financière et matérielle des jeunes, et en particulier des étudiants : les propositions du projet de rapport – je pense en particulier à l'extension urgente, compte tenu de leurs difficultés matérielles, financières et psychologiques, du RSA aux moins de 25 ans – devront être adoptées.

Notre groupe souhaiterait bien évidemment aller plus loin, notamment concernant le revenu universel et les expérimentations visant à réduire tant le taux de pauvreté des jeunes, qui est deux fois plus important que dans le reste de la population, que leur taux de précarité, tout à fait anormal : nous y reviendrons au cours de débats qui auront lieu au début de l'année 2021 à l'occasion des niches parlementaires et des semaines réservées au contrôle dédiées à la question de la jeunesse. La transition vers l'âge adulte s'apparente de plus à un parcours du combattant pour notre jeunesse : comme l'indique le projet de rapport, il faut en moyenne atteindre l'âge de 27 ans pour accéder au marché du travail « classique », en finir avec les CDD et la précarité, obtenir un contrat à durée indéterminée (CDI) et enfin pouvoir se lancer dans certains projets. C'est proprement aberrant.

Je terminerai par deux observations. La première porte sur les vacances apprenantes : le rapport y voit, à la page 120, une relance bienvenue des colonies de vacances ; or si l'aide exceptionnelle apportée cet été a certes revêtu une certaine importance, un léger décalage a été constaté entre l'objectif initial et les publics visés, notamment ceux des quartiers de la politique de la ville. Il faudra être extrêmement vigilant au moment de les reconduire, et s'assurer qu'ils iront bien aux colonies de vacances, apprenantes ou non.

La seconde a trait aux activités sportives mentionnées à la page 136. Il s'agit d'un sujet majeur compte tenu des méfaits de la sédentarité sur toute une génération. Le rapport fait état de chiffres extrêmement alarmants : plusieurs kilos en plus en moyenne par individu, augmentation de la masse graisseuse, perte de coordination et de capacités physiques.

De leur côté, les clubs sportifs ont perdu près de 30 % de leurs adhérents et les fédérations sportives scolaires pratiquement 50 % de leurs licenciés. Des dispositifs sont donc nécessaires pour relancer au premier trimestre 2021 la pratique sportive, dans le cadre de l'éducation physique et sportive (EPS) au sein de l'éducation nationale comme dans celui des clubs ; les familles devront alors être aidées pour que les enfants et les adolescents en retrouvent le chemin. J'espère que l'expérimentation conduite dans l'académie de Créteil et visant à faire pratiquer aux élèves une activité physique pendant trente minutes chaque jour pourra être généralisée très rapidement lors de la rentrée 2021.

Les étudiants, enfin, sont les grands laissés pour compte de la pratique physique et sportive, d'autant plus que leurs problèmes de santé tant physique que psychique doivent nous interpeller.

Je préconise que le Pass'Sport ne soit pas mis en place à l'été 2021 mais le plus rapidement possible si l'on peut mobiliser les moyens financiers correspondants, et qu'il soit élargi, comme le suggère Mme la rapporteure, aux plus de seize ans.

Enfin, comme je l'ai indiqué, nous sommes favorables à l'extension du RSA aux moins de 25 ans.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je rappelle que les propositions – si je fais miennes beaucoup d'entre elles, d'autres, comme celle qui vient d'être évoquée, sont sujettes à discussion – sont à la main de la rapporteure.

Si le rapport a le mérite de lancer le débat sur la pauvreté des jeunes, sujet que nous empoignerons, et d'animer les échanges entre les pouvoirs législatif et exécutif, notre groupe privilégie la garantie jeunes qui, tout en s'inscrivant dans le même esprit, requiert un engagement dans une formation ou dans un emploi.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voici donc, à travers ce document, le résultat de plusieurs mois de travail et des nombreuses réunions qui nous ont permis d'appréhender avec plus de clarté les multiples conséquences de la pandémie sur l'enfance et la jeunesse. Je tiens évidemment à saluer et remercier Marie-George Buffet, sans qui cette commission d'enquête essentielle n'aurait pas vu le jour.

On sait désormais que, du fait de son ampleur inégalée, la crise que nous traversons représente le trouble le plus grave subi par la France depuis la seconde guerre mondiale. La commission d'enquête sur l'impact, la gestion et les conséquences de l'épidémie de covid-19 ne s'étant pas penchée spécifiquement sur les effets de cette crise sur la jeunesse, il était essentiel que notre assemblée se saisisse du sujet pour identifier les leviers qui ont été efficaces, ceux qui ne l'ont pas été et ceux qu'il convient d'améliorer.

Le constat que vous dressez, madame la rapporteure, est celui d'un paradoxe assez glaçant : si les jeunes sont physiquement moins affectés par le virus, ce sont eux qui subissent les conséquences les plus graves de la crise sanitaire. Augmentation des inégalités, sédentarité, altération psychologique provoquant un profond mal-être, rupture dans la continuité pédagogique, précarité étudiante exacerbée : notre jeunesse a vécu et vit toujours une période extrêmement tourmentée, souffrant de maux nombreux et alarmants, qui risquent de déstabiliser dangereusement toute une génération. Ce rapport atteste d'une réalité extrêmement grave : sans chercher à noircir le tableau, force est de constater que notre jeunesse est victime d'un véritable « trauma » psychologique.

Serge Hefez trouvait anormal que, alors même que la nation française était impactée psychologiquement par la crise, il n'y ait aucun psychiatre au sein du comité scientifique ; vous proposez, à juste titre, qu'un pédopsychiatre y participe également. Je me souviens d'ailleurs que, lors d'une de nos premières auditions, des pédiatres et des pédopsychiatres avaient dressé un constat sans appel : si rien n'était fait pour panser les plaies psychiques, les conséquences sur le long terme seraient catastrophiques à l'échelle d'une génération.

Je souscris donc pleinement aux propositions visant à renforcer la présence des personnels de santé – infirmières, médecins et psychologues – et des assistants sociaux dans les établissements scolaires. Sans vouloir être perfide, je signale que nous avions appelé dès le début de la pandémie à un renforcement des moyens humains au sein des écoles ; or toutes les propositions que nous avons émises en ce sens dans le cadre des projets de loi de finances ont été écartées par le Gouvernement.

Je souhaite, à l'instar de mon collègue Régis Juanico, insister sur la nécessité absolue de replacer notre jeunesse au cœur des politiques publiques : c'est la condition sine qua non pour éviter que la génération dite covid soit sacrifiée. Pour le reste, je partage l'ensemble des remarques de Régis Juanico.

Alors que nous souhaiterions une réaction la plus rapide possible, les propositions émises dans le rapport s'inscrivent dans le temps long. Il est probable qu'elles ne seront pas adoptées dans l'immédiat, alors que la crise est toujours là et que nos enfants et notre jeunesse en subissent de plein fouet les conséquences. D'où ma question : si une mesure devait être mise en œuvre immédiatement, quelle serait-elle ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame la rapporteure, je tiens tout d'abord à vous féliciter pour la richesse de votre travail. Deux jours après la fin du deuxième confinement et la mise en place d'un couvre-feu, votre rapport est plus que jamais d'actualité. Nous devons tirer les enseignements de cette crise sanitaire qui a mis en exergue un certain nombre de difficultés rencontrées par les jeunes, notamment les jeunes femmes – je pense en particulier aux cyberviolences sur lesquelles j'ai alerté à plusieurs reprises lors des auditions. J'y insiste : il ne s'agit pas d'un phénomène marginal ; d'après une étude du centre Hubertine-Auclert, cela concernerait une jeune femme sur cinq. J'ai récemment échangé avec les collectifs Stop Fisha et Féministes contre le cyberharcèlement : à titre d'exemple, le channel « Dossier » sur Telegram, qui se veut une boucle de partage d'images pédopornographiques, réunit plus de 240 000 personnes.

J'ai pris connaissance de vos propositions avec beaucoup d'intérêt. Vous proposez – seulement, dirais-je – de sensibiliser les jeunes et les familles aux manifestations et risques de cyberviolence. C'est essentiel, mais il ne faudrait pas oublier que ce sont avant tout les cyberharceleurs – souvent des hommes – qui sont les responsables de ces actes. Que suggérez-vous pour responsabiliser davantage les auteurs de ces violences et faire de l'internet un espace sécurisé ? Quelles mesures préconisez-vous pour soutenir et accompagner les victimes de cyberviolences ?

D'autre part, les enfants en situation de grande précarité vivent dans une insécurité peu favorable à leur épanouissement et à l'acquisition des savoirs fondamentaux. À cette insécurité s'ajoute l'instabilité, accentuée par le risque d'être expulsé. C'est pourquoi je salue tout particulièrement deux de vos propositions : interdire l'expulsion des familles vivant avec des enfants mineurs et instaurer un véritable droit à l'eau et à l'assainissement – c'est une question de dignité autant que de santé publique.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Merci, madame la présidente, madame la rapporteure, de nous avoir accordé ce temps si précieux pour nous pencher sur un sujet auquel on ne prête pas suffisamment attention. Je le dis avec le cœur : on devrait toujours commencer par là d'où l'on vient, c'est-à-dire par l'enfant, et ne jamais l'oublier. Merci donc pour ce travail remarquable, et pour ce foisonnement de propositions en tous genres.

La question, maintenant, est de savoir par quoi l'on commence. J'aimerais avoir votre avis car il y a à la fois du macro, du micro, de l'opérationnel, des propositions qui relèvent de la vision politique globale, d'autres qui sont des suggestions pratiques à mettre en œuvre immédiatement… Plus de quatre-vingts recommandations au total ! Comment les hiérarchisez-vous ? Si vous deviez n'en garder que six, lesquelles sélectionneriez-vous ?

J'ai deux regrets concernant la méthode. Le premier, c'est que nous n'ayons pas eu davantage de temps et de recul pour nos travaux ; avec six mois de plus, je pense que nous aurions pu avoir des retours d'expérience plus intéressants. Peut-être faudrait-il lancer une commission d'enquête pour faire suite à cette commission d'enquête ? (Sourires.) Plus sérieusement, il faut poursuivre ces travaux : il ne faudrait pas qu'ils s'arrêtent avec la commission d'enquête.

Le deuxième regret, c'est que nous aurions dû faire participer plus d'enfants et de jeunes, conformément d'ailleurs aux recommandations faites dans le rapport. Outre qu'il existe plusieurs organisations rassemblant des enfants, à commencer par le Parlement des enfants, nous aurions pu élaborer un questionnaire ou passer par l'intermédiaire des réseaux de jeunes. Trop souvent, nous restons dans l'incantation, à dire ce qu'il faudrait faire, alors même que nous pourrions faire participer un plus grand nombre de personnes à nos travaux – et je m'inclus dans la critique.

La commission d'enquête nous a cependant permis de faire le point sur l'impact de la crise, qui précarise davantage encore les plus vulnérables, ainsi que sur l'articulation des politiques en faveur des enfants et de la jeunesse. Or les principaux intéressés sont trop rarement consultés, a fortiori dans cette période. Autre point qui ressort de nos travaux, c'est qu'il est extrêmement difficile d'évaluer les conséquences du confinement sur les enfants et la jeunesse dans la mesure où nous ne disposons pas véritablement d'indicateurs sur lesquels nous appuyer. Pour donner un exemple qui me permettra de revenir sur les propos d'Albane Gaillot, on pourrait avoir le sentiment que les violences dans l'espace numérique ont augmenté, en raison d'une exposition plus forte aux écrans ; or, à part des témoignages individuels, nous ne disposons pas à ce jour de données fiables qui en attesteraient. Sans repères ni indicateurs, il est extrêmement difficile de mener des politiques publiques adaptées.

L'ambition de la commission d'enquête était immense ; on ne devrait pas s'en tenir à son rapport et continuer à questionner et contrôler les politiques publiques relatives à l'enfance et à la jeunesse. Comment faire pour aller plus loin ?

Afin d'appuyer certaines des propositions que vous avez faites, je souhaite donner un coup de projecteur sur cinq points et formuler dix suggestions.

Premièrement, il faut favoriser la participation des jeunes. Comment faire les bons choix si les jeunes ne sont pas consultés et impliqués dans les mesures qui les concernent ? Dans le cas présent, nous pourrions organiser des sondages, à travers une plateforme dédiée ou une application mobile, se fondant sur des questionnaires adaptés afin de valider les orientations envisagées. Cela permettrait d'avoir un état de leur opinion à l'instant T ou dans un territoire en particulier. À plus long terme, c'est leur capacité à se faire entendre qui doit être repensée par la mise en place de consultations généralisées ou la création d'un Parlement des jeunes au niveau national, sur le modèle de notre assemblée nationale.

Il faudrait aussi faire des droits de l'enfant et de la jeunesse une boussole des politiques publiques. Vous proposez de créer une délégation aux droits de l'enfant. Nous essayons, tous autant que nous sommes, de faire valoir la pertinence de cette proposition, étant donné qu'à l'Assemblée nationale, aucune commission permanente ne traite spécifiquement de l'enfance. À la commission des affaires culturelles et de l'éducation, on traite de l'éducation ; à la commission des affaires sociales, de la famille ; mais nulle part on ne traite de l'enfant. Même chose au niveau de l'État, où pas moins de douze ministères se partagent l'enfant ; une main à la justice, un doigt pour la santé, un bras à l'éducation nationale, un pied pour le secrétariat d'État… Ne vaudrait-il pas mieux réfléchir à un fonctionnement plus adapté, soit de manière transverse, interministérielle, soit en créant un ministère de plein droit ?

Troisièmement, attachons-nous à rendre lisibles et accessibles les contenus destinés aux jeunes. L'information est toujours descendante ; il y aurait pourtant d'autres solutions, par exemple le pair à pair, que je trouve extrêmement intéressant. Quoi qu'il en soit, il faut absolument revoir contenus et contenants. Vous évoquez certaines campagnes totalement à côté de la plaque ou moralisatrices : si l'on veut s'adresser aux enfants et à la jeunesse, il faut avoir les bons outils, passer par les médias qu'ils utilisent, utiliser les mots qu'ils comprennent. D'où la nécessité de les placer au centre des dispositifs – vous le voyez, mes propositions sont extrêmement concrètes.

Quatrièmement, essayons de recréer du collectif dans une société de l'engagement. La Fondation de France a rendu début décembre un rapport qui souligne qu'un des principaux maux liés à la situation actuelle, c'est l'isolement. Jusqu'à présent, les jeunes y étaient moins sujets que les moins jeunes ; or désormais, les chiffres sont équivalents : 14 % des jeunes ont le sentiment d'être complètement livrés à eux-mêmes, du fait de problèmes liés à la pauvreté, au décrochage scolaire etc. Pour aborder la question du RSA et faire un peu de politique, il me semble que, dans ces conditions, il est extrêmement important de ne pas simplement perfuser, mais d'inviter chacun à redevenir acteur de sa vie et faire en sorte qu'il ait la capacité de pêcher son propre poisson.

Dernier point : l'ASE. Si les enfants en foyer ou en famille d'accueil ont été relativement épargnés, alors même qu'ils sont d'habitude transbahutés de droite à gauche, les enfants hébergés dans des hôtels sociaux ont été touchés de plein fouet par la crise. Vous appelez à renforcer les protocoles et l'encadrement pour l'accueil des familles en hôtels sociaux ; je suis quant à moi partisane d'une interdiction pure et simple. Le Défenseur des droits l'a bien dit : la place d'un enfant n'est pas dans un hôtel. À supposer que la situation actuelle dure encore quelques mois, il faut impérativement trouver des solutions pour éviter que des enfants ne crèvent pas de faim – car c'est bien ce qui s'est passé. Quand bien même ils disposeraient d'outils informatiques et du wifi, bref du minimum, il faut mettre en œuvre une politique qui nous permette de les sortir de l'hôtel.

J'avais dix suggestions à formuler, mais je crois que mon temps de parole est écoulé…

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

En effet, chère collègue ! Il serait bon que les interventions soient plus concises…

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous connaissez tous mon engagement sur les questions liées à la jeunesse. Mon intervention sera malheureusement proportionnée à ma participation à cette commission d'enquête, dont l'étendue du rapport et des propositions montrent l'extrême richesse.

Nous n'avons pas réussi, dans la nouvelle configuration gouvernementale, à obtenir un secrétariat d'État auprès du Premier ministre ; le caractère polymorphe et en silo du travail sur la jeunesse rend les choses extrêmement compliquées. On aurait vraiment besoin d'une instance qui dispose de ramifications locales et fasse remonter non seulement des données quantitatives, ce qui permettrait d'affiner les indicateurs, mais aussi des informations qualitatives, afin de s'assurer de la bonne déclinaison sur le terrain des plans très ambitieux décidés à l'échelon national, comme le « plan jeunes » inclus dans le plan de relance. À cet égard, votre proposition de création d'un observatoire me paraît essentielle.

Pour ce qui concerne le RSA, il est vrai que l'État doit être à la hauteur pour accompagner ces jeunes qui ne sont pas encore autonomes, à tous points de vue, et qui ne sont pas complètement formés – le diplôme étant la meilleure arme contre le chômage. On a vu les biais que peut avoir le RSA dans certains territoires – je pense que Mme Buffet en conviendra. Nous devrions avoir pour ambition de donner aux jeunes les meilleures armes pour démarrer dans la vie, en garantissant aussi bien leur autonomie que leur insertion. De ce point de vue, le RSA n'est pas une solution ; il faut être beaucoup plus ambitieux en matière de garantie jeunes, aller plus loin pour ce qui est des degrés de prise en charge et d'accompagnement – car nous nous devons d'accompagner ces jeunes, qui en ont vraiment besoin.

Enfin, ce qui me paraît essentiel, c'est la médecine scolaire et, plus généralement, la problématique de la santé. Là aussi, il faudrait être beaucoup plus ambitieux. Si beaucoup de choses ont déjà été faites, il y a encore nombre de problèmes à régler : les listes d'attente pour accéder aux centres médico-psychologiques ou médico-psycho-pédagogiques, la difficulté à trouver des médecins scolaires… Posons-nous donc les bonnes questions : dans les territoires où la précarité est forte, les problèmes de santé sont vraiment trop importants pour qu'on puisse aller beaucoup plus loin.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame la rapporteure, je vous remercie pour votre rapport. Si le constat que vous dressez est largement partagé, certaines des recommandations que vous formulez le sont un peu moins – mais cela montre toute la vitalité de notre démocratie. Merci aussi d'avoir repris certaines propositions que nous défendons sans succès depuis plusieurs mois, comme la création d'une délégation spécifique au sein de l'Assemblée nationale, la réforme de la gouvernance de l'aide sociale à l'enfance ou la mention du 119 dans le carnet de liaison : autant de petites mesures qui ne coûteraient pas grand-chose mais qui pourraient être d'une grande aide.

À la lecture de ce rapport, j'ai été frappée par une chose : c'est le manque de données. Pendant la période du confinement, on nous a transmis jour par jour le nombre de morts et celui d'hospitalisations, mais on n'est pas capable de dire combien d'informations préoccupantes ont été traitées par les départements, combien de décisions judiciaires ont été prises dans le cadre des ordonnances, c'est-à-dire en mode dégradé, combien d'ordonnances de protection ont été délivrées ; on n'est pas capable d'évaluer l'impact de la crise sur la santé des enfants, ni les violences intrafamiliales, ni le cyberharcèlement. On voit bien à quel point la politique de l'enfance manque de suivi ! Cela ne date certes pas d'aujourd'hui, mais cela transparaît dans votre rapport : on y trouve beaucoup de témoignages, mais peu de données objectives. Cela devrait nous interroger.

Étant très impliquée dans l'aide sociale à l'enfance, j'ai été étonnée de voir que 10 000 à 15 000 enfants en avaient été sortis au moment du confinement pour être, pour la plupart, renvoyés dans leur famille. Nous n'avons aucune information sur ce qui s'est passé pour eux ; et quand bien même cela se serait bien passé, cela poserait question : cela signifierait que l'on avait placé ces enfants alors que l'on pouvait sans danger les renvoyer en catastrophe dans leur famille ! Il serait bon de réexaminer notre politique de protection de l'enfance.

À l'inverse, de nombreux enfants ont été assagis par une certaine rupture avec leur famille. Je l'avais évoqué dans mon propre rapport l'année dernière : je sais que c'est compliqué dans notre société, mais il serait bon de réinterroger l'idée du lien à maintenir obligatoirement entre les parents et les enfants.

De même, la crise a montré que moins de paperasse et d'activités superflues permettaient aux éducateurs de mieux accompagner les enfants. Si l'on ne peut pas décharger les éducateurs de toutes ces tâches, nécessaires pour le suivi des dossiers, il serait bon de parvenir à un taux d'encadrement qui leur permette d'effectuer aussi leur travail éducatif et d'être davantage présents auprès des enfants.

Concernant le contrat jeune majeur, je partage entièrement votre opinion, madame la rapporteure. Dans notre pays, un enfant qui n'est pas passé par l'aide sociale à l'enfance peut attaquer ses parents s'ils ne veulent pas lui verser après ses dix-huit ans une pension alimentaire pour qu'il puisse poursuivre ses études, alors qu'un enfant confié à l'ASE ne peut se retourner contre personne pour obtenir une aide alimentaire. Il faut examiner cette question.

Venant, comme beaucoup de collègues, du monde de l'entreprise, quand j'ai vu que vous évoquiez un plan de continuité d'activité pour les PMI, je me suis dit que c'était une bonne idée… À ceci près qu'il ne faut pas s'en tenir aux PMI : il en faudrait aussi pour les instituts médico-éducatifs (IME), les instituts thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques (ITEP), les cellules de recueil, de traitement et d'évaluation des informations préoccupantes (CRIP) et l'éducation nationale. Nous sommes encore en période de crise, les difficultés perdurent – j'ai été sollicitée aujourd'hui encore au sujet des IME et des ITEP – et il serait bon d'y remédier. L'un des principaux enseignements de votre rapport, c'est de montrer que la crise a eu pour effet des formes de maltraitance à la reprise de l'école ; ce petit garçon qui se fait pipi dessus parce qu'il n'y a plus de couverts, ces enfants placés dans des cercles et qui ne peuvent pas échanger entre eux… : il s'agit véritablement là de cas de maltraitance à l'école. C'est pourquoi l'on a besoin d'un plan de continuité d'activité : il est nécessaire que les enfants puissent rester à l'école.

Dernière remarque : si je partage, tout comme Régis Juanico, le constat que vous dressez concernant le sport, un enfant ne se construit pas uniquement à travers les activités sportives ; il le fait aussi à travers les activités culturelles, comme le théâtre, la musique, le dessin… Il serait bon de souligner aussi l'impact qu'a pu avoir l'arrêt de ces activités sur les enfants – car tous ne sont pas sportifs.

Encore bravo pour le rapport ; quant aux propositions, on verra bien quand elles seront reprises dans un texte !

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je vous remercie d'avoir demandé la création de cette commission d'enquête, qui nous permet de remettre sur le devant de la scène les politiques en faveur de la jeunesse – ce n'est pas rien ! Nous partageons tous l'ambition de participer à l'émancipation de la jeunesse.

J'aimerais souligner le fait que cette crise n'a pas eu que des conséquences négatives – Perrine Goulet parlait des enfants qui se sont assagis pendant la crise. La situation est cependant très hétérogène et dépend tant du profil des jeunes que des territoires. On a vu émerger de belles initiatives, la solidarité s'est développée entre les jeunes eux-mêmes, dans les lycées et parmi les étudiants. Il faut reconnaître quand certaines choses vont dans le bon sens. Je n'irai pas jusqu'à dire merci à la crise, mais elle nous a donné l'occasion de nous pencher sur notre jeunesse.

Concernant l'autonomie financière des étudiants, trois sujets sont à appréhender en priorité. Le premier concerne l'information sur les droits et l'accès au droit. C'est toujours très confus, alors qu'il existe des structures d'information jeunesse, une plateforme pour l'emploi des jeunes, etc. Comment l'information arrive-t-elle vraiment chez les jeunes ?

Le deuxième sujet concerne la souffrance psychique. Nous avons eu l'occasion d'auditionner une plateforme d'écoute destinée aux jeunes et aux étudiants. Il y a un problème d'offres de services en matière de santé mentale en France. Il faut absolument donner plus de moyens aux centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (CROUS) pour l'écoute des jeunes en souffrance psychique.

Le troisième sujet porte sur l'offre de logements. La France a cette particularité d'avoir des campus universitaires dans les métropoles, ce qui rend complexe l'augmentation du nombre de résidences étudiantes.

Je souhaite également mettre l'accent sur la garantie jeunes. Je suis impliquée dans le réseau des missions locales depuis une dizaine d'années. Pour les mêmes raisons que mes collègues, je ne suis pas pour le RSA jeunes. Quand la commission d'enquête a été créée, le plan jeunes n'existait pas, ou venait tout juste de naître. Il a évolué depuis, le Premier ministre a récemment annoncé que les trous dans la raquette seraient comblés. Le nombre de bénéficiaires de la garantie jeunes sera doublé en 2021. C'est un sacré défi pour les missions locales, mais on ne pourra pas atteindre 100 000 jeunes de plus si l'on n'assouplit pas les critères. Nous travaillons avec le cabinet du ministère du travail pour parvenir à supprimer les freins à l'entrée. Il en existe deux principaux : le critère « NEET » (Not in Education, Employment or Training), tout d'abord, qui désigne les jeunes ni en emploi, ni en études, ni en formation. Un jeune ayant un petit boulot ne peut pas bénéficier de la garantie jeunes, alors qu'il n'est pas dans une situation d'emploi durable. Il faut donc faire sauter ce critère. De même, le critère du foyer fiscal non imposable ne doit pas constituer un frein à l'entrée dans la garantie jeunes.

Nous ne pourrons pas résoudre le problème de l'insertion des jeunes à coup d'allocations. Il faut raisonner par parcours d'accompagnement contractualisé, adapté aux besoins du jeune, sécurisé financièrement en fonction des besoins. C'est ce que nous avons fait avec la garantie jeunes et avec le PACEA pour ceux qui ne peuvent bénéficier de la garantie jeunes. Nous avons élargi dernièrement le périmètre de l'allocation PACEA aux jeunes accompagnés par Pôle Emploi dans le dispositif d'accompagnement intensif des jeunes (AIJ) et à ceux qui sont accompagnés par l'Association pour l'emploi des cadres (APEC) dans le dispositif Objectif premier emploi. Il faut vérifier l'efficacité de ces mesures et s'assurer qu'il n'y a plus de trous dans la raquette : certains profils de jeunes ne sont peut-être pas encore identifiés, ou bien nous avons du mal à les atteindre. Le repérage constitue en effet un véritable enjeu. La formation, l'accompagnement et le travail permettront à nos jeunes de s'émanciper et de devenir des citoyens à part entière.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame la rapporteure, bravo ! Je suis venu dans cette commission car sa thématique m'était chère, et je ne doutais pas, compte tenu de votre expérience passée, que nous allions vivre de bons moments. Si nous n'avons pas pu tous participer aux auditions du fait de nos contraintes d'agenda, je tiens à souligner la très grande qualité des intervenants et la richesse de ces auditions qui nous ont beaucoup appris. Je vous félicite également pour la remarquable diversité des personnes auditionnées.

Je soutiens dans l'ensemble votre rapport, qui est fidèle aux auditions que nous avons menées. L'objet de la commission était de mesurer et de prévenir les effets de la covid-19 sur la jeunesse. Or je ne peux cacher une petite déception concernant la question de la prévention. Je souhaitais que l'on insiste sur ce point, même si la culture française s'intéresse moins aux causes qu'aux conséquences. S'il est indispensable d'accompagner les jeunes en difficulté, il y a aussi, fort heureusement, une majorité de jeunes pour qui cela se passe bien : il faut aussi s'occuper d'eux, faire de la prévention à leur égard, afin de leur donner les outils pour qu'ils ne connaissent pas les difficultés que d'autres vivent. Des expériences sont menées dans des écoles, des collèges, des lycées, des universités, et cela fonctionne bien : je suis donc assez surpris que si peu de propositions concernent la prévention. Il me paraît important d'aborder cette question au sujet des rythmes scolaires, de l'adaptation des programmes, du numérique, de l'ouverture à l'école, de l'écoute et de la médiation.

La santé mentale sera le premier poste de dépenses de santé dans dix ans : j'aurais aimé que la prévention dans ce domaine soit davantage prise en compte. Le ministre, que nous avons reçu en octobre, a annoncé une expérimentation large et dans les plus brefs délais de la pleine conscience à l'école. Je regrette toutefois que nous n'ayons pu auditionner des chercheurs français de renom, comme Rebecca Shankland, qui était pourtant prête à venir. Madame la rapporteure, vous pourrez constater que cette expérimentation donne des résultats extraordinaires, en particulier dans votre département, puisque cette pratique contribue à réduire les inégalités à l'école en permettant aux enfants qui en ont le plus besoin de rattraper le niveau de la classe.

Parmi les aspects positifs, vous avez relevé, en page 69 de votre rapport, le travail de terrain accompli par l'excellent observatoire régional de la jeunesse de Bretagne, dont l'objectif est de suivre l'ensemble des jeunes. Je suis toutefois un peu déçu que vous proposiez de créer un observatoire du décrochage plutôt que de la persévérance scolaire, comme l'on fait nos collègues du Québec : le but doit être de maintenir le maximum de nos jeunes à l'école, plutôt que de s'occuper seulement de ceux qui décrochent.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La crise a révélé de grandes inégalités sociales, financières et territoriales chez les jeunes, comme le démontre votre rapport. Comment ne pas être frappé par certains chiffres que vous analysez : ces 27,5 % d'étudiants souffrant d'un haut niveau d'anxiété, les 40 000 étudiants d'outre-mer éloignés de leur famille, les 50 000 étudiants étrangers, dont on ne parle pas souvent, victimes de précarisation, ou encore les familles des 65 000 enfants handicapés confrontées à des difficultés particulières. Je tenais à vous remercier pour cette description de la réalité, dont ce rapport est une fidèle photographie.

Vos propositions, madame la rapporteure, sont pour la plupart de bon sens. Le renforcement des services publics sur le plan sanitaire est une urgence. Vous ne traitez cependant pas de la question des compétences, alors qu'il faudrait, notamment dans le domaine de l'éducation, commencer à réfléchir à la décentralisation d'un certain nombre de services et au partage des politiques éducatives avec les collectivités territoriales, les familles et les enseignants. La Suède, pays aussi centralisé que la France, a totalement décentralisé son système éducatif, permettant ainsi de responsabiliser davantage les acteurs. N'ayons pas peur d'aborder ces sujets.

Vous évoquez la nécessité de renforcer le pilotage des politiques de l'enfance, notamment dans le domaine de l'aide sociale à l'enfance. C'est une réalité : ayant été un temps président d'un département, j'ai été frappé par l'habitude prise par l'État de se décharger des politiques d'accompagnement sur les départements, ceux-ci étant parfois livrés à eux-mêmes. La décentralisation, ce choc girondin que nous réclamons tous, suppose non seulement beaucoup plus de moyens pour les collectivités mais également un vrai pilotage par l'État. Or celui-ci, à vouloir tout faire, ne parvient pas à se cantonner dans son rôle, à savoir définir les grandes politiques tout en donnant des moyens aux collectivités.

Enfin, la piste de l'ouverture du RSA aux moins de 25 ans est un vrai sujet. L'Institut Montaigne a très récemment préconisé un plan massif en direction des personnes les plus fragiles, à savoir les 12 millions de personnes vivant sous le seuil de pauvreté dans notre pays. Ce plan de 30 milliards, soit 2 000 euros par famille ou par personne concernée, permettrait de remédier immédiatement aux grandes difficultés économiques et à la détresse des étudiants de notre pays.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je tiens à vous féliciter, madame la rapporteure, pour le travail que vous avez accompli. Nous vous avons accompagnée et soutenue dans votre proposition de créer cette commission. Quatre-vingt-seize heures d'auditions ont permis d'aboutir à ce rapport conséquent. Le constat est très simple : de nombreuses difficultés et carences existant au niveau de nos politiques publiques ont été aggravées par la crise sanitaire.

Quelques points positifs sont à noter, comme la formidable solidarité dont ont fait preuve les Français dans ces moments difficiles, ainsi que le renforcement des liens familiaux. Cela fait plusieurs mois que nous souhaitons intégrer l'intérêt de l'enfant et des jeunes dans nos politiques publiques, raison pour laquelle nous avons adopté, l'année dernière, la résolution de notre collègue Florence Provendier, dont c'était l'objet.

Si nous ne savons pas systématiquement aller vers ces jeunes, il faut se souvenir qu'ils viennent parfois vers nous. J'ai eu l'occasion de rencontrer Nollan Ducloux, président de l'association Jeunes de France, qui souhaite s'inspirer des conseils municipaux des enfants ou des jeunes pour faire la même chose au niveau du Parlement. Il souhaite être régulièrement auditionné par nous pour pouvoir porter la parole des jeunes : c'est une demande que nous devons entendre. De même, Hakaroa Vallée, qui se bat pour la reconnaissance des maladies chroniques, est venu nous solliciter pour faire réécrire le SIGYCOP. Les jeunes savent venir vers nous si nous ne leur prêtons pas suffisamment attention. Il faut donc ouvrir les portes.

J'exprimerai par ailleurs plusieurs regrets concernant cette commission d'enquête. Tout d'abord, la santé mentale est un véritable problème dans notre pays, aggravé par la crise sanitaire. Nous n'y accordons pas suffisamment d'attention, ni à l'accompagnement des personnes touchées par ces maux. Nous devons impérativement nous pencher sur cette question.

Le deuxième regret concerne les violences intrafamiliales. Si nous savons que les violences physiques et psychologiques ont augmenté pendant les périodes de confinement, nous ne savons rien sur les violences sexuelles. Nous ne sommes pas capables de dire si elles ont été plus nombreuses ni quels enfants ont pu être concernés.

Troisième regret, il aurait fallu ajouter dans le rapport une communication rappelant l'interdiction, depuis juillet 2019, des violences éducatives ordinaires. Nous ne mettons pas suffisamment l'accent sur ce sujet. Je rappelle que les violences éducatives ordinaires, appelées communément fessées ou gifles, qui comportent aussi une dimension psychologique, sont le terreau de la maltraitance. Si on ne l'indique pas clairement en amont, on aura toujours à déplorer des cas de maltraitance.

Enfin, mon dernier regret concerne l'outre-mer. Même si nous avons évoqué la situation des étudiants ultramarins, tout comme celle des étudiants étrangers présents sur notre territoire au moment des confinements, nous ne sommes pas allés voir dans le détail ce que les enfants, les jeunes et les jeunes adultes ont vécu dans les territoires ultramarins. À chaque fois que j'ai posé des questions sur ce point, les réponses qui m'ont été données, quand il y en avait, étaient très lacunaires : je le déplore. S'il est encore possible de noter cela dans le rapport, je vous en saurai gré.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je vous remercie toutes et tous une nouvelle fois pour votre participation et votre apport à cette commission d'enquête.

Vous m'avez demandé quelle serait la première mesure à appliquer. Il en est une qui me paraît évidente : demander un rendez-vous en urgence au président de l'Assemblée nationale afin de créer une délégation aux droits de l'enfant. Tous les groupes doivent se réunir pour faire cette demande, que nous devons rendre publique, parce que cela nous permettra de poursuivre le débat – nous ne sommes pas d'accord sur tout, mais ce n'est pas grave – et d'inspirer des propositions de loi et des projets de loi à l'Assemblée nationale. J'ai vu ce que la délégation aux droits des femmes nous a apporté : sans elle, il n'y aurait pas eu la loi abolitionniste, il n'y aurait pas eu la première loi contre les violences faites aux femmes. C'est vraiment un élément moteur au sein de l'Assemblée. Mobilisons-nous début janvier, de façon pacifique, afin d'insister fortement sur la création de la délégation aux droits de l'enfant.

Ensuite, il faut une mobilisation réelle des services sanitaires, notamment des psychologues et des psychiatres, au niveau des premières années d'université. Des moyens doivent être dégagés pour accompagner ces jeunes qui sont les plus touchés par l'anxiété liée à la disparition des rapports sociaux à l'entrée à l'université. Il faut être très vigilant sur cette question : c'est ma principale inquiétude.

Par ailleurs, nous devons obtenir un observatoire des données. L'enfance et la jeunesse relevant de différents ministères, nous n'avons pas de données suffisantes pour examiner, par exemple, s'il y a eu progression ou non des violences intrafamiliales.

Je ne classerai pas ces quatre-vingts propositions par ordre d'importance. Il est vrai qu'elles sont d'ampleur différente. Veiller à une meilleure communication à destination des jeunes et des enfants en cas de crise, cela ne nécessite pas des millions d'euros : cela demande de réfléchir à la cible, à la teneur du message, etc. Certaines propositions ne demandent pas beaucoup de moyens.

S'agissant de la coopération, beaucoup d'exemples démontrent que l'éducation nationale doit ouvrir grand ses portes et travailler avec d'autres partenaires : c'est important pour l'éducation nationale elle-même et surtout pour le bien des enfants et des jeunes.

La prévention apparaît dans plusieurs propositions, notamment sur le suivi sanitaire des enfants en cas de crise. Concernant le plan de continuité, je pense qu'il est encore possible de l'ajouter au rapport, car cela me semble très précis, très concret. De même, il faudrait ajouter la notion de culture – nous avons, il est vrai, beaucoup travaillé sur le sport.

J'ai essayé de faire des propositions qui tenaient compte de nos auditions. Je souhaite que notre démarche soit positive et privilégie la formation et l'emploi. Toutefois, je peux comprendre que des associations, constatant l'extrême précarité des jeunes, nous demandent d'agir tout de suite et proposent la création d'un RSA pour les jeunes.

Le secrétaire d'État chargé de l'enfance a déjà demandé à me rencontrer. Il faut entamer un dialogue avec tous les ministères concernés – nous avons d'ailleurs reçu les quatre ministres – pour voir avec eux quelles propositions pourraient être appliquées ou travaillées. Je ferai ce travail, en janvier, avec Mme la présidente et tous ceux qui souhaiteront y participer, de rencontre avec les différentes institutions ministérielles. Si nous obtenons la création de cette délégation, nous pourrons de nouveau recevoir les principales associations pour faire le travail avec elles également.

J'ai pris note des autres propositions. J'espère qu'avec la délégation, nous aurons l'occasion de débattre de toutes les nouvelles propositions que vous avez faites. Nous allons l'obtenir, cette délégation !

La commission adopte le rapport et autorise sa publication.

La réunion se termine à seize heures trente

Membres présents ou excusés

Commission d'enquête pour mesurer et prévenir les effets de la crise du Covid-19 sur les enfants et la jeunesse

Réunion du mercredi 16 décembre à 15 heures

Présents. – Mme Sandra Boëlle, Mme Marie-George Buffet, Mme Sylvie Charrière, Mme Christine Cloarec-Le Nabour, Mme Fabienne Colboc, Mme Marianne Dubois, Mme Albane Gaillot, Mme Perrine Goulet, M. Régis Juanico, Mme Anne-Christine Lang, M. Gaël Le Bohec, M. Bertrand Pancher, Mme Maud Petit, Mme Sylvie Tolmont

Excusé. – M. Jean-Charles Larsonneur