Commission d'enquête pour mesurer et prévenir les effets de la crise du covid-19 sur les enfants et la jeunesse

Réunion du jeudi 12 novembre 2020 à 15h45

Résumé de la réunion

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  • CFA
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La réunion

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Commission d'enquête pour mesurer et prévenir les effets de la crise du Covid-19 sur les enfants et la jeunesse

Jeudi 12 novembre 2020

La séance est ouverte à 15 heures 45.

Présidence de Mme Sandrine Mörch, présidente

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous poursuivons nos auditions sur l'impact de la crise sanitaire sur la jeunesse et, plus spécifiquement, sur les enjeux de l'insertion professionnelle des jeunes, leur entrée sur le marché du travail et l'apprentissage.

Nous recevons Jean-Patrick Gille, président de l'Union nationale des missions locales (UNML), qui est accompagné de Sandrine Aboubadra-Pauly, déléguée générale, et d'Ahmed El Khadiri, responsable de projets. Nous recevons également Pascal Picault, vice-président de la Fédération nationale des associations régionales de directeurs de centres de formation d'apprentis (FNADIR) et Jean-Philippe Audrain, qui en est le trésorier.

Nous souhaiterions vous entendre sur les conditions de l'insertion professionnelle des jeunes dans une conjoncture économique particulièrement dégradée et toujours incertaine, alors que la hausse du chômage constatée au cours des derniers mois s'avère plus forte pour les jeunes que pour les autres classes d'âge. Le Plan « 1 jeune, 1 solution » présenté par le Gouvernement propose plusieurs dispositifs destinés à accompagner des jeunes éloignés de l'emploi avec, notamment, le renforcement du dispositif Parcours emploi compétences (PEC) et des Contrats initiative emploi (CIE), une augmentation des places en Garantie jeunes et le déploiement de 80 000 parcours contractualisés d'accompagnement vers l'emploi et l'autonomie (PACEA) supplémentaires.

Les missions locales jouent un rôle essentiel dans plusieurs de ces dispositifs. Nous les avons toutes et tous rencontrées sur nos territoires. Nous souhaiterions vous entendre sur la mise en œuvre des mesures du plan. Nous aimerions également que vous abordiez l'impact de la crise sanitaire sur l'accompagnement des jeunes par les missions locales depuis mars dernier et ses conséquences sur le fonctionnement de ces missions.

Lors d'un déplacement à Toulouse en octobre dernier, plusieurs des jeunes que nous avons rencontrés nous ont fait part de ruptures dans leur parcours, résultant directement de l'épidémie et du confinement, des stages qu'ils ne peuvent plus effectuer, des formations qui s'interrompent et de ce grand désarroi face à une multitude de pistes qu'ils ne savent absolument pas saisir. Comment la situation évolue-t-elle depuis la fin du confinement et dans le cadre du nouveau confinement déclaré fin octobre ?

Le Plan « 1 Jeune, 1 Solution » prévoit également un fort soutien à l'apprentissage avec une aide exceptionnelle de 5 000 euros pour recruter un alternant de moins de 18 ans et de 8 000 euros pour recruter un alternant de plus de 18 ans. 230 000 contrats d'apprentissage et 100 000 contrats de professionnalisation sont attendus en 2020. Nous souhaiterions entendre l'appréciation des directeurs de centres de formation des apprentis (CFA) sur ce dispositif. Plus largement, nous souhaiterions que soit abordé l'impact de la crise sanitaire sur les contrats d'apprentissage depuis mars et le fonctionnement des centres de formation des apprentis, ainsi que tous ces dysfonctionnements et rouages où il manque l'huile pour assurer une cohésion autour du jeune, à votre niveau et à celui de l'État, dans la mesure où chaque mois compte pour l'avenir de ces jeunes.

L'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées par une commission d'enquête de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite donc à lever la main droite et à dire : « Je le jure ».

(M. Jean-Patrick Gille prête serment).

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Jean-Patrick Gille, président de l'Union nationale des missions locales (UNML)

Nous n'avons pas de commentaire particulier à formuler sur le Plan Jeunes. Nous sommes totalement mobilisés pour le mettre en œuvre. Il nous dote d'une boîte à outils très large avec, notamment, la réactivation des emplois aidés, bien que les emplois d'avenir n'aient pas été remis en place, dans une volumétrie augmentée, ce qui nous permet de mettre les parcours des jeunes en œuvre en cherchant la solution adéquate.

Nous avions proposé la possibilité de mobiliser des fonds d'urgence. La crise sanitaire a engendré des moments d'urgence qui auraient nécessité le déblocage de fonds directement destinés aux jeunes, ce qui ne représenterait pas des sommes extraordinaires, mais nous ne disposons pas de cet outil. Nous avons la Garantie Jeunes, le PACEA, le fonds d'aide aux jeunes, lesquels requièrent la mise en place d'une mécanique administrative plus ou moins lourde.

Nous avons réalisé une étude détaillée, que nous vous communiquerons, incluant un questionnaire adressé à 25 000 jeunes correspondant au public des missions locales avec l'idée que de nombreux jeunes ont perdu leur emploi car ils vivent de contrats courts qui ne sont pas renouvelés. Par conséquent, ils ont été les premières victimes dans la mesure où tous les petits contrats se sont arrêtés. En dépit de l'effort produit par les organismes de formation sur le distanciel, les formations ont cessé pour la moitié des jeunes. La situation est très différente au niveau de l'alternance puisque le lien demeurait avec l'employeur. Je pense que les taux de poursuite y sont beaucoup plus élevés.

Les difficultés qui sont apparues étaient d'ordre alimentaire, d'hébergement et d'accès au droit. Nous avons préparé une note à ce sujet. Lors du premier confinement, le réseau a été totalement placé en télétravail. Les structures étaient fermées, mais un service minimum était assuré pour les tâches ne pouvant être effectuées en distanciel, même si nous avions essayé de dématérialiser un maximum de mesures. Néanmoins, dans le cadre du confinement strict, nous avons eu à traiter 25 000 cas d'urgence.

Se mettent en place le Plan Jeunes et l'obligation de formation. Nous avions repris notre activité quasiment à 100 % en présentiel pour ce qui concerne les personnels. Dans le cadre du nouveau confinement, nous donnons priorité au télétravail tout en maintenant un accueil en présentiel dans l'ensemble des structures en tant que service public. Nos 6 000 points d'accueil ne sont pas tous ouverts, mais chacune des missions locales propose des points en présentiel avec des aménagements d'horaires.

La difficulté réside dans la Garantie Jeunes qui comporte une phase collective que nous avions suspendue au cours du premier confinement, puis reprise avec un protocole consistant à limiter les groupes à sept, puis à six, ce qui nécessite davantage de locaux. Nous essayons de maintenir la Garantie Jeunes, les entrées et les parcours, lesquels se déroulent en distanciel et, au besoin, en différant la phase collective. De la même manière, alors que nous avions totalement cessé les périodes de mise en situation en milieu professionnel (PMSMP), nous pouvons les maintenir. J'invite les personnels à faire preuve de vigilance et de discernement sur les situations de travail qui sont proposées aux jeunes, mais il ne s'agit pas d'un arrêt.

Nos effectifs ont crû à la rentrée. Nous avons rattrapé le retard des périodes d'inactivité, ce qui a conduit à un surcroît d'activité en août et en septembre. Nous revenions à un rythme normal avec, néanmoins, une augmentation par rapport à l'année précédente.

Dans la présentation du Plan Jeunes, une enveloppe est envisagée pour le soutien aux missions locales avec un objectif d'augmentation de 50 % de la Garantie Jeunes, passant de 100 000 à 150 000, et à 80 000 Parcours contractualisés d'accompagnement vers l'emploi et l'autonomie (PACEA). En temps normal, les dialogues de gestion ont lieu en juin et les crédits votés en décembre arrivent en septembre dans les missions locales. Si nous voulons augmenter nos capacités, notamment en Garanties jeunes, ce qui nécessite des locaux, il convient d'investir aujourd'hui. Nous sommes un réseau basé sur des associations avec des fonds de roulement de trois mois, qui servent à couvrir les délais de versement de l'État. Il est heureux que les Régions nous financent avant. Faute de perspective et d'avance de fonds, les structures ne s'engageront pas au regard de la prise de risque. Sans certitude d'atteindre l'objectif, il s'agit d'un pari. Nous sommes néanmoins en discussion avec les cabinets des ministres à ce sujet.

Avant la crise sanitaire, nous considérions que nous couvrions le public éligible à 90 %. Aujourd'hui, il est nécessaire de conduire une réflexion nationale sur les critères d'éligibilité en instaurant une souplesse administrative. Les jeunes sortant de l'ASE ou les MNA sont éligibles à la Garantie Jeunes, mais il est quasiment impossible de monter le dossier administratif en raison des difficultés liées aux documents et à la résidence.

(M. Pascal Picault prête serment).

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Pascal Picault, vice-président de la Fédération nationale des associations régionales de directeurs de centres de formation d'apprentis (FNADIR)

La FNADIR est une fédération nationale de 13 associations régionales, qui représentent 500 directrices et directeurs de CFA pour un poids d'environ 380 000 apprentis. Tous les CFA sont représentés au sein de la FNADIR, à savoir les CFA de branche ou non, et les réseaux structurés de type consulaire ou interprofessionnel. La FNADIR repose sur 100 % de bénévolat et se donne pour ambition de porter la voix de tous les CFA pour donner une vision à long terme de l'apprentissage. Elle participe régulièrement aux travaux qui structurent l'apprentissage, soit au niveau national par le biais de son bureau et de ses commissions, soit en région par l'intermédiaire des associations régionales.

La FNADIR s'est fortement mobilisée dans le cadre de la réforme de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel du 5 septembre 2018. Elle anime un réseau social, nommé eFNADIR, qui interconnecte les 500 directeurs de CFA. Son réseau assure des informations montantes et descendantes très réactives qui nous permettent rapidement de collecter des chiffres et des tendances. La FNADIR joue pleinement son rôle d'interface avec les 500 directeurs de CFA et les pouvoirs publics depuis le début de la crise sanitaire.

Il faut noter la très grande réactivité des CFA et du ministère du travail dès le soir des annonces du Président de la République, avec notamment l'annonce rapide du maintien du financement des CFA. Un protocole sanitaire dédié a été mis en place au début du confinement avec des questions-réponses successives se nourrissant des liens établis avec le ministère et la DGEFP (délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle). En huit jours, l'ensemble des CFA avaient mis en place des solutions de formation à distance avec leurs apprentis avec, cependant, une complexité concernant l'enseignement professionnel qui se déroule habituellement sur les plateaux techniques en atelier.

Néanmoins, cette crise révèle des aspects de mise en œuvre de la loi précitée du 5 septembre 2018 qui ne sont pas aboutis et qui ne favorisent pas la transformation des CFA, notamment dans l'intégration durable du digital et ses nouveaux modèles économiques. En la matière, il existe un vrai sujet avec les opérateurs de compétences (OPCO) dont nous souhaitons vous faire part. L'apprentissage dans le secteur public n'a pas encore trouvé de modèle de financement satisfaisant.

(M. Jean-Philippe Audrain prête serment).

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Jean-Philippe Audrain, trésorier de la Fédération nationale des associations régionales de directeurs de centres de formation d'apprentis (FNADIR)

Nous avons pu nous adapter et réagir rapidement. Il se peut que les organismes de formation n'aient pas tous eu les mêmes modalités ou facilités. Il se trouve que nombre de CFA avaient engagé des logiques de formation en digital. Nous avons néanmoins rencontré certaines contraintes comme les zones blanches, la disparité des équipements pour certains publics et la difficulté d'acculturation au digital, notamment pour les publics d'un niveau inférieur au baccalauréat.

Nous avons rapidement instauré des formations à distance. Le maintien du financement des opérateurs de compétences a constitué un point fort pour sécuriser l'ensemble des démarches d'investissement des CFA.

Nous avons mis en place un accompagnement très varié autour de situations complexes avec des apprentis se trouvant maintenus en présentiel par les entreprises, y compris sur les temps de CFA, en particulier dans celles dont l'activité relevait de l'effort national. Nous avons également connu des situations inverses où les jeunes se trouvaient en chômage partiel et nous devions préparer la suite de la formation en CFA pour favoriser au mieux le développement des compétences, alors même que l'activité en entreprise n'était pas acquise.

Une situation particulière s'est révélée à la fin de l'année dite de certification, en juin, avec une problématique entre le ministère de l'Éducation nationale, sur les certifications, et le ministère du Travail dans la façon dont ont été mises en place des prescriptions visant à réguler l'activité de l'apprentissage, notamment dans les CFA. Nous avons eu quelques contractures sur le sujet, mais avons finalement réussi à résoudre cette problématique.

La relation quasiment permanente entre le ministère du Travail et la DGEFP, en lien avec les réseaux de CFA, en particulier avec la FNADIR, a permis une très grande réactivité de la part des CFA vis-à-vis de l'évolution de la situation, avec des prescriptions faites au fil de l'eau. Ce point fait partie des satisfactions permettant d'engager le second confinement. L'organisation est désormais rodée et la position du ministère a immédiatement consisté à valider l'autonomie des CFA dans l'appréciation des situations individuelles.

L'objectif a été de favoriser le distanciel en raison de la crise sanitaire. Les prescriptions prévoient de s'assurer de l'absence de rupture de formation concernant les publics fragiles. Aujourd'hui, les CFA ont la capacité de créer un mix distanciel-présentiel permettant de garantir la continuité d'activité pour les apprentis. Le dernier protocole diffusé le 9 novembre fait évoluer très marginalement le précédent. Les questions-réponses sont toujours très attendues et appréciées par les opérateurs car elles permettent de bien qualifier notre action à suivre.

Ce confinement intervient dans une période de réformes fortes alors que nous avons encore à régler un certain nombre de points pour être aussi efficients que possible, notamment la question de notre relation avec les OPCO, dans le cadre d'un financement complet pour un service complet, ce qui n'est pas le cas dans le cadre de la proratisation du financement au regard du temps de formation, et non du temps de contrat. Dans le cadre d'une formation complète se déroulant jusqu'à la certification, en juin, dont le contrat s'achève fin août, si le jeune décide de partir en juillet comme le permet la loi, l'OPCO ne finance la formation que jusqu'à la fin du mois de juin. Ainsi, 16 % des financements ne sont pas versés, ce qui met en péril l'équilibre économique du CFA. Un arbitrage très clair de l'État est nécessaire sur ces sujets, outre les points à régler sur les systèmes de gestion des contrats avec les OPCO.

L'apprentissage dans le secteur public nous a semblé avoir été oublié dans la réforme. Nous relevons l'iniquité de traitement des apprentis selon qu'ils émargent auprès d'un employeur public ou privé. Les frais de premier équipement, les indemnités d'hébergement et de restauration, les surcompensations liées au handicap et les frais liés à la mobilité internationale sont pris en charge par les OPCO. En aucun cas, il n'est question de cette prise en charge par le CNFPT pour l'apprentissage dans le secteur public, ce qui crée une réelle difficulté sur laquelle il convient de se pencher. Le niveau de prise en charge du financement par le CNFPT pour l'apprentissage dans le secteur public est assez différent, et souvent à la baisse, par rapport à celui des OPCO dans le secteur privé. Ces niveaux de prise en charge sont, de fait, souvent inférieurs au tarif de la formation dans les CFA, ce qui interroge sur le financement du reste à charge avec la collectivité territoriale.

Je souhaite faire part de la satisfaction que nous avons eue à travailler avec le ministère du Travail dans des conditions complexes, mais qui nous ont fait avancer et dans le cadre desquelles les CFA ont pu être réactifs. Il demeure néanmoins des points d'attention que nous devrions aborder afin d'essayer d'améliorer la situation.

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Pascal Picault, vice-président de la Fédération nationale des associations régionales de directeurs de centres de formation d'apprentis (FNADIR)

Il convient de s'interroger sur l'apprentissage que nous voulons demain en France. Doit-il être sanctuarisé pour permettre de passer les moments difficiles que nous vivons actuellement ? La formation par apprentissage présente des spécificités de coûts qu'il faut accepter. Un rapport IGAS-IGF rédigé avant la crise projette une baisse généralisée de 12 % des prises en charge sur trois ans, ce qui n'est pas tenable. Si ce scénario est retenu, nous ne pourrons garantir la qualité d'accueil et de suivi.

L'apprentissage fait partie intégrante du paysage éducatif français, avec cette belle opportunité de faire des réalités de l'entreprise le véritable sujet de développement personnel des apprentis. Cette médiation pédagogique que les CFA maîtrisent depuis près de cinquante ans entre éducation, réalité professionnelle et économie des entreprises doit se développer dans un nouveau contexte, qui intègre des moments inédits tels que ceux que nous vivons. Les CFA présentent la particularité de se situer à la frontière de la vie d'un salarié quand il est en entreprise et de la vie d'un étudiant quand il arrive chez nous. Nous acceptons cette dimension de médiation. Nous avons forcément une dimension sociale, ce qu'il convient d'intégrer à des modèles économiques qui continueront de faire vivre cette dimension.

Une meilleure acculturation réciproque doit émerger entre les services publics de l'emploi, qui intègrent les missions locales, et les CFA. Nous ne pouvons plus nous permettre d'avancer avec des visions et des positionnements différents. Des points de rencontre et de meilleures façons de travailler et de se comprendre doivent émerger. Les missions locales reprochent souvent aux CFA de ne pas accueillir les jeunes qu'elles leur envoient, ce qui s'explique par les contraintes existant autour de la certification et du diplôme, ce que nous devons parvenir à faire connaître. La prépa-apprentissage, qui permet de préparer le jeune issu des missions locales ou d'autres institutions à la vie professionnelle et à l'emploi, est une bonne mesure, bien qu'elle présente un problème concernant la couverture sociale, sur laquelle il semble que le Gouvernement soit en train de travailler. Actuellement, nous ignorons à qui adresser le document qui fonde la couverture sociale du jeune. En outre, en l'absence de Garantie Jeunes, aucune indemnité n'est prévue sur ce sas qui peut durer trois à quatre mois.

Deux mesures phares permettent de mieux passer la crise, à savoir la décision prise par le Gouvernement consistant à passer de trois à six mois l'intégration d'un CFA sans contrat, bien que tout ne soit pas réglé au niveau de la couverture sociale, et la possibilité de maintenir un jeune pendant six mois au maximum suite à une rupture dans le CFA. À mon sens, il s'agit de la mesure phare qui comble le reproche adressé à l'apprentissage. La réforme a permis de différencier la scolarité et le contrat de travail. Si le jeune perd son contrat d'apprentissage, nous disposons de six mois pour l'accompagner vers la recherche d'un nouveau contrat. Une faiblesse est néanmoins constatée sur la couverture et l'indemnité du jeune pendant cette phase de rupture et de maintien en CFA.

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Jean-Patrick Gille, président de l'Union nationale des missions locales (UNML)

Nous avons peu évoqué la situation sanitaire et psychologique des jeunes. Pour de nombreux apprentis, la vie a continué. Ils ont souvent maintenu le lien avec l'organisme de formation, mais parfois moins avec l'entreprise. Ils ont néanmoins gardé le salaire, ce qui crée des liens. D'autres jeunes, dont la vie s'inscrit dans la précarité, vivent des phénomènes de stop & go assez terribles.

Il convient d'aborder le sujet de l'illectronisme. Lorsque nous avons mis nos équipes en télétravail sous 48 heures, l'activité s'est poursuivie dans la mesure où le lien avec les conseillers s'opère largement via les réseaux sociaux et est digitalisée, même si nous ne nous inscrivons aucunement dans une politique de digitalisation des contacts. Notre travail réside dans le présentiel et l'accompagnement avec des rendez-vous réguliers et, entre-temps, de nombreux échanges informels et digitalisés avec les jeunes que nous suivons. Néanmoins, une fraction des jeunes n'est pas au point par manque de matériel ou de maîtrise des outils. Il convient aussi d'avoir le souci de cette situation particulière qu'ils vivent du point de vue psychologique. Certains jeunes peuvent se trouver dans une forme d'isolement.

L'efficacité ou l'efficience de nombreux dispositifs que nous pilotons est mesurée au regard des sorties positives, généralement avec un CDI ou un CDD de plus de six mois, mais il s'est longtemps agi de l'entrée en formation qualifiante. Celle-ci n'est désormais plus considérée comme une sortie positive, ce qui est dommageable au regard de l'effort indéniable fourni par le Gouvernement avec le Plan d'investissement dans les compétences. Cette situation aurait pu se comprendre voici quelques mois lorsqu'il était question de donner priorité à l'emploi à tout prix. Je pense qu'il convient de revenir à la situation antérieure. Il ne s'agit pas d'une décision claire du ministère du Travail, mais plutôt d'une question budgétaire.

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J'ai bien noté les soucis liés au financement des CFA résultant des préconisations du rapport de l'IGAS et la possible baisse de 12 % à laquelle il convient d'être vigilant, ainsi que la difficulté liée au versement des financements dédiés aux missions locales en temps et en heure, qui met en difficulté vos équilibres financiers.

J'aimerais que vous nous en disiez davantage sur les critères d'éligibilité au niveau des missions locales. Que faudrait-il revoir, simplifier et élargir ? Quelles seraient vos demandes précises en la matière ?

Sur l'apprentissage dans le secteur public, y a-t-il une ouverture des discussions sur le financement par le secteur public des besoins des apprentis ? Lors d'une précédente table ronde, nous évoquions les ruptures d'apprentissage. Vous faites part du maintien de l'apprenti durant six mois et de la poursuite de la formation, mais rencontrez-vous des abandons de la part des jeunes parce que la situation est difficile, qu'ils sont psychologiquement affaiblis ou en raison de difficultés familiales ?

Quel est le rapport des jeunes avec la boîte à outils mentionnée par Jean-Patrick Gille ? Est-elle accessible ? Avez-vous le sentiment que beaucoup de jeunes ne connaissent pas ces différents processus ? Comment pourrions-nous améliorer ce rapport des jeunes à ces dispositifs qui les concernent et qu'ils ignorent parfois, ou dont ils ne connaissent pas le chemin pour pouvoir en bénéficier ?

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Jean-Patrick Gille, président de l'Union nationale des missions locales (UNML)

S'agissant de la boîte à outils, il est clair que les jeunes ont assez bien identifié la Garantie Jeunes.

Nous nous sommes posé la question et avons réuni un collectif de jeunes qu'ils ont eux-mêmes intitulé « Ne nous mettez pas dans des cases ! », ce que nous tentons de faire en nous inscrivant dans des logiques de parcours. Je pense que nous en avons les moyens. Nous partons du diagnostic du jeune. La Garantie Jeunes a apporté un élément fondamental du point de vue pédagogique. La garantie d'une allocation pendant douze mois n'est pas anecdotique, mais la phase collective joue un rôle important, car elle permet un diagnostic, lequel n'est pas seulement individuel. Les approches sont beaucoup moins stigmatisantes, voire culpabilisantes. Telle est la véritable avancée de la Garantie Jeunes. Aujourd'hui, nous partons véritablement du diagnostic car le parcours n'est possible qu'en analysant le point de départ. L'idée est d'éviter d'être enfermé dans un tableur Excel de la meilleure gestion possible des mesures. Il s'agit d'une réelle interrogation, mais nous avons la faiblesse de croire que nous disposons de réponses, notamment dans cette dynamique de parcours.

(Mme Sandrine Aboubadra-Pauly prête serment)

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Sandrine Aboubadra-Pauly, déléguée générale de l'Union nationale des missions locales (UNML)

Nous avons très étroitement travaillé avec Pôle Emploi en faveur d'une approche beaucoup plus fine de la prise en compte du parcours et pour articuler au mieux l'ensemble des dispositifs, avec l'objectif de répondre aux besoins du jeune selon ses difficultés.

Au niveau de la Garantie Jeunes, les critères d'éligibilité sont assez stricts et empêchent certains jeunes en situation de précarité d'entrer dans le dispositif. L'un des freins consiste à apprécier la situation du jeune au regard du foyer fiscal lorsque celui-ci habite toujours chez ses parents. Nous proposons de prendre en compte la situation de précarité des jeunes indépendamment de la situation fiscale de leurs parents, y compris s'ils habitent chez eux.

Le deuxième élément consiste à réfléchir à l'assouplissement des critères de définition des Not in Education, Employment or Training (NEETs), en particulier pour les jeunes ayant effectué quelques heures d'intérim ou des CDD très courts juste avant leur possible entrée dans la Garantie Jeunes ; aujourd'hui, il n'est pas possible d'accéder à la Garantie Jeunes dans ce cas. Il s'agit de pouvoir prendre en compte jusqu'à dix heures par semaine de travail.

Le troisième point concerne une meilleure prise en compte des critères dans un parcours de qualification. La Garantie Jeunes est très axée sur l'accès à l'emploi. Ne sont prises en compte que les sorties en emploi et en apprentissage. Nous proposons d'ouvrir vers des sorties en formation qualifiante plus larges, voire des sorties autour de l'engagement et de la citoyenneté comme le service civique.

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Pascal Picault, vice-président de la Fédération nationale des associations régionales de directeurs de centres de formation d'apprentis (FNADIR)

Sur la question des ruptures, cette mesure permet aux CFA de disposer d'un cadre légal pour maintenir les jeunes décrocheurs en formation. En revanche, aucune indemnité n'est prévue durant cette phase de six mois. Il existe même un souci sur la déclaration de la couverture sociale. À mon sens, nous payons une mesure qui n'est pas aboutie. Je pense qu'il s'agit d'une question majeure pour les jeunes en CFA dans la mesure où suivre une formation implique des revenus pour financer les déplacements, l'hébergement et la restauration. Les jeunes qui ne vivent pas chez leurs parents et sont les plus démunis subissent une rupture nette. La mesure a réglé la question du statut et sécurisé la présence en CFA, mais n'a aucunement traité la problématique sociale du jeune décrocheur.

Cette situation vaut également pour l'entrée en formation jusqu'à six mois – contre trois mois avant. La couverture sociale est très fragile. Nous sommes invités à conserver le CERFA « P2S » et à l'envoyer en cas de problème, ce qui n'est pas audible pour les directeurs de CFA. Cette situation totalement insécurisante met directement en jeu la responsabilité du directeur et de ses équipes. Par conséquent, la question de la pédagogie est réglée, ce qui n'est pas le cas de l'aspect social.

La situation est quasiment identique en ce qui concerne la prépa-apprentissage. Dans le cadre des consortiums, les missions locales intervenantes peuvent mobiliser des Garanties Jeunes et assurer une couverture sociale et une indemnisation pour vivre le prépa-apprentissage. Des dispositifs ont été mis en place ; il était peut-être prévu de les affiner dans le temps, mais la crise est survenue. Aujourd'hui, nous constatons une faiblesse du système qui met des jeunes dehors.

Nous ne disposons pas d'étude précise, mais au cours du premier confinement, soit en mars, avril, mai et juin, alors que de nombreuses évaluations de certification ont lieu en juin et que les contrats perdurent éventuellement en juillet et en août, nous avons révélé entre 4 et 5 % de décrochage, voire 10 % selon les secteurs, notamment les plus touchés comme la restauration. Néanmoins, comme nous étions en fin de parcours, nous avons réussi à nous mobiliser pour maintenir la présence en CFA. Les entreprises ont globalement joué le jeu. La majorité des chefs d'entreprise ont préservé le contrat qui était à trois mois de son échéance. Ils ont eu la conscience de porter les apprentis jusqu'à l'examen, ce qui explique la réduction du chiffre évoqué, lequel n'est pas scientifique, mais a été établi au travers des remontées et des échanges intervenus via notre réseau social.

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Jean-Philippe Audrain, trésorier de la Fédération nationale des associations régionales de directeurs de centres de formation d'apprentis (FNADIR)

Nous avons rendez-vous le 16 novembre avec la directrice générale du CNFPT pour échanger sur la problématique des financements, le niveau de prise en charge, la facturation des restes à charge, l'équité de traitement sur les frais annexes, mais également les procédures administratives, puisque le CNFPT est finalement un douzième OPCO pour les CFA avec un fonctionnement différent.

Il convient également d'envisager la façon dont nous nous projetons et, en termes de partenariats, nous cherchons à développer l'apprentissage dans la fonction publique.

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Pascal Picault, vice-président de la Fédération nationale des associations régionales de directeurs de centres de formation d'apprentis (FNADIR)

La Région Hauts-de-France a décidé, quel que soit le niveau de l'apprenti, de combler les 50 % non couverts par le CNFPT. Par conséquent, nous assistons à l'installation d'un apprentissage qui n'a pas les mêmes chances d'une région à l'autre.

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Jean-Philippe Audrain, trésorier de la Fédération nationale des associations régionales de directeurs de centres de formation d'apprentis (FNADIR)

Précédemment, certaines Régions portaient totalement le coût de l'apprentissage dans le secteur public, et d'autres aucunement.

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Les critères d'éligibilité, la couverture en termes d'indemnités, la protection sociale pour les prépa-apprentissages et les six mois qui ont été mis en place figureront parmi nos recommandations. Il me paraît tout à fait essentiel que ces jeunes soient couverts pendant cette période, faute de quoi les inégalités sociales existantes se trouvent aggravées.

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Je constate une demande forte d'augmentation des crédits sur le dispositif de la Garantie Jeunes, qui a été votée lors du précédent quinquennat et qui est suivi dans les missions locales. Je crois qu'il est important de faire passer ce message, notamment si, dans le cadre de ce dispositif de suivi et d'accompagnement personnalisé, les missions locales ont besoin de locaux plus importants pour accueillir ces jeunes de façon satisfaisante et personnalisée.

Dans l'enquête effectué auprès des jeunes accueillis en mission locale, il est largement question de leur perte de formation ou d'emploi en contrat à durée déterminée, en intérim, en stage, en contrat d'apprentissage ou en alternance. Nous constatons une aggravation de la pauvreté et de la précarité, laquelle vaut également pour d'autres publics.

Nous avons récemment rédigé un rapport avec Nathalie Sarles sur l'accès à l'enseignement supérieur et sur Parcoursup. Nous constatons l'arrivée de dizaines de milliers de nouveaux étudiants dans l'enseignement supérieur, mais il se peut que nombre d'entre eux, en fonction du nouveau contexte sanitaire avec un reconfinement et des règles de distanciel, se trouvent dans la situation d'interrompre leurs études dans l'enseignement supérieur. Nous risquons de les retrouver dans les dispositifs que vous représentez au cours de cette audition.

Disposez-vous d'une estimation et d'une projection du nombre supplémentaire de jeunes susceptibles d'être accueillis dans les missions locales au cours des prochains mois ?

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Jean-Patrick Gille, président de l'Union nationale des missions locales (UNML)

Sincèrement, nous peinons à nous projeter et à diagnostiquer la situation. Tel était déjà le cas avant la crise sanitaire. Dans notre pays, nous ne disposons pas d'un diagnostic parfait de la situation de la jeunesse car les données sont très volatiles et les catégories de classement des jeunes sont poreuses et se chevauchent. En termes de volumétrie, nous peinons à estimer l'effet de la crise sanitaire.

Les tableaux évolutifs que nous avons établis montrent un effet de rattrapage et un surcroît d'activité, y compris en volumétrie. Néanmoins, il semblerait que la reprise très forte d'août et septembre soit en train de se tasser, ce qui peut être lié aux effets du reconfinement, mais la situation est très difficile à analyser.

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Outre le flux habituel et les nouveaux arrivants liés à la crise, j'ai été alertée sur mon territoire de cas de jeunes ayant bénéficié d'un CDD qui reviennent dans les missions locales. J'aurais souhaité obtenir quelques précisions de votre part à ce sujet.

S'agissant des travaux avec Pôle Emploi, j'ai été alertée localement sur le fait que la coordination entre les villes, les collectivités locales, Pôle Emploi et la mission locale n'est pas forcément évidente vis-à-vis des dispositifs proposés. Je souhaite savoir comment vous envisagez cette coordination localement.

Par ailleurs, comment les missions locales travaillent-elles avec l'ASE en fonction des départements ? Avez-vous des retours d'expérience à partager ?

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Jean-Patrick Gille, président de l'Union nationale des missions locales (UNML)

En temps normal, hors crise sanitaire, ce qui caractérise les missions locales par rapport à Pôle Emploi est qu'un jeune sur deux que nous suivons travaille à un moment ou à un autre. Nous accompagnons cette intermittence qui caractérise le marché de l'emploi des jeunes. Petit à petit, nous essayons de consolider leur parcours. Nous ne nous inscrivons pas dans un fonctionnement binaire. Ce que vous évoquez existait déjà auparavant, mais se développe puisque la précarité de l'emploi a considérablement augmenté avec la crise.

Notre mode de gestion consiste à agir selon les moyens dont nous disposons. Par exemple, dans le cadre du PACEA, nous avons la possibilité de verser aux jeunes une allocation interstitielle plafonnée à trois fois 450 euros annuels. Ce dispositif a fluctué selon le vote des députés. Nous avons connu des périodes au cours desquelles nous gérions 40 millions d'euros. Nous sommes retombés à 10 millions d'euros voici deux ans, puis nous sommes remontés à 40 millions d'euros, 60 millions d'euros et nous semblons nous diriger vers plus de 100 millions d'euros. Nous constatons que nous parvenons toujours à dépenser, mais nous gérons en fonction des moyens dont nous disposons.

Le rapport entre les missions locales et Pôle Emploi fait l'objet d'un travail depuis dix ans. Un processus de coordination, appelé « partenariat renforcé », est mis en place. Ce matin, j'ai tenu des visioconférences, département par département, rassemblant les directeurs des agences et des missions locales. Il s'agit d'une nouveauté. En revanche, une expérimentation a été votée consistant à déterminer des objectifs en commun sur les territoires, en sachant que certaines mesures sont uniquement portées par les missions locales, comme le PACEA et la Garantie Jeunes, et que d'autres sont communes, comme les emplois aidés. Toutefois, la représentation nationale peut s'interroger sur le fait de financer des dispositifs « jeunes » différents.

Le sujet de l'ASE a été peu traité, mais concerne notre actualité puisque nous avons travaillé avec les cabinets des divers ministères et finalisons un document relatif à l'amélioration des relations entre l'ASE et les missions locales, ce qui est démultiplié puisque chaque département dispose d'une marge de manœuvre. Je pense que nous pouvons apporter beaucoup sur la question de la sortie de l'ASE et des MNA qui seraient potentiellement éligibles à la Garantie Jeunes, ce qui est d'une telle complexité que nous ne le mettons pas en œuvre alors qu'il s'agit d'une piste tout à fait intéressante pour le bien des jeunes et des finances publiques.

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Le comité de suivi du plan de relance au niveau régional ne vous semble-t-il pas redondant, sachant que le CREFOP fait déjà office d'instance régionale réunissant l'ensemble des acteurs de l'orientation et de la formation professionnelle ?

La question de l'obligation de formation a été peu abordée. Ce dispositif fera monter en charge les missions locales sur le plan de l'accompagnement.

Concernant l'accompagnement intensif des jeunes (AIJ), qui est le dispositif d'accompagnement des jeunes de Pôle Emploi, dans les territoires où les rapports entre la mission locale et Pôle Emploi sont satisfaisants, les jeunes ayant besoin d'être accompagnés pour lever les freins périphériques sont facilement orientés vers les missions locales. Se pose la question de cet accompagnement double, qui n'est peut-être pas toujours lisible pour les jeunes.

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Jean-Patrick Gille, président de l'Union nationale des missions locales (UNML)

Il se trouve que je suis aussi conseiller régional. J'ai posé la question et il m'a été répondu que le comité de suivi est celui du CREFOP. Par conséquent, la question posée m'inquiète, mais il est important de désigner un lieu précis de suivi, au moins au lancement des dispositifs.

Je pense qu'il faut intégrer l'obligation de formation au niveau départemental. Nous sommes prêts depuis le 1er septembre, mais il semble que nos collègues de l'Éducation nationale, qui sont sûrement occupés par la crise sanitaire, ont procédé comme les années précédentes en annonçant la communication des listes des jeunes au 15 novembre. Il nous semblait qu'une loi changeait le regard sur les 16-18 ans avec une obligation de formation. Il s'agit d'un changement de paradigme total que nous avons l'impression de porter seuls. Cette obligation de formation ne fait l'objet d'aucune communication. L'instruction n'est parvenue que la semaine dernière. Au cours des textes, la tendance consiste à vider l'esprit de la loi de sa substance.

En tout état de cause, nous sommes mobilisés sur cette réforme majeure consistant en une obligation de formation entre 16 et 18 ans. Il appartient aux missions locales de s'assurer que celle-ci est respectée et, si nécessaire, de sensibiliser les conseils départementaux selon des modalités qui ne sont pas encore prévues. Nous sommes très favorables à ce dispositif et sommes prêts à travailler sur la pertinence et la permanence d'une Garantie Jeunes sur les 16-18 ans.

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Il s'agit du combat de Sylvie Charrière qui fait également partie de cette commission d'enquête.

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Jean-Patrick Gille, président de l'Union nationale des missions locales (UNML)

Il faut qu'un comité active cette question dans chaque département.

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Je m'interroge sur le nombre de décrocheurs au niveau des missions locales. Le risque est de constater l'arrivée d'un grand nombre d'invisibles dans le cadre de ruptures de contrat et d'étudiants qui mettront un terme à leurs études.

Au cours de la table ronde précédente, a été évoqué l'arrêt de contrats de deuxième année en apprentissage par certaines entreprises au profit des aides de 5 000 et 8 000 euros en première année. Avez-vous repéré ce phénomène ?

Le fonds de solidarité des apprentis a-t-il pu proposer des aides, notamment concernant de jeunes apprentis en difficulté, voire en grande précarité durant ce confinement ?

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Pascal Picault, vice-président de la Fédération nationale des associations régionales de directeurs de centres de formation d'apprentis (FNADIR)

Concernant les contrats stockés, dans le cadre de la bascule d'une première à une deuxième année, nous n'avons pas observé de remontée massive de la part de nos 500 adhérents. Nous l'avons craint à un moment, et le positionnement de la FNADIR consiste à ne pas engager les entreprises vers cet opportunisme. Les aides de 5 000 et 8 000 euros ont sauvé la rentrée. Nous nous demandons si les nouveaux entrants, qu'il s'agisse d'entreprises ou d'apprentis, continueront dans la voie de l'apprentissage. Nous nous donnons l'ambition de tout mettre en œuvre pour les conserver, mais peut-être conviendrait-il de réfléchir à une dégressivité de l'aide.

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Jean-Philippe Audrain, trésorier de la Fédération nationale des associations régionales de directeurs de centres de formation d'apprentis (FNADIR)

À la rentrée prochaine, les entreprises n'auront probablement pas retrouvé le niveau d'activité qu'elles ont quitté. Nous n'avons pas observé de remontées de la part des directeurs des CFA sur ce dysfonctionnement. En revanche, la fin de l'activité de certaines entreprises a eu pour effet la rupture du contrat entre la fin de la première année et le début de la deuxième année. Toutefois, nous n'avons pas observé de ruptures de contrat de fin de première année au profit de nouveaux contrats pour pouvoir bénéficier d'une aide.

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Sandrine Aboubadra-Pauly, déléguée générale de l'Union nationale des missions locales (UNML)

Nous ne disposons pas de données statistiques à ce stade sur le décrochage, mais il convient de distinguer les mineurs et les majeurs. Depuis plusieurs années, les missions locales voient la part des mineurs progresser dans les personnes qu'elles accompagnent. En revanche, ils n'affluent pas massivement dans les missions locales, ce qui est sans doute lié à l'absence totale de communication. Ni les jeunes ni les parents ne sont informés de cette obligation de formation entre 16 et 18 ans. Le ministère de l'Éducation nationale indique que le confinement n'aurait pas eu autant d'effet sur le décrochage des mineurs, ce qui reste à vérifier. L'estimation est de 60 000 jeunes décrocheurs mineurs par an, et nous atteindrions ce volume pour l'année 2020.

Les jeunes, notamment les étudiants, qui n'ont plus accès aux contrats leur permettant de financer leurs études et qui ne bénéficient pas de bourses, se retrouvent dans des situations très complexes, ce qui conduit à craindre la précarisation de nouveaux publics et leur arrivée massive dans les missions locales. L'activité de ces dernières s'est intensifiée suite au ralentissement des flux de sortie, dans la mesure où les solutions sont difficiles à trouver, mais également avec l'arrivée des nouveaux accueillis et le retour des CDD non prolongés.

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Je rappelle la date butoir du 19 novembre pour nous apporter vos précieuses contributions avec des cas incarnés permettant de rendre le rapport encore plus lisible et intéressant.

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Pascal Picault, vice-président de la Fédération nationale des associations régionales de directeurs de centres de formation d'apprentis (FNADIR)

Je pense que nous avons besoin de tous nous retrouver et de nous éclairer les uns les autres sur l'adéquation entre les dispositifs et les jeunes, ainsi que la suite d'insertion.

Par conséquent, je lance une invitation au président Gille dans le cadre d'une rencontre avec le bureau de la FNADIR, voire la création d'une convention permettant de mieux travailler les uns avec les autres.

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Jean-Patrick Gille, président de l'Union nationale des missions locales (UNML)

Je reçois très positivement cette invitation. Il se trouve que je suis président d'un CFA depuis quelques semaines. Je partage votre propos. Nous sommes en capacité d'opérer un suivi personnalisé de chacun des jeunes et d'apporter la bonne réponse au regard des crédits votés par le Parlement. Il nous appartient de mieux nous organiser.

Au cours de la première semaine de confinement, nous avons été capables d'être en contact avec 635 000 jeunes. Notre crainte s'est révélée en partie infondée. Durant le confinement, nous avons connu un flux hebdomadaire de contacts avec 400 000 jeunes, ce qui montre que nous avons des capacités.

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Je vous remercie de conclure sur cette idée de cohésion et de concertation, dont l'absence nous rend moins efficients dans une telle crise.

L'audition s'achève à 17 heures 20.

Membres présents ou excusés

Commission d'enquête pour mesurer et prévenir les effets de la crise du Covid-19 sur les enfants et la jeunesse

Réunion du jeudi 12 novembre 2020 à 15 heures 45

Présents. – Mme Marie-George Buffet, Mme Christine Cloarec-Le Nabour, Mme Fabienne Colboc, M. Régis Juanico, Mme Sandrine Mörch, Mme Florence Provendier