Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Réunion du mardi 14 décembre 2021 à 9h00

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • consultation
  • indépendantiste
  • nouméa
  • nouvelle-calédonie
  • référendum

La réunion

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La réunion débute à 9 heures.

Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet, présidente.

La Commission auditionne M. Sébastien Lecornu, ministre des Outre-mer.

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Monsieur le ministre des Outre-mer, au lendemain de la troisième consultation référendaire en Nouvelle-Calédonie, nous souhaitions vous entendre sur son résultat et sur la façon dont elle s'est passée. Nous avons le sentiment que les opérations de vote se sont déroulées dans un grand calme, qu'il n'y a eu ni incident ni trouble à l'ordre public.

Quelles sont maintenant votre feuille de route et les prochaines étapes, sachant que vous aviez réussi à négocier à Paris un calendrier s'étalant jusqu'en juin 2023 pour une quatrième consultation qui porterait sur une évolution du satut ? Avez-vous entamé des discussions, notamment avec les partis indépendantistes ? Le président du Congrès de la Nouvelle-Calédonie a déclaré dimanche qu'il ne reconnaissait pas le résultat de la troisième consultation. Certes, il est trop tôt pour tirer quelque conclusion que ce soit, mais comment décririez-vous la situation ?

Nous souhaitons également vous entendre sur la situation aux Antilles. Vous vous êtes rendu récemment en Guadeloupe et en Martinique mais vous n'aviez eu ni le temps ni l'occasion de nous faire un point sur ce déplacement.

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Sébastien Lecornu, ministre des Outre-mer

En ce qui concerne la Nouvelle-Calédonie, je profiterai de cette intervention pour rétablir quelques vérités, car depuis plusieurs jours certaines choses curieuses s'écrivent dans la presse.

Nous arrivons au terme de l'application de l'accord de Nouméa, qui ne prévoyait pas seulement des référendums. Il comportait également des enjeux de rééquilibrage, la reconnaissance de la culture kanake et de la coutume, la création ou la confirmation d'institutions, les fondements de la citoyenneté de la Nouvelle-Calédonie – car celle-ci est reconnue par notre République – et des outils permettant d'arriver à l'autodétermination, l'un des grands principes posés par les accords de Matignon-Oudinot de 1988. Le processus s'est déroulé sous le regard des Nations unies, puis l'accord de Nouméa est venu valider l'organisation de trois consultations, ou plutôt d'une consultation suivie de deux autres.

La première pouvait être déclenchée à la demande des membres du Congrès de la Nouvelle-Calédonie. Si personne ne la demandait, l'État se devait de l'organiser lui-même. C'est ce qui s'est produit au début du quinquennat, en 2018, sur la base d'une liste électorale spéciale – il s'agissait en quelque sorte d'un corps électoral « gelé ». Le principe en avait été validé par une révision constitutionnelle à la fin du second mandat de Jacques Chirac. Ce processus a eu différentes traductions juridiques, notamment des arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme.

Une deuxième consultation pouvait avoir lieu, au plus tard deux ans après la première, si un tiers des membres du Congrès en faisaient la demande. C'est ce qui a mené à l'organisation du référendum d'octobre 2020.

Lors de ces deux consultations, le corps électoral s'est révélé particulièrement clivé. Le « non » l'a emporté par deux fois, mais l'écart s'était réduit. L'année dernière, j'ai passé trois semaines en Nouvelle-Calédonie, ce qui m'a permis de comprendre que ce schéma binaire était devenu inéluctable à la fin de l'application de l'accord de Nouméa, alors même qu'il n'avait pas forcément présidé à l'élaboration de celui-ci, non plus d'ailleurs qu'à celle des accords de Matignon-Oudinot. Lors de conversations informelles, notamment dans le cadre du « format Leprédour », les différentes formations politiques reconnaissaient elles-mêmes qu'il fallait essayer de construire un autre avenir, mais que cela supposait d'arriver au terme de l'accord de Nouméa – d'aucuns disaient même que le plus vite serait le mieux.

Quelque temps après, une crise importante, passée relativement inaperçue à Paris, a occupé la Nouvelle-Calédonie pendant de longues semaines, concernant le choix d'un repreneur de l'usine de nickel du Sud. Ensuite, le territoire a traversé une longue phase d'instabilité politique : le gouvernement de Thierry Santa a été renversé et il a fallu plusieurs semaines avant que la Nouvelle-Calédonie se dote d'un nouveau gouvernement collégial, désormais présidé par l'indépendantiste Louis Mapou. Pour des raisons quasi mécaniques liées à ces deux éléments, aucune des formations politiques n'est suffisamment ressortie pour desserrer l'étau du oui et du non, en d'autres termes, pour éviter le troisième référendum.

Il ne nous restait donc plus qu'à étudier les conséquences juridiques et politiques de l'une et l'autre réponse. De fait, depuis la signature de l'accord de Nouméa, soit plus de vingt ans, on s'était beaucoup interrogé sur la question à poser – qui devait d'ailleurs être identique lors des trois consultations –, sur le corps électoral et sur le moment de la consultation, mais, bizarrement, jamais personne n'avait travaillé sur la signification que pourrait avoir le oui ou le non.

Un travail interministériel inédit, dont j'assumais le pilotage, a donc été mené dans ce sens sous l'autorité du Premier ministre. Les implications en droit du référendum ne concernaient pas seulement l'indépendance, elles s'étendaient aussi à des questions de traités commerciaux, d'adossement du franc pacifique à l'euro, de citoyenneté et de binationalité, autant de sujets complexes qui n'avaient pas forcément fait l'objet de demandes précises de la part des formations politiques, créant d'ailleurs beaucoup d'angoisse dans le pays, tant chez les investisseurs que chez les habitants, quels que soient leur statut et leur ancienneté sur le territoire. Il s'agissait de rappeler, tantôt le droit international, tantôt, tout simplement, la loi de la République.

Les formations politiques non indépendantistes ont vu dans cette démarche un retour puissant de l'État. Les familles politiques indépendantistes, l'Union calédonienne, qui avait fait le déplacement à Paris en juin dernier, ou l'Union nationale pour l'indépendance (UNI), qui demandaient un tel document depuis une dizaine d'années, soit pendant les deux quinquennats précédents de celui d'Emmanuel Macron, y ont vu une marque de respect : c'était la première fois que, dans le cadre de ce processus, reconnu comme étant de décolonisation par les Nations unies, l'État acceptait de considérer comme possible la perspective de l'indépendance.

Les rencontres à Paris, ont également traité de deux autres sujets. L'un était le cap à fixer pour une période de transition. De fait, en cas de troisième non, l'accord de Nouméa prévoit, par une formule assez mystérieuse, que « les partenaires politiques se réuniront pour examiner la situation ainsi créée ». Si cette formule a le mérite de prévoir un rendez-vous de façon assez souple, elle ne renvoie pas à un avenant relatif à l'après accord de Nouméa. Du reste, alors même que la nation française tout entière avait consenti, lors du référendum national de 1988, à abandonner une part de sa souveraineté pour permettre à ce corps électoral de décider, la mise en œuvre du oui, s'il l'emportait, n'avait pas fait non plus l'objet de discussions particulières, pendant les plus de vingt ans qui ont suivi la signature de l'accord.

Je suis frappé par la naïveté de nombreux commentaires que j'ai lus dans la presse nationale depuis quarante-huit heures. D'aucuns, y compris parmi les signataires de l'accord, considéraient que nous n'arriverions jamais jusqu'au troisième référendum. Il faut d'ailleurs bien voir que l'accord de Nouméa était censé permettre de trouver une solution bien avant le premier référendum, puis entre les premier et deuxième, ou entre les deuxième et troisième.

Quoi qu'il en soit, nous avons conçu une période de transition allant du lendemain du troisième référendum à la fin du mois de juin 2023. Cela permettait de créer à la fois les conditions de l'élection d'une assemblée constituante pour une Kanaky indépendante, en cas de victoire du oui, et, en cas d'un troisième non, celles d'une évolution statutaire pour le territoire – car de nombreuses dispositions relatives à la Nouvelle-Calédonie, dans la Constitution et dans les textes organiques, sont de nature transitoire. Ainsi, la prochaine législature sera de toute façon amenée à ouvrir de nouvelles perspectives pour le territoire.

L'autre sujet abordé lors des rencontres à Paris était la définition du moment où le référendum devait avoir lieu. Que n'ai-je lu ou entendu à ce propos depuis quarante-huit heures ! Seul le premier référendum était obligatoire, l'accord détaillant la technique permettant de le déclencher. À cet égard, il est intéressant de noter que les formations politiques indépendantistes ne l'ont jamais demandé de façon anticipée. Quant aux deux suivants, il fallait qu'un tiers du Congrès demande qu'ils soient organisés.

Pour les signataires de l'accord de Nouméa, il a toujours été clair qu'il était de la compétence de l'État de convoquer le corps électoral. D'une part, ce sont les ministres en charge qui prennent les décrets convoquant les électeurs, sur la base des lois votées par le Parlement. D'autre part, et surtout, il s'agissait de faire en sorte qu'aucun des deux camps – je n'aime pas le terme, mais il a le mérite d'être parlant – n'influe sur le calendrier électoral. Le consensus est le principe, mais quand ce consensus n'existe pas, il faut bien que la tierce partie à l'accord déclenche les opérations électorales. À cet égard, je rappelle qu'il n'y avait déjà pas de consensus sur la date du deuxième référendum, en 2020 – et je ne parle pas de l'utilisation du drapeau tricolore pendant la campagne électorale et autres sujets. Ainsi, il est faux de dire que, depuis l'accord de 1998, le processus a été caractérisé par un consensus permanent. C'est le principe vers lequel nous devons tendre, mais nous ne l'avons pas trouvé à chaque fois.

Pourquoi avons-nous choisi le 12 décembre ? D'abord, parce que le territoire connaît une énorme panne économique. Force est de constater que la Nouvelle-Calédonie pâtit d'une crise de confiance : un nombre non négligeable de personnes ont quitté le territoire depuis le premier référendum, de nombreux investisseurs ont stoppé leurs projets. Le dossier de l'usine du Sud a vraiment été un révélateur de cette fragilité. Et ce n'est pas comme si les deux autres usines de nickel du territoire jouissaient d'une santé de fer permettant d'envisager l'année 2022 avec sérénité…

Ensuite, les familles politiques indépendantistes ont demandé l'organisation du dernier référendum dès le début du mois d'avril, alors que c'étaient les familles loyalistes qui avaient demandé le deuxième référendum – comme quoi le dossier est beaucoup plus complexe qu'il n'y paraît. Les indépendantistes ont formulé la demande quarante-huit heures après l'ouverture de la période pendant laquelle ils pouvaient le faire. Ils n'étaient pas obligés de réagir aussi vite, mais il ressortait des conversations que j'avais eues avec eux il y a un an, et la presse locale s'en était fait l'écho, qu'ils étaient nombreux à souhaiter que le référendum ait lieu avant l'élection présidentielle.

Le 1er juin dernier, à Paris, nous avons acté que la date retenue n'était pas consensuelle. L'Union calédonienne ne souhaitait pas que la consultation ait lieu le 12 décembre. Le Parti de libération kanak (PALIKA), plus réservé, n'était pas présent à la réunion. Toutefois, dans la mesure où les familles loyalistes souhaitaient que le référendum ait lieu le plus vite possible, nous avons arrêté ce calendrier.

Ce que les observateurs ne disent pas, c'est que la campagne avait démarré au mois de juin, avant d'être interrompue à la rentrée par l'arrivée du covid-19 sur le territoire, jusque-là épargné grâce à un premier épisode de confinement. La campagne référendaire a donc été suspendue, mais elle l'a été aussi bien pour les militants du oui que pour ceux du non. S'est ensuite posée la question de savoir si l'on pouvait quand même tenir le référendum. Pour y répondre, nous nous sommes fondés sur les mêmes éléments d'appréciation que pour les autres scrutins qui se sont tenus dans l'Hexagone. Sans dire qu'un référendum d'autodétermination a quoi que ce soit à voir avec des élections régionales, je dis juste que, dans une démocratie, on tient les élections à l'heure prévue. Nous avons observé l'évolution de la situation sanitaire. Dimanche, le taux d'incidence était de 45 cas pour 100 000 habitants – il est désormais de 36. L'ensemble de la campagne officielle référendaire s'est donc déroulé avec un taux d'incidence inférieur à 100.

La campagne a repris pour les uns, mais pas pour les autres, car les formations politiques indépendantistes ont fait le choix de la non-participation. Pour autant – et je m'étonne que personne ne l'ait observé –, elles n'ont pas retiré la demande de référendum, ce qui nous aurait privés de la base légale permettant de convoquer les électeurs. Sans doute ont-elles eu des raisons de ne pas le faire. En outre, les maires indépendantistes, qui sont à la tête de dix-huit des trente-six communes concernées, et à qui il revient d'organiser le scrutin, n'ont pas souhaité boycotter celui-ci. Le boycott, je le rappelle, renvoie aux événements des années 1980. Il convient donc d'être prudent quand on évoque la question.

Enfin, dans une démocratie, il n'y a pas de vote obligatoire, et la faible participation n'entache pas la légitimité juridique du scrutin. Du reste, l'accord de Nouméa n'avait pas prévu de quorum.

Dimanche, à 7 heures du matin, tous les bureaux de vote ont donc ouvert. Du point de vue de la sécurité et de l'ordre public, la situation a été particulièrement calme. Un barrage, enregistré sur l'île des Pins aux alentours de 7 heures 30 ou 8 heures du matin, a été libéré dès 9 heures. Aucune obstruction n'a empêché les électeurs de se rendre dans les deux bureaux de vote de l'île. La situation est donc calme, à l'exception de la dépression Ruby, que le territoire subit depuis quelques heures. La vraie actualité en matière sécurité concerne donc la sécurité civile, puisque plusieurs milliers de nos concitoyens sont privés d'électricité.

Il s'agit maintenant d'imaginer l'après-référendum. Certains aspects doivent encore être affinés. Depuis mon arrivée sur place, j'ai multiplié les échanges informels – interrompus par la dépression tropicale, ils reprendront dès demain, de manière plus formelle et officielle. D'ores et déjà, trois temps se dessinent.

D'abord, il faudra faire face à plusieurs urgences.

La crise sanitaire va très vite nous rattraper. L'Hexagone fait face à une nouvelle vague, et l'on peut redouter qu'il en aille de même pour la Nouvelle-Calédonie. La question de la robustesse et de la permanence des soins dans le territoire va donc être de nouveau posée. C'est un sujet majeur que l'on ne peut traiter à l'économie, surtout dans un territoire qui a longtemps été « covid free ».

Le nickel constitue une autre urgence. Dans les semaines à venir, l'usine du Nord, exploitée par Glencore, sera confrontée à de vrais défis industriels, en dépit de l'engagement de ses équipes. Avec l'usine de la société Le Nickel (SLN) à Nouméa, elle devra faire l'objet, jusqu'au mois de juin, d'une vigilance et d'un accompagnement particuliers. C'est un sujet majeur que nous devons traiter avec les différentes autorités calédoniennes.

Troisième urgence, les finances du territoire sont dans un état extrêmement alarmant. Au 1er janvier, il manque 50 milliards de francs Pacifique pour boucler le budget de la Nouvelle-Calédonie. Les dépenses liées au covid-19 ont donné lieu à une subvention d'une dizaine de milliards de francs Pacifique versée par l'État ; pour le reste, celui-ci a accordé 28 milliards de francs Pacifique à la Nouvelle-Calédonie sous forme d'emprunt. Le territoire est confronté à des difficultés structurelles. Le haut-commissaire de la République – équivalent du préfet – a déjà arrêté le budget de la Nouvelle-Calédonie pour l'année 2021 ; si rien ne change, il devra en faire de même en 2022.

Tels sont les trois problèmes à régler en urgence d'ici à la fin du quinquennat et de la législature. Les conversations sont en cours avec les différentes autorités du pays.

Ensuite, dans un deuxième temps, il faudra dresser le bilan des accords, ou de cette séquence de décolonisation, comme les Nations unies la qualifient. Le président du Congrès, Roch Wamytan, s'est rendu récemment à New York pour rencontrer le Comité spécial des Vingt-Quatre (C24) des Nations unies. Voilà des années qu'il réclame un audit de la décolonisation : la fin de l'accord de Nouméa nous permettra d'y travailler sereinement.

Enfin, le troisième temps devra être consacré à la suite des discussions institutionnelles. Les formations politiques indépendantistes estiment qu'il convient d'attendre le début du prochain quinquennat pour travailler. Ce calendrier me convient d'autant plus que les grandes vacances vont bientôt commencer en Nouvelle-Calédonie et dureront deux mois. Par ailleurs, plusieurs formations indépendantistes doivent tenir leur congrès. On observe le désir, chez les uns et les autres, de retourner vers leur base. Je ne confonds pas vitesse et précipitation. Cela dit, il ne faudra pas perdre trop de temps après l'élection présidentielle et les élections législatives pour tracer un chemin nouveau. J'essaierai peut-être d'esquisser ce qu'il pourrait être en réponse à vos questions.

La Martinique et la Guadeloupe sont, quant à elles, confrontées à trois crises de nature différente, même si certains se sont empressés de raconter une histoire visant à enfermer les Antilles dans leur passé, notamment dans l'année 2009 – comme d'autres, du reste, essaient d'enfermer la Nouvelle-Calédonie dans les années 1980. Cherche-t-on à enfermer l'Hexagone dans son passé, comme se plaisent à le faire de nombreux responsables politiques et observateurs hexagonaux pour les territoires d'outre-mer ? Ces derniers ont surtout besoin qu'on les accompagne et qu'on les aide à se projeter vers l'avenir.

La première crise concerne la sécurité et l'ordre public. J'ai peu goûté les commentaires consistant à dire que le Gouvernement répondait aux difficultés en envoyant l'unité de recherche, d'assistance, d'intervention et de dissuasion (RAID) et le groupement d'intervention de la gendarmerie nationale (GIGN). C'est bien le grand banditisme qui a refait surface la nuit, en Guadeloupe et en Martinique, dans les premiers jours du conflit. Des personnes qui vident un chargeur entier de balles de 9 millimètres dans la portière d'une voiture de police dans le but d'assassiner un policier n'ont pas grand-chose à voir avec celles qui s'opposent à la vaccination obligatoire à l'hôpital.

La première réponse fut donc effectivement régalienne ; le garde des Sceaux, le ministre de l'Intérieur et moi-même l'assumons totalement. Depuis lors, le calme est revenu. Plus de 200 personnes ont été interpellées aux Antilles – plus de 120 en Guadeloupe, 80 environ en Martinique –, ce qui est considérable. Il s'agit souvent d'individus déjà connus des services de police et de gendarmerie pour trafic de drogue, violences contre les personnes ou encore atteintes aux biens. Les chiffres seront mis à jour prochainement par les procureurs de la République.

La deuxième crise est d'ordre social et concerne l'hôpital. C'est Olivier Véran qui est responsable de ce volet en sa qualité de ministre de tutelle des hôpitaux. L'obligation vaccinale pour les soignants libéraux et hospitaliers de Martinique et de Guadeloupe pose question. L'État employeur doit mener un dialogue social avec les médecins ainsi qu'avec les techniciens, infirmiers, aides-soignants, sages-femmes, etc. Un travail de grande ampleur est en cours. Les choses avancent à un rythme différent à la Martinique et en Guadeloupe.

La troisième crise, plus systémique et déjà bien connue, est celle qui touche les jeunes désœuvrés. Au début, les barrages étaient tenus par des soignants ou des pompiers qui ne voulaient pas être vaccinés, mais très rapidement des jeunes ont pris le relais. Des dispositifs d'accompagnement ont été engagés, mais il faut accélérer, et vous avez voté à cette fin des sommes importantes, qui ne sont pas toujours dépensées par les collectivités territoriales. Là aussi, il convient de différencier la Martinique et la Guadeloupe : les difficultés y ont des causes différentes. Une mission consacrée aux politiques publiques en faveur de la jeunesse est en cours.

Enfin, j'assume devant le Parlement la responsabilité pour ce qui concerne les compétences de l'État. De nombreuses revendications se sont fait jour à propos de la délicate question de l'eau en Guadeloupe – étant entendu que ce sont parfois les collectivités locales qui sont en cause. Malheureusement, la question a souvent fait l'objet de récupérations politiciennes. Il faut accélérer ; je le dis d'autant plus volontiers que nous avons consacré beaucoup d'argent à cet enjeu depuis 2017. Nous avons aussi amélioré la gouvernance et augmenté le nombre de réquisitions. Cela pose la question de l'accompagnement des collectivités territoriales dans le rétablissement de certains services publics.

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Comment comptez-vous associer le Parlement aux discussions que vous aurez durant les mois à venir avec les différents courants d'opinion sur l'avenir de la Nouvelle-Calédonie et l'éventualité de nouveaux scrutins ?

Aux Antilles, qu'en est-il de l'ordre public, des retombées économiques et du rétablissement des moyens de communication ainsi que des réparations des dommages commis ?

Bien qu'ils n'aient pas été compris comme tels, vos propos sur l'autonomie ont semblé répondre à une revendication locale. Ils mettaient pour ainsi dire les responsables locaux devant leurs responsabilités.

S'agissant de l'eau, où en sommes-nous de l'application du texte que nous avons voté, qui appelle des actions de la part des pouvoirs publics locaux ?

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Je vous félicite d'avoir exclu que les poursuites contre les violences commises lors de vos récents déplacements dans les Antilles puissent être abandonnées à la suite d'un accord entre le Gouvernement et les représentants des syndicats ou mouvements locaux. Nous sommes dans un État de droit, et seule une loi d'amnistie pourrait l'autoriser.

S'agissant des discussions et consultations à venir en Nouvelle-Calédonie, confirmez-vous que toute solution institutionnelle suppose nécessairement que la République, dans son ensemble, soit partie prenante à l'accord ?

Enfin, quel rôle joue la Nouvelle-Calédonie pour assurer notre présence dans le Pacifique, dans le contexte de la rivalité sino-américaine, dont nous avons récemment souffert en Australie ?

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Un dramatique incendie a touché un immeuble de la capitale, Saint-Denis, et plongé La Réunion dans la tristesse. Je salue le courage des sapeurs-pompiers, qui sont intervenus toute la nuit sur ce sinistre. Grâce à eux, des vies ont pu être sauvées. Avec plus d'une centaine de pompiers mobilisés, 110 logements ravagés par les flammes, et des centaines de personnes hébergées dans un gymnase, le drame est d'une ampleur jamais vue à La Réunion.

Des victimes sont malheureusement à déplorer dans cette tragédie, notamment des enfants. J'adresse de nouveau mes sincères condoléances aux familles endeuillées, et y associe notre commission. La Réunion est sous le choc. Les familles occupant cet immeuble ont tout perdu. Une vie entière partie en fumée ne laisse personne indifférent, et démontre encore une fois la fragilité de notre existence.

L'élan de solidarité qui s'exprime montre aussi que, dans le malheur, nous sommes capables de répondre présents. Les collectivités et les associations réagissent avec efficacité. Compte tenu de l'ampleur du drame, il est nécessaire de réduire la douleur en urgence. À travers le préfet, l'État suit et coordonne. Vous-même, monsieur le ministre, êtes intervenu pendant que les pompiers étaient toujours à pied d'œuvre.

Il faut à présent reconstruire la vie de ces centaines de personnes. Je demande donc à l'État de débloquer un fonds exceptionnel d'urgence, afin de reloger ces familles dans les meilleures conditions. Il faut tout mettre en œuvre, avec les bailleurs publics et privés, pour que le relogement s'effectue dans le quartier ou à proximité immédiate, afin de ne pas ajouter au chagrin la douleur de perdre des habitudes de vie et des repères sociaux. Les familles ont tout perdu : il faudra non seulement équiper leurs logements mais aussi leur fournir vêtements, nourriture et produits d'hygiène. Malgré l'urgence, je vous demande, non de répondre immédiatement mais, a minima, que le dossier soit étudié. Il faut rassurer les familles, pour qu'elles attendent sereinement.

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Monsieur Ratenon, je vous remercie d'avoir associé la commission des Lois et la représentation nationale à votre émotion, à la suite de ce drame effroyable.

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S'agissant des difficultés sanitaires et économiques des territoires d'outre-mer, en particulier aux Antilles, de nombreux élus se sont mobilisés dans le cadre de l'examen du projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dit 3DS, pour être associés plus étroitement à la gouvernance dans ces domaines. Est-il envisageable de créer un comité au niveau national, afin de suivre l'exécution du volet outre-mer du Ségur de la santé ? Il n'est pas suffisamment mis en avant, au regard de l'effort réalisé depuis l'état des lieux de juin 2021. Comment mieux associer la représentation nationale à ce plan de suivi ?

Les conditions d'organisation du référendum en Nouvelle-Calédonie méritent d'être saluées. Nous sommes heureux de constater la sérénité qui a prévalu durant le week-end. Le moment était sensible pour tous les Calédoniens et les Français qui ont suivi la consultation. Naturellement, son résultat est à relativiser du fait du fort taux d'abstention, en raison de la non-participation des indépendantistes. Comment envisagez-vous la suite ?

Vous l'avez dit, ces accords n'ont pas toujours été appliqués dans le consensus bien que la recherche d'un tel consensus ait guidé les travaux de la Nouvelle-Calédonie dans les trente dernières années. La non-participation conduit à se poser des questions juridiques et politiques quant à la suite à donner. Sur le plan juridique, les accords ayant valeur constitutionnelle, une révision constitutionnelle sera nécessaire demain : quelle période de transition prévoyez-vous ?

Pouvez-vous également nous rassurer sur la pleine effectivité des institutions jusqu'au prochain renouvellement ? Il faut que l'on sache qu'elles fonctionnent.

Le Président de la République et vous-même l'avez dit, il faudra prochainement repenser le statut de la Nouvelle-Calédonie. Quelles pistes l'État envisage-t-il, pour en redéfinir les institutions, en poursuivant le travail de réconciliation ? Comment mieux associer la société civile à la réflexion ?

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Dans les Antilles, comment évolue le taux de vaccination chez les soignants ? Dans quel délai pouvons-nous espérer une avancée significative en matière de santé ?

Quelle est, par ailleurs, l'incidence de la situation sanitaire sur le tourisme pour ces territoires ? Au moment où la crise semblait passée, de nouvelles difficultés ont surgi. Quelles prévisions peut-on faire dans ce domaine ?

S'agissant de la Nouvelle-Calédonie, vous avez détaillé le programme et les actions à venir. Nous sommes dans une période intermédiaire, avant la présidentielle. Quelles orientations gouvernementales, quelles négociations et quelles actions sont prévues pour préparer la suite ? Il s'agit d'éviter de perdre un temps précieux dans des relations entre des groupes, qui sont difficiles depuis des années. Nous espérons qu'elles s'amélioreront, et que le climat économique sera plus serein.

Je m'associe aux pensées de notre collègue Ratenon pour nos amis de La Réunion.

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Permettez-moi d'exprimer à mon tour toute mon émotion devant le terrible drame qui a touché Saint-Denis.

En Nouvelle-Calédonie, nous pouvons nous réjouir que le scrutin se soit bien déroulé. Non-participation ou boycott, c'est affaire d'état d'esprit, et chacun interprète les résultats en fonction de ses souhaits. En tout cas, on peut prendre acte d'une volonté générale de faire en sorte que tout se déroule bien.

La situation économique et sociale en Nouvelle-Calédonie révèle une grande fragilité, non seulement du fait de la situation sanitaire, mais aussi parce que les incertitudes liées au référendum avaient mis le territoire à l'arrêt. En prenant en compte le statut particulier de la Nouvelle-Calédonie, comment l'État compte-t-il accompagner le redémarrage de l'économie calédonienne ? Le nickel n'est pas seul en jeu.

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C'est de l'inquiétude que m'ont inspirée les résultats du référendum : le score de 90 % ne paraît pas révélateur, dans la mesure où une partie de la population a décidé de ne pas participer au scrutin. Certes, du point de vue de la loi, il est valable, il n'en reste pas moins que deux populations bien distinctes, avec des idées différentes, s'opposent dans l'archipel. Même si le ministre est relativement optimiste, je ne voudrais pas que nous retombions dans les travers que nous avions pu connaître, par exemple avec la crise d'Ouvéa. Je crains une guerre larvée.

Après l'inquiétude, j'ai compris que vous vouliez proposer ce que l'ancien garde des Sceaux, Jean-Jacques Urvoas, qui connaît bien le sujet, appelle un « État associé ». S'agit-il de pistes que vous avez déjà évoquées avec les acteurs concernés, ou seulement d'une réflexion ministérielle, alors qu'aucune avancée n'est encore possible sur le terrain ?

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Je veux également exprimer notre solidarité et notre amitié à ceux qui ont vu des proches disparaître ainsi qu'aux blessés, et saluer l'action des sapeurs-pompiers, en rappelant combien nous avons besoin de la sécurité civile dans nos territoires.

Au bout de trente-trois ans, est-on parvenu à la fin du processus des accords de Matignon et de Nouméa, pour entrer dans une nouvelle phase ? Le processus est tellement long que l'on a l'impression de ne pas en sortir. Peut-on écarter l'hypothèse d'un nouveau référendum dans ce cadre, et entrer dans une autre période, où l'on travaille à l'évolution institutionnelle et à créer d'autres relations ? Des processus aussi longs rendent les choses compliquées.

Il est dommage, s'agissant d'un processus démocratique, qu'une partie des acteurs directement concernés par cet enjeu d'avenir ne participent pas au scrutin. La non-participation à un scrutin démocratique n'est jamais une solution, quelles que soient les raisons que l'on invoque.

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Je m'associe aux propos de notre collègue Jean-Hugues Ratenon sur le drame qui s'est déroulé à La Réunion, et j'adresse mes condoléances et mon soutien aux familles endeuillées et meurtries. Même si nous sommes loin, ce drame nous touche, a fortiori lorsque des enfants figurent parmi les victimes.

Une dépression tropicale a contribué à lever les difficultés qu'a fait naître le résultat du troisième référendum. La consultation s'est effectivement bien déroulée – ce constat ne doit pas être écarté, car il y avait de grandes inquiétudes. L'État avait mobilisé des moyens considérables pour s'assurer que tout se passe bien. J'en remercie le ministre, et, plus largement, le Gouvernement.

Le scrutin a été particulier : que 96 % des votants aient opté pour le non ne signifie pas que 96 % des Calédoniens sont de cet avis. On est toujours, et de manière spectaculaire, sur la même summa divisio qu'en 2018 et 2020. Si l'on considère le nombre de votants, en valeur absolue, on s'aperçoit que les consignes ont été bien suivies par les électeurs, du oui comme du non. Au total, 75 000 personnes se sont déplacées pour voter non ; elles étaient 81 000 l'année dernière. Dans un contexte où le partenaire – l'adversaire lors du référendum – ne se mobilise pas, on pouvait craindre une abstention plus forte.

Le troisième référendum confirme donc ce que disait Calédonie ensemble : en 2020, contrairement aux partis non indépendantistes, nous n'avions pas demandé le référendum, car nous considérions que l'accord de Nouméa nous plaçait dans un corridor, qui s'est transformé un entonnoir. Le troisième référendum a montré que, malheureusement, on n'arrive pas à sortir d'une consultation binaire, matrice des trente-trois dernières années, et à trouver une solution d'avenir institutionnelle, durable et consensuelle. La consultation a toutefois eu lieu.

Par trois fois, les Calédoniens ont exprimé une volonté majoritaire – qui n'est pas ultramajoritaire – de maintenir la Nouvelle-Calédonie dans la République. Le Président de la République l'a rappelé dans son allocution, dimanche soir. Il l'a fait avec raison, en ouvrant le champ des possibles, du moins le champ des discussions qu'il faut mener.

Nous sommes effectivement dans une situation particulière, les indépendantistes refusant de participer et de discuter avec le Gouvernement tant que le résultat de l'élection présidentielle ne sera pas connu. Dans l'intervalle, la situation du secteur du nickel trouvera des traductions qui nécessiteront des discussions entre le Gouvernement et les formations politiques, notamment pour l'usine du Nord. C'est non seulement un outil industriel, mais aussi un outil politique essentiel de rééquilibrage, dont la pérennité et la survie sont des enjeux politiques. À votre invitation, monsieur le ministre, nous aurons demain l'occasion d'entrer plus en détail dans ce sujet. Il sera probablement difficile d'ouvrir ces discussions sur le plan politique avant l'élection présidentielle.

S'agissant du bilan de l'accord de Nouméa, au terme duquel on arrive, et de l'audit de la décolonisation, qui a été demandé depuis longtemps par le Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS), sur quelles bases comptez-vous proposer que les discussions s'ouvrent ? En 2018, un groupe de dialogue institué par le précédent Premier ministre, avait débouché de manière transpartisane sur un bilan, modeste par son volume, mais important politiquement, car il était partagé. L'audit a été demandé à l'ONU par Roch Wamytan. Comptez-vous donner corps à cette demande, en sollicitant l'ONU ou les experts qu'elle mandatera ? L'audit sera-t-il réalisé par les services du Gouvernement, les spécialistes qui ont déjà travaillé sur le sujet et, naturellement, les formations politiques ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La question institutionnelle n'est pas la seule qui se pose au territoire de Nouvelle-Calédonie. Dans son intervention, le Président de la République a abordé des thématiques diverses, telles que l'égalité entre les hommes et les femmes ou les sujets sociaux, comme la réduction des inégalités, qui sont très marquées en Nouvelle-Calédonie. Vous-même avez évoqué les questions économiques, notamment le nickel, mais il y a aussi le tourisme, la pisciculture, les ressources halieutiques ou l'avenir de la jeunesse calédonienne. Ces sujets ne doivent pas attendre la prochaine élection présidentielle pour être discutés.

Comment, au-delà des forces politiques, pourriez-vous associer la société civile – corps intermédiaires, syndicats, représentants du monde économique, des cultes – et faire que l'ensemble de la société calédonienne s'empare de ces sujets, qui dépassent les questions institutionnelles et dont il semble urgent de débattre ?

Sacha Houlié vous a interrogé sur la façon d'associer le Parlement. Le président de l'Assemblée nationale a créé une mission d'information sur l'avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie. Nos prédécesseurs avaient apporté leur contribution, par le biais de réflexions juridiques, pour tracer des perspectives. Comment pouvons-nous être utiles dans les derniers mois de cette législature ? Comment inscrire nos travaux, qui ont le mérite d'être transpartisans, dans la continuité de ces réflexions ?

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Sébastien Lecornu, ministre

Je salue tout d'abord Jean-Hugues Ratenon et l'ensemble des élus réunionnais. Un drame épouvantable s'est produit, dont la violence n'a pas d'égal. Nos pensées vont aux familles des personnes blessées et des cinq décédées. Près de 300 personnes sont en cours de relogement ou à reloger ; deux personnes sont en garde à vue – il reviendra à l'autorité judiciaire et au parquet de communiquer sur ce point. D'après mes informations, il ne s'agissait pas d'un habitat indigne, mais d'un immeuble datant de 2014. Les faits seront à établir par l'autorité judiciaire, ce qui n'enlèvera rien au deuil des familles des victimes et de la population réunionnaise.

L'objectif que j'ai fixé au préfet de La Réunion est de reloger l'ensemble des personnes d'ici à la fin de la semaine. Un gymnase a permis de les accueillir temporairement ; des solutions de relogement sont à l'étude, en lien avec la Croix-Rouge et les différentes collectivités territoriales. Les demandes de secours exceptionnel seront instruites. Le centre communal d'action sociale (CCAS) mène déjà certaines actions de solidarité. Nous pourrions être amenés à l'aider. Le dossier est naturellement suivi de près, et je compte avancer mon déplacement à La Réunion avant la fin du mois de décembre, pour me tenir aux côtés de celles et ceux qui sont en train de trouver des solutions. À ce titre, vous avez eu raison d'évoquer les pompiers, qui sont intervenus dans des conditions éprouvantes. Nous leur exprimons toute notre solidarité et notre reconnaissance.

Monsieur Houlié, s'agissant de l'association du Parlement, la mission d'information sur l'avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie aura un rôle important à jouer dans le bilan qui doit être dressé. Après tout, l'Assemblée a adopté rien de moins qu'une révision constitutionnelle et une loi organique ; elle a validé des restrictions au corps électoral extraordinaires au sens premier du terme. Il est donc logique mais aussi bienvenu qu'elle évalue les dispositions qu'elle a votées – à cet égard, je me suis agacé lors d'une récente séance de questions au Gouvernement face à l'amnésie dont certains semblent frappés. L'avenir de la Nouvelle-Calédonie n'est pas seulement l'affaire de l'exécutif. Certains articles s'interrogent : « Que fait le Président de la République ? Que fait le Gouvernement ? » Mais dans un territoire de la République comme la Nouvelle-Calédonie, la citoyenneté et la liberté relèvent de la loi. Le Parlement doit s'emparer du sujet, encore plus qu'il ne l'a fait ces dernières années. Il a désormais à imaginer un nouvel accord.

Quant à la situation aux Antilles, tous les barrages sont levés depuis plusieurs jours. L'évacuation du dernier barrage, celui de La Boucan, a demandé une préparation de la part des gendarmes en raison de sa particulière dangerosité – des bouteilles de gaz y étaient installées. Je crois savoir qu'une grande partie de la population nous est reconnaissante de l'action des forces de l'ordre.

En ce qui concerne le mot « autonomie », je l'assume. Les critiques qu'il a suscitées montrent une méconnaissance des outre-mer. Nombre d'observateurs et de candidats, à l'élection présidentielle ou au congrès Les Républicains, ont entretenu la confusion entre autonomie et indépendance. Dans ma chambre à Nouméa, je suis dans un pays qui jouit de l'autonomie. La députée de la Polynésie française, Maina Sage, est députée d'un territoire doté de l'autonomie. Il faut rétablir une culture ultramarine à Paris. Prétendre que l'autonomie signifie faire sécession avec la République est scandaleux, c'est insulter la Nouvelle-Calédonie ou la Polynésie française. L'autonomie, c'est la décentralisation poussée à l'extrême. J'ai jeté ce pavé dans la mare, car cela permettait de déplacer le débat sur le terrain, ô combien noble, de la responsabilité de l'action politique. J'ai parlé d'autonomie sept à huit secondes dans une intervention de quinze minutes sur la chaîne Guadeloupe première mais la mayonnaise nationale est montée au-delà de ce que j'avais pu imaginer. Mes propos ont permis à chacun de réfléchir et ont trouvé un écho spectaculaire auprès de l'opinion, si j'en crois les sondages.

Madame Vichnievsky, vous avez raison, nous sommes dans un État de droit. C'est ce que j'ai tenté de rappeler avec fermeté en Martinique et en Guadeloupe. Pourquoi la situation est-elle différente dans les deux îles ? En Martinique, les syndicalistes sont particulièrement durs dans la discussion, que ce soit avec l'État, la direction de l'hôpital, le préfet ou les élus mais ils portent des revendications syndicales. Lorsqu'il se présente devant moi, M. Élie Domota demande premièrement l'abrogation de la disposition instituant l'obligation vaccinale, deuxièmement la suspension des poursuites judiciaires contre les personnes arrêtées au cours des quinze jours précédents ainsi qu'une amnistie et troisièmement plusieurs décisions qui concernent les collectivités territoriales. Alors, oui l'entretien a duré douze minutes mais il fallait réaffirmer cette vérité : dans un État de droit, on ne peut pas faire n'importe quoi. Les personnes visées ne sont pas des syndicalistes arrêtés à la fin d'une manifestation, mais des gens connus des services de police et de la justice ayant tenté d'assassiner des policiers et des gendarmes. La Guadeloupe, la Martinique, c'est la République, c'est la France, donc l'État de droit s'y applique, ce à quoi 99 % de la population adhère évidemment. Il n'était pas question de prêter le flanc à la récupération du LKP et de M. Domota ou de ses amis qui, soit dit en passant, n'ont toujours pas condamné les violences. Je n'ai pas l'intention d'incarner un État faible : les choses vont mieux lorsque la République tient bon.

La place de la Nouvelle-Calédonie dans le Pacifique est un sujet clé. L'idée selon laquelle la Nouvelle-Calédonie est une chance, un poste avancé a fait florès à travers les tribunes et les tweets mais il faut tendre le miroir aux pays du Pacifique, comme le Président de la République l'avait fait dans ses discours à New Delhi et Sydney après avoir livré le regard des Français et des Européens. Il se passe beaucoup de choses dans le Pacifique, singulièrement dans le Pacifique nord où manœuvrent les trois plus grandes marines de guerre du monde – russe, chinoise et américaine ; où la pression démographique, chinoise notamment, de plus en plus forte, pèse sur les ressources halieutiques. L'Océanie est un continent d'eau, la terre y est rare. L'insularité est source de richesse mais aussi d'interdépendance – les compagnies aériennes, les compagnies maritimes. Le covid a accentué nombre de fragilités. L'accès au foncier est convoité, ce qui accroît les risques d'ingérence étrangère.

Une initiative telle que le One Planet Summit est d'autant plus légitime que nous pouvons témoigner d'une expérience douloureuse de résilience climatique. Outre le blanchissement de la barrière corallienne, les dépressions telles que nous venons d'en connaître sur le Caillou, sont de plus en plus fréquentes et de plus en plus violentes – les anciens le disent. C'est une réalité. Si vous allez à la Baie des citrons ou à l'anse Vata à Nouméa, vous constatez l'avancée du front de mer, l'érosion du trait de côte. Les territoires d'outre-mer sont aux avant-postes en matière de diplomatie environnementale et climatique.

La présence de nos forces armées en Nouvelle-Calédonie a pour but premier de garantir l'action de l'État en mer, autrement dit l'intégrité de nos eaux territoriales et de la zone économique exclusive (ZEE). Sur les photographies aériennes du Pacifique, vous voyez des nuées de bateaux de pêche et deux grandes étendues bleues immaculées : la ZEE polynésienne et la ZEE de Nouvelle-Calédonie ainsi que de Wallis-et-Futuna, cette dernière étant sous la garde des forces armées de la Nouvelle-Calédonie (FANC). Rares sont les pays dans la zone à pouvoir en dire autant.

Depuis le Brexit, la France est le dernier pays de l'Union européenne présent dans la zone. Tous les pays du Commonwealth sont sortis de l'Union avec le Royaume-Uni.

La place de la Nouvelle-Calédonie dans le Pacifique ne tient pas seulement à la présence incontournable de nos forces armées. L'université de la Nouvelle-Calédonie aura un rôle à jouer dans les années qui viennent. Elle pourrait devenir, avec le concours des Polynésiens, une grande université d'Océanie. L'université de la Polynésie française effectue déjà un travail remarquable en matière de recherche marine, de même que le centre de recherches insulaires et observatoire de l'environnement (CRIOBE). Un bateau de guerre mouillant dans la rade de Nouméa ne suffit pas à illustrer les ressources de ces territoires, il faut mieux faire connaître leur étendue.

Madame Sage, le Ségur de la santé fera l'objet d'un point, non pas national, mais par territoire. Je peux toutefois, si besoin, me faire votre porte-parole auprès du cabinet du ministre des Solidarités et de la santé.

Le mot d'ordre de la composante politique du FLNKS de ne pas participer au scrutin a été suivi, mais la carte de l'abstention dimanche dernier correspond aux cartes représentant le oui et le non lors des deux premiers scrutins. De manière un peu schématique, dans les bureaux de vote où le oui totalisait 95 %, la participation atteint 5 % ; là où le non totalisait 90 %, la participation est proche de 90 %. Selon moi, les trois scrutins disent la même chose. D'une part, par trois fois, le non l'emporte, donc par trois fois le choix est fait d'inscrire la Nouvelle-Calédonie dans la République française et de refuser l'accession à la pleine souveraineté – le Président de la République en a pris acte. D'autre part, les scrutins marquent une division terrible du corps électoral. Le Gouvernement ne considère pas le résultat de dimanche isolément, il analyse ceux des trois consultations. Cela permet de s'extraire du débat sur la sincérité du scrutin, laquelle a été attestée par le président de la commission de contrôle, Francis Lamy. Il appartiendra au Conseil d'État et aux Nations unies, s'ils sont saisis, de se prononcer.

Voilà pour le débat juridique. Pour ce qui est du débat politique et moral, il est rare, dans un processus de décolonisation, d'organiser trois référendums, l'un obligatoire et les deux autres non. Jacques Lafleur avait facilement accédé en 1998 à ce qui était une demande des indépendantistes, car personne ne pensait que le troisième référendum se tiendrait.

Je peux le dire maintenant, le scénario qui aurait pu déclencher des violences était celui d'un score très serré. À aucun moment, les signataires de l'accord – j'ai été en contact avec nombre d'entre eux ces derniers jours – n'ont imaginé que les marges seraient aussi étroites.

Il ne faut pas se laisser impressionner par le score de 96 %. Il faut considérer les trois non qui fixent le cadre républicain dans lequel s'inscrit la Nouvelle-Calédonie, là où, monsieur Molac, le statut d'État associé suppose la pleine souveraineté. En revanche, l'autonomie nouvelle du territoire reste complètement à imaginer.

Les travaux sur la Nouvelle-Calédonie pourront évidemment avoir des effets dans d'autres territoires d'outre-mer – je vois Mme Sage sourire.

Madame Dubré-Chirat, en ce qui concerne le rythme de vaccination aux Antilles, je vous renvoie vers Olivier Véran, mais, d'après les chiffres en ma possession, entre 100 et 150 soignants se mettent en règle chaque semaine. Les groupes d'écoute et de dialogue que nous avons instaurés s'adressent aussi aux soignants et aux personnels hospitaliers au sens large qui, en raison de leurs convictions personnelles, ne se feront jamais vacciner pour les accompagner dans leur projet de reconversion professionnelle grâce à l'appui d'une cellule d'orientation et d'appui à la mobilité. Dans un territoire insulaire de 300 000 habitants, la mobilité professionnelle n'obéit pas aux mêmes règles que dans l'Eure.

En matière de tourisme, les choses reviennent à la normale avec un énorme bémol : la situation sanitaire. Les taux d'incidence sont très élevés et la situation à l'hôpital toujours tendue en Martinique. Certains nous reprochent d'avoir cédé en reportant du 15 novembre au 31 décembre l'échéance pour l'application de l'obligation vaccinale mais n'oublions pas que la Guyane et la Martinique sont toujours soumises à l'état d'urgence sanitaire. Le passe sanitaire aussi doit aider à retrouver une activité normale dans ce domaine.

Monsieur Vuilletet, le redémarrage économique passe par le nickel dont des milliers de familles dépendent. Les usines de nickel sont souvent perçues comme des outils de rééquilibrage politique et institutionnel, mais ce sont d'abord des emplois pour les Calédoniens, kanaks ou non. Nous suivons de près la situation de la SLN, sur laquelle le Parlement est parfois appelé à se prononcer.

La stratégie « covid free » a porté ses fruits puisque pendant des mois, la Nouvelle-Calédonie n'a connu aucun cas de covid. Mais le prix à payer pour l'économie touristique est énorme. La fermeture des frontières est ennuyeuse pour l'île des Pins, bijou de l'offre touristique de luxe dans cette partie du Pacifique, dont les Japonais étaient devenus friands pour leur voyage de noces. Le redémarrage touristique est indispensable pour l'économie.

Ensuite, il faut imaginer une relance mais encore faut-il qu'il y ait des crédits pour la financer. Nous en revenons aux 50 milliards de francs Pacifique qui manquent pour boucler le budget de l'année prochaine du pays, dans le cadre de l'autonomie. Je poursuis mes consultations politiques avec le président du gouvernement collégial, messieurs Louis Mapou, le président du congrès, Roch Wamytan, les trois présidents de province – messieurs Jacques Lalié, Paul Néaoutyine, madame Sonia Backès –, les membres du congrès et le bloc communal parce que, comme partout et plus encore dans l'archipel, la commande publique est essentielle pour permettre la relance, sans être suffisante toutefois, raison pour laquelle le monde économique est aussi sollicité. Fort de la clarification institutionnelle intervenue, celui-ci demande désormais de la visibilité sur la relance.

Le redémarrage économique, qui est entre les mains des autorités calédoniennes, est un sujet central. Je souhaite qu'il soit plus fréquemment abordé, de même que l'agriculture ou encore l'énergie. Si le PIB néocalédonien est plus étoffé que celui des pays alentour, c'est parce que les transferts de l'État contribuent à la dynamique économique. Ce n'est pas faire offense au territoire que de le dire : on doit pouvoir faire mieux – c'est un euphémisme ! Au-delà des déclarations d'amour un peu simplistes, dès lors que par trois fois, les Calédoniens ont dit oui au maintien dans la République, il s'agit de savoir comment assurer la stabilité et la prospérité du territoire et comment résorber les inégalités. Alors que le nickel a bénéficié d'importants investissements, certaines tribus n'ont toujours pas accès à l'eau potable. Dès lors, on ne peut pas en vouloir à la population de s'interroger. Il faudra s'intéresser à ce sujet dans le bilan des accords.

En ce qui concerne le bilan, il serait intéressant que le Parlement en dresse un. Quant aux Nations unies, je m'y rendrai au début de l'année 2022 pour rencontrer les différents partenaires du C24 : il est normal que l'État rende compte du processus qu'il a organisé.

La question se pose aussi du rôle des formations politiques du pays dans l'évaluation qui sera faite. Enfin, madame la présidente a raison, la société civile doit continuer à participer. La démarche d'écoute profonde que j'avais lancée l'année dernière a abouti à un résultat très intéressant – certains en doutaient, ce que je peux comprendre car les exercices de ce genre peuvent ne pas fonctionner. Elle a permis de donner la parole à un grand nombre de personnes, notamment des jeunes – le Caillou est majoritairement peuplé de personnes âgées moins de 30 ans. Il faudra veiller à donner la parole à la jeunesse et à l'organiser avec souplesse ; si nous ne le faisons pas, celle-ci la prendra.

L'égalité entre les hommes et les femmes prend un relief particulier puisque la Nouvelle-Calédonie détient le triste record des violences faites aux femmes. Les états généraux de la justice, lancés par le garde des Sceaux, ont donné lieu à un travail intéressant associant le procureur de la République, le président du tribunal ainsi que les forces de police et de gendarmerie, qui permettra sans doute de libérer la parole. Le Sénat coutumier s'est exprimé sur le sujet, de même que plusieurs responsables politiques. Le premier combat consiste à aider les victimes à se reconnaître comme telles. On part de loin. Des associations sont mobilisées et font un travail remarquable. Nous devons continuer à les accompagner.

Monsieur Dunoyer, le seul point sur lequel je ne vous ai pas répondu est la sécurité. L'État répond présent. Je remercie les policiers et les gendarmes qui sont parfois loin de chez eux depuis un certain temps. Des moyens importants sont mobilisés, ce qui n'est pas sans incidence financière pour l'État, mais c'est la moindre des choses. Entre les Antilles et la Nouvelle-Calédonie, une large part de nos forces mobiles sont en outre-mer. Il est utile de le rappeler en cette période préélectorale où il est de bon ton de claironner que les outre-mer sont abandonnés. Il n'en est rien : les effectifs ont augmenté en Nouvelle-Calédonie ces dernières années comme dans tous les territoires d'outre-mer, y compris à Mayotte. En cas de rendez-vous important – Nouvelle-Calédonie – ou de coup dur – les Antilles –, les renforts arrivent immédiatement de métropole et il faut le saluer.

Monsieur Rebeyrotte, l'accord de Nouméa prend fin mais cela ne signifie que tout s'écroule ; c'est aussi le commencement d'autre chose, raison pour laquelle une phase de transition est prévue – je vous renvoie à la déclaration du 1er juin à l'issue de la session d'échanges et de travail autour de l'avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie. Malgré tout, les dispositions de l'accord deviennent caduques – il en est ainsi du recours au référendum. En revanche, nous pouvons nous appuyer sur les acquis de l'accord de Nouméa, notamment en matière d'institutions. Le principe d'irréversibilité n'empêche pas d'envisager des évolutions. Certains s'élèvent ici pour réclamer plus de pouvoirs pour les provinces ou pour mettre fin à la collégialité du gouvernement – je n'ai pas, à ce stade, d'avis sur le sujet. Ce sont des questions importantes qui demandent du temps pour y répondre et, en la matière, je ne confonds pas vitesse et précipitation. Il a fallu dix ans pour que l'accord soit signé.

Faisons le bilan et mettons de côté les sujets qui peuvent tendre, irriter ou polluer les discussions – le nickel, les finances locales ou la gestion de la crise sanitaire. Ainsi, au lendemain des congrès des formations politiques indépendantistes et loyalistes parfois, puis au lendemain de l'élection présidentielle, les discussions reprendront, ce qui n'empêche pas, dans cette attente, de travailler de manière informelle, comme je le fais depuis quarante-huit heures.

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Je vous remercie monsieur le ministre. Nous serons heureux de vous entendre de nouveau assez rapidement tant l'actualité ultramarine est dense.

La réunion se termine à 10 h 30.

Informations relatives à la commission

La commission nomme M. Charles de Courson, membre du groupe de travail visant à étudier les suites législatives éventuelles à donner au rapport de la commission indépendante sur les abus sexuels dans l'Église.

Sont nommés coordonnateurs du groupe de travail : M. Alain Tourret et M. Pierre Morel-À-l'Huissier.

Membres présents ou excusés

Présents. - Mme Caroline Abadie, Mme Yaël Braun-Pivet, Mme Nicole Dubré-Chirat, M. Philippe Dunoyer, M. Jean-Michel Fauvergue, Mme Camille Galliard-Minier, M. Philippe Gosselin, M. Guillaume Gouffier-Cha, M. Sacha Houlié, M. Guillaume Larrivé, M. Pierre Morel-À-L'Huissier, M. Jean-Pierre Pont, M. Rémy Rebeyrotte, Mme Maina Sage, M. Jean Terlier, M. Alain Tourret, Mme Laurence Vichnievsky, M. Guillaume Vuilletet

Excusés. - Mme Marie-George Buffet, M. Éric Ciotti, M. Alexis Corbière, M. Jean-François Eliaou, Mme Paula Forteza, M. Mansour Kamardine, M. Matthieu Orphelin

Assistaient également à la réunion. - M. Moetai Brotherson, M. Paul Molac, M. Jean-Hugues Ratenon