Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du mercredi 6 octobre 2021 à 17h00

Résumé de la réunion

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  • ferroviaire
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La réunion

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La Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a auditionné M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué chargé des transports, sur les crédits relatifs aux transports de la mission « Écologie, développement et mobilités durables » du projet de loi de finances pour 2022 et l'actualité du secteur des transports.

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Nous avons le grand plaisir d'accueillir M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué chargé des transports, pour qu'il nous présente les crédits du projet de loi de finances pour 2022 dédiés aux transports.

Monsieur le ministre, merci beaucoup d'avoir accepté notre invitation à cette audition qui doit aussi nous permettre d'évoquer, au-delà de l'évolution des crédits pour 2022, un certain nombre de sujets d'actualité dans le domaine des transports. Je ne citerai que l'évolution et les investissements dans le domaine ferroviaire : l'ouverture à la concurrence des lignes régionales, éventuellement la perspective du projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dit « 3DS », qui nous permettrait d'avoir votre avis sur le transfert des gares aux collectivités locales. J'ajouterai la mise en œuvre de la loi d'orientation des mobilités (LOM), le plan de soutien au fret ferroviaire, le plan Vélo, l'avenir du transport aérien, le déploiement des bornes de recharge pour les véhicules électriques, la création de l'Agence de l'innovation pour les transports, autant de sujets qui ne manqueront pas, j'en suis sûre, de susciter des questions de la part de mes collègues.

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Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué chargé des transports

Je veux d'abord vous dire mon plaisir de vous retrouver pour cette traditionnelle revue des crédits du projet loi de finances concernant le ministère des transports, qui me permettra à la fois de vous présenter formellement le budget dans ses grandes lignes avant d'entrer dans le détail des questions et de vous dire un mot du bilan de cette législature.

Ce budget est encore en hausse car nos ambitions pour les transports ne faiblissent pas. Vous le savez, nous connaissons des transformations technologiques très rapides, notamment avec la décarbonation du parc automobile, celle de l'aviation qui s'engage, tandis que le développement du ferroviaire et des transports du quotidien se poursuit – nous étions ce matin avec le Premier ministre à Tourcoing pour annoncer les lauréats du quatrième appel à projets de transports collectifs en site propre (TCSP).

Ces transformations exigent des investissements massifs, d'où un budget pour 2022 d'environ 14 milliards d'euros, un niveau de dépenses élevé, cohérent avec les objectifs des lois que vous avez votées et que vous avez citées, notamment la LOM et la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite « Climat et résilience ».

Ce budget augmente pour chaque programme : de 4 % pour le programme 203 « Infrastructures et services de transport », 5 % pour le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », 2,5 % pour l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) et 20 % pour le programme 205 « Affaires maritimes ».

Doté de 3,8 milliards d'euros, le programme 203 progresse de 4 %. Il se caractérise par une priorité marquée donnée au ferroviaire afin de soutenir à la fois la régénération du réseau, le développement du fret ferroviaire avec la pérennisation – et c'est une première – des aides à l'exploitation – réduction des péages, aide à la pince et soutien de secteurs qui ne répondent pas tout à fait à des logiques de marché, notamment le transport combiné et le wagon isolé.

Au titre du programme 203, nous accompagnons la mise en place de l'Agence de l'innovation pour les transports, qui a déjà des effets bénéfiques, notamment pour accompagner les innovations dites de rupture autour du train léger, de la digitalisation du fret et de bien d'autres sujets.

Doté de 3,47 milliards d'euros, le budget de l'AFITF augmente de 2,5 %, suivant une trajectoire cohérente avec la LOM. La crise de la covid-19 ayant un impact sur les ressources affectées, il sera certainement nécessaire, comme l'an dernier, d'inscrire 250 millions d'euros en loi de finances rectificative, fin 2021.

Le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » augmente de 5 % pour atteindre 2,38 milliards d'euros. Le secteur aérien n'est pas sorti de sa crise ; nous maintenons cependant des programmes d'investissement de navigation aérienne ambitieux, tout en faisant porter un effort certain sur la maîtrise des dépenses courantes. Ce budget s'accompagne d'un recours élevé à l'emprunt, estimé à 709 millions d'euros cette année, portant le niveau de la dette à 3,3 milliards d'euros fin 2022, étant entendu que le budget annexe amorcerait un désendettement à compter de 2023.

Le programme 205 est doté de 192 millions d'euros. Nous avons engagé pendant la crise des moyens non négligeables en faveur de Brittany Ferries, en instaurant notamment un dispositif important, pérennisé pour trois ans, de remboursement de la part salariale des cotisations sociales pour les lignes de transport de passagers soumises à la concurrence internationale. C'est un effort massif de soutien à la marine marchande, en complément de l'évolution du suramortissement des navires propres prévu par l'article 8 du projet de loi de finances.pour 2022.

Le plan de relance permet d'apporter, en 2022, 26 millions d'euros au programme 203 « Infrastructures et services de transport », tous modes confondus, plus de 750 millions d'euros au budget de l'AFITF, dont 124 millions d'euros pour Lyon-Turin et le canal Seine-Nord Europe ; 1,67 milliard d'euros est octroyé à SNCF Réseau au titre de la dotation en recapitalisation adoptée en loi de finances initiale 2021 et 186 millions d'euros sont consacrés à la recherche aéronautique destinée à décarboner le secteur aérien.

S'agissant de l'exécution des crédits, le plan de relance a déjà montré son efficacité cette année. Ainsi, sur les neuf premiers mois de 2021, nous avons engagé 85 % des crédits dédiés aux transports terrestres, hors automobile, soit 5,8 milliards d'euros sur les 6,8 milliards votés, et plus de 87 % du 1,5 milliard dédié à la recherche et l'aéronautique. Voilà qui me permet de faire la transition avec le bilan.

Je ne reviens pas sur la situation des transports en 2017 mais vous vous souvenez de l'état du réseau ferroviaire, âgé en moyenne de trente ans et formé de 9 000 kilomètres de petites lignes ferroviaires qui menaçaient d'être fermées. La voiture électrique pesait 1 % des ventes par an contre 17 % aujourd'hui et l'avion décarboné n'était encore qu'une idée. Depuis, nous avons investi et modernisé les transports. Le Parlement a été particulièrement mobilisé sur des textes qui donnent déjà des résultats concrets, notamment la loi pour un nouveau pacte ferroviaire, la loi d'orientation des mobilités et la loi « Climat et résilience ».

Le pacte ferroviaire s'exerce désormais pleinement. En 2022, nous aurons achevé la reprise des 35 milliards d'euros de dette de la SNCF : 10 milliards seront repris l'année prochaine après 25 milliards en 2020, auxquels s'ajoutent 4 milliards de recapitalisation à l'occasion du plan de relance. Pour régénérer les voies, nous sanctuarisons 3 milliards d'euros par an dans le contrat de performance de SNCF Réseau qui a vocation à être signé début 2022. Au total, au cours du quinquennat, 60 % des investissements ont porté sur le mode ferroviaire. Notons que les premières lignes TER s'ouvrent à la concurrence en région Provence-Alpes-Côte d'Azur, qui a d'ores et déjà annoncé les attributaires pressentis.

Dix-huit mois après sa promulgation, 90 % des mesures de la LOM sont déjà en vigueur, malgré la covid-19. Je remercie les équipes qui se sont particulièrement mobilisées. Depuis le mois de juillet, la totalité des territoires est couverte par une autorité organisatrice de la mobilité (AOM), notre objectif étant également de déployer un million de bornes de recharge d'ici 2022. Nous approchons d'ores et déjà des 50 000 bornes de recharge en voirie publique. Citons la réalisation de pistes cyclables, qui est aussi en forte progression, avec 13 000 kilomètres ouverts depuis 2017. S'agissant enfin de la programmation 2019-2023, 13,4 milliards d'euros sont déjà engagés, tandis que le Conseil d'orientation des infrastructures (COI), dans sa nouvelle composition, prépare d'ores et déjà la suite.

La majorité des textes d'application de la loi « Climat et résilience » seront pris sous neuf mois, ce qui soulève des enjeux de continuité avec la loi d'orientation des mobilités. Je pense notamment aux zones à faibles émissions (ZFE), à l'installation des bornes dans les copropriétés et à la transition du parc automobile, notamment des véhicules industriels les plus lourds.

Nous avons lancé d'autres projets en lien avec l'Agence de l'innovation pour les transports (AIT) pour accompagner jusqu'au terme du quinquennat le développement des technologies de demain. Nous reparlerons du projet de loi dit « 3DS » et de la décentralisation des routes, ainsi que du plan d'investissement 2030, qui sera annoncé par le Président de la République dans les prochains jours. Dans ce cadre, les transports, notamment le secteur aérien et le parc automobile, seront étudiés sous l'angle de la décarbonation.

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( LaREM). Je me félicite de l'augmentation des crédits du programme 203 car ces fonds sont destinés à la rénovation de lignes ferroviaires et de routes, au financement de pistes cyclables, avec les collectivités locales, à l'entretien de fleuves souvent délaissés par le passé et à bien d'autres mesures afin de mieux préserver l'environnement et d'améliorer le cadre de vie de nos concitoyens. Nous sommes ainsi fidèles aux objectifs que nous poursuivons depuis le début de la législature et nous sommes donc nombreux à avoir hâte d'adopter ces crédits.

Puisque l'heure est au bilan, permettez-moi de revenir sur le transport routier de marchandises, car si l'objectif de doublement de la part modale du fret ferroviaire est plus que louable, il n'en reste pas moins qu'une majorité de nos marchandises continuera à passer par la route. Verdir le parc est donc une nécessité. Pour ce faire, il nous faut une offre de véhicules – les marques y travaillent –, mais aussi que nos transporteurs aient la capacité d'investir et de les acheter. Or ils sont bien souvent confrontés à une concurrence déséquilibrée qui tire les prix vers le bas.

Si nous voulons verdir ce mode de transport, il faut augmenter les revenus de ces sociétés, ce qui aura également pour effet de redonner de l'attractivité au métier alors que nous manquons cruellement de chauffeurs.

Notre assemblée a voté à la quasi-unanimité la proposition de résolution européenne que j'ai présentée sur ce thème. Le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine des transports, de l'environnement, de l'économie et des finances (DDADUE) a récemment inscrit certaines de ces dispositions dans le droit français, mais beaucoup reste à faire, notamment afin d'éviter un report modal vers les véhicules utilitaires légers qui semble toujours trop peu encadré par le droit européen. À quand le tachymètre sur ce type de véhicule lorsqu'il fait du transport pour compte d'autrui ?

Je sais l'engagement du Gouvernement sur ce sujet. Pouvez-vous nous rappeler les avancées déjà acquises, mais aussi celles à venir, notamment dans le contexte de la présidence française de l'Union européenne ?

Enfin, l'Agence de l'innovation pour les transports est nécessaire pour coordonner les acteurs de l'écosystème de l'innovation dans les transports, mais quid de sa gouvernance ?

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Monsieur le ministre, vous êtes évidemment satisfait du budget que vous présentez et avez bien raison de l'être. Le groupe majoritaire est, visiblement, lui aussi, très satisfait. Rien que de très normal jusqu'à présent. Nous émettons, quant à nous, quelques réserves, restant ainsi dans la normalité des choses… C'est toutefois au regard du sort qui sera réservé à nos amendements et des évolutions de ce budget que nous déterminerons notre position.

Je vous donne acte que 80 ou 90 % des décrets d'application de la LOM – et non pas des objectifs qu'elle fixe – ont été pris. Il n'en demeure pas moins que les résultats ne sont pas tout à fait au rendez-vous, ce qui n'est pas anormal puisque le texte s'inscrit dans la durée.

Vous avez parlé du financement de l'AFITF. Quelle est la part de la recette de l'agence tirée des billets d'avion, sujet qui avait suscité un débat extrêmement long ?

Vous avez évoqué un certain nombre de propositions relatives à l'Agence de l'innovation pour les transports. Je rejoins M. Damien Pichereau sur le verdissement du parc de transport poids lourds. Nous comptons actuellement 600 000 poids lourds, d'un âge moyen de six ans ; il nous en faut 100 000 nouveaux par an. Or nous ne pouvons en avoir que quelques centaines fonctionnant à l'hydrogène. L'AIT essaie-t-elle de trouver des solutions avec les constructeurs pour massifier la production ?

M. Damien Pichereau souhaite accroître le pouvoir d'achat des entreprises ; pour ma part, je considère qu'il faut faire baisser le prix des camions à hydrogène, qui sont inaccessibles aux transporteurs routiers français.

S'agissant des petites lignes ferroviaires, force est de constater que l'on ne progresse guère. Si la volonté existe, aucune avancée sur le plan financier n'a été négociée, notamment avec les collectivités, les régions et les départements. J'aimerais en savoir plus sur cette question.

En matière d'hydrogène, enregistre-t-on des avancées concrètes pour le parc automobile ? Les constructeurs sont-ils susceptibles de progresser ?

Au-delà des chiffres, qui peuvent évoluer au gré des lois de finances rectificatives, nous nous intéressons aux avancées technologiques qui permettront que le transport soit beaucoup plus vert demain.

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Je salue l'exceptionnelle ambition de ce PLF en matière de transition écologique : doté de 50 milliards d'euros hors plan de relance, ce poste budgétaire augmente de 3 % par rapport à 2021. Au total, sa progression aura été de 20 % depuis le début du quinquennat. Le secteur des transports n'est pas en reste puisqu'il voit, lui aussi, son budget augmenter de 3 % cette année pour atteindre environ 8 milliards d'euros.

Parmi les priorités particulièrement soutenues, on relèvera notamment le développement du fret ferroviaire. La France avait pris beaucoup de retard dans ce secteur et je me félicite de la volonté de notre majorité de commencer à le rattraper, même si ce n'est pas chose simple !

Cela passe par la reconduction pour 2022 de l'enveloppe complémentaire de 170 millions d'euros inscrite en 2021 pour soutenir l'exploitation des services de fret ferroviaire de transport combiné. Au total, l'État apporte à ce secteur un soutien six fois supérieur à ce qu'il était en 2015. En matière d'investissement, 1 milliard d'euros est mobilisé entre l'État, les collectivités et l'Europe pour financer de nouveaux projets. Ce ne sont pas que des mots, ce sont des actes concrets, la reprise de l'exploitation de la ligne Perpignan-Rungis en est un symbole.

Cela passe aussi par le déploiement de la stratégie de développement du fret ferroviaire présentée en septembre, à laquelle a fortement contribué le Conseil d'orientation des infrastructures. À ce titre, et en tant que membre du COI, je veux particulièrement remercier le ministre de son écoute attentive de nos préoccupations.

J'aimerais aussi revenir sur la question complexe du transport routier. Particulièrement compliquée dans ce secteur, la transition écologique nécessiterait un accompagnement soutenu de l'État, notamment à destination des plus petits acteurs, qui signalent que nous ne pouvons nous passer d'aucune énergie disponible susceptible de faire baisser les émissions de gaz à effet de serre, que ce soit le biogaz, le B100, l'électricité ou l'hydrogène. Nous avons d'ailleurs adopté dans la loi « Climat et résilience » des dispositions qui nous permettront d'y voir un peu plus clair sur les modalités du soutien que l'État pourrait apporter au secteur après la présidence française de l'Union européenne, en 2022. Dans l'attente, je me réjouis du nouveau programme d'engagements volontaires pour l'environnement, adopté en 2021.

Nous pourrions évoquer bien d'autres sujets en faveur desquels notre majorité s'attache à accompagner la transition, qu'il s'agisse du développement du vélo, du covoiturage ou des transports en commun. Une telle ambition en matière de lutte contre le changement climatique est inédite dans les transports comme dans les autres domaines, c'est un fait, non une opinion. Gardons cela humblement en tête et continuons le travail !

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Qu'ajouter à cette excellente intervention ? Je rejoins mon collègue Bruno Millienne et m'associe à la satisfaction de voir le budget progresser de plus 3 %, en dehors même du plan de relance, une part importante étant dédiée aux transports, de façon équilibrée entre terrestre, aérien et maritime.

Rapporteure pour avis pour les affaires maritimes, je note la progression de 34 millions d'euros qui s'accompagne de nouveaux outils, notamment d'un fonds d'intervention maritime qui sera géré par la direction des affaires maritimes (DAM).

Je m'attarderai sur deux sujets de préoccupation du secteur maritime, en premier lieu le dispositif de suramortissement prévu par l'article 39 decies C du code général des impôts, modifié par l'article 8 du projet de loi de finances pour 2022. La mise en œuvre de ce dispositif est très attendue et nous ne pouvons que l'encourager.

Je sors d'une réunion avec les armateurs, parmi d'autres acteurs : si nous voulons que ce dispositif fonctionne, il faut entendre le terrain, monsieur le ministre, comme nous devons défendre le dispositif auprès de Bercy.

J'ai moi-même plaidé pendant trois ans pour rendre effectif un dispositif relatif aux activités de croisière. Il a fallu le modifier à trois reprises. Dès la première année, je vous avais indiqué qu'il ne serait pas opérationnel et qu'il fallait absolument le rendre accessible et réaliste. Or, si les nouvelles dispositions prévues par l'article 8 du projet de loi de finances pour 2022 sont intéressantes, je pense que nous allons retomber dans les mêmes travers et que, l'année prochaine, les députés de la future majorité devront certainement encore améliorer le dispositif.

Gagnons du temps, monsieur le ministre ! Nous comptons sur votre soutien pour agir dès cette année. Il faut absolument travailler sur la durée d'amortissement et je soutiens pleinement les propositions que notre collègue M. Jean-Marc Zulesi a faites et qui ont été adoptées par cette commission lors de l'examen de son avis sur la première partie du projet de loi de finances, mercredi 29 septembre.

Je veux ensuite appeler votre attention sur le dispositif d'aide à l'emploi qui a été pérennisé pour trois ans, mais dont nous avons exclu les délégations de service public (DSP). Il nous faut examiner cela de près. Selon les armateurs, l'impact budgétaire serait de 8 à 10 millions d'euros. Si nous ne soutenons que l'offre internationale au détriment de nos compagnies qui assurent les lignes intérieures, nous passerons encore à côté de l'objectif.

Ce secteur a été lourdement touché par la crise sanitaire. À ce contexte très particulier s'ajoutent des obligations de transition majeures qui sont imposées par l'Organisation maritime internationale (OMI) au cours des prochaines années. Il faudra donc également soutenir cette transition, qui représente un surcoût de 20 %, ne serait-ce qu'en termes d'investissement.

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Le secteur des transports, premier émetteur de CO2 en France et responsable de 31 % des émissions de gaz à effet de serre, est sur une mauvaise trajectoire depuis les années 1990.

L'un des enjeux majeurs de ce projet de loi de finances réside donc dans l'application des mesures nécessaires pour verdir enfin notre mobilité. Or, à ce stade, je crains que les dispositions du texte soient insuffisantes.

Concernant les transports publics tout d'abord, de nombreux élus locaux s'inquiètent de l'insuffisance des aides aux autorités organisatrices de la mobilité. Des moyens supplémentaires leur seront-ils accordés ?

Par ailleurs, l'Association des maires de France (AMF) ainsi que le Groupement des autorités responsables de transport (GART) demandent de longue date que la TVA sur les transports publics soit abaissée à 5,5 %. Comment expliquez-vous votre position ?

Le fret ferroviaire est en grande difficulté depuis plusieurs années. Vous avez annoncé le mois dernier un coup de pouce de 170 millions d'aides annuelles au secteur jusqu'en 2024.

Les opérateurs du rail estiment leurs besoins à 13 milliards d'euros sur dix ans. Dans ces conditions, pouvez-vous assurer un basculement effectif du fret routier vers le ferroviaire ?

En ce qui concerne le secteur automobile, en particulier son électrification, la Cour des comptes a considéré, à propos du bonus automobile et de la prime de conversion, que l'évaluation des aides reste insuffisante et que leur pilotage demeure erratique. Un bilan poussé de ces aides sera-t-il fait d'ici à la fin du quinquennat afin de recadrer, si nécessaire, leur périmètre ?

Le Gouvernement entend prendre des mesures en faveur de la compétitivité des armateurs français afin de faciliter le financement et de rendre plus écologique la flotte contrôlée par les compagnies maritimes françaises. Pourtant, les compagnies telles que Corsica Linea ou La Méridionale sont à ce jour exclues des dispositifs d'aide à l'emploi maritime et subissent des attaques récurrentes contre les DSP, par exemple s'agissant des dessertes continent-Corse. Elles ont été récemment fragilisées. Une amende de 88 millions d'euros vient sanctionner la collectivité de Corse des errements conjoints du mandat 2007‑2013 et de l'État, qui voulait à tout prix sauver l'ancienne Société nationale Corse Méditerranée (SNCM). Envisagez-vous d'opter pour une aide à l'emploi maritime universel sans discrimination, applicable à toutes les compagnies ?

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Je me concentrerai sur les voies ferrées, si importantes pour notre territoire.

Vous avez annoncé vouloir accélérer et amplifier la modernisation et la rénovation du réseau ferré français. Dans le cadre du plan de relance, une partie des 4,7 milliards d'euros octroyés au transport ferroviaire sera consacrée, je cite : « à réinvestir, avec les régions, dans les lignes de desserte fine du territoire ».

Ces lignes constituent des moyens de déplacement majeurs pour les habitants des territoires ruraux ou des villes moyennes. Elles représentent 9 000 kilomètres, soit à peu près un tiers du réseau.

Les travaux sur ces lignes garantissent, certes, leur maintien, mais souvent, comme c'est le cas sur la ligne Tours-Loches que vous connaissez bien, sans légère amélioration du temps de trajet et surtout sans augmentation annoncée du cadencement.

Ces lignes à voie unique et à signalisation simplifiée sont fréquentes dans nos zones rurales. La signalisation est rudimentaire, les aiguillages souvent immobilisés par de simples cadenas, les trains circulent en marche à vue et les passages à niveau sont sans annonce, obligeant le conducteur à décélérer pour vérifier que la voie est libre. En outre, ces voies uniques ne permettent pas aux trains de se croiser. L'ensemble de ces raisons empêche d'augmenter le cadencement, ce qui pousse les usagers à se désintéresser du train pour privilégier la voiture, à l'encontre des objectifs du Gouvernement de mobilité durable et de désenclavement des territoires ruraux.

Le train à hydrogène est une autre piste de travail. En effet, les autorails légers d'Alstom ont une forte capacité d'accélération et de freinage, ainsi qu'un temps réduit d'ouverture et de fermeture des portes, des qualités indispensables sur ces lignes de desserte fine. Nous nourrissons beaucoup d'espoir dans les prototypes de navettes autonomes pour investir les lignes ferroviaires secondaires en offrant une solution de mobilité flexible et autonome.

Vous avez déclaré, avec raison, que le fret ferroviaire, c'est moins de bruit, moins d'accidents, moins de pollution, moins de congestion et moins d'émissions de gaz à effet de serre. Ce sujet est également majeur pour nos territoires ; nous attendons depuis longtemps une position claire et des engagements.

Pouvez-vous garantir le maintien et la modernisation des lignes de desserte fine du territoire afin que tous les Français bénéficient d'un accès facilité aux transports en commun tout en décarbonant leurs trajets ? Quel est le plan de développement des trains à hydrogène ? Dans quelle mesure pensez-vous accentuer la part du fret ferroviaire dans le transport ?

Enfin, je suis sûre que la Touraine est le lieu parfait pour expérimenter trains à hydrogène et navettes autonomes ! Je vous invite dès à présent à venir découvrir les travaux, qui sont achevés, de la ligne Tours-Loches et à tester ce matériel du futur.

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Il nous a été accordé à peine vingt-quatre heures pour travailler les documents budgétaires, soit 467 pages pour la mission « Écologie, développement et mobilité durables » ! Cela en dit long du respect que vous portez aux travaux parlementaires, notamment ceux qui portent sur les politiques écologiques. Nous apprenons, par ailleurs, par voie de presse, que vous présenterez un plan d'investissement le 12 octobre, au lendemain du début de l'examen du PLF. On finit par se demander à quoi servent nos débats en commission…

Mais j'entre dans le vif du sujet avec le fameux mythe de l'aérien et de sa prétendue neutralité carbone, un mythe que vous avez chiffré à 186 millions d'euros dans votre propos liminaire. Je ne sais si vous espérez que les avions du futur battent des ailes pour voler, mais j'ai le regret de vous annoncer que cette neutralité carbone n'arrivera pas et que, sans décroissance du secteur et report modal massif, la neutralité carbone est inatteignable. Ce n'est pas moi qui le dis, ce sont les ingénieurs de l'Institut supérieur de l'aéronautique et de l'espace.

J'ai toutefois une bonne nouvelle : la solution existe. Elle consiste à faire rouler des trains plutôt que de faire voler des avions, ce que nous savons déjà faire. Je pense notamment au fret ferroviaire, plusieurs fois évoqué ici, mais pour lequel la France est très en retard sur ses voisins européens.

Je me réjouis que vous soyez revenu à la raison et que la ligne Perpignan-Rungis puisse redémarrer, évitant ainsi des milliers de camions sur les routes. Cela faisait pas moins de deux ans que nous vous le réclamions.

Vous avez annoncé, il y a dix jours, une subvention de 170 millions d'euros par an pendant quatre ans pour l'exploitation des services de fret ferroviaire. À l'évidence, c'est trop peu. Je souhaiterais savoir où ira précisément cet argent et selon quel calendrier. Quelle part notamment sera réservée au wagon isolé ? Qu'avez-vous imposé au PDG de la SNCF sur ce sujet précis ? Quid du transporteur routier Geodis, filiale de la SNCF, qui fait de la concurrence à la SNCF sur ce créneau du wagon isolé ? Comptez-vous enfin revenir sur l'avantage concurrentiel offert aux camions en 2013, avec le passage de 38 à 44 tonnes ?

Enfin, qu'en est-il des investissements nécessaires aux infrastructures ? Quel montant avez-vous prévu pour les gares de triage, pour quelles gares et, question très précise, combien sera investi dans celle de Bègles-Hourcade, la seule de l'ancienne région Aquitaine et l'une des rares de Nouvelle-Aquitaine, bien qu'il s'agisse d'infrastructures stratégiques ?

Les débats budgétaires ne peuvent se satisfaire de déclarations d'intention ; nous avons besoin d'éléments clairs et précis, notamment quand il s'agit d'engager une bifurcation écologique de notre politique de transport. J'attends donc des réponses aussi précises que mes questions.

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Je constate une hausse sensible du budget qui nous est présenté : de 20 % pour les affaires maritimes et de 30 % pour les ports, ce dont je me réjouis. Pour les ports, il s'agit d'un bond considérable destiné à financer, entre autres, les projets de développement des grands ports maritimes. Il permettra d'accélérer la transition énergétique en soutenant, par exemple, les projets d'électrification à quai.

Ce budget consacre aussi 16 millions d'euros supplémentaires au maintien, en 2022, de l'aide exceptionnelle au secteur du transport de passagers en 2021, dite netwage. Je suis évidemment très satisfait de cette décision que j'avais appelée de mes vœux dans mon rapport précédent.

Un point d'inquiétude, toutefois : la prise en charge des cotisations versées par les compagnies de ferries au titre de la part salariale devait leur conférer un avantage compétitif face à la concurrence internationale, notamment, pour ce qui est la Méditerranée, celle des compagnies italiennes qui bénéficient de coûts salariaux bien moindres. Or le décret pris en mai pour l'application de cette mesure exclut les lignes exploitées dans le cadre des DSP. Mme Sage l'a relevé dans son intervention. De fait, la ligne maritime qui dessert la Corse n'est pas concernée et les compagnies Corsica Linea et La Méridionale n'en bénéficient donc pas.

Ce traitement différencié, je vous le dis, monsieur le ministre, n'est pas compris. S'il s'agit de soutenir la compétitivité de nos compagnies face à la concurrence internationale, se pose la question de l'inclusion des lignes gérées en DSP. Sinon, quelle autre mesure pourrait être envisagée pour aider nos armateurs français, notamment en Méditerranée, mais pas uniquement, face à la concurrence internationale ?

Par ailleurs, l'article 8 du projet de loi de finances pour 2022 prévoit la refonte du dispositif de suramortissement que j'avais fait voter dans le cadre de la loi de finances pour 2019. Je m'en réjouis et je soutiens les modifications adoptées hier en commission des finances. Je proposerai en séance publique d'allonger la durée d'éligibilité de ce dispositif.

Enfin, comme pour le secteur maritime, le suramortissement me semble un outil pertinent pour accélérer la transition écologique du transport aérien. J'ai également déposé un amendement en ce sens. Quel est votre avis ?

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Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué chargé des transports

M. Damien Pichereau, sur la question du transport routier de marchandises qui fait le lien avec celle sur le fret, je rappelle que s'est établie entre le rail et la route une double concurrence : une concurrence sur les prix et un défaut d'attractivité des infrastructures, en raison notamment de l'abandon d'une partie du réseau ferroviaire, telles les installations terminales branchées. Dans ce contexte, également marqué par la désindustrialisation, la part du fret ferroviaire a diminué et la France n'a pas su trouver ses avantages comparatifs dans le cadre de l'ouverture à la concurrence. Nous nous retrouvons donc avec seulement 9 % de marchandises transportées par le rail, ce qui est bien trop faible. L'objectif, grâce aux dispositifs que j'ai exposés, est de passer à 18 % d'ici à 2030. Certains pays voisins ont atteint un taux bien supérieur et nous voudrions aller vers 30 % des marchandises transportées par le rail et rééquilibrer cette concurrence qui joue en faveur de la route.

Sur le volet social, je veux d'abord vous remercier de votre action, à la fois sur le projet de résolution européenne et sur sa traduction en actes au travers du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine des transports, de l'environnement, de l'économie et des finances.

Après l'adoption du paquet « mobilité », le volet social comporte des avancées très concrètes. Je pense à l'interdiction de rémunérer les conducteurs en fonction de la rapidité de livraison, à l'introduction de sanctions à l'encontre des entreprises qui ne respecteraient pas le droit au retour des conducteurs, au durcissement des sanctions pour celles qui ne respecteraient pas les conditions de repos ou encore au renforcement de la lutte contre la concurrence déloyale pour éviter le cabotage systématique qui, nous le savons, se produit encore et impose le renforcement des contrôles à la fois au niveau européen – nous l'avons demandé à la Commission – et à l'échelle des inspections que nous diligentons en France.

Deuxième grand sujet : le prix de la transition énergétique. La particularité du secteur tient au fait que l'offre hydrogène ou électrique existe peu, voire est inexistante pour le transport de marchandises lourdes. Le gaz et le biogaz nécessitent une période de transition.

Une task force, à laquelle vous participez, nous permet d'étudier l'ensemble des leviers d'action, notamment au travers du suramortissement, et de préparer les différentes aides, dès lors que l'offre française et européenne existera.

Je précise par ailleurs que la mesure visant à équiper les véhicules d'un tachymètre s'applique depuis le 15 juin 2019 aux véhicules lourds immatriculés pour la première fois. À compter de 2023, conformément au paquet « mobilité », elle sera déployée avec des fonctionnalités supplémentaires et s'appliquera en 2026 aux véhicules utilitaires légers ainsi qu'aux véhicules de plus de 1,5 tonne qui opèrent à l'international.

Un mot de la philosophie générale de l'AIT, en lien avec le conseil ministériel que nous avons créé et qui fonctionne plutôt bien. Elle vise deux objectifs : d'abord, « désiloter » l'innovation entre les secteurs. En d'autres termes, l'hydrogène intéresse l'ensemble des secteurs : le secteur maritime, le monde portuaire, le transport terrestre et le transport aérien. Or, bien souvent, ces secteurs ne communiquaient pas, peu ou trop peu.

Ensuite, il faut entendre davantage les différentes parties prenantes, singulièrement les industriels et les exploitants, ce qui se fait encore trop peu.

Je crois pouvoir dire que ce conseil ministériel est opérationnel et que l'AIT représente une avancée. Les deux directeurs généraux, M. Damien Cazé pour l'aviation civile et M. Marc Papinutti pour les infrastructures terrestres et de la mer, en lien avec les deux directeurs en charge de l'innovation des deux grandes administrations, M. Frédéric Médioni et Mme Claire Baritaud, préfigurent cette avancée de l'innovation dans les transports qui sera prête à entrer dans sa phase de croisière avec une direction unifiée.

Monsieur Jean-Marie Sermier, vous avez évoqué les effets de la crise de 2020 et 2021 sur les recettes de l'AFITF, s'agissant de la part de ressources assise sur les billets d'avion. Pour pallier ces insuffisances de ressources, telle la taxe de solidarité sur les billets d'avion, dite « taxe Chirac », nous avons procédé, en 2020 et en 2021, à des abondements exceptionnels, de l'ordre de 250 millions d'euros. Nous prévoyons au budget 2022 des recettes affectées à l'AFITF d'environ 91 millions d'euros pour la taxe de solidarité sur les billets d'avion.

S'agissant de la trajectoire de décarbonation, il est utile de rappeler que le secteur des transports représente en France environ 30 % des émissions de gaz à effet de serre, dont 50 % sont le fait des véhicules légers, d'où l'action que nous menons résolument pour la transition du parc automobile, avec des effets de levier non négligeables. Alors que les ventes de véhicules électrifiés, donc électriques et hybrides rechargeables, représentaient 1 % des ventes en 2017, elles en constituent 17 % en ce mois octobre, et j'ai l'espoir d'atteindre 20 % d'ici à la fin de l'année. La transition est engagée, elle est irréversible et s'appuie sur des annonces très ambitieuses des constructeurs français et européens.

À cela s'ajoute la stratégie pour le développement de l'hydrogène décarboné des mobilités. Dans notre esprit, c'est la mobilité lourde qui, la première, sera une bonne expérimentatrice de l'hydrogène. Nous pensons aux trains qui sont déjà, pour partie, en circulation, et aux bus, cars et poids lourds qui seront concernés dans un second temps.

Un mot sur les petites lignes pour répondre à la fois à M. Jean-Marie Sermier et à Mme Sophie Métadier. Nous avons choisi de sauver 9 000 kilomètres de petites lignes en procédant, dans le cadre du pacte ferroviaire, à un audit très précis de l'état des voies et du coût de régénération, au sens de leur pérennisation. Une fois l'audit mené, nous avons proposé aux régions un plan de co-investissement de 7 milliards d'euros pour sauver ces 9 000 kilomètres. Nous avons soit signé des protocoles, soit obtenu la délibération de huit régions sur les onze concernées, si l'on compte la Corse et l'Île-de-France qui obéissent à des régimes un peu particuliers. Voilà deux jours, je me suis entretenu avec le président de la région Hauts‑de‑France ; j'ai bon espoir que nous puissions avancer dans les tout prochains jours sur le sujet. Ainsi, 6 500 kilomètres de petites lignes sont d'ores et déjà sauvés et, sur les 7 milliards d'euros que j'évoquais précédemment, 5,2 milliards sont engagés sur dix ans. Nous avons financé les travaux en 2020-2021 sur les 300 millions d'euros du plan de relance : c'est un véritable levier pour accélérer les projets.

J'en viens à la ligne Tours-Loches, que je connais bien, tout en saluant l'action de votre prédécesseur. Elle fait partie des lignes qui permettront de démontrer l'intérêt des trains légers à hydrogène et donc, d'amorcer ce cercle vertueux. Nous étions enserrés dans un cercle vicieux, l'abandon du réseau entraînant la réduction du nombre de passagers dans des TER toujours plus lourds, et le système aboutissait progressivement à l'abandon des petites lignes. La logique s'inverse : nous voulons sauver les petites lignes, travailler à des référentiels ferroviaires adaptés pour faire rouler à l'avenir des navettes autonomes et des trains plus légers. Nous avons lancé un appel à projets dans le cadre de l'AIT et nous avons d'ores et déjà beaucoup de projets très qualitatifs sur les trains légers et très légers. Nous pourrons ainsi faire évoluer ou adapter le modèle économique aux petites lignes ferroviaires et retrouver de la sorte à la fois de l'appétit pour l'innovation et du service aux usagers.

S'agissant du fret ferroviaire, évoqué par un certain nombre d'entre vous, la logique est de considérer qu'il n'est pas un marché totalement unifié. Il existe schématiquement trois types de marché : le train, qui trouve des logiques de rentabilité, un certain nombre d'acteurs français et surtout européens étant rentables sur ce secteur, le transport combiné qui doit représenter à peu près 20 % de l'activité et le wagon isolé qui en représente environ 10 %.

Comme partout en Europe, ces deux derniers secteurs nécessitent des soutiens publics. C'est donc ce qui a prévalu et que nous traduisons en actes, que je détaillerai dans un instant pour M. Loïc Prud'homme. Nous portons également ce message au niveau européen et nous avons obtenu la signature d'une déclaration commune de seize pays européens sur vingt-sept. Dans le cadre de la présidence française de l'Union européenne, je continuerai à mener ce combat.

L'objectif est triple : il s'agit de soutenir les opérateurs en baissant le niveau des péages et en soutenant les marchés qui ne sont pas tout à fait ceux sur lesquels peut s'exercer une concurrence saine : wagon isolé et transport combiné. Sur l'aide additionnelle de 170 millions d'euros, 65 millions sont consacrés à la baisse de péage, 65 millions au wagon isolé et 30 millions à l'aide à la pince, donc au transport combiné. Par ailleurs, nous relançons trois autoroutes ferroviaires : Perpignan-Rungis, que nous voulons étendre au nord, vers les ports de Dunkerque et d'Anvers, et au sud vers Barcelone, Calais-Sète et Cherbourg-Bayonne sur la façade atlantique.

Je pense avoir répondu à M. Bruno Millienne.

Madame Maina Sage, le suramortissement a, en effet, été prolongé de deux ans, jusqu'en 2024. La proposition du Gouvernement, à l'aune de la discussion budgétaire qui s'engage, est de l'étendre à d'autres équipements acquis à l'état neuf, d'établir un plafond de soutien de 10 à 15 millions d'euros en fonction des dispositifs et d'assouplir les critères d'accès à l'ensemble des armateurs qui sont assujettis à la taxe au tonnage français.

J'ai pris note des propositions qui ont été présentées. Vous avez raison de dire qu'il faut tendre vers l'efficacité. Je suis tout à fait disposé à étudier dans le détail ce qui est proposé ainsi que les voies et moyens pour cheminer ensemble dans la discussion budgétaire.

J'en viens à l'aide au netwage et aux opérateurs maritimes en concurrence ou non – je ferai peut-être le lien avec la question de M. Colombani sur la Corsica Linea. Sur l'ensemble de ces questions, nous avons été particulièrement attentifs à la situation des opérateurs, à l' « effet Brexit » dont souffre Brittany Ferries. Pour parler de ce cas qui a été assez emblématique, nous avons garanti à hauteur de 90 % un PGE (prêt garanti par l'État) de 117 millions d'euros ; nous avons mis en place les dispositifs d'activité partielle, le netwag e a été prolongé à trois ans, dans la mesure où ces activités étaient ouvertes à la concurrence internationale. Nous avons également conclu un accord d'activité partielle longue durée de 21 millions d'euros entre 2021 et 2023, instauré des dispositifs « coûts fixes » que vous connaissez bien, et la compensation du préjudice lié à la crise de la covid-19 a été autorisée par la Commission à hauteur de 61 millions d'euros. D'autres acteurs, collectivités territoriales notamment, ont également financé des avances remboursables.

Outre ces aides circonstanciées pour passer la crise, l'objectif, à travers nos diverses actions en faveur du secteur portuaire, maritime et fluvial, est bien de se redonner des avantages comparatifs, de capter de nouveaux flux, de ne pas être dupes des stratégies non coopératives de nos amis – et néanmoins concurrents – britanniques.

Nous avons déjà traduit pour partie ces ambitions au travers des grands plans d'investissement sur certains axes, dont l'axe HAROPA ou encore l'axe Méditerranée, en remontant vers Marseille et Lyon, qui fera également l'objet d'actions résolues de l'État. Notre stratégie industrielle, commerciale et de services sur l'ensemble du secteur me paraît répondre à l'ambition collective.

Monsieur Paul-André Colombani, sur le caractère suffisant ou non des aides, les transports en commun ont été et sont une priorité réaffirmée par la loi d'orientation des mobilités. Ils auront bénéficié de 39 % de crédits supplémentaires lors du quinquennat, ces crédits passant de 230 millions d'euros par an entre 2013 et 2017 à 330 millions entre 2018 et 2022. Je rappelle l'annonce ce matin des lauréats du quatrième appel à projets de transports collectifs en site propre : nous sommes passés de 450 millions sur la période 2013-2018 à 900 millions sur la période qui s'ouvre avec, par exemple, des projets comprenant plus de 20 % de tramway, et de nombreux projets de bus en site propre, au titre desquels l'effort budgétaire des collectivités et de l'État est considérable.

S'agissant de l'accompagnement des véhicules propres, les chiffres sont éloquents : depuis le début du quinquennat, nous avons lancé différents dispositifs. Je citerai, entre autres, le bonus automobile et la prime à la conversion : plus de 400 000 bonus et plus de 860 000 primes ont ainsi été distribués. Cela participe de l'engouement et de la conversion du parc automobile aux fins environnementales que vous avez citées.

Nous progressons également s'agissant des bornes de recharge. D'ici à la fin de l'année, nous compterons un million de bornes en France, toutes bornes confondues, l'essentiel étant destiné aux entreprises et aux particuliers. Quasiment 150 000 bornes seront ouvertes au public, la moitié des aires de service sur les axes routiers et autoroutiers seront équipées et l'intégralité le sera d'ici à la fin 2022 sur ces grands axes.

Il nous reste deux cas difficiles à traiter : celui des copropriétés, au titre desquelles différentes lois permettent d'ouvrir des dispositifs réglementaires, et celui des bornes publiques ouvertes aux voiries. Les études montrent que l'on s'oriente plutôt vers des bornes de forte puissance autour de hubs de recharge afin de maximiser l'intérêt de tous et de faciliter l'utilisation par les conducteurs qui auront fait cette conversion.

Pour ce qui est de l'aide « illégale » destinée au sauvetage de la SNCM, en dehors de votre proposition qui est intéressante – peut-être est-ce le sens de l'histoire –, se pose la question de la capacité de l'État à décider du port d'origine et de destination, dans le cadre de la DSP, ce qui n'est pas prévu à ce jour ou pas permis par le droit de l'Union européenne. En effet, une telle situation peut se produire dans d'autres secteurs, à d'autres moments et conduire à cette incompréhension. C'est un objet de débat politique pour la présidence française de l'Union européenne et je suis en accord avec la philosophie que vous avez développée.

Monsieur Loïc Prud'homme, l'aide au fret ferroviaire s'élève à 70 millions d'euros pour l'axe Perpignan-Rungis, dont 65 millions alloués aux wagons isolés. De manière générale, la stratégie pour le fret national et le fret ferroviaire est annoncée. Elle fixe les montants financiers qui sont alloués, gare de triage par gare de triage, ligne par ligne.

Je vous adresserai rapidement une réponse écrite et chiffrée sur la gare de triage de Bègles.

En ce qui concerne la complémentarité des activités du groupe SNCF entre Geodis et le fret, l'objectif est de rehausser très largement le recours au fret ferroviaire, en le portant à 18 % dans un premier temps, davantage plus tard. Si un déséquilibre existe, une complémentarité s'instaurera à moyen terme entre la route et le rail. La totalité des marchandises ne passera pas par le rail, pour des raisons évidentes, mais il faut travailler à la fois sur les infrastructures, qui ont trop longtemps été délaissées, et sur le signal prix.

Il existe deux façons de considérer l'aide au signal prix : soit baisser les taxes, soit subventionner des secteurs où des segments de marché du fret ferroviaire le nécessitent. J'ai évoqué les mesures prises en faveur du wagon isolé et du transport combiné.

Je connais et respecte votre avis sur le mythe de la décarbonation aérienne et sur la décroissance. C'est d'ailleurs une partie des élèves de Supaéro qui a porté cette voie de la décroissance de l'aérien. J'observe toutefois que la France n'est pas une île, que le trafic aérien repart moins fortement en Europe que dans d'autres parties du monde, mais que la décarbonation de l'aviation intéresse évidemment l'ensemble des acteurs. Nous observons toujours une croissance forte en Afrique, en Amérique latine, en Asie du Sud-Est. C'est donc un sujet dont nous devons nous saisir ; c'est précisément parce que nous avons des acteurs industriels d'envergure mondiale qu'engager cette décarbonation est une bonne chose.

Vous avez pu noter hier que les acteurs du secteur se sont prononcés pour une décarbonation nette en 2050 et que, d'ores et déjà, des mesures sont prises au niveau français et européen sur les carburants alternatifs au kérosène qui permettent une très forte décarbonation. Je le rappelle, un carburant alternatif représente une réduction immédiate de 90 % des émissions de CO2, en plus des filières industrielles que nous pouvons implanter sur le territoire autour des huiles de cuisson usagées, de la biomasse et, demain, des carburants de synthèse.

Monsieur Saïd Ahamada, nous sommes à votre disposition pour tenter de converger vers des propositions qui satisfassent les objectifs de suramortissement au sens large, notamment de suramortissements pour l'aérien.

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J'élargis le débat à une question à laquelle, vous le savez, je suis extrêmement sensible en tant que députée de la Haute-Savoie et de la région Rhône-Alpes : la réalisation effective du tunnel Lyon-Turin, avec une possible livraison des voies d'accès dès 2030.

Nous vous avons interpellé au mois de juillet, nous avons demandé au Président de la République et au Premier ministre de soutenir fortement le projet, l'Europe s'étant engagée à financer des voies d'accès à hauteur de 50 %. La France prendra en outre la présidence de l'Union dès le mois de janvier 2022. Le rapport de M. Philippe Duron fléchait des millions sur la ligne Dijon-Modane, qui ne permettra pas le report modal sur le corridor méditerranéen. Partagez-vous notre position quant à l'importance d'une mise en service de ces voies d'accès dès 2030 ?

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Le secteur des transports représente 30 % de nos émissions de gaz à effet de serre, ce qui en fait une priorité pour atteindre l'objectif européen de baisse de 55 % des émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2030.

Au-delà des différentes mesures évoquées, le transport public de voyageurs devra également jouer un rôle, et pas seulement dans les grandes villes, car une offre de transport de qualité évite aussi bien des trajets en voiture que les émissions de CO2 qui en découlent.

La crise de la covid-19 est venue priver nos autorités organisatrices de la mobilité des recettes nécessaires au bon fonctionnement des services. Face à cela, l'État leur a proposé de recourir à des prêts remboursables. Force est de constater que cela ne fonctionne pas. Confrontées à la baisse de la demande future et à l'incertitude des remboursements, les autorités organisatrices préfèrent réduire l'offre de transport de nos concitoyens qui en sont les premiers pénalisés.

Aussi, l'État entend-il enfin compenser, comme l'ont fait nos voisins européens, l'intégralité des pertes liées à la crise de la covid-19 afin de conserver au maximum une offre de transport diversifiée pour nos concitoyens ?

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Vous le savez, puisque vous y avez largement contribué, notre majorité est celle qui a relancé le rail sur notre territoire et vous savez à quel point nous sommes exigeants et cherchons constamment des propositions nouvelles pour améliorer la compétitivité du rail.

Deux pistes ont commencé à être débattues il y a déjà trois ou quatre ans. La première consiste à travailler sur une baisse de la fiscalité du rail, notamment sur la contribution de solidarité territoriale (CST), qui n'a plus de sens à l'heure où nous œuvrons à l'ouverture à la concurrence. La seconde est la taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires (TREF). Les deux pistes équivalent à 250 millions d'euros. Nous souhaitons donc proposer, dans le cadre du projet de loi de finances, la suppression, à la fois de cette contribution et de cette taxe. Je pense que nous allons dans le bon sens, mais je souhaiterais avoir votre avis.

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La LOM prévoit le développement de nouvelles lignes de trains d'équilibre du territoire (TET) afin de répondre aux besoins de désenclavement des territoires les plus éloignés des grands axes de circulation.

Dans l'étude publiée en mai 2021 par la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer, cinq corridors ont été identifiés, dont la liaison Metz-Lyon-Grenoble.

D'après ce rapport, les départements desservis directement par cette nouvelle ligne, dont la Haute-Marne, où je suis élu, totaliseraient un potentiel de 6,5 millions de voyageurs. Toutefois, si trois trains passeront effectivement chaque jour par la Haute-Marne, aucun arrêt n'y est prévu.

Notre département a vu son offre ferroviaire se dégrader fortement depuis plusieurs décennies pour des raisons économiques, touristiques, mais aussi d'accès aux soins, à l'emploi, aux études supérieures. Ce territoire éprouve un fort besoin de désenclavement, notamment vers Nancy et Dijon.

Pouvez-vous nous préciser les critères qui président au choix des arrêts de ces TET, ainsi que le calendrier de mise en œuvre de ces nouveaux trains ? Quel rôle comptez-vous jouer pour améliorer la desserte des départements enclavés ?

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Merci, monsieur le ministre, de votre engagement en faveur de ce budget très volontaire pour le ferroviaire.

Ma question porte sur le projet de TGV d'équilibre du territoire entre les grandes villes, pour mailler le territoire en dehors de Paris. La ligne TGV Strasbourg-Marseille a été abandonnée par la SNCF. Elle passait par Lons-le-Saunier, ville préfecture du Jura, qui se trouve cruellement dépourvue aujourd'hui.

Avec l'arrivée des transporteurs italiens et espagnols, eux aussi pourvoyeurs de TGV, ces lignes abandonnées par la SNCF seront-elles reprises ?

Quel avenir peut-on imaginer pour cette ligne Strasbourg-Marseille, d'autant que la gare de Lons-le-Saunier a été rénovée au prix de lourds investissements ? La collectivité avait beaucoup investi pour l'électrification de cette ligne qu'il serait très utile de remettre en service.

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Officiellement, les concurrents de la SNCF peuvent faire circuler leurs trains, y compris sur le réseau TGV, depuis décembre dernier. La mise en concurrence apparaît comme une solution pour améliorer la qualité de l'offre et garantir un service public ferroviaire efficient au meilleur coût. Je pense notamment à l'Italie : depuis quinze ans, NTV Italo, seul opérateur privé de TGV en Europe, concurrence la Trenitalia sur ses lignes intérieures à grande vitesse. Les consommateurs italiens n'ont cessé, depuis, de s'en féliciter. La qualité du produit Italo a, en effet, incité sa concurrente publique à améliorer ses services, sa ponctualité et son confort.

Il semblerait que la SNCF ne fasse pas preuve de diligence pour ouvrir son réseau à la concurrence. Certains se plaignent du manque de coopération de la part de l'opérateur historique, voire d'une véritable volonté de freiner par tous les moyens cette ouverture à la concurrence, en transmettant par exemple des données difficilement exploitables.

Comment le Gouvernement peut-il inciter la SNCF à aller plus vite dans la libération du réseau ?

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Monsieur le ministre, encore une question sur le verdissement des transports lourds ! Deux mille motrices diesel des trains TER sont à remplacer. Quelle feuille de route fixez-vous au train à hydrogène ? Pourquoi ne pas imposer aux régions une stratégie nationale d'État avec au moins deux trains à hydrogène par région, alors que seulement quatre sur treize l'ont décidé ?

Qui plus est, un train à hydrogène entraîne la création d'un écosystème écologique territorial justifiant la massification des électrolyseurs, donc la baisse de prix de cette technologie de rupture qui s'accompagne de zéro émission chimique et sonore ! Que je sache, vous ne demandez pas l'avis des régions s'agissant des TGV !

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Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué

Madame Véronique Riotton, je commence à bien connaître le sujet, grâce à vous et, plus encore, grâce à votre mobilisation et celle de vos collègues.

J'apporterai plusieurs éléments de réponse.

L'importance du projet a été affirmée à de nombreuses reprises. Le Président de la République l'a encore réaffirmée à l'occasion du sommet franco-italien. Nous avons pu le vérifier ensemble, le Lyon-Turin n'est plus un projet, mais bien un chantier qui avance ; la mise en service du tunnel de base est programmée en 2030. Vous avez rappelé, et c'est très important, l'obligation d'avancer rapidement sur les accès qui bénéficient de taux bonifiés de la Commission – 55 % pour le tunnel de base et 50 % pour les accès –, raison pour laquelle nous avons mis au débat plusieurs scénarios préférentiels pour les accès. Des comités de pilotage se rendront sur place ; une mission de l'inspection générale des finances et des ministères techniques sera mobilisée pour viabiliser le modèle économique ; enfin, nous avons mobilisé récemment le COI, dans sa nouvelle composition, pour que le travail s'engage rapidement.

Dans la LOM, nous avons inscrit la modernisation de la ligne Dijon-Modane pour 700 millions d'euros. La ligne est complémentaire puisque, à terme, elle représentera environ un quart des 40 millions de tonnes de marchandises charriées par le tunnel Lyon-Turin. Les accès sont prévus pour 2030. Il est important de « phaser » correctement ces travaux, tout en rappelant que les accès neufs ou ceux qui ont pu être mis au débat sont essentiels, nécessaires et complémentaires de ce qui a déjà été engagé.

J'ai quelques difficultés à m'engager sur un calendrier, notamment celui que vous évoquez de 2030, pour les raisons que vous connaissez : d'une part, nous en sommes au stade de la préparation de l'avant-projet détaillé et du financement qui devra être engagé en regard, qui sera considérable ; d'autre part, nous connaissons les uns et les autres la durée de livraison de tels chantiers. Je puis donc m'engager sur l'intention politique, vous préciser le phasage des réunions que nous avons prévues, vous dire notre total engagement de livrer un ouvrage complet – tunnel de base, accès neufs et accès Dijon-Modane – et réaffirmer qu'il s'agit d'une priorité politique pour la France, pour l'Europe, et que cette priorité est désormais partagée, et de façon définitive, par nos voisins italiens.

Madame Sylvie Bouchet Bellecourt, nous avons compensé les pertes en fiscalité liées, notamment, au versement mobilité et nous nous sommes assurés que les régions disposent des fonds suffisants pour faire face aux pertes de recettes, grâce aux avances remboursables qui ont été consenties à un certain nombre de collectivités. Au total, l'État aura compensé pour près de 2 milliards d'euros les pertes liées à la covid-19 en 2020. Pour 2021, nous avons d'ores et déjà sécurisé des produits de recettes finales, dont le versement mobilité.

Sans doute me faut-il le préciser, lors des Rencontres nationales des transports publics qui se sont tenues à Toulouse, il est apparu que le transport en commun connaît des ruptures durables de son modèle économique, liées au télétravail et à la visioconférence. On note en particulier sur les gros réseaux, parisien et autres, que 100 % des passagers de 2019 ne sont pas revenus. Selon les estimations, la perte de fréquentation sera encore de l'ordre de 15 % cette année. Cela pose la question de la durabilité des modèles économiques tels que nous les connaissions avant 2019.

Par ailleurs, à un moment où beaucoup de responsables politiques défendent des politiques de gratuité générale et absolue des transports, il importe de rappeler que notre système fonctionne selon un équilibre entre la fiscalité consentie ou versée par les entreprises au travers du versement mobilité et les recettes tarifaires. Je verse ces éléments au débat. Dans ce cadre, l'État fait sa part en compensations et solutions pour alimenter la trésorerie. Si nous voulons viabiliser le modèle économique du transport en commun dans un moment de fort investissement et alors qu'on s'interroge sur ses soubassements, je considère qu'il nous faut préserver cette spécificité française qui s'appuie sur le versement mobilité, la fiscalité et les recettes tarifaires.

Monsieur Jean-Marc Zulesi, merci de votre action et de toutes vos propositions. À l'occasion du lancement du nouveau TGV et des 40 ans du TGV, le Président de la République s'est engagé à supprimer la CST et la TREF d'ici 2023. Nous avons donc prévu une forte réduction du poids de l'imposition dès 2021, une nouvelle réduction en 2022 en supprimant la CST et la suppression de la TREF en 2023. Pour satisfaire les objectifs que vous défendez, ces propositions feront l'objet d'amendements au PLF 2022.

Monsieur Sylvain Templier, nous avons d'ores et déjà réinvesti sur les TET, à hauteur de 800 millions d'euros au titre des matériels roulants sur la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse, sans compter les travaux que nous réalisons sur les voies et sur la ligne Paris/Clermont-Ferrand. Ce matériel est produit à Bagnères-de-Bigorre. Les premières livraisons sont prévues pour la fin 2023. Les choses avancent très correctement.

Nous avons également réinvesti 150 millions d'euros sur la desserte Nantes-Bordeaux, ce qui permet d'ajouter un aller-retour supplémentaire par jour et de gagner presque une heure de temps de trajet.

Enfin, un rapport très sérieux que nous avions diligenté sur les TET de jour et de nuit, a été rendu voilà quelques mois. Il propose de nouveaux corridors et de nouvelles lignes potentielles. Vous avez cité Metz-Lyon-Grenoble, Toulouse-Lyon ainsi que Nantes-Rouen-Lille. Nous n'avons pas encore arrêté nos décisions. Des études complémentaires seront nécessaires sur la faisabilité technique et économique, de même que sur le calendrier. En tout cas, l'objectif que j'ai annoncé est de rouvrir une dizaine de lignes, de jour et de nuit, d'ici à 2030, étant entendu que cet effort n'est possible qu'en lien avec l'ensemble des travaux que nous continuons de mener pour la modernisation du réseau.

Je répondrai à Mme Danielle Brulebois que nous avons investi considérablement sur le train. À l'échelle de la décennie qui s'ouvre, tous fonds cumulés, nous y consacrons 75 milliards d'euros sur dix ans. C'est considérable. La priorité de la LOM a porté sur un certain nombre de projets.

Le Premier ministre a eu des paroles fortes sur la complétude, si je puis dire, du réseau grande vitesse, en relançant et en crédibilisant quelques opérations : Toulouse-Bordeaux, Montpellier-Perpignan, Marseille-Nice et la desserte TGV Strasbourg-Marseille qui passe par Lons-le-Saunier. Cette dernière est actuellement encore perturbée par des travaux en gare de Lyon Part-Dieu – qui s'achèveront, de mémoire, d'ici à la fin 2023 – et des travaux d'accessibilité, à ce jour terminés, en gare de Lons-le-Saunier, dont les derniers crédits seront remboursés en 2021.

Dès lors que cette perspective se rapprochera, nous solliciterons la SNCF pour savoir ce qu'elle entend faire en termes de dessertes. Nous ne manquerons pas alors de vous tenir informée.

Monsieur Jean-Claude Leclabart, votre question a principalement trait à SNCF Réseau en tant que gestionnaire du réseau dans le cadre du groupe public unifié. Les problèmes de mise à disposition des données que nous avons pu connaître ont été largement résolus au fil du temps, de même que les demandes que nous avons pu adresser au groupe public ferroviaire et que nous ne recevons d'ailleurs plus aujourd'hui de la part des acteurs que vous évoquiez. Nous restons vigilants, mais je pense que ce sujet est très largement derrière nous.

Enfin, monsieur Michel Delpon, vous proposiez un schéma directeur qui s'imposerait aux régions. Je considère que nous avons effectué avec elles un véritable travail de dentelle pour, tout à la fois, définir la part de l'État et la reprise en main par l'État du réseau de petites lignes ferroviaires les plus circulées, continuer de cofinancer une grande partie des lignes dans le cadre des contrats de plan État-région (CPER) et offrir la possibilité aux régions d'expérimenter, quand elles le souhaitent, de nouveaux modèles, que ce soit autour du train à hydrogène, du train léger, voire demain de navettes autonomes – en un mot, de laisser l'innovation se faire.

Je constate que les appels d'offres sur le train léger ont fait éclore de nombreuses propositions, très différentes et très innovantes, auxquelles, je le dis en toute sincérité, ni les uns ni les autres n'avaient pensé jusqu'à présent. Tel est le sens de l'innovation : celle-ci est très largement ascendante, elle permet de différencier les besoins des territoires, dont l'engagement diffère également.

L'hydrogène est important pour nous et pour le ferroviaire. Vous avez raison de dire que cela pose la question des cas d'usage ; le bon cas d'usage pour le train à hydrogène doit intéresser les 45 % de lignes non électrifiées, faisant de l'hydrogène un vecteur énergétique intéressant. Cela pose également le sujet de la production, mais là encore, les écosystèmes locaux n'ont pas tous les mêmes capacités de production. Certains s'appuient sur des énergies renouvelables, d'autres sur la biomasse, d'autres sur le recyclage de produits de décharge ou de gaz de décharge. Tous les modèles sont en cours d'analyse et remontés par les collectivités.

Enfin, se pose le sujet de la distribution ; à cet égard, vous avez raison de dire que, demain, les ports, les gares et les aéroports pourront être des lieux de production et de distribution d'hydrogène. C'est à cela que nous travaillons en lien avec les différents acteurs, pour définir les ordres de grandeur et travailler ensuite plus finement au système de distribution.

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Je profite du temps restant pour vous demander quelques éclaircissements et précisions sur l'Agence de l'innovation pour les transports. Vous l'avez évoquée dans votre propos liminaire et au fil des questions, mais peut-être pourriez-vous nous expliquer son articulation avec France Mobilités, puisque l'AIT n'a été créée que cet été.

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Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué

Ces deux sujets ne sont pas tout à fait disjoints. Je salue M. Jean-Marc Zulesi, qui est l'un des très grands acteurs de France Mobilités.

France Mobilités part vraiment des besoins du territoire dans une logique ascendante, qui remonte, assemble et crée les bonnes synergies pour les projets d'innovation. Pour sa part, l'Agence de l'innovation pour les transports a vocation à faire mieux communiquer les différents secteurs entre eux ; ils ont parfois beaucoup à faire ensemble alors qu'ils se connaissent peu. Ainsi, les industries – l'écosystème des transports compte de gros industriels – doivent davantage parler aux exploitants. L'AIT doit donc renforcer la dynamique de partenariat.

Elle doit aussi, parfois, accélérer des projets. Si je prends l'exemple du train léger, un certain nombre de constructeurs n'ont pas perçu le train léger comme étant une opportunité évidente et immédiate. Or ce train correspond à des besoins de territoire, à des marchés centre-européens, et apparaît, à nos yeux, comme totalement pertinent en termes d'efficience de la dépense publique.

Cette agence sert donc à la fois à mieux agréger l'information, à mieux comprendre ce que font nos voisins, parfois nos adversaires, sur un certain nombre de sujets, dans une période où les transformations technologiques sont extrêmement rapides. Elle sert à créer des synergies entre les différents acteurs. Elle sert à accélérer des projets : la capacité à réaliser des projets rapidement est un élément clé dans nos économies. Elle sert à faire le relais avec d'autres initiatives, qu'il s'agisse de celles des collectivités, de France Mobilités ou d'autres ministères. Elle met très largement en actes des plans d'investissement d'avenir (PIA), notamment sur la décarbonation et la digitalisation des transports – en plus des sept objets d'innovation dirigée que l'agence anime.

Membres présents ou excusés

Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du mercredi 6 octobre 2021 à 17 heures

Présents. - Mme Valérie Beauvais, M. Jean-Yves Bony, Mme Sylvie Bouchet Bellecourt, Mme Danielle Brulebois, M. Lionel Causse, M. Paul-André Colombani, M. Michel Delpon, M. Vincent Descoeur, Mme Nadia Essayan, Mme Camille Galliard‑Minier, M. Jean-Claude Leclabart, Mme Sandrine Le Feur, Mme Laurence Maillart‑Méhaignerie, Mme Sophie Métadier, Mme Marjolaine Meynier-Millefert, M. Bruno Millienne, Mme Christelle Petex-Levet, M. Damien Pichereau, M. Loïc Prud'homme, Mme Véronique Riotton, Mme Nathalie Sarles, M. Jean-Marie Sermier, M. Sylvain Templier, M. Vincent Thiébaut, Mme Élisabeth Toutut-Picard, M. Jean-Marc Zulesi

Excusés. - M. Christophe Arend, Mme Yolaine de Courson, M. Bruno Duvergé, Mme Aude Luquet, Mme Sandra Marsaud, Mme Laurianne Rossi, Mme Frédérique Tuffnell, M. Pierre Vatin

Assistaient également à la réunion. - M. Saïd Ahamada, Mme Maina Sage