Séance en hémicycle du lundi 29 mars 2021 à 16h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • climat
  • écologie

La séance

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La séance est ouverte à seize heures.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (nos 3875, 3995).

La conférence des présidents a décidé d'appliquer à cette discussion la procédure du temps législatif programmé, sur la base d'un temps attribué aux groupes de quarante-cinq heures.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme la ministre de la transition écologique.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Face à l'urgence climatique, l'objectif est aussi simple que le chemin est complexe. Nous savons tous où aller : vers la fin de la civilisation des énergies fossiles, la fin d'une civilisation qui rejette des milliards de tonnes de gaz à effet de serre dans l'atmosphère chaque année, la fin d'une civilisation qui dérègle le climat et fait de nos étés des canicules, des crues de nos rivières, des cataclysmes mortels, et de nos forêts des brasiers.

Il suffisait de se rendre, à l'automne, dans la vallée de la Roya, dévastée par une inondation comme au lendemain d'un bombardement, pour réaliser que nous avons déjà trop attendu. Ce que nous savons moins, ici comme partout dans le monde, c'est comment y aller. Car il s'agit précisément de changer de civilisation, de toucher au coeur de notre économie, de notre société, mais aussi de nos modes de vie. Il n'y a pas de mode d'emploi pour une telle transformation. Il n'y a pas de manuel pour transformer un constat scientifique, aussi massif soit-il, en ligne de conduite mondiale, en plan d'action qui finisse par imprégner la réalité sociale dans nos entreprises, nos communes, nos foyers.

Pourtant, parce qu'il s'agit tout simplement de garantir un avenir, à nous-mêmes, à nos enfants, nous nous y attelons, avec humilité, avec espoir et avec coeur, car la société à laquelle nous aspirons est tout sauf un monde de privation, tout sauf un retour en arrière. Elle est au contraire un monde de liberté, un monde libéré de notre dépendance aux énergies fossiles, libéré d'un air irrespirable, libéré de la surconsommation, libéré de la malbouffe, libéré d'une logique économique qui considère les externalités environnementales comme négligeables, un monde qui ne mesure pas sa réussite qu'à l'aune d'un indicateur, le PIB, qui ne prend pas en compte les limites physiques de notre planète.

L'objectif est clair, mais le seul plan qui existe pour l'atteindre est théorique et aucun gouvernement ne l'a mis en oeuvre : nous cherchons à tracer notre propre chemin, à dépasser les obstacles, à avancer, même lorsqu'on nous dit que c'est impossible, ou que ce n'est pas le moment, un chemin qui nous permette d'arriver à bon port, et d'y arriver ensemble.

À mes yeux, la transition écologique ne peut qu'être ambitieuse et rassembleuse. La transition à laquelle je crois refuse toute brutalité dans la méthode et vise à faire nation autour d'un projet protecteur et émancipateur. C'est cet esprit rassembleur qui animait le Président de la République lorsqu'il a décidé d'installer la Convention citoyenne pour le climat. Pendant dix-sept mois, 150 citoyens tirés au sort, employés, agriculteurs, retraités, lycéens, infirmiers et médecins, professeurs, chefs d'entreprise et même publicitaires et pilotes de ligne ont été confrontés aux faits scientifiques.

Ainsi, 150 citoyens sont venus prêter directement leur concours à la vie de la cité, dans ce qu'elle a de plus noble, de plus sincère : assimiler un problème complexe, débattre, proposer. Nous pouvons collectivement être fiers de ces 150 citoyens : leur héritage démocratique et écologique est considérable. Car oui, mesdames et messieurs les députés, cet exercice démocratique inédit prend aujourd'hui tout son sens, ici, avec vous : après le temps des citoyens, voici le temps des élus de la nation.

Je suis extrêmement attachée à ce temps du Parlement, car c'est celui de la démocratie représentative, celui des débats au grand jour et des votes qui gravent des espoirs dans le marbre de la loi. Ainsi, c'est ensemble que nous répondrons à l'appel de la Convention citoyenne, ensemble que nous passerons de 150 Françaises et Français à 577 aujourd'hui, et à 67 millions demain.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM et sur plusieurs bancs du groupe Dem.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Le texte que je vous présente aujourd'hui est une nouvelle pierre importante à l'édifice de la République écologique que nous voulons construire, et qui n'est pas un vain mot, car l'écologie est un terme issu du grec « oikos », la « maison », le « patrimoine » : il s'agit d'apprendre à gérer ensemble notre patrimoine commun, une maison dont nous sommes de simples sujets, profondément dépendants des services que nous rend la nature.

Comme le rappelle l'encyclique « Laudato si' » du pape François, lorsque l'on évoque l'environnement, on désigne en particulier une relation : celle qui existe entre la nature et la société qui l'habite. Cela nous empêche de considérer la nature comme séparée de nous ou comme un simple cadre de notre vie. Nous sommes inclus en elle, nous en sommes une partie et nous sommes enchevêtrés avec elle.

Mme Valérie Petit applaudit.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Ce patrimoine extraordinaire, nous l'avons déjà largement dilapidé, en quelques décennies, quand notre planète a mis des millions d'années à le construire. À l'heure où je vous parle, les trois quarts de notre planète ont été significativement modifiés par l'action humaine ; la dégradation des sols a réduit d'un quart la productivité de la surface terrestre mondiale ; les zones urbaines ont plus que doublé en trente ans ; la pollution plastique a été multipliée par dix en quarante ans, causant des dommages irrémédiables sur l'océan, les cours d'eau et les écosystèmes qu'ils abritent. Je ne peux me résigner à cet héritage. Nous ne pouvons pas nous résigner à ce que notre génération soit encore celle de l'inaction, celle des renoncements dictés par le court-termisme. Face à l'histoire, nous n'aurons aucune excuse, car nous savions.

Mesdames et messieurs les députés, notre devoir est de prendre nos responsabilités, de nous inscrire dans une nouvelle temporalité, celle de l'urgence. Telle est l'ambition du texte que j'ai l'honneur de vous présenter, même si beaucoup débattront du rythme que nous choisissons, pour dire qu'il est trop rapide ou trop lent.

C'est tout l'enjeu du texte que je vous présente aujourd'hui : dessiner la France de 2030, sans laisser personne au bord du chemin ; définir une écologie pratique, un juste équilibre entre la contrainte, qui permet de donner l'impulsion, et l'accompagnement, qui permet à chacun de s'inscrire dans le changement.

Le présent texte est un projet de loi de bon sens, tout simplement. Parce que tout commence par l'école, il fera entrer l'écologie dans ce pilier de la République, pour former et sensibiliser les futurs citoyens aux enjeux de la planète. Parce qu'il faut rompre avec les conséquences néfastes du consumérisme, ce projet de loi transformera la publicité et permettra à chaque citoyen de faire des choix de consommation plus vertueux, grâce à un étiquetage environnemental sur tous les produits et services qui leur sont vendus.

Parce qu'aujourd'hui encore, 48 000 personnes au moins meurent chaque année à cause de la pollution de l'air, en particulier du fait de la congestion automobile, le projet de loi crée des zones à faibles émissions dans toutes les grandes villes de France, pour mettre fin à la circulation des véhicules les plus polluants. Parce qu'il est absurde de prendre l'avion lorsque le même trajet peut être fait en deux heures et trente minutes en train, le texte limite le nombre de vols domestiques. Parce que l'on ne peut plus laisser 20 000 hectares de nature disparaître sous le béton chaque année, il met fin à la construction de centres commerciaux au milieu des champs et divise par deux la vitesse d'artificialisation des sols.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Parce que l'on ne peut plus laisser près de 2 millions de foyers vivre dans des passoires thermiques, tomber malades en hiver, suffoquer en été et payer les factures exorbitantes, nous en interdisons la mise en location, pour obliger les propriétaires à réaliser des rénovations de qualité.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Sur ce sujet, crucial, alors que le secteur du bâtiment représente un quart des émissions globales, je souhaite qu'ensemble, nous allions plus loin. Parce que la destruction volontaire de la nature ne peut plus être tolérée, la future loi nous donnera les moyens de punir sévèrement ceux qui portent atteinte à l'environnement.

Le projet de loi constitue une véritable bascule culturelle globale, qui fera de l'écologie une réalité du quotidien. Un tel combat dépasse ce seul texte, aussi fort soit-il, parce qu'aucune loi ne peut, à elle seule, mener la transformation systémique de notre pays.

Depuis le premier jour, nous agissons : pour prendre des décisions que personne n'avait osé prendre, en mettant fin à de grands projets datés, comme Notre-Dame-des-Landes, EuropaCity, la Montagne d'or…

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

… ou le terminal 4 à Roissy-Charles-de-Gaulle ; pour mobiliser les moyens sans lesquels les objectifs ne sont que du papier, avec un plan de relance vert historique, 30 milliards d'euros d'investissements pour décarboner notre économie ; pour porter haut nos ambitions à l'international et en Europe ; pour décrocher des accords historiques, qui font date ; pour renforcer le marché carbone européen et aligner nos partenaires commerciaux sur le même niveau d'exigence environnementale.

Et les autres pays nous regardent. L'expérience de la Convention citoyenne pour le climat inspire. Le Royaume-Uni a lancé une initiative similaire ; l'Allemagne et l'Espagne s'apprêtent à le faire. Nous avons le leadership dans ce combat que nous ne pouvons pas perdre. Oui, le projet de loi est une nouvelle pierre à l'édifice que nous construisons, pour assurer l'avenir du pays en responsabilité, en s'attelant à ce qu'il y a de plus ordinaire, de plus basique, mais aussi de plus crucial : nos modes de vie. Telle est l'écologie à laquelle je crois et pour laquelle je me bats : une écologie qui apporte des solutions simples dans le quotidien des Français, une écologie qui remette du bon sens dans nos vies, qui lutte contre tout ce que nous voyons d'aberrant et d'idiot, dans un système qui ne peut plus continuer comme avant.

Le texte est maintenant devant vous. Il est une chance, celle d'avoir un héritage dont nous pourrons toutes et tous être fiers. Mesdames et messieurs les députés, je relisais hier, avant de venir devant vous, quelques mots d'un grand Français, d'un grand écrivain, d'un grand député, qui a fait honneur à son pays et à cet hémicycle : Aimé Césaire. De la société coloniale, il disait qu'« une civilisation qui s'avère incapable de résoudre les problèmes que suscite son fonctionnement est une civilisation décadente. Une civilisation qui choisit de fermer les yeux à ses problèmes les plus cruciaux est une civilisation atteinte ». Ces mots résonnent toujours, encore, avec force et avec talent. Ils nous appellent à l'exigence envers nous-mêmes, envers notre société, à la responsabilité d'agir pour la transformer, pour nous, pour nos enfants, pour notre planète. Telle est ma détermination, et je sais pouvoir compter sur la vôtre.

Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem et LT.

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La parole est à M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général de la commission spéciale.

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Nous sommes aujourd'hui face à une responsabilité historique : réussir la transition écologique. C'est un devoir, c'est une obligation que nous avons vis-à-vis de notre planète et vis-à-vis des générations à venir. Je salue à cet égard les dizaines de milliers de jeunes qui, en France et dans le monde, se mobilisent pour cette cause.

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L'urgence, nous y sommes. Le réchauffement climatique est bien réel. Si l'homme – l'ensemble de l'humanité – devait consommer autant que les Européens, il faudrait 2,8 planètes terre pour subvenir à nos besoins.

Le projet de loi dont le Gouvernement vient de nous résumer l'ambition est un texte de mobilisation générale. Notre pays s'est engagé à diviser par six, par rapport à 1990, ses émissions de gaz à effet de serre, en visant une réduction de 40 % en 2030 et la neutralité carbone à l'horizon de 2050.

Les débats en commission spéciale ont été longs – quatre-vingt-seize heures, pendant onze jours consécutifs. J'en retiens l'implication et le sérieux des députés de tous les groupes politiques, qui ont fait honneur à notre Parlement. Je veux également saluer les rapporteurs thématiques, qui ont su à la fois enrichir le texte et répondre aux multiples interventions de leurs collègues.

Ce sont 7 250 amendements qui ont été déposés sur le projet de loi avant son examen dans l'hémicycle, preuve que le sujet passionne. Nous aurons un grand débat, et c'est tant mieux. Je pourrais reprocher à nos collègues siégeant à droite leurs centaines d'amendements de suppression, témoignant d'une propension à faire l'autruche, à refuser les changements. « L'écologie, oui, mais pas pour moi. » Je ne le ferai pas. Je pourrais aussi reprocher à nos collègues de gauche la brutalité de certaines de leurs propositions, qui mettraient des pans entiers de notre économie en péril et y créeraient des cassures irréparables.

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Je ne le ferai pas, car ces contradictions traversent notre société.

Comment concilier l'impérieuse nécessité du changement et notre volonté de préserver nos emplois, notre niveau de vie, notre modèle social ? C'est l'ambition de cette loi et son équilibre. Nous souhaitons incarner une écologie de progrès en associant l'ensemble de nos concitoyens, l'État, nos collectivités territoriales, nos entreprises, bref, toutes nos forces vives, dans un vaste mouvement de transformation vers une société écologique plus résiliente, plus juste, plus solidaire.

Ce projet de loi s'inscrit dans un cycle commencé en 2017 par notre majorité, qui a placé l'environnement au coeur de son action. Les lois sur le logement, les transports, l'alimentation, l'économie circulaire et la loi énergie et climat portaient toutes une vision écologique que l'on retrouve dans ce texte.

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La prise en compte de l'écologie s'étend ainsi graduellement à des pans croissants de notre société.

Comme l'a souhaité la Convention citoyenne, le projet de loi agit sur de multiples leviers et transformera la vie de 68 millions de Français et de Françaises. Mode de consommation, publicité, prise en compte des énergies renouvelables à l'échelle territoriale, verdissement de notre commande publique, transports en commun et vélo, extension des zones à faibles émissions, lutte contre l'artificialisation des sols et les passoires thermiques, virage accéléré vers l'agroécologie et vers une alimentation saine et équilibrée, répression accrue en cas d'atteinte à l'environnement… Quand on connaît les enjeux politiques, les sommes considérables à investir et la complexité de tous ces sujets, on mesure l'ambition du texte. En étant le premier pays d'Europe à inscrire certaines de ces mesures dans la loi, la France se positionne comme un des leaders mondiaux de lutte contre le dérèglement climatique.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.

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Un des leaders de la galaxie, tant que vous y êtes !

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Cependant, si beaucoup ici partagent les mêmes objectifs, nous divergeons souvent sur le chemin à suivre. Nous ne sommes pas pour une écologie de la décroissance, une écologie brutale, une écologie qui mettrait en péril nos industries automobile et aéronautique et notre agriculture. Oui, nous avons besoin de transformer notre modèle économique, …

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… mais la solution se produit avec les entreprises, pas contre elles ni dans l'incantation. N'oublions pas que c'est la croissance économique qui financera la transition écologique. Nous ne sommes pas pour une écologie punitive, qui expliquerait aux Français ce qu'ils doivent consommer, où et quand. Nous sommes pour une écologie pragmatique et populaire, qui se fonde sur la pédagogie et la confiance.

J'adhère entièrement à la philosophie de ce projet de loi, qui donne une trajectoire, des échéances, des moyens, et qui fait le pari de l'intelligence collective.

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La solution à la crise écologique réside dans de multiples outils qui se combinent – innovation technologique, énergies renouvelables, finance verte, consommation raisonnable, économie circulaire – , mais ces outils ne sont rien si nous ne parvenons pas à créer une prise de conscience, un mouvement qui unit les élus nationaux et locaux, les syndicats, les diverses composantes de ce que nous appelons la société civile.

Parce que le projet de loi est d'une importance cruciale, nous avons souhaité, avec la présidente de la commission spéciale Laurence Maillart-Méhaignerie et d'autres députés, un titre spécifique consacré à la gouvernance du texte et au suivi de sa mise en oeuvre et de son impact.

C'est un honneur pour moi et pour notre majorité de soutenir ce projet de loi, qui est à la hauteur d'un des plus grands défis de notre histoire.

Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur plusieurs bancs du groupe Dem.

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La parole est à Mme Aurore Bergé, rapporteure de la commission spéciale pour le titre Ier.

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La Convention citoyenne pour le climat est issue d'une interrogation fondamentale : comment, après la colère suscitée par la taxe carbone et face à l'urgence du dérèglement climatique, associer les Français aux décisions qui les concernent et les touchent directement ? C'est à cette question que les membres de la Convention citoyenne se sont employés à répondre. Notre enjeu, ici, est de réconcilier plusieurs visions.

Réconcilier la démocratie délibérative et la démocratie représentative, d'abord. On dit notre démocratie fatiguée, on constate une confiance largement érodée. Il est donc inenvisageable de donner le sentiment d'une concurrence entre ces deux processus démocratiques légitimes.

Réconcilier pour refuser toute vision idéologique, ensuite. L'écologie n'est pas un dogme. Elle est une urgence, une nécessité. Ce n'est pas en supprimant le mot « croissance » des manuels scolaires que nous lutterons contre le dérèglement climatique, mais en nous dotant des outils efficaces de mesure, de contrôle et, le cas échéant, de contraintes, et en donnant aux Français les moyens d'être pleinement acteurs de l'écologie. Personne ne gagnera à alimenter la défiance envers nos entreprises, nos TPE, nos PME et nos agriculteurs. Ils sont et doivent être les alliés de la transition écologique.

Réconcilier, enfin, pour ne rien rogner de notre ambition écologique, à savoir le respect de la trajectoire carbone que nous nous sommes fixée. Ce projet de loi en est une brique essentielle.

Le titre Ier permettra de déclencher plusieurs révolutions vertueuses dans notre façon de consommer, le préalable à ces changements profonds étant une meilleure information des consommateurs, parce que nous sommes autant citoyens que consommateurs. En commission spéciale, ce titre a été largement retravaillé : nous avons clarifié, précisé, enrichi et rendu normatives plusieurs dispositions programmatoires. Nous avons adopté plus de cinquante amendements issus de la majorité comme des oppositions.

Sur l'affichage environnemental, ou environnemental et social, nous avons apporté des compléments indispensables, notamment pour assurer une pleine prise en compte des externalités du monde agricole. Nous irons plus loin dans la transparence des données et l'open data.

Comme vous l'avez indiqué, madame la ministre, l'article 2 inscrit, dans les missions transversales du service public de l'éducation, l'éducation à l'environnement et au développement durable. Nous proposerons d'élargir ce champ à l'enseignement supérieur. Nous avons procédé à la réécriture de l'article 3 pour donner un champ d'action plus large aux comités d'éducation à la santé, à la citoyenneté et, dorénavant, à l'environnement.

La publicité a un rôle de prescription essentiel à jouer. Elle est aussi un levier essentiel de financement de l'information, du pluralisme de nos médias et de la création audiovisuelle et cinématographique. L'article 4 opère un changement de paradigme en interdisant pour la première fois la publicité en faveur de la vente d'énergies fossiles, directement responsables du dérèglement climatique. Quel autre pays met une telle mesure en oeuvre ? Parce que les sanctions ne doivent pas être inférieures aux bénéfices qui découleraient de la publicité illégale, je souhaite que le montant de celles-ci puissent atteindre la totalité des dépenses consacrées à l'opération illégale.

Au-delà des seules énergies fossiles, nous visons à réduire la publicité audiovisuelle en faveur des produits et services qui auront un impact négatif sur le climat. Nous devons aller plus loin encore dans la transparence et le contrôle des engagements qu'ont pris devant vous, madame la ministre, les annonceurs et les médias, avec une évaluation annuelle, mesurée et rendue publique. Je proposerai également d'étendre les codes de bonne conduite aux partenariats mis en place entre des annonceurs et des influenceurs sur des plateformes de partage de vidéos, qui échappent souvent à la règlementation en vigueur.

Comme je m'y étais engagée lors de l'examen du texte en commission spéciale, j'ai déposé des amendements tendant à renforcer la lutte contre le blanchiment écologique. Nous devons combattre avec détermination les pratiques commerciales trompeuses en matière environnementale.

Nous irons également plus loin dans le transfert de compétences aux maires, qui sont les premiers acteurs dans nos territoires. Nous encadrerons aussi les publicités et les enseignes situées à l'intérieur des vitrines de nos commerçants, mais en lien avec leur droit de propriété et leur liberté. C'est pourquoi nous nous sommes limités à la réduction de la pollution lumineuse.

Nous avons revu la portée de l'article 8, afin qu'il soit directement normatif, et donc interdit les avions publicitaires. Quant à l'article 9, qui propose d'expérimenter le dispositif « oui pub », nous avons, là encore, choisi de donner de la liberté aux collectivités pour qu'elles puissent prévoir des exemptions. L'article 10 interdira la distribution gratuite d'échantillons pour limiter enfin le gaspillage.

Enfin, la commission spéciale a totalement réécrit les articles 11 et 12, qui suscitaient des inquiétudes dans certains secteurs. Il était légitime d'écouter celles-ci et de rester dans la droite ligne de ce que nous avons nous-mêmes voté, il y a peu, dans la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire.

La lutte contre le dérèglement climatique est un enjeu collectif, qui nous dépasse et qui doit se faire – vous l'avez dit, monsieur le rapporteur général – non pas contre, mais avec les entreprises, les industriels, les artisans, les commerçants, les maires, les agriculteurs, avec les Français et aussi, j'ose le dire, avec les parlementaires.

Oui, madame la ministre, ce texte est une chance. Il nous appartient désormais de nous en saisir à l'Assemblée nationale.

Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Mme Marguerite Deprez-Audebert applaudit également.

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La parole est à Mme Cendra Motin, rapporteure de la commission spéciale pour le titre II.

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Il y a maintenant plus de quarante ans que le monde économique a pris conscience, au niveau international, de son rôle sur le changement climatique. Avec la première Conférence mondiale pour le climat, en 1979, et les conférences des parties (COP) qui lui ont succédé, les États et le monde économique se sont engagés dans les transitions nécessaires, mais il reste encore beaucoup à faire pour rendre notre économie plus sobre et construire un nouveau modèle capitaliste plus transparent et plus juste.

Nous y avons déjà contribué avec la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, dont nous reparlerons, et avec la loi PACTE – plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises. L'Europe y travaille également, avec l'aboutissement, attendu avant la fin de l'année, d'une norme de rapportage extra-financier des entreprises, qui permettra plus de transparence et des critères communs d'amélioration.

Nous avons aujourd'hui l'occasion de poursuivre ce travail, à travers le titre II, qui a pour objectif d'accompagner de manière très concrète l'ensemble des acteurs économiques. Je vous propose d'en faire le tour.

Pour les entreprises, d'abord, cela signifie adopter de nouveaux modes de production plus respectueux de l'environnement. C'est l'un des piliers du plan France relance et de ses programmes d'investissement. Parce que la recherche fondamentale d'aujourd'hui préfigure les avancées technologiques d'après-demain, nous nous devons d'être au rendez-vous. C'est pourquoi, à l'article 14, nous avons aligné la stratégie nationale de recherche sur la stratégie bas-carbone et la stratégie biodiversité.

Cela veut dire aussi consommer autrement, notamment en matière d'énergie. L'extension de l'obligation d'équiper le toit de certains bâtiments professionnels de plus de 500 mètres carrés de dispositifs de production ou d'économie d'énergie a été renforcée en commission spéciale. Pour étendre encore le champ des toits vertueux, je vous proposerai d'y intégrer les immeubles de bureau.

Cela signifie également que l'entreprise doit anticiper ses changements pour accompagner les salariés dans la transition. Au cours des prochaines années, les directeurs des ressources humaines (DRH) devront relever un nouveau défi en intégrant au dialogue social les enjeux environnementaux et en accompagnant la transformation des métiers et des organisations. C'est l'objet d'un chapitre entier de ce titre, car, sans accompagnement des salariés dans cette transition, il n'y a pas de vraie loi climat.

Autre acteur de poids : la puissance publique et ses 200 milliards de commande publique, qui constituent un formidable levier de transformation pour des milliers d'entreprises. Il s'agit de devenir exemplaire dans ses actes d'achat, mais aussi dans leur concrétisation, en imposant la prise en compte de l'environnement non seulement dans les critères d'attribution d'un marché, mais également dans ses critères d'exécution, ce qui va au-delà de ce que les membres de la Convention citoyenne pour le climat avaient imaginé. Ensemble, nous irons jusqu'au bout de la logique en étendant ces obligations aux concessions qui, à elles seules, représentent environ 120 milliards d'euros.

Les collectivités territoriales seront amenées, à partir de la prochaine programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), à jouer un rôle plus fort dans le déploiement des énergies renouvelables sur leur territoire. Aussi, pour permettre aux régions et aux parties prenantes d'être véritablement force de proposition, nous défendrons, le rapporteur général et moi-même, un amendement tendant à créer un comité régional de l'énergie, lieu d'échange entre les acteurs au sein de la région, dont les propositions seront attendues pour alimenter le décret relatif aux objectifs de déploiement de la PPE. Le développement de communautés d'énergies renouvelables ou citoyennes, qui permettront à des acteurs locaux et à des citoyens de s'impliquer directement dans la production d'énergies renouvelables, sera un des outils de ce déploiement régional.

Enfin, le texte offre au consommateur, qui est l'acteur principal de l'évolution de l'économie, une nouvelle opportunité de réparer et de moins jeter. La loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire a ouvert la voie, il y a un an. Nous continuons son oeuvre avec de nouveaux objets du quotidien : vélos, outils de bricolage et de jardinage motorisés. Dès 2023, leurs pièces devront être disponibles pour au moins cinq ans et, grâce au travail de la commission spéciale, il sera possible d'utiliser, pour les réparer, des pièces issues du réemploi.

Reste un sujet majeur qui nous touche tous et nous inquiète de plus en plus : celui de l'eau, donc des écosystèmes aquatiques ; ce qui nous entoure, ce qui nous protège des inondations et qui atténue les sécheresses, ce qui préserve la biodiversité et la qualité de nos terres agricoles. Nous inscrivons le principe de leur préservation dans le texte et nous reconnaissons les services environnementaux qu'ils nous rendent.

Grâce au travail de notre collègue Martial Saddier, que je remercie de nouveau, nous avons ajouté un article visant à protéger nos ressources stratégiques en eau potable auquel nous apporterons quelques ajustements, parmi lesquels l'accompagnement de l'adaptation des activités humaines dans les zones à protéger.

Nous avons fait de belles avancées en commission spéciale et je me réjouis de la qualité des débats qui ont eu lieu. Je sais que nous allons encore enrichir ce texte en séance et, par avance, je vous en remercie.

Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Mme Marguerite Deprez-Audebert applaudit également.

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La parole est à M. Damien Adam, rapporteur de la commission spéciale pour les articles 20 et 21 du titre II.

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Notre assemblée va enfin examiner en séance publique la réforme du code minier tant attendue depuis douze ans. Alors que plusieurs projets sont restés dans les cartons ces dernières années, notre majorité prend enfin ce sujet à bras-le-corps pour que la réforme aboutisse.

En effet, le code minier actuel ne répond plus aux attentes sociales et environnementales, et sa dernière modification substantielle date de 1994. Cette réforme est également très attendue par nombre d'entre nous, chers collègues, tant elle aura des conséquences dans nos circonscriptions de métropole et d'outre-mer, que ce soit pour les activités minières passées que pour celles présentes ou futures. À ce titre, je rappelle que cette réforme a fait l'objet d'une large concertation avec l'ensemble des acteurs depuis 2018.

Prévue aux articles 20 et 21 du projet de loi, elle vise avant tout à garantir un haut niveau de protection de notre environnement et de la santé des populations riveraines dans les travaux miniers. Le 1o de l'article 20 étend la liste des intérêts protégés par le code minier, en ajoutant la santé publique, notion aujourd'hui absente du code, afin de mieux prendre en considération la santé des populations riveraines des sites, qu'ils soient fermés ou encore en activité. La plus importante des innovations introduites par la réforme est la prise en considération de tous les enjeux et de tous les intérêts à protéger, à chaque étape de la vie juridique d'une mine, avec la réalisation d'une analyse environnementale, économique et sociale dès l'octroi, l'extension ou la prolongation d'un titre minier, ce qui n'est pas prévu aujourd'hui.

La seconde innovation de la réforme est de prévoir des outils juridiques qui permettront à l'administration de faire respecter efficacement le droit minier et ses nouvelles exigences, à commencer par la possibilité de refuser un titre minier en cas de « doute sérieux » sur la menace significative que son projet représente pour l'environnement, la santé publique ou tout autre intérêt protégé par le code minier. Aujourd'hui, l'État n'en a pas la faculté, alors qu'elle aurait permis d'éviter un contentieux comme celui de la Montagne d'or. En outre, l'amendement de notre collègue Lénaïck Adam a permis de renforcer très significativement les sanctions contre les infractions au droit minier, s'agissant d'activités illégales et d'atteintes aux intérêts environnementaux. Quant à moi, je vous proposerai de soumettre les activités minières au régime de la responsabilité environnementale, et d'étendre les garanties financières demandées aux opérateurs, afin de couvrir notamment les éventuelles interventions en cas d'accident avant ou après la fermeture d'un site, ce qui constitue une mesure très concrète.

Si plusieurs des évolutions annoncées seront précisées par voie d'ordonnance, l'article 20 propose déjà des mesures d'application immédiate relativement à l'après-mine. Ainsi, il renforce la consultation des communes et systématise une nouvelle participation du public aux décisions relatives à l'arrêt des travaux, afin d'éclairer le préfet sur les enjeux locaux.

Ensuite, l'article 20 prolonge pendant trente ans la police résiduelle des mines, qui permet au préfet d'obliger un ancien opérateur à intervenir en cas de menaces survenant après la fin de son activité, comme c'est le cas aujourd'hui pour les sites industriels, les installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE). En commission spéciale, je vous ai proposé un amendement visant à sécuriser le point de départ de cette responsabilité trentenaire.

Enfin, l'article 20 permet d'engager une action en responsabilité à l'encontre de la société mère d'un opérateur qu'elle aurait volontairement laissé faire défaut. Cette mesure permettra à l'État de retrouver un responsable dans l'après-mine.

J'ajoute que nos travaux devront également répondre à une préoccupation très importante pour beaucoup de parlementaires avec qui j'ai pu échanger : le traitement du dommage minier. Sans anticiper la suite des débats, le Gouvernement proposera d'étendre l'habilitation à légiférer par ordonnance pour définir ce qu'est un dommage minier et réformer son régime de réparation et d'indemnisation, ce sujet complexe méritant une ample concertation.

En outre, la réforme du code minier présente une dimension stratégique majeure. Aujourd'hui, nos industriels sont entièrement dépendants des ressources minérales d'autres pays, comme la Chine, qui ne respectent pas nos exigences sociales ni environnementales. Par conséquent, il est indispensable de donner les moyens à la France de relancer de manière raisonnée et responsable la valorisation des ressources de nos sous-sols, en se dotant d'une véritable stratégie nationale, afin d'assurer notamment notre transition écologique.

À propos de transition, la réforme du code minier inscrite dans le projet de loi reconnaît à une énergie d'avenir, l'hydrogène, un rôle majeur, en établissant un cadre juridique pour son stockage souterrain.

Pour conclure, l'article 21 comprend un volet consacré à l'outre-mer, notamment à la Guyane, avec deux axes principaux : simplifier les procédures pour les petits projets miniers ultramarins et accentuer encore la lutte contre l'orpaillage illégal en Guyane qui est un véritable fléau pour notre pays. À ce sujet, nous avons voté en commission l'introduction de deux articles additionnels. Le premier habilite les agents de l'Office français de la biodiversité (OFB) et de l'Office national des forêts (ONF) à constater les infractions au code minier sur tout le territoire de la Guyane. Le second étend le report du début de la garde à vue autorisé en Guyane à l'ensemble des infractions au code minier.

Telle est la réforme du code minier inscrite dans le projet de loi. J'espère vous avoir convaincus qu'elle était utile et nécessaire.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.

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La parole est à M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur de la commission spéciale pour le titre III.

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Je tiens tout d'abord à souligner le travail effectué par la commission spéciale qui a enrichi le projet de loi, fruit du travail préparatoire de la Convention citoyenne pour le climat, que je salue.

Attente, espoir, demande de plus d'ambition pour certains, inquiétude et colère pour d'autres, le projet de loi ne laisse personne indifférent. Pour les responsables politiques que nous sommes, cela crée un double devoir : être à la hauteur des attentes des Français face aux enjeux du dérèglement climatique, mais aussi accompagner dans tous les territoires la transition écologique et sociale ambitieuse que nous défendons. Nous partageons tous la conviction que le statu quo n'est plus une option, qu'il est nécessaire de faire entrer l'écologie dans la vie quotidienne des Français. C'est précisément ce que je vous propose dans le titre III, « Se déplacer », dont j'ai l'honneur d'être rapporteur.

Le chapitre Ier renforce le développement de mobilités durables, ce qui passe par un objectif intermédiaire de décarbonation du parc automobile français. Ainsi, 2030 marquera la fin de vente des voitures thermiques les plus polluantes. Je défendrai également en séance un amendement visant à fixer à 2040 l'objectif de fin de vente des véhicules thermiques lourds de transport de personnes et de marchandises. Parce que le développement des mobilités douces est primordial, je reste convaincu que le vélo a toute sa place dans le texte et que le soutien financier est la clé de la réussite. C'est pourquoi je vous proposerai un amendement qui élargit la prime à la conversion aux cycles et aux vélos électriques.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.

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Afin de favoriser l'intermodalité, le texte a été enrichi de propositions relatives à l'équipement des parkings-relais en stationnements sécurisés pour vélos. Nous devons maintenant aller plus loin dans l'équipement des parcs de stationnement, en rendant obligatoire l'installation de bornes de recharge pour les véhicules électriques et hybrides rechargeables.

Enfin, l'instauration des zones à faibles émissions mobilité dans les agglomérations de plus de 150 000 habitants et l'obligation d'expérimenter des voies réservées aux abords de ces zones constituent des éléments essentiels de la lutte contre la pollution atmosphérique. Je souhaiterais également renforcer en séance le développement d'itinéraires cyclables dans toutes ces zones.

Le chapitre II vise à réduire l'incidence du transport routier de marchandises sur l'environnement, notamment en supprimant l'avantage fiscal sur la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), dont bénéficient les transporteurs de marchandises sur le gazole routier à l'horizon 2030 et ce, dans le cadre européen.

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Bien que convaincu que rail et route ont des complémentarités encore sous-exploitées, je souhaite affirmer devant vous que la transition énergétique passera aussi par le camion vert.

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Le transport routier de marchandises est un secteur stratégique. C'est pour cette raison que l'accompagnement des transporteurs français dans la transition est primordial. Nous avons commencé à le faire, nous continuerons.

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Pour que l'effort de réduction des émissions ne pèse pas uniquement sur les transporteurs, les entreprises « chargeurs » devront élaborer des plans d'action de réduction de leurs émissions, en prévoyant notamment le recours aux modes fluvial et ferroviaire.

Enfin, l'objectif de neutralité carbone nécessite de limiter la croissance du trafic aérien et les émissions de ce secteur, dont je connais les difficultés actuelles. La suppression des lignes aériennes lorsqu'il existe une alternative en train de moins de deux heures trente, et l'interdiction de la construction ou de l'extension d'aéroports permettront d'atteindre cet objectif.

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Le mécanisme de compensation carbone des vols domestiques constitue également un outil innovant dont il sera nécessaire de mesurer les effets à plus long terme. C'est pourquoi la commission spéciale a adopté un amendement visant à la publication d'un bilan annuel relatif à l'application des programmes de compensation.

Mes chers collègues, je suis convaincu que nous aurons des débats riches car nous partageons tous, j'en suis certain, le même objectif : réduire largement les émissions de gaz à effet de serre des secteurs, tout en préservant la compétitivité du transport français et en accompagnant nos concitoyens vers des mobilités plus propres et plus durables.

Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe Dem.

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La parole est à M. Mickaël Nogal, rapporteur de la commission spéciale pour les chapitres Ier et II du titre IV.

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J'ai l'honneur d'être rapporteur de la partie « Se loger » du projet de loi, laquelle porte sur les enjeux relatifs à la rénovation énergétique des logements et à la réduction de la consommation d'énergie.

Le projet de loi qui nous réunit représente un tournant dans la lutte contre le dérèglement climatique. Le texte que nous voterons s'inscrit dans un travail collaboratif, qui a débuté avec les propositions formulées par la Convention citoyenne pour le climat, exercice démocratique inédit voulu par le président Emmanuel Macron.

Le logement est au coeur de notre ambition. En effet, le secteur du bâtiment représente 45 % de la consommation d'énergie dans le pays et un quart des émissions de gaz à effet de serre. Sans amélioration de la performance énergétique et environnementale du bâti, il n'est pas de transition écologique possible. Les enjeux sont environnementaux, mais aussi sanitaires, sociaux et économiques. En même temps qu'elle représente le plus grand vivier d'économie de CO2, la rénovation énergétique constitue aussi la promesse d'une vie meilleure pour tous les Français.

Nous devons aujourd'hui tout mettre en oeuvre pour y parvenir. Nous ne partons pas de rien : des avancées considérables ont déjà été réalisées depuis le début de la législature, notamment dans la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ÉLAN), la loi relative à l'énergie et au climat, et le plan de relance, dans le cadre duquel l'État investit 6,7 milliards d'euros pour la rénovation énergétique des bâtiments. Beaucoup a été fait, mais le chemin est encore long.

Alors que l'ancien diagnostic de performance énergétique (DPE) – cette fameuse étiquette qui classe les logements de A à G – indiquait uniquement la consommation d'énergie, le DPE nouvelle génération prévu à l'article 39 est une étiquette unique associant la consommation du logement et ses émissions de gaz à effet de serre. Ainsi, ce nouveau DPE, qui entrera en vigueur le 1er juillet prochain, constitue une avancée majeure dans la prise en considération de l'incidence environnementale des logements. Il sera également plus fiable qu'aujourd'hui et rendu opposable pour mieux protéger l'ensemble des propriétaires et des locataires.

Si nous voulons atteindre les objectifs ambitieux que nous nous sommes fixés, c'est-à-dire la sobriété énergétique et la neutralité carbone à horizon 2050, il nous faut réunir trois conditions essentielles que nous allons inscrire ensemble dans le projet de loi. Tout d'abord, donner à tous les Français un égal accès à l'information sur tout le territoire grâce au guichet unique dédié à la rénovation prévu à l'article 43.

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Ensuite, en nous inspirant des recommandations de la mission Sichel, nous proposerons un accompagnement clés en main, qui permettra de guider l'ensemble de nos concitoyens dans leur projet de rénovation, de son élaboration jusqu'au contrôle des travaux réalisés, en passant par l'accès au financement ou le choix de professionnels reconnus. Enfin, la trajectoire ambitieuse que nous fixons dans le projet de loi ne peut se concrétiser que par un engagement fort de l'État d'investir dans le temps, afin de réduire le reste à charge des ménages, en particulier des plus modestes, grâce à un système stable et durable d'aides publiques.

Saluons au passage l'effort sans précédent du Gouvernement, qui consacre 2 milliards d'euros du plan de relance à la rénovation énergétique des logements, à travers MaPrimeRénov'. Cet effort, tout simplement inédit, devra se poursuivre.

La trajectoire prévue implique d'accompagner l'ensemble des Français dans la rénovation, qu'ils soient propriétaires occupants ou propriétaires bailleurs, qu'il s'agisse d'une maison individuelle ou d'une copropriété. Quant à l'interdiction de mise en location des passoires énergétiques, elle s'appliquera dès 2025 pour tous les logements classés G, …

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Nous allons travailler, chère collègue ; attendez de voir les amendements. L'interdiction s'appliquera, donc, dès 2025 pour tous les logements classés G, ce qui représente près de 600 000 logements.

En 2028, l'interdiction sera étendue aux logements classés F, ce qui représente un total de 1,8 million de logements. Enfin, nous voulons aller encore plus loin avec le Gouvernement, en interdisant la mise en location des logements classés E en 2034.

M. le rapporteur général applaudit.

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La rénovation des logements classés G, F et E, qui représentent un total de 4,4 millions de logements, devra donc être réalisée avant ces différentes dates butoirs.

Le travail en commission spéciale nous a notamment permis d'avancer ensemble sur la définition de la rénovation globale et performante. Nous précisons ainsi les six postes de travaux de rénovation énergétique sur lesquelles les rénovations performantes pourront s'appuyer et nous fixons une définition de la rénovation globale.

Les mesures relatives au logement constituent une pièce maîtresse du projet de loi et de notre stratégie face à l'urgence stratégique qui, je le rappelle, s'impose à nous tous. Enrichies par le travail parlementaire, elles n'ont pas de précédent et s'élèvent à la hauteur des attentes de nos concitoyens.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe Dem.

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La parole est à M. Lionel Causse, rapporteur de la commission spéciale pour les chapitres III à V du titre IV.

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Le projet de loi dont nous commençons l'examen dans l'hémicycle est d'une ampleur inédite. C'est un pas de plus vers une consommation et une production plus vertueuses, des déplacements plus respectueux de l'environnement, des logements et des villes plus vertes et une alimentation plus durable. Outre sa portée écologique, ce texte s'appuie sur un exercice démocratique inédit, qui allie la participation des citoyens à la représentativité du Parlement.

Après deux semaines d'examen intense en commission spéciale, je suis particulièrement fier des avancées que nous proposons dans la partie consacrée à la lutte contre l'artificialisation des sols, dont je suis le rapporteur et qui a fait couler beaucoup d'encre – elle a fait l'objet de plus de 1 000 amendements en commission spéciale et de près de 1 500 amendements pour la séance.

Durant l'examen en commission spéciale, j'ai toujours tenu à maintenir l'équilibre entre les élus locaux et les citoyens – pour ancrer le texte dans le territoire – , avec les agriculteurs – pour la protection des espaces agricoles – , avec les associations – pour leur ambition en matière de protection des espaces et de la biodiversité – , ainsi qu'avec les acteurs économiques – pour leur capacité à revitaliser nos villes.

Nous gravons dans la loi un objectif de réduction par deux de l'artificialisation des sols entre la décennie qui vient de se clore et celle à venir. C'est un objectif indéniablement ambitieux, qui limitera la tendance des collectivités à ouvrir toujours plus d'espace à urbaniser, tout en les accompagnant, par le biais de nombreux outils permettant de densifier et améliorer le bâti existant.

Nous formulons une définition claire de l'artificialisation des sols. L'objectif en la matière sera fixé pour chaque région, qui veillera ensuite à assurer une répartition équilibrée de l'effort sur son territoire, dans le cadre d'une planification…

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… et en fonction des situations des bassins de vie.

Notre objectif n'est pas tant d'empêcher la consommation des sols que de la rendre intelligente, proportionnée, et de l'adapter aux besoins. Nous renforcerons donc en même temps les outils de mesure et d'analyse de l'artificialisation.

Dans le même objectif d'adaptation de notre urbanisation, nous limiterons l'implantation, en périphérie des villes, des grandes surfaces commerciales, qui sont très consommatrices d'espaces et impliquent un grand nombre de déplacements très polluants. Un tel moratoire permettra de protéger les commerces de proximité, donc de revitaliser les centres-villes.

Le texte comprend en outre des mesures visant à améliorer la connaissance qu'ont les collectivités de leur foncier et les outils dont elles disposent pour mener des opérations de requalification, notamment des friches, confortant ainsi l'action impulsée par le plan de relance et par le fonds friches.

En parallèle de cette action visant à mieux maîtriser la croissance urbaine, le texte comprend des mesures renforçant nettement la protection des espaces naturels, par exemple l'inscription dans la loi d'une stratégie nationale des aires protégées, qui fixe l'ambition de protéger 30 % de notre territoire.

Enfin, et c'est une partie que j'ai à coeur en tant qu'élu des Landes, nous inscrivons dans la loi des outils pour lutter contre le recul du trait de côte dans les territoires littoraux. Grâce à la création d'un zonage selon le degré d'exposition, à l'identification des communes à risques et à l'instauration d'un droit de préemption, les élus du littoral pourront améliorer la résilience de leurs collectivités. C'est le fruit d'un long travail entre l'État, les collectivités et les députés du groupe d'études sur le littoral, dont nous pouvons réellement nous réjouir.

Si nous avons consolidé les acquis des travaux de la Convention citoyenne pour le climat, je suis également très fier des avancées obtenues en commission spéciale, qui permettent de porter encore plus loin l'ambition de ce texte, à commencer par le fameux article 52 sur l'interdiction de construction de nouveaux centres commerciaux.

J'entends la demande de certains d'y inclure les entrepôts logistiques d'e-commerce, tant pour résoudre le problème posé par leur concurrence déloyale avec les autres commerces que pour rendre plus vertueuse leur implantation dans nos territoires. Malheureusement, une simple interdiction ne résoudrait pas la question environnementale et augmenterait les externalités négatives. Pour agir malgré tout, et afin de permettre aux élus locaux, au plus près du terrain, d'instaurer une planification territoriale cohérente, j'ai proposé d'inclure les entrepôts logistiques dans les documents d'urbanisme.

M. Mounir Mahjoubi applaudit.

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Grâce à l'ajout d'un volet logistique, le document d'aménagement artisanal et commercial permettra de maîtriser l'impact de tels entrepôts sur les équilibres territoriaux. Je souhaite aller encore plus loin en séance, en proposant d'associer l'État à cette démarche, par l'intermédiaire du préfet, dont l'avis conforme serait nécessaire pour déroger à la règle de l'interdiction de nouvelle implantation.

Concernant la biodiversité, nous avons ajouté aux 30 % d'aires terrestres et marines protégées 10 % d'aires fortement protégées, conformément aux engagements du Président de la République.

Pour lutter contre l'hyperfréquentation touristique des hauts lieux de la nature et protéger ces espaces durablement, nous inscrirons dans la loi le droit, pour les élus locaux, d'en réguler l'accès.

L'ensemble de ces mesures nous promet de beaux débats en séance, que je souhaite apaisés, constructifs et pragmatiques. Nous devrons être à la hauteur des attentes des Français qui, hier encore, en manifestant pour le climat, ont montré qu'ils attendaient un changement de paradigme dans l'ensemble des pans de notre quotidien. L'heure est donc à l'action, et nous devons tous absolument être au rendez-vous.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.

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La parole est à Mme Célia de Lavergne, rapporteure de la commission spéciale pour le titre V.

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Pour évoquer le titre V du projet de loi, « Se nourrir », permettez-moi de vous amener de la fourche à la fourchette.

La fourche, d'abord. De tout temps, les paysans ont déployé leur énergie, leur savoir-faire et leur inventivité pour répondre aux attentes de la société : nous nourrir toujours plus, toujours mieux, en respectant leur outil de travail, la terre, bien commun de l'humanité et leurs bêtes. Aujourd'hui, ils font aussi face au dérèglement climatique et s'y préparent. Je veux avant tout rendre hommage à leur dévouement et à leur capacité d'adaptation et de transformation. Des efforts, ils en ont déjà fait, et de considérables. Ils sont prêts à en faire davantage mais, pour cela, ils veulent notre considération et la juste rémunération de leur travail. Cette rémunération, nous y travaillons depuis la loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite loi ÉGALIM ; bientôt, notre collègue Grégory Besson-Moreau vous présentera en outre une proposition de loi sur ce sujet.

Le chemin à parcourir est immense. La rémunération des producteurs baisse depuis plus de trente ans ; la moitié d'entre eux gagnent moins de 500 euros par mois. Selon l'INSEE, c'est la profession qui travaille le plus mais qui gagne le moins, et, toutes catégories socioprofessionnelles confondues, celle dont le taux de suicide est le plus élevé. Nous devons une juste rémunération aux producteurs : pour eux, pour la souveraineté alimentaire de notre pays et pour le climat, car, toutes les études le montrent, un paysan qui gagne bien sa vie est un paysan qui transforme plus facilement ses pratiques.

Pour faire progresser ce sujet en mobilisant le consommateur, qui constitue un maillon très puissant pour le changement des pratiques des distributeurs et des industriels, je défendrai un amendement visant à expérimenter un indicateur, pour chaque produit alimentaire, de la juste rémunération au producteur – une sorte de « rémunéra-score », sur le modèle du nutri-score, qui permettra un choix responsable et éclairé du consommateur et incitera les industriels et distributeurs à les considérer davantage.

En matière d'enjeux climatiques, le projet de loi cible les émissions d'ammoniaque et de protoxyde d'azote, qui représentent 42 % des émissions de gaz à effet de serre de l'agriculture française.

En France, si la question de l'azote a été traitée sous l'angle des nitrates présents dans l'eau et si les agriculteurs ont déjà diminué l'utilisation d'engrais azotés minéraux de 20 % depuis 1990, force est de constater qu'il reste un long chemin à parcourir quant aux pollutions dans l'air. Nous devons le parcourir ensemble : exécutif, Parlement et agriculteurs. C'est selon moi le seul moyen pour aboutir sur cet enjeu commun, et c'est le sens des amendements déposés en commission spéciale, qui permettront au Parlement de disposer annuellement d'un état des lieux des efforts en la matière, donc de légiférer en amont de chaque projet de loi de finances en connaissance de cause. Si les objectifs fixés aux articles 62 et 63 ne sont pas respectés, l'instauration d'une fiscalité adaptée est prévue ; surtout, des budgets ad hoc permettront de respecter la trajectoire.

Venons-en à la fourchette et à nos assiettes. L'article 59 ouvre le débat de la place du repas végétarien dans nos cantines et l'article 60 celui de la qualité de la restauration collective. Ma conviction est simple : cessons d'opposer défenseurs de la viande et végétariens.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Très bien !

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Et puis, jusqu'à preuve du contraire, un producteur de légume est aussi un agriculteur !

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Les éleveurs eux-mêmes ne le font pas. Comme nous y invitent les Français, remettons de la qualité, de la proximité dans nos assiettes et mettons-y davantage de repas végétariens.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.

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Il n'y a pas lieu d'opposer ceux-ci aux autres ; ils ne sont pas l'apanage d'un parti, ni l'antichambre d'organisations antispécistes. En revanche, ils font l'objet d'une attente sociétale forte de nos concitoyens – nous sommes en retard pour y répondre.

Ces repas, qui plus est, servent l'environnement, puisqu'une assiette végétarienne est 30 % moins émettrice de gaz à effet de serre qu'une assiette traditionnelle. Je vous propose donc, aux articles concernés, un chemin permettant de concilier équilibre nutritionnel, qualité des produits servis, liberté de choix du régime alimentaire et respect de la libre administration des collectivités territoriales. L'expérimentation, prévue dans la loi ÉGALIM, d'un menu hebdomadaire végétarien serait ainsi étendue.

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L'État s'engagerait dans une démarche proactive dans les cantines des administrations, des établissements et entreprises publics. Une concertation aurait lieu avec les collectivités, pour les inciter à l'expérimentation et évaluer celle-ci.

Cette démarche sera complétée par l'instauration d'un objectif de qualité spécifique aux produits de l'élevage et de la pêche et d'un objectif en matière de circuits courts, qui permettra aux produits des projets alimentaires territoriaux d'entrer dans nos cantines.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.

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Ainsi, chers collègues, ces travaux nous invitent à mettre plus de durabilité, plus d'équité, plus de souveraineté alimentaire dans nos assiettes, et de tout cela nous débattrons très prochainement.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM. – Mme Marguerite Deprez-Audebert applaudit également.

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La parole est à M. Erwan Balanant, rapporteur de la commission spéciale pour le titre VI.

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En commission spéciale, nous avons débattu longuement sur le texte proposé par le Gouvernement à l'issue des travaux de la Convention citoyenne pour le climat. Je veux saluer nos débats, qui furent sérieux, passionnés et constructifs ; je forme le voeu que cette écoute républicaine et cette volonté d'améliorer le texte se maintiennent en séance. Nous honorerons ainsi la représentation nationale et prouverons l'efficacité d'une démocratie continue, articulant démocratie participative et démocratie représentative.

Une société repose sur des normes instaurées collectivement. Si le droit, instrument de nos choix sociétaux, reflète notre relation aux biens et à autrui, les lois doivent aussi, désormais, poser le cadre de notre relation à l'environnement, à la nature. Les citoyens et les citoyennes membres de la Convention ont ainsi souhaité introduire dans notre arsenal législatif un crime d'écocide défini en ces termes : « Constitue un crime d'écocide toute action ayant causé un dommage écologique grave en participant au dépassement manifeste et non négligeable des limites planétaires, commise en connaissance des conséquences qui allaient en résulter et qui ne pouvaient être ignorées. »

Cette idée de crime d'écocide reposant sur les limites planétaires est stimulante mais, en approfondissant ce concept, à la lumière des nombreux travaux dont il a fait l'objet, force est de constater que la création de ce crime soulève de nombreuses interrogations.

Un premier point quasi unanime qui ressort des auditions que nous avons menées est que le crime d'écocide doit s'envisager dans une perspective transnationale et supranationale. Il n'a pas aujourd'hui d'intérêt à l'inscrire dans notre droit national et, pour les défenseurs de l'environnement, les acteurs de terrain, les avocats et enfin les magistrats, cette nouvelle qualification proposée par les citoyens n'est pas l'enjeu.

Pour autant, la volonté des citoyens est légitime, et je pense que nous la partageons tous. Mais, si nous devons mieux protéger la nature, j'ai acquis la conviction qu'inscrire le crime d'écocide dans notre droit national n'est ni l'urgence ni la solution pour une justice plus protectrice de nos écosystèmes vivants.

Comment avancer, alors, pour mieux protéger l'environnement, punir ceux qui trichent et offrir un cadre juridique fiable aux acteurs économiques ? Nous avons déjà des normes et des règlements, mais les questions que nous devons nous poser consistent à déterminer si notre modèle juridique est suffisamment protecteur : est-il efficace ? Est-il compréhensible par tous les acteurs – économiques, associatifs – , par les pouvoirs publics et par les citoyens ?

Au mois de décembre 2020, dans le cadre du texte sur le parquet européen, nous avons posé une partie des fondations du chantier devant permettre d'assurer une meilleure effectivité du droit de l'environnement. Il résulte en particulier de ce texte que, avec la création de juridictions spécialisées en matière d'environnement, des conventions judiciaires d'intérêt public en matière d'environnement pourront désormais être conclues ; en outre, les inspecteurs de l'Office français de la biodiversité se voient attribuer des compétences de police judiciaire.

En commission spéciale, nous avons continué ce travail et, même si je regrette que nous n'ayons pas adopté certaines de mes propositions qui auraient sécurisé les dispositifs des articles 67 et 68 et auraient vraisemblablement renforcé leur efficacité, il faut saluer des avancées significatives sur la mise en danger de l'environnement, les peines complémentaires, le délai de prescription de l'action publique, la sanction de restauration du milieu naturel, le relèvement du montant des amendes et, enfin, la création d'un bureau enquête accident dédié aux risques industriels.

Nos débats devront nous mener encore plus loin, par exemple avec l'adoption des amendements sur la question des référés environnementaux, qui constitueraient une réponse bien plus efficace qu'un crime d'écocide, sans aucune portée.

Enfin, il nous faudra nous donner les moyens d'évaluer les dispositifs du texte. Nous avons été nombreux à mettre en exergue cette question du pilotage de la trajectoire carbone et de l'évaluation climatique des lois, et le titre VI est une première brique apportée en réponse à cette délicate question.

Notre société ne peut plus ignorer les enjeux de la nouvelle relation que nous devons construire avec les écosystèmes vivants et la nature ; notre société ne peut plus s'organiser sans tenir compte de la place de notre nature, de son droit à exister, à se régénérer et à s'épanouir.

Ouvrir la voie à de nouvelles dispositions juridiques, les réorganiser et créer des instances spéciales de protection de la nature permettra à la France, pionnière en matière de libertés fondamentales, de prendre part à cet effort collectif et de répondre à cette exigence éthique de préservation de l'environnement. Si nous menons ce chantier à son terme, nous protégerons nos ressources efficacement et saisirons notre dernière chance de léguer aux générations futures une planète harmonieuse et saine.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Dem et LaREM.

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La parole est à Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, présidente de la commission spéciale.

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Voici venu le temps parlementaire sur un projet de loi qui, à plusieurs égards, a connu un parcours hors norme. Hors norme, d'abord, du fait de sa genèse, que tout le monde connaît : pour la première fois, il a été fait appel à un panel de citoyens, chargés d'élaborer des propositions pour répondre au défi le plus urgent que nous ayons à relever, la lutte contre le réchauffement climatique.

Ce défi, nous le connaissons bien pour avoir, à plusieurs reprises, délibéré et adopté des mesures visant à transformer notre économie et à l'accompagner dans sa nécessaire décarbonation. Je ne reviendrai pas ici sur les avancées inscrites dans la loi ÉGALIM, la loi ÉLAN, la loi relative à l'énergie et au climat, la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire ou encore la loi d'orientation des mobilités : chacun se souvient de nos débats, particulièrement nourris, notamment dans cet hémicycle.

Le projet de loi qui nous est soumis est l'occasion de les approfondir, comme nous avons commencé à le faire en commission spéciale. La Convention citoyenne pour le climat, que je salue, a donc émis des propositions, dont certaines, de nature législative, ont été intégrées dans ce projet de loi mais également dans le projet de loi sur le parquet européen, adopté en décembre 2020, ainsi que dans le projet de loi constitutionnelle modifiant l'article 1er de la Constitution, adopté le 16 mars dernier.

Nous avons procédé à de nombreuses auditions avant même le dépôt du texte à l'Assemblée nationale, puis en commission spéciale, en parallèle de toutes celles menées par nos rapporteurs, qui ont accompli à cette occasion un travail remarquable et même colossal au vu du temps qui leur était imparti. Je souhaite évidemment les saluer, tant ils ont démontré une nouvelle fois toute l'utilité du travail préparatoire mené par les parlementaires avant de délibérer. Permettez-moi aussi de remercier le Gouvernement qui a, tout au long de ce processus, fait preuve d'une grande disponibilité.

Ce texte est également hors norme par l'ampleur de l'initiative parlementaire qu'il a suscitée, ce qui est normal, eu égard aux enjeux essentiels qu'il soulève ; c'est en effet la vie quotidienne et les activités humaines dans leur ensemble qui sont concernées par la transition écologique que nous devons mettre en oeuvre. Pas moins de 3 850 amendements ont été débattus, pendant plus d'une centaine d'heures, en commission spéciale, ce qui témoigne du sérieux de nos travaux et de l'implication de chacun dans les débats. Je veux, là aussi, saluer tous les membres de la commission spéciale qui ont siégé, y compris le week-end, pour débattre et argumenter des différentes politiques et options envisageables. L'implication de chacun doit être soulignée, car de nombreux sujets ont pu être précisés, complétés et approfondis.

Ce plein exercice de l'initiative parlementaire trouve d'ailleurs sa traduction dans le fait que, de 69 articles initialement, le projet de loi est passé à 127 articles après son examen par la commission spéciale. Voilà qui me semble démontrer toute l'utilité de la discussion parlementaire, qui a permis d'avancer sur des sujets importants, que ce soit en matière d'information du consommateur, d'activités productives, de transport, d'agriculture et d'alimentation, de logement et d'urbanisme ou encore de protection judiciaire de l'environnement.

À cet égard, le projet de loi « climat et résilience » apparaît bel et bien comme un texte ambitieux, qui vise à mettre en oeuvre une transition réaliste durable et socialement acceptable, notamment dans le contexte de crise que nous connaissons.

Un dernier point me semble essentiel. Pour nous permettre de suivre de très près les engagements des acteurs publics et privés impliqués dans cette transition, il nous faudra sans doute aller encore plus loin pour renforcer l'évaluation de la mise en oeuvre des mesures et des trajectoires inscrites dans ce texte. Sans une évaluation et sans un pilotage précis de cette loi, nous serions dépourvus de moyens pour en mesurer l'efficacité et en ajuster les trajectoires. C'est le sens de l'amendement que nous vous présenterons avec le rapporteur général, à la toute fin de l'examen du texte.

La discussion en séance publique doit nous permettre d'aller plus loin encore pour enrichir le texte et poursuivre le travail accompli par la commission spéciale. Je ne doute pas que nous saurons être collectivement à la hauteur de ses enjeux, à la hauteur des attentes exprimées par les citoyens, les jeunes en particulier, qui se mobilisent partout et en nombre face à l'urgence climatique.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.

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La parole est à Mme Liliana Tanguy, au nom de la commission des affaires européennes.

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Je m'exprime aujourd'hui en tant que rapporteure pour observation de la commission des affaires européennes sur ce projet de loi qui a pour objectif de traduire, sur le plan normatif, 46 des 149 propositions de la Convention citoyenne pour le climat. Ce n'est donc pas un texte de transposition ni d'adaptation au droit de l'Union européenne. Toutefois, de nombreuses dispositions du texte ont un lien avec les ambitions environnementales européennes, récemment renforcées par la présentation du pacte vert pour l'Europe.

Ce projet de loi « climat et résilience » part du constat des citoyens, partagé par le Gouvernement et moi-même, de la nécessité d'agir très rapidement pour la protection de la planète, tant au niveau national qu'au niveau européen, mais aussi à l'échelle de nos territoires, déjà très affectés par les conséquences du dérèglement climatique : j'ai une pensée toute particulière pour ma circonscription du Finistère, qui fait face à l'érosion des côtes du pays bigouden.

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Je salue également l'excellente proposition de loi pour une alimentation durable, élaborée par les élèves de l'école de Saint-Jean-Trolimon, dans le cadre du Parlement des enfants, proposition qui s'inscrit dans l'esprit du titre V du texte que nous examinons.

Ce projet de loi doit aider la France à atteindre les objectifs ambitieux de l'Union européenne en matière climatique : avec l'adoption prochaine de la loi européenne pour le climat, d'ici à la fin de l'année 2021, la cible de diminution des émissions de gaz à effet de serre doit être relevée de 40 à 55 % à l'horizon 2030, par rapport à leur niveau de 1990.

Plus encore, la loi européenne vise la neutralité climatique de l'Union européenne en 2050, comme l'a souligné très précisément dans ses travaux, ma collègue Nicole Le Peih. Pour y parvenir, le pacte vert prévoit différentes stratégies sectorielles, appelant l'adoption ou la révision prochaine des normes européennes, notamment dans le domaine de l'agriculture, du transport ou de l'économie circulaire. Ce sont précisément les domaines dans lesquels les dispositions du projet de loi « climat et résilience » interviennent.

Dans le cadre de ma mission de rapporteure, ma première observation tient donc au caractère mouvant du droit européen en matière climatique et environnementale. En adoptant dès maintenant ce texte ambitieux, défendu avec force et conviction par notre ministre, Barbara Pompili, la France se pose ainsi parmi les États membres les plus exigeants en matière climatique.

Ma seconde observation tient au choix politique dont découle ce projet de loi et qui consiste à anticiper la réglementation européenne à plusieurs égards – notamment sur la question de l'affichage environnemental. Ce texte permet ainsi à la France d'endosser un rôle moteur en matière environnementale dans l'Union européenne et l'incite à être force de proposition dans les négociations à venir pour la concrétisation du pacte vert pour l'Europe.

Ma dernière observation est liée à l'équilibre entre le respect des objectifs européens en matière écologique et la prise en compte des enjeux économiques des différents secteurs concernés que permet ce projet de loi. Ma conviction est que, pour être efficace et juste, la transition écologique et climatique doit s'appuyer sur l'acceptabilité des nouvelles mesures par les citoyens. À cet égard, le projet de loi prend en compte cet accompagnement nécessaire de l'ensemble des acteurs concernés.

Compte tenu de ces observations, mon travail de rapporteure m'a conduite à formuler dix recommandations sur la mise en oeuvre de cette transition.

La première catégorie de recommandations concerne les articles qui renvoient aux négociations européennes pour étendre au niveau de l'Union les mesures prévues par le projet de loi. Trois dispositions prévoient ainsi une action prioritaire au niveau européen en matière de gasoil routier, de taxe de solidarité sur les billets d'avion et de redevance sur les engrais azotés minéraux. Sur tous ces sujets, les négociations doivent s'articuler avec l'organisation de la présidence française de l'Union européenne, qui débutera, pour six mois, le 1er janvier 2022, offrant à la France une chance de mettre certaines de ses priorités environnementales à l'agenda des négociations européennes.

La seconde catégorie d'observations vise plus largement à soutenir et à encourager la France dans la défense de positions venant compléter les dispositions du projet de loi : c'est le cas du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières, qui fait l'objet d'une proposition de la Convention citoyenne pour le climat et qui devrait être une priorité forte de la France lors de sa présidence de l'Union.

Pour conclure, je tiens à souligner l'importance de ce projet de loi qui doit permettre à la France non seulement d'atteindre des objectifs européens de plus en plus élevés, mais aussi de s'affirmer comme un État membre, pionnier et ambitieux dans la stratégie environnementale européenne.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.

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J'ai reçu de M. Jean-Luc Mélenchon et des membres du groupe La France insoumise une motion de rejet préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 5, du règlement.

La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon, pour trente minutes.

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Deux heures, ça aurait été mieux !

Présidente, ministre, ô combien nombreux rapporteures et rapporteurs –

Sourires sur les bancs du groupe LR

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onze, dont les interventions s'ajouteront au temps de parole de la ministre et des neuf heures auxquelles aura droit La République en marche, dont nous connaissons tous les détails de la pensée sur le sujet, mais cela n'est pas de trop – , nous voici appelés à discuter d'un projet de loi sur le climat, peut-être le seul sur ce thème dont nous aurons discuté sous cette législature.

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L'ampleur du sujet mérite une méditation sur la nature de la réponse qui est attendue de la représentation nationale lorsqu'on l'interroge. Car, si le climat s'intègre dans la géographie dont il est partie prenante, il ne connaît pas pour autant les frontières, ni les nations qu'elles délimitent. Tant et si bien qu'à cette heure, conscients de la globalité du problème qui nous est posé, nous ne délibérons pas tant en députés du peuple français qu'en députés du peuple humain.

M. le rapporteur général sourit.

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Notre délibération aura une influence directe, non seulement sur nos compatriotes, mais sur l'humanité tout entière car, les uns dépendant de l'autre, nous sommes définitivement instruits du fait que l'espèce humaine est en réalité une et indivisible dans l'écosystème dans lequel elle s'intègre, lequel est lui-même indivisible, et que, s'il est probable que les araignées, les abeilles et les vers de terre puissent vivre dans d'autres écosystèmes sans êtres humains, il est absolument certain que les êtres humains, eux, ne peuvent vivre dans aucun autre écosystème que celui où ces bêtes se trouvent.

Nous ne prétendrons pas avoir quelque monopole que ce soit de la conscience écologique au moment où nous rejetterons ce texte. Nous croyons que, dorénavant, tous les partis sont préoccupés par le contexte écologique : tous, sans exception. La discussion ne porte donc pas sur le fait de savoir qui l'est plus ou moins, mais sur celui de savoir comment on l'est.

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Cette discussion est d'une importance idéologique fondamentale à nos yeux car, au fond, nous discutons de la façon dont s'organise la société humaine et de la forme qu'elle prend dans sa relation à la nature. Mais ce n'est pas sur ce terrain qu'a lieu le débat législatif. Il a lieu sur le terrain de la comparaison des mesures concrètes. Le concret est, à nos yeux, le sel le plus révolutionnaire que l'on puisse mettre dans la cuisine politique aujourd'hui. Nous allons rejeter ce projet car il ne comporte pas les mesures concrètes et indispensables qui sont à notre portée et que vous avez décidé de ne pas prendre. Ce qui compte, c'est moins ce que vous proposez de faire que ce que vous décidez de ne pas faire dans ce texte.

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Comment peut-on faire une loi sur le climat sans dire un mot du moratoire sur les accords internationaux tels que CETA – accord économique et commercial global – , JEFTA – accord de libre-échange entre le Japon et l'Union européenne – , Mercosur – Marché commun du Sud –,

Applaudissements sur les bancs des groupes FI et GDR

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qui sont des invitations surpuissantes au saccage de la planète ? Comment peut-on faire une loi sur le climat et sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre sans plan pour le ferroviaire, auquel il manque 3 milliards par an…

Applaudissements sur les bancs des groupes FI et GDR. – Mme Jennifer de Temmerman applaudit également

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… et sans interdiction d'agrandir les aéroports – car les trois que vous avez prévu de limiter se fichent bien de la réglementation que vous êtes en train de proposer ?

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Comment peut-on faire une loi sur le climat et sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre sans interdire de louer les passoires thermiques que sont tant de logements ?

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Si, justement !

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Comment peut-on le faire sans abolir la publicité sur les produits polluants ? Comment peut-on le faire sans un mot sur le 100 % renouvelable ? Comment peut-on le faire alors même que les représentants de ce Gouvernement n'étaient pas présents lors du jugement à propos du permis sur la Montagne d'or ?

Applaudissements sur les bancs des groupes FI et GDR.

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J'en passe, et sans doute des pires. Tant et si bien que non pas moi, Mélenchon, ni même les Insoumis, qui ont tous signé une pétition pour demander une véritable loi sur le changement climatique,

M. le rapporteur général s'exclame

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mais ceux-là même que vous aviez convoqués, c'est-à-dire les citoyens de la Convention, vous ont donné la note de 2,510 pour les conclusions auxquelles vous êtes arrivés ! Enfin, le projet de loi a été jugé insuffisant par 110 organisations écologistes, plus le Haut Conseil pour le climat.

Ce qui est insuffisant en matière écologique est sans doute inutile – mais, après tout, pourquoi pas – , mais surtout dangereux. Ne pas être à l'heure est dangereux, car le moment écologique est placé sous le signe de l'urgence. Le changement climatique est commencé. Nous sommes certains de passer à une augmentation de température de 1,2o C depuis le début de l'ère industrielle. Nous sommes dans la sixième extinction des espèces, avec une réduction drastique de la biodiversité : 1 million d'espèces menacées. L'élévation du niveau des océans est commencée. Nous savions tous que la question se poserait car, dès la COP21 à Paris, les représentants des États îliens étaient venus protester contre le fait que le document proposé ne les protégeait pas du fait que leur nation serait rayée de la carte par la montée des eaux si l'on en restait à l'élévation de la température prévue. Et c'est parce qu'ils sont intervenus de cette manière que les dirigeants français ont compris qu'il fallait prendre l'initiative de changer le niveau d'élévation de température proposé par la COP21. Pourtant, à la sortie, nous avons tous vu que, dans les documents d'engagement des États, ce n'était pas + 1,5o C degré qu'ils prévoyaient pour eux-mêmes, mais + 3,5o C, autrement dit, la consommation assurée de la catastrophe. Des dizaines d'îles sont déjà englouties ; 12 000 le seront prochainement. Il y a déjà 25 millions de réfugiés climatiques dans le monde ; il y en aura 250 millions, d'après l'Organisation des Nations unies (ONU).

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L'urgence qui frappe à notre porte n'a rien d'idéologique, elle est concrète. Quand des masses humaines se mettent en mouvement parce qu'il n'y a plus d'eau dans le lac Tchad, quand des masses humaines se mettent en mouvement parce que, ici ou là, la montée de la mer fait que les terres sont acidifiées, il n'y a plus ni raison ni frontière qui tienne contre la faim, la soif et la volonté de protéger sa famille et ses enfants ; les gens se déplacent, ignorant les frontières, ignorant les règles, provoquant un tohu-bohu géopolitique que nous aurons tous à affronter. Tout cela, ce n'est pas de l'idéologie au sens strict, ce n'est pas un débat que nous avons entre nous, c'est du concret. Que faisons-nous concrètement pour mettre notre action au niveau ? Assumons-nous, oui ou non, une bonne fois pour toutes, que l'humanité et la planète tout entière sont entrées dans une ère nouvelle ?

Le grand homme qu'était Paul Crutzen, mort il y a peu, avait, dans les années 1980, provoqué la première convention mondiale impliquant toute l'humanité au sujet des oxydes d'azote, qui faisaient des trous dans la couche d'ozone. C'est la première fois que tout le monde s'est accordé pour prendre des mesures afin d'empêcher que le trou ne s'agrandisse. Nous avons vaincu cette difficulté et, désormais, on nous dit que le trou se réduit ; le problème n'est pas réglé, mais il est en bonne voie d'évolution.

Paul Crutzen avait proposé de définir l'ère actuelle comme l'ère de l'anthropocène. Les premières fois que le mot a été utilisé, il a provoqué beaucoup de surprise : après le pléistocène, l'anthropocène. D'aucuns disent qu'il ne faut pas l'appeler anthropocène, car ce qui est en cause, ce ne serait pas l'être humain, mais le régime économique dans lequel il vit, c'est-à-dire le capitalisme. Je prends l'anthropocène en mémoire de Paul Crutzen et de son travail, dans lequel il commençait par signaler que, comme dans la numérotation des Anglo-Saxons, l'on calcule dorénavant les résultats des examens au carbone 14 d'après une date considérée comme BP, before present. Le present, c'est l'année 1950 où l'on a constaté pour la première fois du matériel radioactif à la surface de la planète dans une quantité qui en modifie la minuscule partie supérieure, nous faisant entrer dans une nouvelle ère. Depuis, on a vu qu'il n'y avait pas que les produits radioactifs. Peut-être serons-nous l'ère des ailes de poulet, car 80 % des oiseaux qui vivent sur terre aujourd'hui sont des poulets et des canards d'élevage, si bien qu'un scientifique a proposé d'appeler cette ère l'ère du poulet. Mais on pourrait aussi bien citer le plastique, que l'on retrouve dans à peu près tout, notamment dans la mer, en très grande quantité, et jusque dans le corps des êtres humains, en particulier des êtres humains à naître.

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Tel est le present, l'empreinte humaine dans la géologie. Elle est absolument incroyable. Le poids de ce que les êtres humains ont fabriqué surpasse désormais celui de tous les êtres vivants.

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Le plastique produit pèse deux fois plus que l'ensemble des animaux vivant à la surface de la planète.

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L'être humain est dorénavant une force d'érosion et de transformation de la géologie plus grande que n'importe quelle autre force de la nature : le vent, la pluie, les rivières, les fleuves, la mer. L'être humain est donc entièrement, radicalement, absolument responsable de son destin, comme l'annonçaient, dans le livre De la dignité de l'homme, Pic de La Mirandole et les fondateurs de l'humanisme, qui disaient : ne comptez pas sur la Providence pour régler vos destins, comptez sur vous-mêmes, sur votre intelligence, car c'est tout ce que vous avez pour faire face aux situations.

Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM. – Rires sur les bancs du groupe Dem.

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Je suis heureux de l'hilarité et de l'enthousiasme que cette phrase déclenche chez certains collègues : il est bon de rire dans les cimetières.

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Nous sommes entrés dans un moment de basculement : ce moment, c'est celui des dix prochaines années. Certains phénomènes sont irréversibles, nous n'y pouvons plus rien. Vous avez cité tout à l'heure, madame la ministre, l'événement de la vallée de la Roya, et je vous approuve. L'évaporation de la mer Méditerranée, qui est une sorte de lac avec une ouverture de seulement 13 kilomètres sur l'océan mondial, se déroule plus vite que les autres mers du monde, tant et si bien que, pour chaque degré supplémentaire, c'est 7 % de pluies et de condensation en plus, et que toute la façade méditerranéenne est condamnée à des chutes d'eau torrentielles que ni la nature, qui n'était pas prévue pour cela, ni les installations humaines ne sont capables d'amortir.

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Ça vient, attendez ! En 2022, votez pour moi, et vous l'aurez tout de suite.

M. Alexis Corbière applaudit. – Rires sur les bancs des groupes LaREM et Dem.

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On me demande où est l'ordonnance Mélenchon sur le climat, mais je vais vous signaler un détail qui a l'air de vous échapper : je suis dans l'opposition ! Je ne demande qu'à gouverner et à ce que vous vous en alliez – pas tous, je vous aime bien, mais changez de ligne politique et gardez votre humour à deux balles pour vos foires !

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Le moment de bascule, c'est celui où la fonte de la calotte glaciaire de l'Antarctique et du Groenland modifie le tapis roulant des mers, le Gulf Stream, …

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… de telle sorte que toutes les civilisations qui sont le long de ce tapis roulant, depuis les Amériques, en Afrique, en Europe, avec les animaux, les cultures et tout ce qui s'y rattache, tout est menacé, tout est transformé, tous les repères sont changés. Que se produira-t-il ? Un ami géologue à qui je demandais où était passé le Doubs, là où il a disparu, m'a dit : « Il est là-dessous. » Nous avons parlé, et je lui ai demandé : « Alors, qu'est-ce que tu me recommanderais de faire ? »

Debut de section - Permalien
Plusieurs députés du groupe LaREM

Ah !

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« Est-ce qu'il faut interdire l'imperméabilisation des sols ? » Il me répond : « Oui, pourquoi pas, mais écoute bien : nous sommes entrés dans une phase où, pendant peut-être une décennie ou deux, tous les paramètres seront incertains. » Nous entrons donc dans l'ère de l'incertitude quant à la décision. C'est pourquoi le principe de précaution doit nécessairement être appliqué avec plus de vigueur peut-être que dans le passé, et que, par conséquent, …

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… toutes les mesures de protection mutuelle, d'entraide et de précaution doivent être déployées, et évidemment discutées, car il n'est même pas certain qu'elles suffisent. Le déplacement de la mousson ouest-africaine et indienne va mettre en mouvement des millions de personnes à qui, à moins de les condamner à mort, il faudra bien proposer une autre issue.

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C'est le moment de dire que nous ne défendons pas la nature, qui se passe de nous : tel qu'il est, l'univers continuera de rouler dans le silence glacé de son infinitude et les planètes d'y évoluer. Il y aura d'autres animaux, sans doute. Nous ne défendons pas la nature, mais l'écosystème compatible avec l'être humain : celui-là, et celui-là seulement, parce que nous ne savons pas en défendre d'autres. C'est ce que Karl Marx appelait « le corps inorganique de l'homme ».

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Vous pouvez lire Karl Marx, vous savez, ce n'est pas interdit.

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Vous l'avez lu ? Cela m'étonnerait, cela vous aurait rendu plus intelligents.

Rires sur les bancs des groupes FI et LT.

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Voyons maintenant les cycles fondamentaux de l'espèce humaine, perturbés par ce que nous vivons, et vous y rapporterez les mesures du texte pour voir si elles sont – pas un petit peu, totalement – à la hauteur.

Le cycle de l'eau souffre de la fonte des glaces, du changement du régime du Gulf Stream – les deux étant liés – , de la montée des eaux, de leur acidification – tout cela allant ensemble – et, surtout, de la transformation de la qualité de l'eau. La quantité de pesticides et de plastique que nous avons déversés dans les eaux nous revient : ainsi, les plastiques jetés dans la mer reviennent sous forme de microparticules dans les neiges et les glaces au point que l'on interdit, au Groenland, aux femmes enceintes de manger du poisson à cause du plastique que l'on retrouve dans les foetus humains.

Le cycle de l'eau est intégralement perturbé.

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Personne ne sait comment faire alors que seul 1 % de l'eau disponible sur la planète est potable. La question de l'eau potable se posera à nous tous et requerra des mesures terribles pour empêcher dès maintenant que cette eau se perde ou qu'elle soit gaspillée, pour empêcher des conflits d'usage réglés pour faire plaisir à telle ou telle clientèle, dont le problème n'est pas qu'elle se bat pour vivre mais qu'elle soit rendue, pour le faire, à des moyens qui nuisent à la vie des autres.

Le cycle de l'air est entièrement déréglé, et un décès sur cinq est lié à la pollution de l'air. Alors évidemment, on va dire que ce n'est que le diagnostic. C'est vrai, mais il faut le faire, et jusqu'au bout. Jusqu'au bout !

Debut de section - Permalien
Plusieurs députés du groupe LaREM

On l'a fait !

Debut de section - Permalien
Plusieurs députés du groupe Dem

On l'a fait !

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Je ne parle pas qu'à vous, chers collègues qui ne vous intéressez pas à ce que je dis, …

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… mais peut-être à ceux que cela pourrait intéresser : souffrez qu'il y ait une opposition !

Ce qui est certain, c'est qu'il faut revenir à cette idée pour comprendre et faire comprendre aux autres le danger : l'atmosphère terrestre compatible avec la vie humaine est le résultat d'une pollution datant de quelques centaines de millions d'années, peut-être 2 milliards, lorsque le carbone qui s'y trouvait majoritairement fut transformé en oxygène par des bactéries. Le mécanisme inverse se déroule sous nos yeux ! Nous savons que ces phénomènes peuvent se produire, hier à cause de bactéries, aujourd'hui à cause de nous, êtres humains. Tant et si bien que les scientifiques nous alertent : il faut empêcher le processus qui conduit à la raréfaction de l'oxygène.

Pour cela, il faut interdire la destruction des puits de carbone qui existent et il faut le faire maintenant dans la loi ! Les coupes rases n'ont pas de sens parce qu'elles épuisent les puits de carbone et que soixante ans sont nécessaires pour reconstituer la fertilité du sol alors qu'on en replante pour quarante ans. Ce sont ces cycles économiques qu'il faut rompre ! Et cela se décide maintenant !

Il y a bien des paysans dans notre assemblée : ils savent où en est le cycle de la terre. La part de la matière organique dans la terre que nous travaillons – car ce n'est que cela, la terre ! – s'est réduite de moitié. En cinquante ans, la fertilité des sols a baissé de 23 %. Tout cela concerne la survie de toutes sortes de bestioles qui s'y trouvent et qui ne meurent que de ce qu'on y met, c'est-à-dire ces tonnes de pesticides qu'il faut interdire maintenant, tout de suite, pas après-demain.

Outre le cycle de la terre, le cycle de l'air, le cycle de l'eau, il y a celui du jour et de la nuit, qui rejoint celui de la veille et de l'éveil, dont nos législations sont encore plus directement responsables. Le temps de sommeil est passé, dans le monde, de dix heures à six heures et demie. Un quart de la planète est éclairée en permanence, …

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… tant et si bien que tous les cycles sont bouleversés. La moitié du fond sonore animal de la planète a disparu.

Enfin, dans le cycle de la génération, auquel les êtres humains peuvent accorder plus d'importance qu'à d'autres car il est plus immédiat et concerne leur parentèle, la fertilité des hommes européens a baissé de moitié en cinquante ans.

Nombre d'entre vous disent qu'ils sont parfaitement informés de ce diagnostic, sur lequel je viens de revenir pour souligner l'urgence : je le crois très volontiers, c'est la raison pour laquelle, dans la discussion des articles du projet de loi, …

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… chacun tranchera, à n'en pas douter, avec l'étendard de l'urgence à la main. Je sais que vous repousserez ma motion de rejet préalable – cet outil existe et je peux bien l'utiliser, vous qui parlez à douze sur ce texte.

La civilisation humaine est aussi menacée par trois autres facteurs. Tout d'abord, le modèle économique qui a consisté à faire baisser tous les prix a accéléré le cycle de la marchandise et de l'argent, en un mot, le capitalisme. Pour appliquer ce modèle, on a développé des élevages ultra intensifs, qui sont les premiers et principaux foyers des zoonoses, celles-ci étant apparues depuis que les êtres humains font de l'agriculture et au sein des premières villes. Leur échelle est maintenant celle de l'économie globalisée, dans laquelle un virus apparaissant à un endroit se répand de manière certaine et endémique sur toute la surface de la terre. Ces élevages sont la cause de la transmission accélérée des épidémies, dont le nombre a triplé lors des quinze dernières années. En outre, les villes, qui constituent aujourd'hui l'habitat essentiel des êtres humains, sont menacées par la montée des eaux puisque les plus grandes villes du monde se trouvent au bord de l'eau. Voilà pour l'habitat.

Ensuite, problème plus terrible encore, les réseaux. À notre époque, ce sont les réseaux qui font les villes et les villes qui font les peuples. Les réseaux collectifs sont indispensables à la production et à la reproduction de l'existence matérielle des gens. Or les réseaux ne sont pas compatibles avec le déchaînement de la violence du changement climatique. Un réseau d'électricité à haute tension, à 40 degrés de température et un vent de 170 kilomètres-heure, n'a plus aucune solidité, comme on a pu le vérifier aux États-Unis d'Amérique où des incendies gigantesques se sont déclarés pour cette raison.

Voilà que le changement climatique est considéré comme une menace pour le système économique dominant lui-même, puisque celui-ci est entièrement globalisé et financiarisé. La Banque centrale européenne, une succursale du parti communiste français sans doute,

Sourires sur les bancs du groupe GDR

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vient de dire que le changement climatique était l'un des risques systémiques qu'il fallait prendre en compte. Un risque systémique, c'est le genre d'événement qui s'est produit en 2008, lequel a causé l'effondrement de la planète financière sur le dos des pauvres gens appelés ensuite à la remplumer.

Alors il est possible de parler de principes, raison pour laquelle j'ai voulu poser ce diagnostic : non pour vous apprendre quelque chose – j'ai commencé mon propos par dire que j'étais certain que vous saviez tout cela – , mais pour prendre conscience que la connaissance vous rend plus responsables et plus coupables de tout ce que vous ne faites pas.

Applaudissements sur les bancs du groupe FI. – Mme Elsa Faucillon applaudit également.

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Nous avons résumé notre ligne politique en une phrase : nous visons à faire vivre une société de l'harmonie entre les êtres humains et entre les êtres humains et la nature. En effet, l'harmonie entre les êtres humains, c'est-à-dire la réduction des inégalités sociales, est une contribution directe à la préservation de la planète.

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Les inégalités sociales tuent, polluent et rendent bêtes. Surtout, elles polluent ! Les personnes appartenant au groupe du 1 % les plus riches polluent deux fois plus que la moitié la plus pauvre de l'humanité ! Quatre banques françaises ont chacune une empreinte carbone supérieure à celle de la France elle-même.

C'est de cela dont on déduit les principes fermes et pas toujours très populaires auxquels il faut se raccrocher pour organiser l'action publique. Tout d'abord, il ne faut pas prélever sur la nature plus de ressources que ce qu'elle peut reconstituer.

Mêmes mouvements.

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Cela s'appelle la règle verte, qui représente un défi pour tous les ingénieurs et les techniciens : trouver partout le moyen de développer une consommation énergétique sobre et une grande capacité de renouvellement.

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Enfin, il faut parvenir à la synchronie entre les cycles de l'activité humaine et ceux de la nature. Pour cela, il faut récupérer la propriété collective du temps collectif, aujourd'hui approprié par le cycle du temps court du capitalisme. La propriété collective du temps nécessite de remettre à l'ordre du jour la planification et la prévision : non par idéologie mais parce que cette approche est concrète. Le capitalisme vit aujourd'hui exclusivement dans le temps court ; la durée moyenne de détention d'une action est de vingt-deux secondes dans le marché globalisé. Or la nature vit dans le temps long : le renouvellement d'une forêt de feuillus prend 180 ans, mais on coupe tous les 40 ans. Le temps de l'industrie, c'est le temps long : il s'est écoulé sept ans entre la décision de créer le TGV et son premier lancement. Le temps long est aussi celui de la génération : 13 ans pour amener un jeune enfant de son entrée à l'école jusqu'au baccalauréat. La vie humaine, comme celle de la nature, est faite de cycles longs. Le droit d'intervenir sur ces cycles longs ne doit pas être réservé à ceux qui le possèdent par petites tranches dans le temps court où leur argent gouverne tout.

C'est de cela que l'on déduit les mesures à prendre. Nous avons besoin de temps long pour maîtriser le cycle de l'eau. Nous perdons un litre sur cinq et on me dit que c'est une bonne chose car les litres perdus retournent dans la nature, mais ils ne seront pas dans le même état car ils auront lavé les sols plein de pesticides. Il faut arrêter cette perte. Continuer à rénover les réseaux d'eau au même rythme qu'aujourd'hui demanderait 150 ans ! Nous n'avons pas 150 ans devant nous sur cette question ! C'est la raison pour laquelle nous organisons en ce moment même une votation citoyenne, sous l'autorité de ma collègue Mathilde Panot et d'une série d'associations, pour la propriété collective de l'eau et l'inscription du droit à l'eau dans la Constitution, comme l'avait proposé notre ami et camarade Evo Morales lors d'une séance plénière de l'assemblée générale des Nations unies.

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Il faut dépolluer : le glyphosate doit être interdit, point final. Il faut trouver d'autres techniques : les jeunes ingénieurs agroalimentaires, femmes et hommes, sont prêts à inventer ces techniques. Il faut les exiger pour dire qu'on ne mettra plus un seul gramme de glyphosate dans la nature en 2022 !

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Bien sûr !

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Il faut arbitrer les conflits d'usage de l'eau et libérer la paysannerie du poids des dettes qu'elle a dû contracter pour se mettre en ligne avec le modèle agricole actuel. Il convient de l'appeler à développer toute la créativité dont la jeune génération compétente est capable. Je l'ai dit tout à l'heure, nous pouvons agir sur les forêts : nous possédons le deuxième massif d'Europe, nous y pouvons quelque chose ! Nous connaissons depuis le XVIIIe siècle le rapport entre les forêts et le climat. Ce n'est donc pas une invention du moment. Buffon l'explique très bien en évoquant les « colères du ciel », dans un texte que vous pouvez lire. Évidemment, cette croyance a conduit à des abus, mais elle présente un grand intérêt pour notre réflexion.

Nous devons interdire les coupes rases dans les forêts. Nous devons embaucher plus d'agents à l'ONF, leur garantir un statut stable et leur accorder tout ce que la loi leur permet d'avoir, et qui aujourd'hui leur est refusé.

La société pour laquelle nous nous battons à propos du défi écologique ne se résumera jamais à tel ou tel ensemble de règles – même s'il faut évidemment qu'on en parle et qu'on en décide : c'est la société de l'entraide et du partage. Cette histoire va mal tourner, nous le savons tous. Et dans ces mauvais moments, nous nous souvenons de ce que l'anthropologie nous a appris : si, en dépit des mauvaises habitudes qu'elle a prises sous le régime général actuel de l'égoïsme, de la compétition permanente et de l'aspiration à la jouissance de biens inutiles, l'humanité reste ce qu'on l'a vue être pendant des millénaires, on sait que dans la difficulté, c'est la volonté d'entraide qui l'emportera – comme en ce moment d'ailleurs ! Une société de l'entraide, c'est possible : c'est celle des services publics, de la décision en faveur de l'intérêt général, dont elle ne croit pas qu'il résulte seulement de l'addition des intérêts particuliers. La France peut faire beaucoup dans ce domaine, pour le bien de l'humanité : tout d'abord, mettre en partage les savoirs dont elle dispose. Est-ce que ce ne serait pas une grande mesure écologique que de créer une université des océans, puisque nous sommes le deuxième territoire maritime du monde ?

Applaudissements sur les bancs du groupe FI.

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Ça s'appelle l'IFREMER – Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer – , à Brest !

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Dans cette université, on accueillerait tous ceux qui, arrivant d'où ils veulent dans le monde, viendraient étudier et apprendre comment explorer et valoriser cette ressource, au lieu de s'abandonner au tripotage de l'Union européenne, qui achète les stocks halieutiques, les vide et pousse les populations riveraines à la misère !

Société du partage, société de l'entraide : la France peut beaucoup. La plus grande éolienne en mer au monde a été construite en France ; les satellites français se sont mis au service d'une campagne de dépollution des océans en Indonésie ; le CNRS – Centre national de la recherche scientifique, qui a mieux à faire que d'aller surveiller les islamo-gauchistes – est capable de diriger la Coalition mondiale pour les algues.

Il faut que je termine avec des principes, une fois de plus. Je vous ai dit qu'à notre sens, nous étions en ce moment les députés du peuple humain. C'est le moment de constater de nouveau l'unité de l'espèce humaine. C'est le moment de renouveler, pour nous tous qui sommes républicains – en tout cas pour ceux qui le sont – le lien que nous avons avec l'idée d'humanisme dont j'ai parlé tout à l'heure. Oui, c'est un nouvel humanisme qui est réclamé par la période dans laquelle nous vivons.

Au fond, dès le début, il y a eu deux branches : d'une part, les gens disant que les êtres humains sont des animaux comme les autres – ce qui leur a valu bien des bûchers – et que nous ne pouvons pas avoir raison contre la nature, comme le disait le baron d'Holbach au XVIIIe siècle. D'autre part, ceux qui disaient : « Tout ça a été fait pour nous, c'est écrit dans le Livre, et par conséquent, il faut nous rendre comme maîtres et possesseurs de la nature ». Je détesterais qu'on ramène Descartes à cette seule phrase, parce que le doute méthodique qu'il nous a enseigné l'avait lui aussi rapproché du bûcher. Mais c'est avec ce type de formule qu'il faut rompre : nous n'avons pas à être maîtres et possesseurs de la nature…

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… nous avons au contraire à penser l'harmonie que nous pouvons avoir avec elle. Ce qui nous ramène aux mythes fondateurs : les dieux avaient décidé de munir les vivants de qualités diverses et confièrent cette tâche à Épiméthée…

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… dont on dit qu'en grec, le nom veut dire « celui qui pense après » – il faut que la catastrophe ait lieu pour qu'il se mette à y réfléchir. Épiméthée a donc distribué les talents : tel animal court vite, tel autre a de grandes griffes, etc. Arrive l'être humain, mais il n'y a plus rien pour lui. Alors survient Prométhée, « celui qui pense avant » – une sorte de planificateur – , qui déclare : « Ceux-là, je ne sais pas quoi leur donner ! On va leur donner l'intelligence. » Il leur donne la technique avec, et les rend auteurs de leur propre histoire. C'est ça le point de départ, pour nous tous ; parce que l'idée républicaine est née à ce moment-là. Cet humanisme, qui était d'abord philosophique, est devenu tout de suite un humanisme politique. J'espère être à la hauteur de la dignité qu'il a inspirée à tant d'autres avant moi, et sans doute en même temps que moi à cet instant. Il faut être de ceux qui sont prométhéens, qui réfléchissent avant et qui se souviennent de cette anecdote. Parce qu'une fois que les êtres humains ont eu ce talent, il semblerait que bien vite, ils l'aient employé à s'entre-détruire. Il fut alors décidé, par la faveur des dieux, qu'ils régleraient ces problèmes en en discutant entre eux : pour cela, il y avait la démocratie.

Le principal obstacle auquel nous nous heurtons, ce ne sont pas les êtres humains. L'obstacle auquel nous nous affrontons, c'est le capitalisme…

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… parce que c'est lui qui, intrinsèquement, est responsable de cette nécessité qu'éprouvent les gens, contre toute raison, d'accumuler sans cesse et de consommer, pour les uns, ou de pâtir sans rien, pour les autres. Ce n'est pas un bon signe, dans les jours que nous vivons, que de voir votre gouvernement, votre Union européenne, voter à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) contre l'universalisation des vaccins.

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Comme je suis désolé que mon pays, qui jusqu'en 1959 ne permettait aucun brevet sur les vaccins, n'ait pas été le premier à proposer l'accès libre à la production de ces vaccins ! Tant et si bien qu'aujourd'hui, le sujet est discuté chez M. Biden ! Comme vous en êtes souvent les fidèles caniches, vous finirez vous aussi par le faire, s'il en décide ainsi.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Oui, mais ça, c'est la vie réelle. Tout ceci est de mauvais augure. L'universalisation de l'humanité se vit au quotidien, dans la créolisation des moeurs, des habitudes, des langues. Mais pour ce qui concerne les sciences et les techniques, tout reste à faire puisqu'il a été décidé stupidement de mettre des brevets partout – c'est-à-dire de faire des fruits de l'intelligence une propriété privée – ce qu'on n'avait pas connu par le passé. C'est en libérant la société de cette chaîne et des comportements qu'elle induit, que nous nous libérerons tous, qui que nous soyons, quels que soient notre couleur de peau, notre religion ou notre genre.

Au fond, ce dont il est question à travers des débats comme celui-ci, c'est que s'il y a un peuple humain de fait, encore faut-il qu'il le soit dans sa conscience de lui-même. S'il y a un peuple humain, s'il y a un peuple terrien, s'il l'est pour lui-même, alors nous aurons fait oeuvre utile, au sens où nous aurons repris l'ancienne injonction figurant sur le fronton du temple d'Apollon à Delphes, où toute l'humanité pensante européenne de l'époque se rassemblait pour méditer. Devenir le peuple humain, c'est appliquer une bonne fois cette idée individuelle : « Connais-toi toi-même ». Tu es d'abord humain, semblable aux autres.

Applaudissements sur les bancs des groupes FI, SOC et GDR.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Je vous ai écouté, monsieur le président Mélenchon, et ça m'a fait chaud au coeur de me rendre compte qu'enfin, tout le monde prend conscience de l'enjeu de la lutte contre le réchauffement climatique. Est-ce qu'il faut encore poser le diagnostic ? Pour certains, manifestement, il le faut. Je peux vous renvoyer tout simplement à un discours qui pour moi a été fondateur : la déclaration de candidature à l'élection présidentielle de René Dumont, en 1974. Cela fait quarante-sept ans ! Je n'étais pas encore née – vous peut-être, monsieur le président. Depuis ce temps-là, j'ai entendu beaucoup de palabres et beaucoup de moqueries aussi, sur les enjeux écologiques. Je suis vraiment heureuse qu'enfin, les moqueries laissent la place à des paroles qui nous projettent vers l'avenir. Les paroles, c'est bien ; les diagnostics, c'est bien ; mais l'urgence nous impose à tous d'agir…

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

… et de sortir justement des diagnostics. J'ai écouté vos propositions, monsieur Mélenchon…

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Oui, il y en a quelques-unes, je les ai cherchées. Vous avez parlé de l'eau et des différents cycles ; vous avez raison. Vous avez parlé du cycle de l'eau et des océans qui sont très abîmés, par la pollution plastique par exemple.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Je vous rappelle à tous que l'équivalent d'un camion poubelle de plastique se déverse chaque minute dans l'océan. Oui, il faut agir ! Je vous ai entendu : vous avez dit qu'il fallait des mesures. Il en faut effectivement, et nous les instaurons, avec la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, et aujourd'hui avec le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets ; par exemple, en augmentant le recours au vrac, qui permet de lutter très fort contre les emballages plastiques. C'est une mesure du projet de loi au sujet duquel vous défendez une motion de rejet ; vous proposez donc qu'on ne puisse pas la voter.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Vous parlez de l'air, …

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

… du cycle déréglé de l'air et des questions de pollution. Eh bien, dans ce projet de loi, nous proposons la création de zones à faible émission qui concerneront la moitié de la population française. La moitié de la population française !

Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Les voitures polluantes ne pourront plus entrer dans ces zones, mais on ne s'arrête pas là ; évidemment, les mamans qui promènent leurs enfants dans leurs poussettes auront enfin un air un peu meilleur à leur faire respirer,

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

mais nous allons aussi aider les artisans, qui ne pourront plus entrer dans ces zones, à changer de véhicule. Nous allons aider les gens à trouver des solutions, parce que c'est facile de balancer des slogans, mais c'est un petit peu plus difficile de les appliquer et de créer une harmonie sociale autour de la transition écologique.

Mêmes mouvements.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Vous avez beaucoup parlé de la forêt ; vous avez dit qu'il faut arrêter les coupes rases. Très bien, mais pour que l'on parle des mêmes choses, je rappelle qu'entre 1850 et 2019, la surface forestière a doublé.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Elle a doublé ! Ça ne veut pas dire qu'il ne faut rien faire, loin de là. La forêt doit s'adapter au réchauffement climatique, qui risque de la faire brûler. Nous avons un opérateur, l'ONF, qui doit se reconstruire ; nous y travaillons. Tout ça demande qu'on sorte un peu des slogans, qu'on travaille contre la déforestation, notamment contre la déforestation importée.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Il y a des mesures dans cette loi pour lutter contre la déforestation importée, qui ne concerne pas seulement le climat, mais aussi le problème des zoonoses.

Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

C'est aussi ce qui a entraîné le blocage de toute la planète à cause d'un virus.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Voilà ce que nous essayons de faire.

Mêmes mouvements

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Vous dites que tout ça, c'est la faute du capitalisme : c'est encore un slogan !

M. Alexis Corbière rit.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Cela fait vingt ans que je m'investis pour l'écologie : les dégâts commis sur la planète n'ont malheureusement épargné aucun pays, pas même les pays communistes qui luttent pourtant contre le capitalisme. Des dégâts irréversibles ont aussi été faits dans ces pays-là.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

L'héritage est donc malheureusement très large et il est supporté par tous. Sortons de ces débats-là, essayons de voir quels sont les réels problèmes !

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Vous avez rejeté tous nos amendements ! Vous ne faites que des phrases !

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Nous en avons parlé ; vous avez fait un diagnostic d'une demi-heure, je ne vais pas y revenir. Mais attaquons-nous aux réels problèmes. Vous dites que les prométhéens, ce sont ceux qui réfléchissent avant : c'est très bien, et nous avons tous bien réfléchi. Maintenant, j'aimerais que l'on agisse, notamment à travers ce projet de loi, mais pas seulement, parce que ce n'est pas la seule loi sur le climat.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Monsieur Mélenchon, je vous informe, puisque vous ne le saviez pas – vous êtes pourtant parlementaire, vous étiez là quand j'étais moi aussi parlementaire – que depuis le début de la législature, et même avant– , il y a eu au moins trois lois qui s'occupent du climat. C'est un puzzle qui est en train de se faire. Nous avons une grosse pièce du puzzle sur laquelle travailler et nous avons des heures devant nous pour le faire : je vous propose que nous nous y mettions.

Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le président Mélenchon, je vous ai écouté avec beaucoup d'attention : vous aviez la sincérité du novice, de celui qui vient de découvrir le dérèglement climatique. Non, monsieur le président, le dérèglement climatique ne date pas d'aujourd'hui. Je vous renvoie aux ouvrages du Club de Rome, dont Halte à la croissance ?, publié en 1972. Quand vous étiez ministre, monsieur le président, vous n'avez rien fait contre le dérèglement climatique.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous ne savez pas de quoi vous parlez ! Que connaissez-vous à l'enseignement supérieur ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il y a encore deux ans, vous n'aviez pas de mots assez durs pour évoquer EELV (Europe Écologie Les Verts) et Yannick Jadot. Vous découvrez l'écologie !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je ne vous poserai qu'une question : avez-vous lu le projet de loi ? Non, incontestablement ! Vous affirmez que c'est notre seule loi relative au climat. Ce n'est pas vrai : depuis le début de la législature, la loi dite énergie-climat, la loi ÉLAN sur le logement, la loi ÉGALIM et la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire concernent l'écologie.

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Ce texte, que vous semblez ne pas avoir lu, contient des dizaines de mesures concrètes. Chacune mérite d'être discutée et votée, c'est pourquoi une motion de rejet préalable qui les englobe toutes est inacceptable !

Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.

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Dans les explications de vote sur la motion de rejet préalable, la parole est à M. François-Michel Lambert.

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La température monte, la colère aussi. Hier, de Lille à Bonifacio et de Quimperlé à Strasbourg, plus de 110 000 citoyens se sont réunis pour protester contre les insuffisances du projet de loi climat et résilience.

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Comme eux, comme une grande partie de mes collègues, comme le Haut Conseil pour le climat, comme tant d'experts, je considère que ce projet de loi n'est pas satisfaisant en l'état. Les mesures qu'il comporte ne suffiront pas à diminuer de 40 % les émissions de gaz à effets de serre, sans parler de les diminuer de 55 %, conformément à l'objectif européen. Pourtant, la décennie à venir sera cruciale si nous voulons réussir les changements structurels nécessaires pour atteindre nos objectifs : réduire les émissions de gaz à effet de serre, limiter les atteintes à la diversité et lutter contre toutes les formes de pollution. Voilà ce que M. Mélenchon a voulu souligner. Ce n'est pas aux générations futures qu'il appartient de relever ce défi, mais bien à nous aujourd'hui.

Certes, les petites mesures contenues dans ce projet de loi vont dans la bonne direction, mais leur application ne suffira pas à provoquer un changement de paradigme, une indispensable transformation écologique. De trop nombreux sujets ont été écartés ou ne sont pas abordés, en particulier la lutte contre la pollution plastique, la gestion des ressources en eau, la protection de la biodiversité et les ressources forestières.

Pire, le texte est dépourvu de pensée structurelle. Pourquoi vivons-nous tant de mobilités contraintes et désordonnées ? Devons-nous simplement interdire, ou faut-il réviser notre modèle d'existence, entre lieux de vie, de travail, de loisirs, de service public, et repenser notre économie, fondée sur la société de consommation et du gaspillage, prise dans une mondialisation effrénée ? Le cargo échoué de la compagnie Evergreen en est devenu le symbole ; il porte bien son nom, puisqu'il luttera sûrement davantage à lui tout seul contre les émissions de gaz à effet de serre, en bloquant le canal de Suez, que ce projet de loi.

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Alors oui, notre inquiétude justifierait que nous votions cette motion de rejet. Cependant, nous estimons qu'il faut prendre acte de l'urgence qu'impose la crise écologique, donc laisser le débat se dérouler. Nous repousserons donc cette motion de rejet.

Debut de section - Permalien
Plusieurs députés du groupe Dem

Très bien !

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Ce projet de loi fait semblant. Or, en matière de climat, il n'est plus temps ! L'année 2020 a été une des trois années les plus chaudes depuis que nous sommes capables de relever les températures, alors que le covid-19 a largement diminué la production et que le phénomène El Niño, dans l'océan Pacifique, connaissait une année froide.

Dans l'exposé des motifs, vous précisez que l'application des mesures contenues dans ce projet de loi ne suffira pas à atteindre les objectifs que la France s'est fixés pour 2030. Ce seul aveu devrait suffire à fermer le ban, mais non, vous avez décidé de faire semblant.

Vous faites semblant d'adapter les mesures issues de la Convention citoyenne pour le climat, or 113 ont été abandonnées, soit 76 %, et les 46 que vous proposez d'adopter sont non conformes.

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D'ailleurs, les 150 membres vous ont attribué la note de 3,3 sur 10. Vous me direz que cela reste inférieur à la hausse des températures d'ici à la fin du siècle, selon les prévisions de Météo France en février : de 3,9 à 6 degrés centigrades, si rien n'est fait, soit à peu près ce que vous proposez.

Vous avez retoqué toutes les réformes structurelles que la Convention citoyenne a proposées : taxation des dividendes, moratoire sur la 5G, interdiction de la publicité pour les produits polluants. Nombre de vos propositions sont vagues, …

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… destinées à être appliquées fort tardivement, ou de caractère expérimental, comme les repas végétariens dans les cantines. D'ailleurs, la plupart des municipalités en ont déjà fait l'essai, sans attendre votre projet de loi.

Vous allez jusqu'à faire régresser le droit en matière d'écocide. En effet, vous proposez d'introduire une condition d'intentionnalité, laquelle est notoirement difficile à prouver. Vous ne proposez aucun outil, rien en matière de libre-échange ou de service public. Il est vrai, madame la ministre, que votre ministère subit les plus grandes purges de tous les ministères en nombre d'équivalents temps plein (ETP), avec 5 291 postes supprimés depuis 2017, auxquels s'ajoutent ceux supprimés chez ses nombreux opérateurs, de sorte qu'il est difficile de croire que le sujet soit aussi fondamental à vos yeux que vous l'affirmez.

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Pour l'instant, nous n'avons échappé qu'au projet Hercule, qui tend à démanteler EDF. Vous aviez initialement prévu de l'inscrire dans ce projet de loi, mais, heureusement, la mobilisation nous l'a épargné.

En matière climatique, comme en matière épidémique, vous faites semblant. On en voit les résultats dans le domaine sanitaire ; je crains fort qu'on les constate également, sous la forme d'une hausse des températures, si votre proposition de loi est la seule adoptée dans les années à venir.

Le week-end dernier, 110 000 manifestants ont interpellé les députés pour leur demander leurs intentions. Nous ne participerons pas à l'élaboration de votre trompe-l'oeil : nous n'acceptons pas de faire semblant dans le domaine climatique. Vous objectez à M. Mélenchon que nous serions seuls à nous opposer à votre texte ; je vous fais remarquer que 500 organisations ont appelé à manifester, dont certaines auxquelles vous avez appartenu dans le passé. Elles trouvent votre texte insuffisant et le notent plus sévèrement encore que les 150 citoyens, puisqu'elles lui donnent 2,5 sur 10. Voilà ce que vaut votre loi.

Nous avons déposé des amendements visant à appliquer des mesures concrètes ; vous les avez tous retoqués. Nous attendrons notre arrivée au pouvoir en 2022 pour appliquer les propositions contenues dans le numéro des Cahiers de l'avenir en commun consacré à la planification écologique, que je vous conseille de lire : vous y trouverez les réformes que la situation climatique impose.

Applaudissements sur les bancs des groupes FI et GDR.

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Je m'adresse à toute la majorité, mais plus particulièrement à Mme Motin : elle seule a eu le courage d'évoquer le capitalisme dans ce début de débat. Notre conviction, que voulez-vous, est que le capitalisme ne peut être vertueux, ni pour les hommes, ni pour la nature.

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Permettez-moi un peu de solennité pour évoquer une actualité tragique : le bilan de 6 500 morts sur les gigantesques chantiers écocides du Qatar, destinés à préparer la Coupe du monde 2022.

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Cet État pétrolier est par ailleurs actionnaire des groupes Lagardère, Accor, Total, Vinci et LVMH.

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Aussi longtemps que vous persisterez dans la logique qui vise à maintenir la domination d'un système économique que vous refusez d'égratigner, nous ne parviendrons pas à engager la transition écologique et solidaire que tant de millions de Français ont à coeur de connaître.

Comment mettre fin à la terrible tragédie que je viens d'évoquer ? Faites payer les coupables très cher. Inscrivez dans le texte le prélèvement sur les dividendes que la Convention citoyenne a réclamé. Emmanuel Macron a offert aux privilégiés ce joker incompatible avec la transition écologique et citoyenne.

Le système que vous défendez est à l'origine des circonstances tragiques que les hommes et la nature affrontent chaque jour. Nous voterons donc la motion de censure.

Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI.

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Hier, La France insoumise défilait dans les rues pour appeler à lutter contre le réchauffement climatique ; …

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… aujourd'hui, ses députés défendent une motion de rejet du projet de loi qui vise à accélérer cette lutte. L'absurdité politique n'a pas de limites. J'aurais préféré débattre avec vous que de répondre à votre motion, si vous aviez été plus assidus pendant les douze jours qu'a duré l'examen du texte en commission. Vous auriez ainsi pu prendre connaissance des principales avancées que contient le texte.

Il reprend des propositions avancées par la Convention citoyenne. Il contient des mesures puissantes : orientations de la planification écologique, renforcement des critères environnementaux dans les marchés publics, lutte contre l'artificialisation des sols, interdiction de louer des passoires thermiques, transition des transports terrestres et aériens, renforcement des pouvoirs judiciaires et sanctions contre l'orpaillage illégal.

Le projet de loi propose aussi des outils concrets à l'intention des maires et des collectivités locales, afin de préserver la qualité de l'air en zone urbaine, d'encadrer la publicité lumineuse et de favoriser un aménagement vertueux du foncier, objectif intégré aux documents de planification. Il contient des mesures et indicateurs pour mieux informer le consommateur et encourager l'évolution, comme l'Éco-score ou encore le DPE.

L'écologie punitive n'est pas efficace. Un chemin existe entre ceux pour qui aucune mesure n'est efficace, et ceux qui voudraient ne jamais rien faire évoluer. Nous incarnons ce choix d'une voie médiane de bon sens. Nous ne reprenons pas à notre compte l'injonction, dont certains partis politiques ont fait une rente ; nous ne prônons pas l'écologie de la décroissance…

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… que défendent ceux qui veulent clouer les avions au sol, et qui pleurent sur les emplois détruits.

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La vérité est que la transformation écologique du pays est en marche. Nous agissons à tous les niveaux ; notre bilan pour le climat sera historique. La semaine dernière, nous avons adopté le principe de la réforme de l'article 1er de la Constitution ; cette semaine, nous examinons ce projet de loi dans l'hémicycle ; au Parlement européen, nos collègues du groupe Renaissance votent un ajustement carbone aux frontières de l'Union européenne ; le Président de la République reçoit à l'Élysée John Kerry, venu saluer l'engagement français en faveur du climat.

Nous sommes à la pointe de la transition écologique en France, en Europe, à l'international, et ce texte est l'un des jalons de notre politique. Nous voterons donc contre cette motion.

Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

M. Mélenchon a pris du temps pour expliquer sa position. C'est normal, car nous n'en avons pas eu beaucoup en commission : il a fallu s'adapter en permanence à un système de réécriture des articles indigne d'un débat républicain.

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Madame Lebec, politiquement, je n'ai pas forcément beaucoup en commun avec M. Mélenchon, …

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… mais vous ne pouvez pas lui reprocher de ne pas avoir assisté aux séances de la commission spéciale, alors qu'il n'en est pas membre.

Le débat doit avoir lieu. Monsieur Mélenchon, nous sommes nombreux à partager votre constat que la planète ne va pas bien, qu'elle est abîmée. Comme vous, je pense que nous devons nous fixer pour objectif de laisser aux générations qui nous succéderont une Terre plus vertueuse et plus durable. Néanmoins, et j'en suis désolé, je ne suis pas d'accord sur le choix du chemin pour atteindre ces objectifs. Je ne pense pas que l'entreprise soit un problème : je crois qu'elle est une solution.

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Oui, mais l'entreprise, ce n'est pas le capitalisme !

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Monsieur Wulfranc, si les entreprises que vous avez citées en évoquant le Qatar construisaient des stades en France, elles respecteraient la loi française. Le problème n'est donc pas du ressort des entreprises, mais de l'État dans lequel elles travaillent.

Comme vous le voyez, il existe différentes options, et il faut que nous puissions en débattre au cours des semaines qui viennent. C'est donc pour laisser toute sa place au débat que le groupe Les Républicains s'abstiendra lors du vote de la motion.

Applaudissements sur les bancs du groupe LR.

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En proposant le rejet préalable de ce texte, le groupe de la France insoumise refuse que l'on puisse apporter sa conclusion à un processus démocratique inédit.

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En effet, il refuse que le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, qui n'est autre que la traduction législative de la volonté des 150 membres de la Convention citoyenne pour le climat, voie le jour.

Au prétexte d'un prétendu manque d'ambition du texte, les insoumis refusent que l'on puisse adopter des avancées majeures : ils refusent l'instauration d'un « score carbone », l'interdiction de la vente de véhicules polluants en 2030, la rénovation des passoires thermiques d'ici 2028, les zones à faibles émissions dans les villes. Ils refusent que l'on privilégie les trajets en train à ceux en avion, ils refusent la diminution drastique de l'artificialisation des sols, l'amélioration de la qualité des repas dans les cantines, la création d'un délit d'écocide, et ainsi de suite !

Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem. – Exclamations sur les bancs du groupe FI.

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En proposant de rejeter ce texte avant même d'en débattre, M. Mélenchon et les insoumis méprisent les citoyens qui se sont investis dans ce travail – qu'ils aient été ou non membres de la convention, d'ailleurs. Ils méprisent aussi les milliers de personnes qui ont défilé dans les rues hier, et qui attendent des mesures fortes en faveur du climat, car ce projet de loi leur apporte justement des réponses concrètes.

En outre – et c'est peut-être le plus grave – , ils méprisent le débat parlementaire, qui doit permettre d'améliorer encore le texte, de lui donner à la fois plus d'ambition et de finesse, pour répondre au mieux aux besoins des Français, gage de la pleine et entière acceptabilité des mesures qu'il prévoit.

Les insoumis rêvent d'une Assemblée nationale sans mixité démocratique, au sein de laquelle ils pourraient choisir qui a le droit de parler, et de quoi : …

Brouhaha et rires sur les bancs du groupe FI

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« Collègues ! Vous aurez le droit de débattre uniquement lorsque le texte nous conviendra ! En attendant, taisez-vous ! »

Exclamations sur les bancs du groupe FI.

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Tel est le message envoyé par les insoumis avec cette motion de rejet.

Vous l'aurez compris, cher président, ce n'est pas notre vision du débat démocratique, et c'est la raison pour laquelle nous voterons contre votre motion de rejet.

Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.

Debut de section - Permalien
Plusieurs députés du groupe FI

Une autre, une autre !

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Ce texte devait être le grand projet de loi du quinquennat en matière de climat. Mais de rétrécissement en rétrécissement, de déception en déception, de renoncement en renoncement, il se transforme peu à peu en un grand désenchantement. Manque de lisibilité, de cohérence, d'accompagnement social : la grande transition climatique à réaliser nécessite plus de justice, condition sine qua non pour évoluer vers une société moins carbonée.

Les conséquences du réchauffement climatique seront aussi claires et imaginables que les prévisions que vous connaissez toutes et tous.

Les flux humains seront les premiers concernés, avec un nombre croissant de réfugiés climatiques. Alors que nous ne sommes déjà pas capables, aujourd'hui, d'accueillir dignement de nombreux exilés, notre pays se donnera-t-il les moyens de pouvoir tendre la main demain ?

Les conséquences du réchauffement climatique sur les milieux naturels seront évidemment lourdes, touchant fortement la biodiversité et entraînant, vous le savez, des retombées sur la production d'eau potable, le tourisme et l'agriculture – nous en avons parlé tout à l'heure.

Tous les sinistres climatiques auront non seulement un coût humain considérable, mais également un coût économique énorme. Deux grandes fédérations professionnelles, la fédération bancaire française (FBF) et la fédération française de l'assurance (FFA), tentent d'en faire le chiffrage : la fédération française de l'assurance l'estime à près de 100 milliards d'euros entre 2014 et 2039, soit une augmentation de 90 % par rapport à la période 1988-2013. Ce coût pourrait être plus élevé encore si des mesures de prévention des catastrophes ne sont pas mises en place.

Madame la ministre, ce texte permettra-t-il de respecter les accords de Paris, qui ont pour objectif de limiter le réchauffement climatique à 1,5 degré et de respecter la stratégie nationale bas-carbone ? À nos yeux, la réponse est non.

Il y a quelques semaines, le Conseil économique, social et environnemental – CESE – vous a avertie : « Alors qu'il faudrait tripler le rythme annuel de réduction des émissions et les diviser par six d'ici 2050, les mesures apparaissent souvent limitées, différées, ou soumises à des conditions telles que leur mise en oeuvre à terme rapproché est incertaine. »

Le Haut conseil pour le climat vous a également alertée, évoquant là encore des périmètres d'application trop restreints et des délais d'exécution trop longs, tout comme les citoyens de la Convention citoyenne pour le climat, qui ont montré leur déception en délivrant au projet de loi la note de 2,5 sur 10.

Enfin, les différentes organisations non gouvernementales – ONG – et les citoyens vous ont alertée, pas plus tard qu'hier après-midi, en descendant pacifiquement dans les rues pour exprimer leurs attentes, mais aussi leur mécontentement sur le texte proposé.

Pourtant, j'ai entendu tout à l'heure un satisfecit continu : après toutes les réserves émises par les différentes institutions, les organismes et conseils indépendants, comment pouvez-vous encore parler de « grandes ambitions » ?

Je regrette également que, par le jeu des irrecevabilités, vous n'ayez malheureusement pas entendu nos propositions en commission spéciale. Pourtant, nous en avions formulé de nombreuses, que ce soit en matière de transport ferroviaire, de fret fluvial, de sobriété numérique, de gestion forestière ou de gaspillage alimentaire.

Toutes ces raisons nous poussent aujourd'hui à réclamer un texte plus juste et à voter en faveur de la motion de rejet préalable présentée.

En effet, toutes les mesures que vous proposez dans ce texte n'entreront en vigueur qu'à une date très lointaine, bien souvent au-delà de 2022. Plutôt que d'adopter un texte écorné, profitons du moment pour retravailler collectivement ce grand projet de société que vous appeliez aussi de vos voeux : proposons un accompagnement social digne de ce nom, une véritable obligation de rénovation globale des logements, l'instauration d'un prêt à taux zéro couplé à un reste à charge nul pour l'achat d'un véhicule peu émetteur de gaz à effet de serre, l'application d'une TVA réduite pour les produits locaux et les transports en commun. Tout cela, nous l'avons proposé, mais vous ne l'avez pas retenu.

Pourquoi avoir abandonné l'instauration d'une taxe sur les dividendes, alors qu'elle aurait justement pu être le socle de justice permettant la réussite de ce grand projet de transition ? Profitons de ce texte pour enclencher une nouvelle ère industrielle verte et créer des emplois dans les territoires, en lien avec des circuits courts et la solidarité. Redonnons du sens à nos vies à travers un grand objectif de préservation de notre patrimoine naturel, sur lequel la France doit exercer sa souveraineté.

Soyons responsables : ce texte doit préserver les générations futures, et nous ne pouvons pas remettre à demain les efforts qui doivent être réalisés aujourd'hui, alors travaillons sur les référés environnementaux et l'instauration d'un crime d'écocide.

Quel monde voulons-nous laisser aux générations suivantes ? La voie centrale, qui a été rappelée tout à l'heure par nos collègues de la majorité, manque cruellement d'ambition : entendons les préoccupations légitimes et la mobilisation des milliers de nos concitoyens qui ont marché partout en France hier. N'oublions pas, mes chers collègues, que « nous n'héritons pas de la terre de nos ancêtres, nous l'empruntons à nos enfants. » Travaillons donc à rendre le texte plus ambitieux : proposons un projet de loi à la hauteur des enjeux, proposons une vraie loi pour le climat !

Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.

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Sur la motion de rejet préalable, je suis saisie par le groupe La France insoumise d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à Mme Valérie Petit.

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L'intention qui sous-tend cette motion de rejet est à l'évidence de priver l'écologie et les Français non seulement d'une loi historique, mais aussi d'un débat démocratique.

En résumé, la démocratie est sommée de se taire.

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Vous avez limité le temps de parole et rejeté tous nos amendements, et vous appelez ça la démocratie ?

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Il semblerait que ce soit à la mode ! Monsieur Mélenchon, il fut un temps où la démocratie, et non les ego, était sacrée pour les membres de cet hémicycle. Seulement, les gens changent, et pas toujours dans le bon sens, jusqu'à parfois devenir la caricature d'eux-mêmes.

C'est un bien triste spectacle que cette motion pour ceux qui défendent à la fois l'écologie et la démocratie représentative ; pour les Français, aussi, qui voient leurs aspirations en matière d'écologie prises en otage par des aventures et des soliloques personnels pseudo-révolutionnaires.

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On ne peut que souhaiter que le rideau tombe sur ce triste spectacle, c'est pourquoi le groupe Agir ensemble votera contre la motion de rejet.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.

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Comme vous tous, j'ai écouté attentivement Jean-Luc Mélenchon, qui juge le projet de loi « Climat et résilience » insuffisant. Il a noté des manques, voire des défaillances, que l'on peut partager. Il a également pris le temps d'aborder plusieurs problématiques : trente-cinq minutes d'intervention pour évoquer le cycle de l'eau, la montée des eaux dans les océans, les migrations climatiques, les accords commerciaux bilatéraux de libre-échange conclus respectivement avec le Canada – le CETA – et le Mercosur, …

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… mais également les 3 milliards d'euros qui manquent chaque année au ferroviaire et la nécessité d'abolir la publicité pour les produits polluants.

Il a même cité l'exemple du glyphosate, allant jusqu'à dire qu'il fallait supprimer le glyphosate car les ingénieurs étaient prêts.

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Vous ne manquez pas d'air, monsieur Mélenchon, vous ne doutez vraiment de rien ! Bien sûr que les ingénieurs sont prêts, seulement ce n'est pas le cas de tous les agriculteurs.

J'ai regretté, monsieur Mélenchon, que votre argumentaire de trente-cinq minutes soit essentiellement consacré à la dénonciation de certains faits et des défaillances du projet de loi, au détriment de toute proposition alternative, puisque vous n'en avez formulé que très peu.

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Mais les propositions sont dans nos amendements !

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Prenons l'exemple du glyphosate – pour n'en citer qu'un : tout l'enjeu de ce projet de loi réside dans l'accomplissement des transitions, et leur temporalité. Or je pense – comme 66 millions de nos compatriotes – , que dans la France comme dans le monde, chacun doit prendre sa part.

Il y a sans nul doute des manques dans le texte : personnellement, j'aimerais que l'on aille beaucoup plus loin en matière de publicité papier, ou encore qu'on ne se contente pas de limiter le nombre de mètres carrés des grandes surfaces, mais qu'on en interdise totalement la construction pendant plusieurs années – nous en débattrons probablement cette semaine.

Mais il y a des urgences, et deux faits de l'actualité internationale nous prouvent que chaque pays, dans le monde, doit agir en matière de climat : le porte-conteneurs bloqué dans le canal de Suez, véritable symbole du gigantisme humain et de l'empreinte écologique qu'il laisse sur la planète, et l'explosion dans une raffinerie sur l'île de Java, en Indonésie. Une prise de conscience collective sur l'empreinte écologique de l'activité humaine est plus que jamais nécessaire, et le texte présenté aujourd'hui ne va probablement pas suffisamment loin.

Cependant, je me souviens très bien de ce qu'il s'est passé il y a dix ans, sous une autre majorité. Lorsque Jean-Louis Borloo a présenté les lois issues du Grenelle de l'environnement, tout le monde était d'accord avec le concept, les idées, les orientations stratégiques. La loi « Grenelle I » a même été adoptée à la quasi-unanimité.

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Mais lorsqu'il s'est agi de passer aux travaux pratiques – en particulier en matière de fiscalité, avec la taxe carbone et l'écotaxe – , il n'y avait plus personne sur le terrain, c'était très compliqué.

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Aujourd'hui, nous sommes attendus : à nous de réussir à passer d'une écologie conceptuelle à une écologie dite opérationnelle.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 103

Nombre de suffrages exprimés 91

Majorité absolue 46

Pour l'adoption 18

Contre 73

La motion de rejet préalable n'est pas adoptée.

Suspension et reprise de la séance

La séance, suspendue à dix-huit heures trente, est reprise à dix-huit heures quarante.

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Dans la discussion générale, la parole est à M. François-Michel Lambert.

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Depuis le début du mandat présidentiel, les textes s'enchaînent. Ils sont censés déboucher sur la loi de la dernière chance, sur la loi la plus importante du quinquennat. Ils concernent la mobilité, l'énergie, le climat, l'économie circulaire, mais tous affichent la même ambition : faire face à l'urgence écologique. Or, derrière ces slogans politiques, qu'y a-t-il vraiment ? Quelques bonnes mesures, parfois ; un manque de moyens, souvent ; toujours la volonté que la réponse au changement climatique demeure reléguée à la périphérie des politiques publiques.

À mon grand regret, ce projet de loi s'inscrit dans la lignée des textes qui l'ont précédé : il ne se montre pas à la hauteur de l'enjeu climatique. D'ailleurs, je ne suis pas le seul à le dire. Les 150 citoyens qui en sont à l'origine, qui se sont investis dans ce travail et sensibilisés à ces questions pendant près de neuf mois, ont su déterminer les secteurs essentiels à la transition écologique, formuler des propositions visant à réduire nos émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2030. Néanmoins, sans doute par manque de temps, de formation, de connaissances, ils ont laissé de côté certaines questions. Nous attendions du Gouvernement qu'il comble ces failles, qu'il suscite cette ambition là où elle faisait défaut. Je l'ai dit en commission et je le répète ici : ce texte n'est finalement bâti que sur des fondations branlantes.

La France gagne chaque année près de 200 000 habitants – soit l'équivalent de la population du Gers, cher rapporteur général. Le temps d'un quinquennat ou d'une législature, cela donne 1 million de personnes, davantage qu'il ne s'en trouve dans la ville de Marseille. Cette croissance démographique et ses conséquences sur l'aménagement du territoire sont les grandes absentes de votre postulat : leur prise en compte fera donc défaut lorsqu'il faudra agir. Rien n'a été prévu pour rétablir l'équilibre entre territoires, limiter les mobilités contraintes. Pourtant, nous ne parviendrons à réduire la quantité de gaz à effet de serre émis par les transports, par la consommation, qu'à condition de repenser la ville et les territoires, de rapprocher lieux de travail et lieux de vie, lieux de socialisation et lieux de production, de privilégier les circuits courts.

La logistique, elle aussi, est aux abonnés absents, malgré nos mauvaises performances en la matière : selon la Banque mondiale, la France se classe au huitième rang des pays européens, au seizième rang dans l'absolu. Cela signifie que la mobilité y est désordonnée, avec des conséquences néfastes à la fois sur l'environnement et sur l'économie : cette sous-performance logistique nous coûte chaque année 60 milliards d'euros et environ 10 millions de tonnes de CO2. Le symbole même de ce gaspillage, mais aussi de la mondialisation, c'est l'Ever Given, ce porte-conteneurs d'Evergreen Marine Corporation. Celle-ci porte finalement bien son nom. En obstruant le canal de Suez, son cargo aura davantage fait baisser les émissions de gaz à effet de serre qu'aucune de vos mesures.

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Surtout, il aura démontré la nécessité de repenser notre système en profondeur. Nous devons engager la transformation écologique qui aboutira à un nouveau modèle de développement.

Autre oublié majeur : la fiscalité environnementale. Vous nous donnez rendez-vous à l'occasion du projet de loi de finances mais je crains que ce rendez-vous n'ait pas lieu. La fiscalité environnementale est pourtant un levier essentiel de la transformation écologique. Quant à la lutte contre la pollution plastique et à celle pour la préservation de l'eau, deux enjeux majeurs pour les décennies à venir, elles ne font l'objet que de mesures résiduelles.

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Au-delà de ces failles originelles, je déplore que la promesse présidentielle du « sans filtre » n'ait pas été tenue. Édulcorant certaines propositions de la Convention citoyenne pour le climat, en éludant d'autres, le Gouvernement a considérablement amoindri la portée du projet de loi. De trop nombreuses mesures se limitent ainsi à des expérimentations, subissent des dérogations conséquentes, voire ne sont pas normatives. L'article 12 en est un exemple : il prévoit que des dispositifs de consigne pour réemploi puissent être mis en oeuvre pour les emballages en verre, dans un cadre expérimental. D'abord, c'est déjà le cas ; ensuite, cela ne fait pas avancer les choses ! Autre exemple, l'article 35 précise que l'État se fixera pour objectif que le transport aérien s'acquitte d'un prix du carbone suffisant à partir de 2025 – quel objectif ! Ces dispositions contribuent à rendre le projet de loi bavard, illisible et complexe. Pire, elles laissent croire que vous agissez alors qu'en réalité, vous choisissez le statu quo.

D'autres mesures, qui relèvent également de la communication, posent de nouveaux principes mais ne permettent pas de faire avancer la cause climatique. L'interdiction des terrasses chauffées ? Une mesurette qui fera sans doute parler ; c'est un bon exemple. Nous aurions pu et aurions dû parler – et nous le ferons – des jet-skis de loisir l'été au large du fort de Brégançon.

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De même, vous prétendez empêcher la construction et l'extension de nouveaux aéroports sur le territoire métropolitain. Dans les faits, seuls les travaux nécessitant une déclaration d'utilité publique seront visés, ce qui concerne une infime minorité d'aéroports.

Enfin, des articles du texte pourraient même, selon certains observateurs, acter un recul de l'ambition environnementale. D'aucuns considèrent ainsi que le fait de rendre les étiquettes C voire D éligibles à une rénovation améliorant la performance énergétique saborderait la politique en la matière.

Quant au délit d'écocide, il n'aura de sens que s'il s'accompagne d'une extraterritorialité de notre droit. Autrement dit, nous ne pouvons risquer que le durcissement de notre cadre législatif n'incite les industriels à s'installer ailleurs. La délocalisation de la pollution n'est pas une solution, elle est même un danger. Nous aurons à ce sujet un rendez-vous majeur : rendre extraterritorial le délit d'écocide.

Je veux en outre pointer un problème de méthode. Vous imposez, avec ce texte, une vision descendante et centralisatrice de l'écologie. Au sein du groupe Libertés et territoires, nous sommes au contraire convaincus que l'ambition environnementale doit être portée et s'incarner dans les territoires. Pour cela, il faut donner aux élus locaux, engoncés dans le centralisme jupitérien, les moyens de mettre en oeuvre une politique adaptée à leurs réalités locales. Ce n'est pas le choix que vous avez fait avec ce projet de loi, qui impose des solutions nationales décorrélées des réalités locales.

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Si, monsieur le rapporteur général ! Votre approche de l'artificialisation des sols est à ce titre révélatrice. Les membres de la Convention citoyenne pour le climat souhaitent mettre fin à la bétonisation à tout-va et nous partageons cet objectif. Mais en obligeant à diviser par deux la consommation d'espace, quel que soit le territoire…

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… vous faites fi des dynamiques démographiques que j'évoquais tout à l'heure et des 200 000 nouveaux habitants que la France accueille chaque année. Vous exposez ainsi nos concitoyens au risque d'une crise du logement – et de fait, à un échec probable de notre objectif commun.

Enfin, je regrette les conditions dans lesquelles nous examinons ce texte. Les deux semaines d'examen en commission, week-end compris, ne nous ont même pas laissé une heure par article. Le temps législatif programmé nous permettra à peine d'évoquer plus en profondeur les sujets. Quarante-cinq heures seulement sont mobilisées pour débattre des solutions à mettre en oeuvre pour diminuer de 40 % les émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030 et pour être à la hauteur de l'enjeu du siècle – quarante-cinq heures dans l'hémicycle ! Qui eût cru que l'urgence climatique se traduirait non pas par des mesures plus ambitieuses, mais par une accélération du temps législatif et une urgence à statuer ? La démocratie parlementaire vaut-elle moins que la démocratie de 150 citoyens tirés au sort ?

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En dépit des conditions difficiles d'examen de ce projet de loi, nous défendrons nos propositions. Surtout, nous porterons notre ambition d'une transformation écologique pour remettre au coeur de notre projet national une espérance et une résilience, pour bâtir le monde d'après et pour enfin croire dans nos territoires et leur donner les moyens d'agir dans l'intérêt de nos concitoyens et des générations futures. Voilà l'ambition du groupe Libertés et territoires. Nous vous donnons rendez-vous dans trois semaines et porterons haut cette ambition de dépasser le cadre dans lequel vous imposez la transition écologique.

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Ministre, collègues, ce jour signe la fin de votre mascarade démocratique. Aujourd'hui s'ouvre le procès de votre politique écologique. Depuis 2017, vous avez voulu mettre à l'ombre des militants écologistes, des syndicalistes et des gilets jaunes. Maintenant c'est votre tour d'être jugés sur vos actes ! La liste des chefs d'accusation est interminable. Votre premier méfait : l'engraissement des riches en bande organisée. En 2018, vous supprimiez l'impôt de solidarité sur la fortune. Le riche n'était pas assez riche à votre goût. L'enquête préliminaire est sans appel : vous ignorez toujours que plus les riches s'enrichissent, plus ils possèdent, plus ils polluent.

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Si c'était votre objectif, bingo : la France est le pays où la fortune des milliardaires a le plus progressé, gagnant 45 % entre 2019 et 2020. En revanche, on verra plus tard pour le ruissellement, car notre pays compte toujours 10 millions de personnes pauvres. Avec cette suppression, vous rendiez 4 milliards d'euros à l'oligarchie, la même somme que vous vouliez récupérer avec la taxe carbone. C'est ainsi qu'il faut comprendre la puissance du mouvement des gilets jaunes qui a déferlé sur les ronds-points et dans les rues. Ils l'ont scandé partout : pas d'écologie sans justice sociale ! Quand les gens n'ont pas d'autre choix que de prendre la voiture pour se déplacer, c'est quand même à eux que vous allez chercher des noises, plutôt qu'à Total. Ce sursaut populaire magnifique a rappelé ce que nous sommes viscéralement : une patrie révolutionnaire. Les gilets jaunes ont renoué avec le désir d'une société de solidarité et de partage. Je leur adresse ici un salut fraternel : aux éborgnés, aux estropiés, aux gazés, aux matraqués, aux emprisonnés, aux condamnés, à ceux qui ont vu s'abattre la répression sur leur corps, à toutes ces gueules cassées du macronisme matées à tour de bras pour avoir exigé un monde plus juste.

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La contestation a repris son souffle au moment de votre infâme tentative de réforme des retraites. Là encore, votre esprit comptable étriqué…

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… ne s'était pas aperçu qu'il s'agissait bien d'une politique anti-écologique. Vous vouliez nous faire travailler plus longtemps, c'est-à-dire produire jusqu'à l'épuisement toujours plus de marchandises inutiles et indésirables, exportées partout dans le monde, aggravant ainsi nos émissions de gaz à effet de serre. Votre logiciel basé sur la croissance infinie est archaïque. Il vous reste à apprendre que notre planète et le vivant ont leurs limites physiques tout comme les êtres humains, qui ne rêvent pas de travailler jusqu'au seuil de leur mort. Avec cette réforme, vous vouliez anéantir le temps libre passé hors de la sphère marchande. Vous acheviez le modèle d'homo ?conomicus à l'heure où il est insoutenable. Vous réduisiez à néant nos capacités intergénérationnelles de résistance collective au chaos climatique, alors que nos conditions de survie sont fondées sur l'entraide. Il paraît même que vous voulez remettre cette réforme sur la table pour payer la crise du covid-19. Cela constituerait, j'en suis sûre, une circonstance aggravante.

Nous en arrivons au deuxième chef d'accusation : matraquage, gazage et répression aggravée. Emmanuel Macron disait en juin 2019, au mouvement des jeunes pour le climat : « J'ai besoin d'une chose, c'est que vous nous rendiez la vie impossible, nous les dirigeants. () J'ai besoin de ces mouvements, de ces indignations. »

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Ce qu'il a oublié de dire aux jeunes, c'est la manière singulière dont il allait leur répondre, que l'on pourrait résumer en une phrase devenue célèbre du préfet Lallement au sujet des gilets jaunes, prononcée le 8 décembre 2018 : « Allez-y franchement, n'hésitez pas à percuter. Ça fera réfléchir les suivants. »

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Ils furent matraqués et gazés, parfois même sans raison apparente, comme le furent les militants d'Extinction Rebellion sur le pont de Sully à Paris, le 28 juin 2019, alors qu'ils étaient parfaitement pacifiques.

Répression sans distinction, comme pour ce journaliste de Reporterrre placé dix heures en garde à vue le 26 juin 2019 pour avoir couvert une action écologiste à l'aéroport d'Orly.

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Criminalisation tous azimuts, comme avec ces centaines de procès intentés contre les décrocheurs de portraits de Macron ou comme avec les militants anti-agrobusiness pour lesquels vous avez spécialement inauguré, en décembre 2019, la cellule de renseignement Déméter…

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… ou encore les militants antinucléaires qui luttent contre l'enfouissement des déchets nucléaires et l'empoisonnement des sols pour des générations, à Bure, pour qui vous avez sorti l'arsenal antiterroriste et consacré un million d'euros à l'enquête qui les vise. Quel est leur point commun ? Ils n'en peuvent plus de l'écologie des petits pas et de votre inaction coupable.

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N'est-ce pas là une bonne raison pour les frapper gaiement ?

Venons-en au troisième chef d'accusation : enfumage en réunion, celui sur lequel votre taux de récidive est le plus élevé. Il suffit de remplacer des mots par d'autres : « écologie du concret » pour « écologie de la touillette », « écologie du progrès » pour « écologie qui laisse les pollueurs tranquilles ».

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La Convention citoyenne pour le climat a pour sa part rendu son jugement ; c'est la note médiocre de 2,5 sur 10 que ses membres ont donnée à votre texte, lui-même décrié de toutes parts. Savez-vous où étaient certains de ces citoyens hier ? Ils étaient dans la rue pour réclamer une vraie loi climat. On peut vous reconnaître un talent, celui de dresser sans trop d'efforts le grand nombre contre vous. Le Haut Conseil pour le climat, le Conseil national de protection de la nature (CNPN), le CESE, une centaine d'organisations de la société civile et la marée de jeunes qui défilaient dans les rues dimanche… Toutes et tous ne savent plus dans quelle langue vous le dire : votre projet de loi est insuffisant.

Vous nous dites pour votre défense, madame la ministre, qu'il faut considérer votre bilan en entier. D'accord ; je concède cet argument à la partie adverse. Voyons : tapis rouge et fanfare pour Amazon et ses entrepôts ; retour des néonicotinoïdes qu'il est pourtant plus facile d'interdire que de prononcer ; pas d'interdiction du glyphosate ; traités de libre-échange à gogo ; aides publiques accordées aux multinationales polluantes sans contrepartie ; fuite en avant dans le nucléaire ; suppression des aides à l'agriculture biologique ; autorisation de fermes-usines ; contournements autoroutiers ; la France condamnée pour la pollution de l'air ; destruction des effectifs du ministère de la transition écologique et des opérateurs publics comme l'Office national des forêts…

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Franchement, êtes-vous sûre de votre stratégie de défense, madame la ministre ? Vous en arrivez même à fatiguer vos propres agents, qui ne sont pas dupes de vos petites manoeuvres. Je cite l'un d'eux : « J'ai fait un burn-out. Pas celui où l'on travaille trop. Non, pensez-vous, l'écologie sous Macron ! Non, un burn-out de manque de sens dans mon travail. Je voulais parler permaculture, collapsologie et résilience locale ; on me demande de serrer des mains, de me réjouir des tasses qui remplacent les gobelets plastiques et d'organiser l'étape du Tour de France des objectifs du développement durable dans ma région. » Les syndicats de votre ministère ont même un mot pour cela : « inaction verbeuse ».

Je vous entendais hier, madame Pompili, dire qu'il fallait continuer à se battre, continuer encore, ne surtout pas baisser les bras. Encore faudrait-il les lever, ne serait-ce que pour dire aux lobbys de se taire. C'est votre quatrième chef d'accusation : le conflit d'intérêts. Alors que nous devrions être guidés par l'intérêt général, vous êtes les ventriloques des intérêts privés et c'est ainsi que vous avez écrit un texte qui fait reposer notre destin sur la bonne volonté des multinationales : vous leur dites qu'elles peuvent, sans être obligées, mais que ça serait quand même bien qu'elles fassent un petit effort, parce que cela sera obligatoire en 2065, et vous leur demandez gentiment d'être sympas et de ne pas trop polluer. L'écologie de la caresse n'a fait ses preuves nulle part ! Ce qu'il nous faut, c'est une rupture claire avec nos modes de production et de consommation devenus fous. La pandémie en est la démonstration la plus flagrante : ce que nous traversons est une crise de la frontière écologique. Déforestation, agriculture et élevage intensifs, commerce illégal d'animaux sauvages : la persistance de ces pratiques nous assure que nous ne faisons qu'entrer dans l'ère des pandémies.

Il faut sortir de ce marasme. C'est ce que nous appelons la bifurcation écologique et solidaire. La destruction de nos écosystèmes, l'agression permanente de la société de consommation, la création de la frustration pour faire tourner la machine à consommer : tout cela doit prendre fin. Nous devons « désaccumuler ».

De quoi avons-nous réellement besoin ? Cette question est celle qui met fondamentalement en péril tout votre édifice libéral. Vous savez, personne n'irait pleurer la disparition de panneaux publicitaires lumineux ou la fin des publicités pour les SUV. En revanche, nos concitoyens se plaignent de l'air pollué qu'ils respirent et font respirer à leurs enfants, ils s'inquiètent de la qualité de la nourriture et de l'eau qu'ils consomment. Vous tremblez quand il s'agit de contraindre les multinationales…

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… mais vous êtes indifférents à l'idée que nos compatriotes d'outre-mer n'ont parfois pas d'accès à l'eau potable. Quarante-quatre écoles ont dû fermer depuis la rentrée en Guadeloupe, faute non pas de professeurs, qui seraient absents ou malades, mais d'accès à l'eau !

Pour réaliser la bifurcation écologique et solidaire, il nous faut partir des besoins fondamentaux des gens. Pour cela, nous avons une méthode : la planification. Se réapproprier le temps long, faire de l'accès à l'eau un droit inaliénable, faire de nos forêts des biens communs, ne pas prendre plus à la nature que ce qu'elle peut reconstituer sont des objectifs que la nation pourrait se donner. Il faut croire que ces sujets ne vous intéressent pas : la plupart de nos amendements sur la forêt ou l'eau ont été rejetés, prétendument parce qu'ils n'avaient pas de rapport avec le texte. Tiens donc, l'eau, les forêts n'auraient aucun rapport avec une loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets : balivernes ! Nous ne pourrons donc pas discuter de l'interdiction des coupes rases qui libèrent une partie du carbone contenu dans les sols et qui détruisent la biodiversité, pas plus que de l'Office national des forêts, service public indispensable qui a la charge de nos forêts publiques et que vous vous hâtez de privatiser. Nous ne parlerons pas non plus de la mise en place des régies publiques de l'eau destinées à préserver la ressource à l'heure où elle se raréfie. Aucun rapport avec le climat, dites-vous !

Vous évoquez sans cesse l'acceptabilité sociale de ces mesures, mais cette foutaise ne trompe plus personne, c'est plutôt l'acceptabilité gouvernementale qui a de quoi heurter ! Vous avez sabordé les mesures de la Convention citoyenne ; vous avez rejeté par paquets de cent les amendements qui tentaient d'améliorer un peu votre texte ; …

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… vous avez activé le temps législatif programmé pour mieux museler l'opposition. Je vous le dis sans filtre : cette arnaque démocratique a assez duré ! Elle se joue sur le dos de notre avenir collectif.

Cela m'amène au cinquième chef d'accusation : l'atteinte aux générations futures.

Vous ne partagez pas le sentiment de l'urgence face au chaos climatique qui s'annonce, mais le monde qui vient vous le fera comprendre coûte que coûte, de gré ou de force : les Jeunes pour le climat, les Gilets jaunes, les militants écologistes, la jeunesse à qui vous volez son avenir. Le peuple finira toujours par se soulever contre les puissances de l'argent et leurs représentants politiques. Il ne vous laissera pas persévérer dans votre inaction coupable. Nous sommes le mouvement de cet espoir, celui d'un pouvoir populaire fondé sur les intérêts de la majorité sociale de notre pays.

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Un tel pouvoir ne peut être qu'écologique. Nous n'avons qu'une hâte, tourner la page de votre irresponsabilité, faire de votre règne un accident de l'histoire et surtout un mauvais souvenir.

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Très bien ! Mme Panot a définitivement traité le problème en confrontant Mme Pompili à ses accusations sans fondement !

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C'est bien un réquisitoire qu'appelle ce projet de loi.

En tout premier lieu, nulle part n'y figure l'enjeu essentiel de l'emploi. La formation professionnelle ne fait l'objet d'aucune disposition d'ampleur alors que les métiers de demain appellent un engagement financier robuste en ce domaine – pensons, par exemple, aux mutations de l'industrie du transport ou de la construction. La seule mesure à noter concerne les comités sociaux et économiques (CSE) : déjà réduits aux acquêts après votre offensive contre les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), ils seront embolisés davantage du fait de la vague consultation sur les effets de l'activité de l'entreprise sur l'environnement que vous prévoyez. Quant à l'adjonction de personnes supplémentaires dans les commissions techniques, elle est elle aussi bien loin de la réalité du terrain social. C'est une carence coupable de votre projet, car chacun sait que la question de la sécurisation de l'emploi et des droits des salariés ne peut être découplée d'une transition écologique juste et progressiste. Cette loi prétend mettre la dernière main à vos politiques sectorielles, qui ont toutes été marquées par le recul de l'État stratège et de ses outils structurants pour conduire une transition sociale et écologique.

Prenons tout d'abord l'énergie. Cet enjeu majeur est traité en dehors de ce débat, en dehors des Français : vous êtes en train d'ouvrir aux capitaux privés les activités d'énergies renouvelables et la branche distribution d'EDF. Notre armature industrielle et agricole est profondément affaiblie : le laissez-faire accordé aux banques et aux groupes du CAC 40 qui délocalisent et font exploser leurs émissions de CO2 comme le laissez-passer encouragé par les accords de libre-échange organisant le dumping social et environnemental la conduisent dans une impasse. C'est le grand déménagement hors du territoire national qui précarise les salariés, les petits agriculteurs et malmène toujours plus les ressources naturelles. S'agissant des mobilités, vous avez livré l'entreprise nationale de transport, la SNCF, à la concurrence, ouvrant une bataille du rail aux conséquences suicidaires pour les usagers et pour le climat, aggravées par l'absence d'un plan d'investissement massif à long terme dans le ferroviaire.

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Le logement social, au bénéfice duquel peuvent prétendre 70 % des Français, a été asséché par des ponctions financières assimilables à un véritable racket, alors que ses acteurs ont fait la démonstration de leurs engagements dans la rénovation thermique.

Voilà le contexte dans lequel se situe votre projet de loi. Ce bilan, vous le revendiquez, en libéraux pragmatiques que vous êtes, toujours à l'affût de nouveaux marchés à ouvrir. Bruno Le Maire doit être le plus content des ministres. Vous ne prévoyez pas de régulation, pas de contrepartie autre que le bon vouloir des entreprises car, pour vous, c'est le consommateur qui doit être responsabilisé et donc culpabilisé.

Alors, que reste-t-il de votre projet de loi ? Des mesures anecdotiques. Vous voulez supprimer les avions tractant des publicités alors que c'est d'une taxe consolidée sur les billets de première classe qu'il faudrait discuter. Vous envisagez de mettre en place un tirage au sort d'usagers pour siéger dans les comités de lignes de transport collectif quand il s'agirait de mettre en place un taux de TVA réduit à 5,5 % sur les billets de train comme le réclament les associations d'usagers.

Qu'y a-t-il encore dans votre texte ? Ce sont des expérimentations qui viennent se superposer à d'autres : vous voulez interdire la distribution de publicités sur papier à domicile avec un dispositif « Oui pub » venant s'ajouter à « Stop pub », alors que c'est un cadrage rigoureux et indépendant des lobbies de la pub qu'il conviendrait d'imposer dans les médias. C'est la mise en place de menus végétariens quotidiens dans les écoles alors que l'expérimentation hebdomadaire, qui fait encore débat, ne peut être évaluée et qu'il faudrait renforcer le soutien financier, technique et humain en faveur des collectivités pour garantir un saut alimentaire qualitatif. C'est encore la transmission par l'État de quelques patates chaudes aux élus de proximité : pourquoi imposer aux commerçants une police des vitrines et épargner les supports énergivores qui prolifèrent ? Pourquoi multiplier le recours à de lourdes études d'urbanisme payantes sans les accompagner d'une assistance technique ou d'aides financières de l'État ? Fait encore plus grave, rien n'est prévu pour accompagner les ménages : pas de prêt à taux zéro pour les ménages modestes amenés à acheter une voiture moins polluante, pas de révision de la tarification sociale nationale de la SNCF pour la rendre plus attractive, pas de reste à charge zéro pour la réhabilitation thermique des logements des propriétaires occupants modestes ou très modestes, pas de soutien financier à une alimentation de qualité pour tous.

Évoquons enfin tous ces engagements majeurs tronqués ou différés : l'interdiction de louer des passoires thermiques est reportée à 2028 sans qu'il y ait d'obligation anticipée pour les propriétaires bailleurs indélicats ; la fin de l'avantage fiscal pour les poids lourds est prévue à l'horizon 2030 sans qu'aucune mesure immédiate ne rétablisse un tant soit peu l'équité avec le fret ferroviaire ; l'interdiction de la publicité se limite aux énergies fossiles alors qu'elle devrait être étendue aux produits finis les plus polluants ; l'interdiction d'installation de surfaces commerciales en périphérie ne concerne que celles de 10 000 mètres carrés, un critère extensif totalement inefficace quand, pour lutter véritablement contre l'artificialisation des sols et préserver les petits commerces de proximité, il faudrait s'attaquer à l'e-commerce.

Finalement, nous examinons un projet de loi décapité des propositions fortes de la Convention citoyenne, réécrit en permanence par le Gouvernement et sa majorité, sous l'éclairage minimum de missions flash précipitées, expurgé de tout amendement portant sur des ambitions sociales et écologiques fortes, sur les moyens à déployer pour les atteindre et amputé de tout débat les concernant.

Dans ces conditions, les députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine s'engagent dans la discussion avec la ferme intention de faire obstacle aux dispositions de cette loi qui créeraient des ruptures sociales ou écologiques ou viendraient accentuer celles qui font déjà rage dans le pays.

Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.

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Après onze jours et quatre-vingt-seize heures de débats en commission, nous abordons en séance publique l'examen de ce projet de loi issu de la Convention citoyenne pour le climat. Ses membres ont fait leur travail en émettant des propositions, qui n'ont pu être toutes intégrées car certaines relevaient du domaine réglementaire. Les rapporteurs ont fait le leur : ils ont permis, dans un temps contraint, après des dizaines d'heures d'auditions, d'améliorer et d'enrichir ce texte. Nous, députés, avons fait notre travail de parlementaires. Nous ne sommes pas de simples boîtes aux lettres et je regrette que certains collègues aient plaidé pour une reprise « sans filtre » des préconisations de la convention citoyenne. Ses membres ont eux-mêmes souligné qu'ils ne disposaient pas d'études d'impact et ne pouvaient procéder à des auditions pour les formuler.

Ce projet de loi est à considérer dans une perspective d'ensemble, en cohérence avec d'autres actions de la majorité que j'aimerais ici rappeler. Citons tout d'abord la loi ÉGALIM, la loi « hydrocarbures », la loi énergie-climat, la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC), la loi d'orientation des mobilités (LOM) et la loi ÉLAN. Autre avancée notable à rappeler : la France a été le premier pays du monde à réaliser une évaluation environnementale de l'ensemble de son budget. Soulignons aussi que 30 % des financements du plan de relance sont fléchés vers la transition écologique. Le projet de loi constitutionnelle, que nous avons récemment adopté en première lecture, porte également une belle ambition : compléter l'article 1er de la Constitution de manière à sécuriser définitivement la valeur constitutionnelle de la préservation de l'environnement et de la diversité biologique ainsi que de la lutte contre le dérèglement climatique.

Le projet de loi Climat et résilience vient donc compléter et renforcer des dispositifs dont nous avons pu d'ores et déjà mesurer les effets. Permettez-moi d'en rappeler quelques-uns, puisque certains ici semblent avoir la mémoire courte : la diminution de la part des véhicules diesel dans le total des véhicules vendus, de 70 % il y a un peu plus de huit ans à 33 % aujourd'hui ; la réduction du parc automobile au profit des transports en commun ; la réglementation environnementale 2020 (RE2020), directement issue de la loi ÉLAN, qui favorise un nouveau modèle de construction prenant en compte les matériaux biosourcés, les gaz à effet de serre et l'impact environnemental de la construction dans l'ensemble du cycle de vie du bâtiment. Évoquons encore la trajectoire qui mènera à la fin des plastiques à usage unique.

Je pourrais aussi parler de la création des filières pollueur-payeur, un acquis de la loi AGEC, ou de celle du Haut Conseil pour le climat, décidée par notre majorité dans la loi énergie et climat. C'est notre majorité également qui a transformé progressivement le crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE) en prime, à travers le dispositif MaPrimeRénov' – victime de son succès, avec plus de 140 000 dossiers validés l'an dernier. N'oublions pas la prime à la conversion des véhicules : plus d'un million de véhicules polluants seront mis hors de circulation d'ici à la fin de ce quinquennat, grâce à la mise en place d'une aide qui permet aux plus faibles, aux plus démunis de répondre à leur niveau aux enjeux de la transition écologique. J'arrête ici car la liste est encore longue : nous pouvons tous être fiers, mes chers collègues, du travail que nous avons accompli.

Si cette loi climat est indispensable, c'est aussi parce que l'ensemble des Français et des Françaises ont pris conscience des enjeux liés au climat et à l'environnement. Nous assistons à un remarquable changement de modèle. C'est pour cela que notre majorité a fait le choix de donner de la visibilité et de la lisibilité à ses décisions, et surtout de tracer de nouvelles trajectoires.

Nombre d'entre vous, dans cet hémicycle, défendent une vision différente sur la conduite à tenir, entre ceux qui voudraient interdire tout, tout de suite, malgré les conséquences dramatiques que cela impliquerait tant sur le plan humain que social, et ceux qui veulent bien agir mais préfèrent attendre, pour ne pas changer de méthode trop rapidement. Comme dirait Albert Einstein : faire toujours la même chose et s'attendre à des résultats différents, c'est de la folie !

Le présent projet de loi nous permettra de mieux accompagner et de mieux informer les consommateurs, grâce aux dispositions du titre Ier, ou encore de rendre les institutions exemplaires en matière d'enjeux environnementaux, par le biais de la commande publique notamment. La France sera le seul pays européen à lutter contre les passoires énergétiques en les interdisant à compter de 2028 et à favoriser les mobilités propres, en décidant la fin des véhicules qui utilisent de l'énergie fossile. Le projet de loi favorisera une alimentation saine et durable, dans la ligne des dispositions de la loi ÉGALIM. Enfin, il fournira les outils juridiques nécessaires afin de faire respecter la préservation et la protection de l'environnement en sanctionnant, comme il se doit, toute infraction ou tout délit dans ce domaine. Je n'oublie pas non plus la réforme du code minier, tant attendue depuis des années par nos concitoyens et les acteurs concernés. Enfin, je salue la volonté du projet de loi de mieux impliquer les collectivités territoriales.

Par son action en faveur de l'environnement et contre le dérèglement climatique, la France se veut pionnière et leader. C'est pourquoi elle fera de la présidence française du Conseil de l'Union européenne, au premier semestre 2022, un rendez-vous majeur pour prolonger, à l'échelle européenne, la lutte contre le changement climatique, à travers différents dispositifs : le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières, la fermeture du marché européen aux produits issus de la déforestation, l'augmentation du prix du carbone à travers le renforcement du marché européen du carbone.

Non, la majorité n'a pas à rougir de son action en faveur de la transition écologique, bien au contraire ! À travers ce projet de loi, elle confirme son engagement pour une écologie positive, pragmatique et constructive.

Je vous invite d'ailleurs à écouter l'audition de Pascal Canfin, président de la commission de l'environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire au Parlement européen, par la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire. Il souligne que la France est à l'avant-garde pour ce qui concerne l'interdiction de la location des passoires thermiques à partir de 2028, pionnière en matière d'encadrement de la publicité des produits les plus polluants, précurseur, avec l'Autriche, pour ce qui est de la suppression des vols court-courriers lorsqu'une alternative en train existe. Cette dernière mesure a, au demeurant, été saluée par les Verts allemands – une référence sur la scène politique européenne – , qui demandent au Bundestag de s'inspirer de l'exemple français. Qui aurait pu imaginer cela il y a encore quelques années ?

Tel est mon état d'esprit pour les semaines à venir. Soyons collectivement à la hauteur du défi écologique qu'il nous faut relever, dans la continuité de l'Accord de Paris, en confirmant notre capacité à être force de propositions sur le pacte vert pour l'Europe – European Green deal. Notre action ne doit pas simplement prévoir l'avenir mais, surtout, le permettre.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.

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Nous voici dans l'hémicycle, après deux semaines de travaux intenses au sein de la commission spéciale, pour débattre d'une cause qui nous mobilise tous : la bataille contre le dérèglement climatique. Cet enjeu intéresse tous les députés du groupe Les Républicains, qu'ils fassent ou non partie de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, qui aurait d'ailleurs pu examiner elle-même le présent projet de loi.

Le changement climatique est encore plus prégnant et personnel pour celles et ceux d'entre nous qui travaillent la terre, que ce soit le vigneron d'Arbois que je suis ou l'éleveur du Cantal qu'est notre collègue Jean-Yves Bony ; le dérèglement climatique est une réalité concrète que nous observons tous les jours.

Le respect de la nature et le souci de la protéger constituent des engagements anciens de notre famille politique ; ils forment même son ADN. Ainsi, en 1971, le gaulliste Robert Poujade fut le premier des ministres de l'environnement, sous l'autorité du président Georges Pompidou, – avant M. René Dumont, madame la ministre – à prendre des mesures audacieuses telles que la création du Conservatoire du littoral, pour ne citer que celle-ci. Il s'agissait d'un premier socle, sur lequel allaient s'appuyer plus tard les présidents Valéry Giscard d'Estaing, Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy. Je pense par exemple à la Charte de l'environnement, inscrite dans le préambule de la Constitution, ou au Grenelle de l'environnement.

Malheureusement, leurs successeurs ne pourront pas arguer d'un tel bilan, les travers de la communication ayant souvent pris le pas sur l'action. N'osant pas sortir de l'ambiguïté, par peur de déplaire, ils n'ont pas eu le courage de trancher entre deux lignes philosophiques majeures inconciliables : la décroissance, que nous rejetons avec force, et la croissance verte et durable que nous défendons.

Ce numéro d'équilibriste permanent s'est traduit, ces dernières années, par la multiplication des textes d'affichage : la loi ÉGALIM, la loi ÉLAN, celle sur l'énergie et le climat, la loi d'orientation des mobilités, la loi sur l'économie circulaire et, demain, l'éventuelle modification de la Constitution. Ces textes s'additionnent, se contredisent, se superposent. Pour quels résultats ? Alors même que les dispositions des lois précitées ne sont pas encore en vigueur, il nous est déjà demandé d'examiner un nouveau projet de loi. Quel aveu d'échec !

À cet égard, les débats en commission ont été révélateurs. Quel bilan pouvons-nous en dresser, après vingt-neuf réunions de la commission spéciale ? Les sujets majeurs concernant l'avenir de la planète sont absents de ce texte, malgré les propositions des différents groupes politiques ; l'appréciation stricte, pour ne pas dire sévère, des règles d'irrecevabilité a muselé une partie des débats.

Il n'y a rien, par exemple, ni sur la politique maritime ni sur les forêts qui représentent pourtant une solution de stockage du carbone et sont créatrices d'emplois ; rien non plus en matière de pollution numérique, domaine dans lequel nous aurions aimé défendre une stratégie de relocalisation des data centers ; rien concernant le cadre de vie ou les paysages, pourtant souvent menacés.

Prenons l'exemple des éoliennes, sujet cher à notre collègue Julien Aubert : les mâts, largement subventionnés, défigurent les territoires pour une efficacité très relative. Les membres du groupe Les Républicains le disent clairement : nous voulons un moratoire sur les implantations d'éoliennes.

M. Guillaume Larrivé applaudit.

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Certes, les énergies renouvelables sont utiles, mais elles le sont plus encore dans les pays dépendant d'énergies fossiles, ce qui n'est pas notre cas grâce au socle nucléaire. La France a la chance de bénéficier encore de la vision stratégique du général de Gaulle, ce qui lui permet à la fois d'assurer son indépendance énergétique et d'être le pays développé qui produit le moins d'émissions de gaz à effet de serre.

Il faut donc réaffirmer notre soutien à la filière nucléaire. Dans ce domaine, le « en même temps » est une catastrophe : remplacer une énergie décarbonée pilotable par une autre, moins fiable, est un non-sens complet. D'ailleurs, un certain nombre d'écologistes finlandais et norvégiens ont, eux, la lucidité de remettre en question leurs certitudes.

Le projet de loi n'aborde pas non plus la question de la décarbonation industrielle. Pourtant, les industries représentent actuellement 20 % des émissions de gaz à effet de serre françaises. Nous aurions souhaité, par exemple, un véritable accompagnement des entreprises en faveur de l'hydrogène vert. Nous ne contestons pas le plan de relance ; mais il faut désormais agir aux côtés des entreprises, car c'est bien par la maîtrise de la technologie que nous préserverons notre planète et créerons des emplois.

Les montagnes ont également été oubliées, ainsi que les stations de ski qui, après une année difficile due à la crise sanitaire, s'interrogent sur leur avenir : en cinquante ans, les Alpes ont perdu un mois d'enneigement en basse et moyenne montagne et la fonte accélérée des glaciers pèse sur l'écosystème et la gestion de l'eau. L'eau, parlons-en : heureusement que Martial Saddier a déposé un amendement, que vous avez finalement retenu, faute de quoi ce sujet n'aurait pas été évoqué non plus dans le présent projet de loi !

Enfin, l'absence des territoires ultramarins est consternante.

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Alors qu'ils représentent plus de 80 % de la biodiversité française, aucune mesure n'est envisagée pour répondre aux enjeux les concernant. C'est une faute supplémentaire de votre projet de loi qui, vous l'aurez compris, écarte bien des domaines pourtant essentiels à la lutte contre le réchauffement climatique.

Quant à ceux que vous abordez, vous le faites selon votre triptyque désormais connu : culpabilisation, taxation, interdiction. Nous rejetons cette approche et les remontrances permanentes vis-à-vis des Français ; nous refusons que l'écologie se résume à la multiplication des impôts et des taxes. Or c'est bien ce que l'on comprend de votre projet de loi.

Prenons les zones à faible émission mobilité (ZFE-m) : ce n'est ni plus ni moins qu'une nouvelle division des Français ! Vous avez déclaré, madame la ministre, que les gens ne pourront plus accéder aux centres-villes.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Non !

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Si ce n'est pas le cas, vous pourrez me dire le contraire tout à l'heure, mais c'est ce que j'ai lu dans la presse. Ce parti pris est dangereux et méconnaît la réalité : comment allez-vous dire à un artisan ou à de jeunes parents de covoiturer dans les zones concernées, le premier pour aller travailler, les autres pour consulter un médecin ? Pensez-vous sérieusement qu'en pleine crise économique, les artisans ont les moyens de renouveler leur parc automobile et de passer au véhicule électrique ? D'ailleurs, quand bien même seraient-ils prêts à le faire, ils se heurteraient au manque d'offres automobiles. Qu'en est-il de l'objectif initial de justice sociale annoncé par le Président de la République ?

Pour ce qui concerne la réduction des émissions de gaz à effet de serre, c'est à se demander si les leçons de la crise des gilets jaunes ont été tirées ! Vous n'épargnez pas non plus le transport routier de marchandises, qui assure pourtant 90 % du total du transport de ce secteur ; que vous le vouliez ou non, c'est grâce aux routiers que les Français ne manquent de rien, comme ils ont pu le constater lors des différents confinements. Or, pour réduire leurs émissions de CO2, vous voulez les taxer ! D'ici quelques années, c'est toute une profession qui risque de s'effondrer au profit de la concurrence européenne.

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Les membres du groupe Les Républicains vous demandent d'infléchir votre position et de préparer une vraie transition du secteur qui passera par des biocarburants et par l'avitaillement sur tout le territoire ; les entreprises y sont prêtes.

Durant le quinquennat de François Hollande et sous la pression du mouvement des bonnets rouges, l'écotaxe était sortie par la porte ; avec Emmanuel Macron, elle revient par la fenêtre ! Il s'agit d'une mesure punitive, dénuée de sens tant qu'une offre massive de poids lourds écologiques ne sera pas disponible pour effectuer la transition dans les délais escomptés.

Vous doutez également de la filière aéronautique et de ses milliers de salariés qui, pourtant, préparent déjà la plus formidable révolution technologique en matière de transport aérien : de petits avions zéro carbone volent déjà. Soutenez cette filière !

Je pense aussi aux restrictions prévues contre les enseignes commerciales ou à l'interdiction de la distribution des publicités non adressées, autant de mesures symboliques des partisans de la décroissance, qui ne règlent en rien le problème du dérèglement climatique. Les sujets que défend notre collègue Sylvie Bouchet Bellecourt vous seront présentés au cours de nos débats. Nous parlerons de l'aberration environnementale que constitue l'instauration d'une consigne sur le verre, qui entraînera une augmentation du CO2 et de la consommation d'eau potable, sans oublier l'homogénéisation des bouteilles qui en découlera. Sur ce point, je fais confiance à ma collègue champenoise Valérie Beauvais pour faire valoir nos arguments. De la même façon, Vincent Descoeur évoquera la rénovation énergétique des bâtiments et défendra une programmation pluriannuelle du secteur, afin d'inciter les propriétaires à mener des travaux dans un cadre sécurisant et de permettre un reste à charge zéro pour les plus modestes. Enfin, et j'en terminerai là, les questions liées à l'agroécologie seront abordées par notre collègue Julien Dive.

Plus que jamais, les Français réclament de la qualité et de la traçabilité dans leurs assiettes, pour eux et pour leurs enfants, à l'école. Quels que soient les menus choisis – la possibilité de disposer d'une alternative entre un repas avec viande ou végétarien est essentielle – , la priorité doit être donnée au produit local.

Et si des questions se posent quant à l'utilisation de certains engrais, nous veillerons à ce que le débat soit porté au niveau européen, pour ne pas pénaliser les seuls agriculteurs français ; il en va de leur survie. Plutôt que de taxer nos paysans, accompagnons-les !

Madame la ministre, mes chers collègues, voilà ce que nous pensons de ce texte au sortir de son examen en commission spéciale.

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Après l'organisation d'une Convention citoyenne pour le climat et dix-sept mois de réflexion, et malgré un teasing parfaitement organisé pour assurer une bonne communication présidentielle, votre projet de loi est bien maigre.

La science a permis un développement immense de l'humanité. Qui remettrait désormais en cause le bénéfice de toutes les avancées technologiques ? Certaines ont réduit la famine ou ont amélioré la santé, d'autres encore ont permis de vivre mieux. Certes, elles ont produit aussi des effets néfastes, tels que les rejets carboniques. La partie est-elle perdue pour autant ? L'espérance doit-elle disparaître ? Nous ne le croyons pas, car les mêmes esprits scientifiques qui, depuis des siècles, ont conduit à améliorer la condition humaine peuvent le faire encore, tout en respectant la planète.

Décrétons la mobilisation générale contre le réchauffement climatique, léguons aux futures générations une planète propre et préservée, et faisons-le autrement que par la privation et l'interdiction de consommer. Tout cela n'est qu'une question de volonté. Nous aurons à coeur, madame la ministre, de travailler avec vous à ce défi gigantesque qu'est le dérèglement climatique. Soyez certaine que les députés du groupe Les Républicains seront présents pour proposer des solutions – et nous espérons qu'elles seront plus écoutées qu'en commission spéciale.

Applaudissements sur les bancs du groupe LR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures :

Suite de la discussion du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ces effets.

La séance est levée.

La séance est levée à dix-neuf heures trente.

Le directeur des comptes rendus

Serge Ezdra