La réunion

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Samedi 8 février 2020

La séance est ouverte à quinze heures.

La commission poursuit l'examen du projet de loi instituant un système universel de retraite (n° 2623 rectifié) (M. Guillaume Gouffier-Cha, rapporteur général, MM. Nicolas Turquois, Jacques Maire, Mmes Corinne Vignon, Carole Grandjean et M. Paul Christophe, rapporteurs).

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Mes chers collègues, nous avons examiné 3 124 amendements ; il en reste 16 988.

Article 13 (suite) : Cotisations applicables aux salariés et assimilés

La commission est saisie de l'amendement n° 21124 de M. Boris Vallaud.

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Comme beaucoup de parlementaires, nous serions demandeurs d'un tableau de financement montrant comment seront compensées les pertes de cotisations pendant la période transitoire. Selon les chiffres de l'AGIRC-ARRCO, ce régime perdrait 3,8 milliards de cotisations par an dès 2025 et devrait verser jusqu'à 2070 plus de 100 milliards cumulés de prestations sans contrepartie en termes de cotisations.

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Résumons une dernière fois : jusqu'à trois fois le montant du plafond annuel de la sécurité sociale (PASS), 100 % des personnes sont concernées ; au-delà de 3 PASS, seulement 1 %. En maintenant le caractère contributif des cotisations au-delà de ce seuil, nous risquerions de mettre en place un système de redistribution inversée.

Votre amendement propose de demander son assistance au Conseil d'État mais cette juridiction a elle-même indiqué qu'il n'était pas pertinent de la solliciter au sujet du changement annuel des taux et des plafonds.

Avis défavorable.

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Monsieur le rapporteur, nous n'avons toujours pas la réponse à notre question : quel va être le coût de la nouvelle niche fiscale que constitue le plan épargne retraite (PER), dont l'attractivité va être amplifiée par votre nouveau système de cotisation pour les très hauts revenus ? Comme le souligne Le Figaro aujourd'hui, le plan épargne retraite est un excellent placement, qui s'est envolé depuis sa création : 84 000 PER ont été commercialisés pendant les trois derniers mois de l'année. Les souscripteurs sont, en effet, attirés par l'aubaine que constitue la possibilité de déduire de leur revenu fiscal 100 % de leurs versements.

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Monsieur le secrétaire d'État, ce qui intéresse les Français, c'est de savoir s'ils seront gagnants ou perdants avec ce nouveau système. Tout d'abord, pendant leur vie active : qu'en sera-t-il des cotisations ? Quel poids aura leur augmentation potentielle sur leur pouvoir d'achat ? Ensuite, pendant leur retraite : quelles prestations sont-ils en droit d'attendre ?

Vous nous avez dit viser une réforme plus lisible, mais nous voyons bien que la possibilité d'augmenter à tout moment les cotisations risque de nuire à la prévisibilité. Or les Français ont besoin de garanties ; ils ont à coeur la préservation de leur pouvoir d'achat.

La commission rejette l'amendement.

Puis elle est saisie des amendements identiques n° 5184 de M. Bastien Lachaud et n° 5187 de Mme Danièle Obono.

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Non seulement les PER permettent à leurs titulaires de déduire 100 % des sommes placées, mais ils offrent les mêmes avantages qu'une assurance vie – abattement, clause bénéficiaire – s'ils sont souscrits auprès d'une compagnie d'assurance. En ce cas, le capital épargné peut être transmis au décès du titulaire, hors succession. Je réitère ma question : à combien évaluez-vous le coût de cette double niche fiscale ?

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En demandant la suppression de l'alinéa 5, nous souhaitons nous opposer à la remise en cause des règles relatives à l'assiette des cotisations à l'assurance vieillesse. La volonté de prendre en compte la totalité des revenus d'activité pour le calcul de la pension de retraite répond à une logique purement comptable de proportionnalité, qui fera travailler plus longtemps et diminuera les pensions des personnes ayant eu des carrières incomplètes, notamment les femmes. Étrangement, l'effort contributif ne concernera pas les plus hauts revenus, qui s'acquitteront d'une cotisation dite non-contributive de seulement 2,8 % pour les revenus dépassant les 10 000 euros par mois.

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Monsieur Bazin, le conseil d'administration de la future Caisse nationale de retraite universelle (CNRU) sera composé de représentants des employeurs et des salariés. Toute augmentation du taux de cotisation devra être solidement argumentée.

Monsieur Lachaud, madame Obono, nous n'allons pas parler indéfiniment du PER. Favoriser une épargne de long terme était une volonté assumée de notre majorité pour encourager un changement de culture. Les Français épargnent, en effet, beaucoup mais ils sont réticents à financer l'économie. En 2019, ils ont placé 13 milliards d'euros supplémentaires sur le livret A, qui rapporte seulement 0,5 % depuis le 1er février. Certes, les hauts revenus pourront consacrer leurs surplus de capacité financière à l'épargne retraite mais je ne suis pas sûr que pour ceux qui ont 30 ou 40 ans, la retraite constitue une obsession de chaque matin. Ils choisiront sans doute plutôt la consommation, ce qui génèrera de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA).

Avis défavorable aux amendements.

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L'incitation à la capitalisation est un encouragement à la financiarisation de l'économie. Avez-vous fait expertiser la possibilité d'assujettir les revenus financiers des sociétés à une contribution d'assurance vieillesse calculée selon un taux égal à la somme des taux qui s'appliquent aux cotisations d'assurance vieillesse patronales et salariales du secteur privé ? Cela permettrait de financer utilement un système vertueux, mutualisé, solidaire pour un droit à la retraite garantie pour toutes et pour tous.

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Monsieur le rapporteur, soyons sérieux ! Pensez-vous réellement qu'une personne gagnant entre 10 000 euros et 27 000 euros va consacrer la totalité de ses revenus à la consommation ? Toutes les études montrent – et c'est ce qui fait de la TVA un impôt particulièrement injuste – qu'à partir d'un certain montant, une partie du revenu est consacré à l'épargne. À cet égard, la défiscalisation de l'épargne retraite constitue un véritable effet d'aubaine. Et quand bien même ces personnes dépensaient tout ce qu'elles gagnent, serait-ce souhaitable à l'heure où nous connaissons une crise écologique majeure ? Est-il bon d'encourager ainsi la surconsommation ?

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À vous entendre, la déductibilité des sommes placées dans un PER serait totale alors qu'elle est plafonnée, tout comme pour les assurances vie. Il existe bel et bien des règles pour éviter les abus.

Par ailleurs, je ne suis pas certain qu'il y ait un gain d'épargne si important par rapport à l'ancien système où les cotisations s'appliquaient aux revenus allant jusqu'à 8 PASS. Tout cela nécessiterait un calcul macroéconomique.

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Les PER ne sont pas réservés aux très hauts revenus. Il existe aussi les PER financés par une surcotisation des employeurs à destination d'une catégorie de salariés. Ils remplaceront les « article 83 » qui ont bénéficié, par exemple, aux ouvriers de la métallurgie. Les PER présentent des avantages au moment où les bénéfices de l'entreprise sont redistribués au travers de l'intéressement et de la participation. Depuis plusieurs années ont été ouverts des plans d'épargne retraite collectifs. Ces nouveaux PER entreprise seront abondés par les employeurs en même temps que par les salariés qui placeront des sommes pour améliorer leur retraite. Ajoutons qu'au moment de la sortie du plan d'épargne, les revenus seront fiscalisés.

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Le débat sur la capitalisation est relancé dès qu'on touche un cheveu au système de retraite en place. Au-dessus de 3 PASS, il est certain que la réforme actuelle incite à la capitalisation. Il faudra donc définir correctement les règles fiscales qui s'imposeront et revoir l'ensemble des outils d'épargne retraite. Sinon, il ne manquera pas d'y avoir des décalages et des surprises. La répartition reste la base du système mais, pour autant, la capitalisation n'est pas diabolisée. Ce n'est peut-être pas une mauvaise chose, car beaucoup de Français raisonnent en termes de capitalisation. Beaucoup nous disent qu'ils ont beaucoup cotisé et qu'ils ont droit à une retraite en proportion, ce qui n'est pas la logique de la répartition.

La commission rejette les amendements.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements n° 21827 de M. Julien Aubert et n° 22273 de M. Dominique Da Silva.

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Avec le nouveau système, la cotisation ne sera plus que de 2,8 % pour la part des rémunérations dépassant 3 PASS. Le premier piège serait de croire que cela constitue un cadeau pour ces hauts revenus. Ce n'est pas le cas. Le deuxième piège serait de croire que cela sera sans incidence sur le principe qui fonde notre système, la répartition, puisque la capitalisation sera encouragée. Pour éviter tout cela, nous proposons d'établir un troisième taux de cotisation pour les hauts niveaux de revenus. Les cotisations qui en découleraient seraient, au même titre que celles du premier taux, prises en compte pour l'acquisition des points.

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J'aimerais que le Gouvernement nous fasse la démonstration qu'abaisser jusqu'à supprimer les cotisations au-dessus de 3 PASS, autrement dit pour les salaires de plus de 10 000 euros par mois, sur une période transitoire de vingt ans, suffira à payer les pensions des retraités concernés. Les personnes nées avant 1975, ayant une espérance de vie de l'ordre de 85 ans, bénéficieront de 100 % de leurs droits jusqu'en 2060 et celles qui sont nées après 1975 bénéficieront de manière dégressive d'une partie de leurs droits acquis selon les règles de l'ancien système, ce qui nous amènera environ à 2070. À mon sens, il y aura un besoin de financement supplémentaire et on peut se demander s'il est juste qu'il repose sur l'ensemble des assurés. Je propose d'instaurer une cotisation additionnelle des employeurs qu'aura à définir la CNRU. Nous fixerions un cadre législatif tout en laissant la main aux partenaires sociaux pour rendre plus lisible les paramètres qui financeront ces droits jusqu'à leur extinction.

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Vos deux propositions reviennent à créer des cotisations supplémentaires mais, telles qu'elles sont rédigées, elles ne donneraient pas lieu à de nouveaux droits. En outre, elles constitueraient une forme d'impôt supplémentaire, ce qui va à l'encontre de la jurisprudence du Conseil constitutionnel.

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Jusqu'en 2070, la perte de cotisations entraînée par l'abaissement du plafond de 8 à 3 PASS atteindra, au total, 100 milliards, ce qui n'est pas une paille. La conférence de financement doit trouver 12 milliards. Êtes-vous capables de donner une vision d'ensemble du coût de la période de transition ? Quelle est la somme recherchée ?

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Monsieur le rapporteur, je pense qu'il faut effectivement revoir la rédaction de l'amendement n° 21827. Notre objectif est bien que ce troisième taux de cotisation ouvre de nouveaux droits. Je le retire donc.

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Avec le nouveau système, une part des cotisations des hauts revenus n'engendrera pas de droits puisque la dégressivité touche à la fois la part employeur et la part salariale. Je vais retirer mon amendement n° 22273 pour que la cotisation additionnelle que je propose puisse créer des droits.

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Monsieur le secrétaire d'État, pourrait-on faire une nouvelle étude d'impact ? Qu'il s'agisse du coût des pertes de cotisation entraînées par le passage à 3 PASS, des mesures d'exonération patronale que vous multipliez ou des objectifs de la conférence de financement, nous avons du mal à y voir clair. Nous aimerions aussi avoir une idée de l'impact financier de l'application de la révision générale des politiques publiques dans les trois fonctions publiques : quelles conséquences auront les moindres cotisations ? Au total, des milliards sont en jeu. Il y a de quoi flipper.

Comme vous avez décidé de réduire le poids global des retraites dans le produit intérieur brut (PIB), les seules variables d'ajustement seront paramétriques : revoir le niveau des pensions à la baisse ou bien le montant des cotisations à la hausse.

Les amendements sont retirés.

La commission en vient aux amendements identiques n° 5578 de M. Bastien Lachaud, n° 5581 de Mme Danièle Obono et n° 5589 de Mme Bénédicte Taurine.

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Nous demandons la suppression de l'alinéa 6 de l'article 13, qui généralise la répartition des cotisations entre l'employeur et les salariés, à raison de 60 % pour l'un et 40 % pour les autres, propre au secteur privé. Cet alignement sera défavorable aux salariés et aux fonctionnaires relevant de régimes où le taux de cotisation des employeurs était beaucoup plus élevé.

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L'unification – autre mot pour universalité – qui sous-tend votre projet se traduit par une généralisation du moins-disant, un nivellement par le bas. Le système de répartition s'est construit, à l'inverse, par un alignement sur les régimes spécifiques les plus avancés. La logique voudrait que la répartition entre part salariale et part patronale rejoigne celle, plus avantageuse pour les salariés, des régimes spéciaux.

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Nous nous opposons au principe d'unification des régimes que vous avez retenu. La construction d'un système de sécurité sociale fondé sur la solidarité intergénérationnelle et interprofessionnelle s'est appuyée sur des régimes professionnels. Votre réforme repose sur une convergence vers le bas, qui nie les spécificités professionnelles des régimes et détricote peu à peu les conquis sociaux.

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Monsieur Vallaud, le système sera équilibré sur le long terme. Les retraites des hauts revenus sont une danseuse : elles coûtent très cher. Imaginons que vous achetiez une voiture de luxe dont le prix est trop élevé par rapport à vos revenus ; avant de la revendre, il faudra rembourser l'emprunt que vous avez contracté. Dans la phase de transition, il y aura d'abord un impact en matière de trésorerie, d'environ 150 millions d'euros par an à partir de 2027, si on lisse de manière homogène sur vingt ans – et je ne sais pas de quelle manière le Gouvernement procédera à ce lissage. Toutefois, à terme les droits acquis correspondant aux pensions des hauts revenus diminueront et il y aura, in fine, un gain.

J'en viens aux amendements identiques. Le taux de la cotisation salariale pour les fonctionnaires passera de 11,10 % à 11,25 %. Il n'y aura, pour ainsi dire, pas de changement. Quant à l'État, il n'acquitte pas à proprement parler de cotisations. Il verse directement les pensions. En prenant le rapport entre pensions versées et salaires actuellement payés, on aboutirait, par effet d'optique, à un taux de 70 %. Évidemment, lorsqu'il passera de 70 % à 16 %, l'État fera des économies mais il s'est engagé à abonder la CNRU des sommes correspondantes.

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L'alinéa 6 aboutira à diminuer le taux de cotisation de l'État. Votre objectif est bien de faire des économies même si on ne voit pas pourquoi l'argent consacré aux retraites serait considéré comme indu, mal utilisé. Le système de répartition perdure, certes, mais il se réduit comme une peau de chagrin avec le nivellement par le bas auquel vous procédez. Vous favorisez un système par capitalisation en vidant le système par répartition de tout principe de solidarité.

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Nous pensons qu'il y a une autre façon de faire de la redistribution que de supprimer les cotisations retraite des Français les plus riches. Mieux vaut les faire contribuer que de leur rendre 4 à 5 millions par an. Pendant la période de transition, ce ne sont pas eux qui contribueront au retour à l'équilibre mais les 99 % autres. Cela pose un petit problème de justice.

Par ailleurs, je ne comprends pas les pourcentages que vous citez. Ils ne correspondent pas à ceux publiés par l'AGIRC-ARRCO.

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Le débat sur le passage à 3 PASS est assez idéologique. Avez-vous l'intention, monsieur le secrétaire d'État, de procéder de la même manière pour l'assurance maladie ? Même si l'assiette n'est pas la même que pour l'assurance vieillesse, comptez-vous mettre en place un plafond pour les droits à remboursement ? J'aimerais le savoir, car vous êtes en train de toucher certains fondamentaux de la sécurité sociale.

Par ailleurs, nous regrettons de ne pas avoir plus d'informations sur le régime de transition. Durant cette phase, les cotisations au-dessus de 3 PASS seront-elles contributives ? Ouvriront-elles des droits avec la même valeur d'achat de point que pour tout le monde ?

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Le débat que nous avons est vieux de soixante-quinze ans. Depuis 1930, il existait des systèmes d'assurances sociales disparates qui fonctionnaient sur le mode de la capitalisation. L'ordonnance du 4 octobre 1945 a rendu obligatoire l'assurance vieillesse par répartition. Il est intéressant de souligner que trois catégories de population se sont opposées alors au nouveau système : les bénéficiaires de régimes spéciaux antérieurs, qu'ils jugeaient plus avantageux ; le monde agricole, géré par la Mutualité sociale agricole (MSA) ; les professions libérales qui, par contestation, créeront leur propre régime, dit régime autonome.

L'ordonnance de 1945 a aussi institué le fameux PASS, plafond au-delà duquel il était convenu que les Français ne pouvaient plus cotiser pour leur retraite et devaient se débrouiller. C'est pour permettre aux cadres de percevoir une retraite à la hauteur de leurs revenus qu'allaient être créées trois ans plus tard l'AGIRC et quinze ans plus tard l'ARRCO.

Désormais, cette limite au-delà de laquelle les cotisations à l'assurance vieillesse ne sont pas assorties de droits à la retraite est égale à 3 PASS institué en 1945, alors que la retraite par capitalisation était fortement combattue. 3 PASS, c'est aussi l'assiette maximale pour le calcul des cotisations à l'assurance chômage. Le PASS sert, par ailleurs, à déterminer la part du salaire soumise à cotisation pour la retraite complémentaire à l'AGIRC-ARRCO. En outre, c'est dans la limite de 3 PASS que sont calculées les indemnités journalières, notamment dans le cadre des congés pour maternité.

En 1945, c'était vous qui étiez en train d'essayer d'expliquer aux Français ce que nous essayons de leur expliquer aujourd'hui. Nous nous situons donc dans cette continuité.

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Je veux bien que Véran se prenne pour Croizat et qu'il s'approprie l'esprit de la Résistance, mais comparaison n'est pas raison.

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Oui, et tous ceux qui n'ont pas collaboré. La Résistance, c'est la sève de notre engagement. Les régimes spéciaux – qui sont au nombre de dix et non pas de quarante-deux – ont été préservés par les ordonnances de 1945. Un régime spécial supplémentaire a même été créé, celui des électriciens-gaziers, que vous vous apprêtez à flinguer.

Faire l'amalgame entre ceux qui aujourd'hui s'opposent à votre projet de réforme et ceux qui s'opposaient à l'instauration du régime général en 1945 est un anachronisme inacceptable.

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Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, chargé des retraites

En examinant les amendements, j'ai cru comprendre, dans un premier temps, qu'ils visaient la suppression de la répartition des cotisations entre employeurs et salariés à 6040. Les débats m'ont montré que tel n'était pas le cas. Tous ceux qui défendent le paritarisme sont, je le pense, favorables à ce que ce partage perdure.

Beaucoup de questions ont porté sur l'évolution des cotisations. Selon le scénario de transition sur vingt ans, qui n'est encore qu'une hypothèse puisqu'il n'a pas encore été arbitré, le bilan financier des cotisations pour les salariés du privé, les contractuels du public et les salariés agricoles serait le suivant : il serait neutre en 2025, les cotisations progresseraient de 100 millions en 2027, de 300 millions en 2030 et en 2040 d'1 milliard. Il n'y a donc pas de perte de cotisations avec le passage de 8 PASS à 3 PASS.

Nous insistons sur le fait qu'il importe de redistribuer vers les plus modestes, comme cela a pu être rappelé dans les débats. Choisir de maintenir les cotisations contributives au-delà de 3 PASS n'a pas d'effet distributif vers les plus modestes mais plutôt vers les plus favorisés, compte tenu de l'espérance de vie très favorable des hauts revenus. De brillants économistes l'ont montré dès 2008.

Quant aux partenaires sociaux, ce n'est pas nous qui leur demandons de trouver des économies, ce sont eux qui souhaitent prendre leurs responsabilités afin de combler le déficit, ce qui est tout à leur honneur. Rappelons que, selon l'hypothèse du Conseil d'orientation des retraites (COR), le déficit s'élève à 12 milliards en 2027 mais il n'est pas à zéro ni en 2026, ni en 2025, ni en 2024, ni en 2023, ni les années précédentes. Il importe de raison garder. Quand on compare des agrégats, il faut le faire jusqu'au bout. Notre système de retraite est en difficulté financière durable et l'objectif du Gouvernement, fort du compromis avec les partenaires sociaux, est de trouver les conditions de l'équilibre du nouveau système universel.

La commission rejette les amendements.

Elle est ensuite saisie de l'amendement n° 21125 de M. Boris Vallaud.

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Le secrétaire d'État nous dit que le Gouvernement veut inciter les Français à travailler un peu plus longtemps sans les y contraindre. Il pourrait dire, de la même façon, qu'il veut inciter les Français à recourir davantage aux plans d'épargne retraite et à la capitalisation sans les y contraindre. Ils seront, en effet, très fortement incités à le faire, et pas seulement les cadres touchant de très hauts revenus qui ne cotiseront plus au-delà de 3 PASS. On voit là la très grande cohérence qui existe entre, d'un côté, la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, et, de l'autre côté, votre réforme des retraites. La perspective pour les Français est une baisse des pensions, qui ne leur permettra pas de maintenir un niveau de vie satisfaisant et qui les poussera à rechercher un complément en dehors du régime d'assurance vieillesse public. C'est là qu'intervient l'épargne retraite. Mais comme les sommes consacrées à la capitalisation seront à la fois défiscalisées et désocialisées, c'est en milliards que se chiffrera la perte de ressources, véritable cercle vicieux pour les finances publiques.

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Je m'en tiendrai à l'objet de votre amendement, qui visait à ajouter les mots « en Conseil d'État ».

Avis défavorable.

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Puisqu'il est question du Conseil d'État, je rappelle que celui-ci a signalé plusieurs trous dans votre projet de loi. Or il importe que nous sachions quel sort attend les retraités demain. Si j'ai bien compris, pendant la période de transition, les personnes dont les revenus sont compris entre 3 et 8 PASS continueront de payer des cotisations sur la part de leurs revenus supérieure à 3 PASS. Ces cotisations leur ouvriront-elles des droits ?

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Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, chargé des retraites

Oui.

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Très bien. Vous avez estimé tout à l'heure que ces cotisations compenseront en partie les pensions des Français gagnant plus de 3 PASS qui sont déjà partis à la retraite. Nous souhaiterions, d'ici à la séance, avoir un tableau global reprenant l'ensemble des hypothèses que vous avez énoncées oralement, et mettant en regard les recettes liées aux cotisations et les coûts liés aux pensions. Nous pourrons ainsi nous assurer de l'équilibre du système et veiller à ce qu'il n'y ait pas de perdant.

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Le Conseil d'État, je le rappelle, a fait des remarques assez dures sur votre étude d'impact et sur vos calculs. Vous êtes obsédés par l'équilibre financier, alors même que les projections du COR ne font pas craindre le péril imminent que vous annoncez. Or ce sont vos politiques, notamment celle qui a consisté à réduire le nombre de fonctionnaires, et donc à se priver de leurs cotisations, qui ont contribué à déséquilibrer le système. Et votre politique d'exonération des cotisations va encore amplifier ce déséquilibre. Lorsqu'on vous dit que vous allez perdre 70 à 100 milliards de cotisations, vous répondez que ce n'est pas un problème et que vous allez trouver une solution. Ne trouvez-vous pas ces exonérations contradictoires avec le prétexte de l'équilibre financier que vous prenez pour remettre en cause la solidarité ?

La commission rejette l'amendement.

Elle examine ensuite les amendements identiques n° 5595 de M. Bastien Lachaud, n° 5598 de Mme Danièle Obono et n° 6556 de Mme Bénédicte Taurine.

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Monsieur Véran, la comparaison que vous avez faite entre la situation de 2020 et celle de 1945 ne tient pas. En 1945, la part des revenus qui dépassait le plafond de la sécurité sociale n'était pas défiscalisée, comme c'est le cas aujourd'hui avec le PER. L'argent qui entrait dans les finances de l'État en 1945 va désormais passer dans une niche fiscale. Ce qui entrait dans la solidarité nationale n'y entre plus aujourd'hui. Votre comparaison n'a donc aucun sens.

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Vous essayez de bricoler une justification pour nous vendre votre réforme, mais la ficelle est trop grosse. Cet amendement vise à supprimer l'alinéa 7 qui prévoit que, par dérogation au précédent alinéa, l'État peut fixer des taux différents ainsi qu'une répartition différente entre employeurs et salariés. Or l'expérience nous montre que les dérogations servent rarement à aller vers le mieux-disant.

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Pour revenir à la question de la transition de 8 à 3 PASS, je veux souligner qu'en mutualisant les caisses, on garantit les cotisations des professions qui n'existeront plus demain. Dans le monde agricole, par exemple, il n'y a pas assez d'agriculteurs actifs pour payer les pensions des retraités. C'est la même chose à la SNCF, où il y a beaucoup moins d'actifs que par le passé. La phase de transition, par définition, est une phase qui permet d'assumer les engagements pris par les majorités précédentes ou dans des contextes différents.

Madame Obono, nous n'avons pas pour seul objectif l'équilibre financier, mais l'équilibre financier est la condition nécessaire à la création d'un système plus lisible, plus équitable et plus solidaire.

Avis défavorable aux amendements.

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Je ne doute pas de votre bonne foi, monsieur le rapporteur, mais vous avez complètement raté votre objectif en matière de lisibilité. Depuis le début, non seulement de cette commission spéciale, mais du débat public sur votre réforme, le flou s'épaissit à mesure même que vous essayez de répondre aux questions que tout le monde se pose – jusqu'au Conseil d'État.

Quant à la solidarité, quand vous imposez aux salariés qui travaillent dans les secteurs les plus pénibles de renoncer à leurs spécificités et de travailler jusqu'à ce que mort s'ensuive, vous remettez en cause ce que le système actuel avait de solidaire et vous assumez de favoriser la capitalisation, qui n'est ni équitable, ni solidaire.

Je ne doute pas de vos bonnes intentions, mais vous êtes complètement à contresens.

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Au sujet de ceux qui vont continuer à payer des cotisations au-delà de 3 PASS durant la fameuse phase de transition, vous avez dit que ces cotisations leur ouvriront des droits à la retraite. Confirmez-vous qu'ils achèteront leurs points au même prix que les paieront ceux dont les revenus sont en dessous de 3 PASS ?

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Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, chargé des retraites

Oui.

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Indépendamment de l'impact que cette mesure aura sur l'impôt sur le revenu et dans d'autres domaines, êtes-vous bien sûrs que le régime universel va y gagner au regard de la solidarité dont vous parlez sans cesse ? Êtes-vous bien sûrs que la balance entre les cotisations et les pensions versées aux personnes ayant des salaires compris entre 3 et 8 PASS soit déficitaire ? Je doute que vous ayez les chiffres des pensions actuellement versées au-delà de 3 PASS.

La commission rejette les amendements.

Puis elle examine l'amendement n° 21575 de M. Sébastien Jumel.

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Nous refusons de limiter le débat sur les retraites à la seule question de l'allongement de la durée de cotisation, car jouer sur la variable de l'âge nous paraît profondément injuste. Le président du MEDEF, quand nous l'avons auditionné, nous a pourtant bien fait comprendre que c'était la seule variable qu'il envisageait de prendre en compte. Il a certes parlé d'un cocktail de mesures, mais nous avons vite compris qu'il y avait un seul ingrédient dans son cocktail – ce doit être assez dégueulasse, comme cocktail.

Je vous propose donc d'ajouter une deuxième liqueur dans ce cocktail, qui pourrait être le taux de cotisation – 1 point de plus, c'est 9 milliards –, ou l'assiette, dans laquelle Pierre Dharréville a envisagé la possibilité d'inclure les revenus financiers. Il ne faut pas mettre à contribution les seuls salariés pour financer votre mauvaise réforme, mais réfléchir à d'autres paramètres.

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Avis défavorable.

Pour répondre à votre question, monsieur Woerth, le point sera effectivement au même prix au-delà de 3 PASS.

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Votre réponse est un peu courte, monsieur le rapporteur. Vous refusez, sans aucune explication, d'ouvrir un débat sur les autres paramètres qui pourraient financer les retraites. Vous refusez d'envisager une autre solution que l'âge : tâchons de mourir tôt pour être épargnés par votre réforme ! Y a-t-il, au-delà de votre refus idéologique, une raison technique qui m'échappe ?

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Je trouve aussi que votre réponse est un peu courte. Pourquoi refusez-vous d'envisager d'assurer l'équilibre financier du système par l'assiette ou le taux ? Vous nous présentez un projet de loi qui, de notre point de vue, remet en cause tous les fondements de notre système. Et lorsque nous faisons des propositions, vous ne nous donnez aucune réponse. À croire que les parlementaires n'ont aucune contribution à faire sur le sujet !

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Notre pays souffre des charges qui pèsent sur le coût du travail et, avec cet amendement, vous proposez de les augmenter encore. Pour payer ces rémunérations, il faut que l'entreprise dégage une marge brute. Qu'il y ait un débat sur la taxation du capital, je l'entends, mais je ne pense pas qu'il faille encore augmenter les charges.

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Ce sont des cotisations, pas des charges !

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Vous avez raison de me reprendre : ce sont des cotisations, c'est-à-dire l'achat différé d'un droit à des prestations. Quand je dis « charge », ce n'est pas un jugement de valeur, mais une notion comptable. Ce qui arrive dans la poche du salarié, c'est le net, mais l'entreprise paye tout le reste – ce qui est tout à fait logique. Je ne suis pas opposé à ce que nous ayons un débat sur les moyens de trouver d'autres sources de profit, mais je ne pense vraiment pas qu'il faille augmenter encore le coût du travail. Il est déjà suffisamment élevé en France pour ne pas en rajouter une couche.

La commission rejette l'amendement.

Elle est ensuite saisie des amendements identiques n° 21619 de M. Sébastien Jumel et n° 21620 de M. Pierre Dharréville.

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Je remercie M. Mattei de reconnaître que les cotisations ne sont pas des charges – la question n'est pas que sémantique, elle est fondamentale.

L'amendement que vous venez de repousser sans aucune explication, monsieur le rapporteur, ne proposait pas d'augmenter les taux de cotisation dans l'absolu, il veillait – ce qui n'est pas la même chose – à ce qu'on ne se prive pas de la possibilité d'utiliser ce levier pour financer les retraites sans que la compétitivité du travail en pâtisse forcément. Par ailleurs, il ne nous a pas échappé que vos mesures multiplient les exonérations de cotisations, qui creusent aussi le déficit. Enfin, je trouve assez amusant que ceux qui ont voulu augmenter la contribution sociale généralisée (CSG) pour les retraités nous donnent aujourd'hui des leçons sur la mise à contribution des Français.

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À la première phrase de l'alinéa 7, nous proposons de substituer au mot « universel » le mot « inéquitable ».

On vous entend bien souvent vanter la valeur travail, mais cela ne vous empêche pas de critiquer le prétendu coût du travail, qui n'est pas toujours rémunéré à sa juste valeur. M. Mattei nous explique que ce sont les entreprises qui paient les cotisations, mais les cotisations sont une part du salaire. Il ne faut pas inverser les choses !

Lorsque vous diminuez les cotisations, que vous vous attaquez au coût du travail, vous diminuez les droits. Et la promesse que vous faites en refusant la possibilité de recourir à une augmentation des cotisations, c'est une réduction du droit à la retraite. Pourtant, une telle augmentation est l'un des leviers que les organisations syndicales envisagent – ce n'est pas le seul et c'est sans doute le dernier. Votre volonté de baisser la part des richesses consacrées aux retraites trouve ici une nouvelle illustration.

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Cela faisait longtemps, monsieur Dharréville, que vous n'aviez pas proposé de substituer au mot « universel » le mot « inéquitable » !

Dans l'alinéa 7, on ne présage rien, on laisse aux partenaires sociaux la liberté de faire évoluer les taux de cotisation, s'ils pensent que c'est nécessaire : cela peut se faire à la baisse, mais aussi à la hausse. Nous ne voulons rien figer et nous nous en remettons au rapport de force équilibré qui existe entre les employeurs et les salariés. En tant qu'employeur, je me souviens qu'il a pu arriver que des taux de cotisations sociales n'augmentent que pour les employeurs, parce qu'il y avait eu un accord. Le texte, dans sa rédaction actuelle, permet une évolution dans un sens comme dans l'autre, ou la stabilité.

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M. Mattei a dit que le coût du travail était très élevé dans notre pays. Je veux tout de même rappeler que les mesures successives que vous avez prises depuis 2017 ont considérablement pesé sur la rémunération du travail. Aujourd'hui, on a 66 milliards d'exonérations par an : c'est considérable.

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Les mots sont révélateurs. Notre collègue Jean-Paul Mattei a expliqué que le terme de « charge » n'avait pas pour lui une valeur péjorative mais qu'il s'agissait seulement d'une notion comptable. De fait, c'est bien une logique comptable qui sous-tend votre texte, avec la règle d'or. Dès lors, il est logique que vous parliez de charge et de coût. Il faut plutôt parler du prix du travail. Ce prix, ce sont les salariés qui le paient, et notre collègue Pierre Dharréville a justement rappelé que les cotisations, c'est du salaire. Et le salaire, c'est le partage de la richesse produite par le travail des salariés. Dans cette logique, la répartition de la richesse produite devient une des variables. Nous pensons qu'il faut en faire profiter celles et ceux qui produisent la richesse, c'est-à-dire les salariés. Et si vous voulez parler de coût, les dividendes nous coûtent bien trop cher. C'est le travail qui devrait être vraiment très cher, parce qu'il coûte d'abord aux personnes qui le font. Changeons de logique !

La commission rejette les amendements.

Elle examine l'amendement n° 21126 de M. Boris Vallaud.

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À qui profite le hold-up financier qui consiste à abaisser de 8 PASS à 3 le plafond de cotisation ? Surtout aux grandes entreprises, qui économiseront 60 % des cotisations de retraite patronales, soit 40 milliards d'euros d'ici à 2040. Et, parmi ces grandes entreprises, il profite surtout à celles qui rémunèrent les cadres au-dessus de 10 000 euros par mois : les banques, les assurances ou encore les clubs de football – je vous renvoie à l'enquête parue hier dans L'Équipe sur la rémunération des footballeurs en Ligue 1. Les 40 % de cotisations salariales, quant à elles, iront alimenter les fonds de pension et l'épargne retraite, au détriment des finances publiques. Je rappelle que Bruno Le Maire souhaite que 80 milliards d'euros supplémentaires aillent, d'ici à deux ans, à l'épargne retraite. Combien cette mesure va-t-elle rapporter aux entreprises du CAC40, sachant que ces sommes sont à la fois défiscalisées et désocialisées, avec la baisse des cotisations, et donc une baisse d'impôt ?

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Je vous propose un jeu : je vais désormais écouter les amendements les yeux fermés et je devrai deviner quel groupe les a déposés, selon qu'ils visent à remplacer « universel » par « inéquitable », à introduire un décret en Conseil d'État ou à supprimer un alinéa. Ce ne sera pas très difficile, mais j'y serai toujours défavorable.

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Le débat progresse, puisque le rapporteur vient de nous dire, pour la première fois, qu'il avance sur cette réforme les yeux fermés ! C'est bien ce qu'on lui reproche depuis le début du débat ! La majorité, devant le président Le Gendre, qui n'est pas plus loquace que ses collègues, nous dit qu'elle avance les yeux fermés. Ça valait le coup d'être là un samedi après-midi pour l'entendre !

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En tout cas, que le rapporteur a les oreilles et la voix bien ouvertes pour vous entendre et vous répondre depuis quatre jours.

M. Juanico a évoqué les clubs de football, mais je pense que le salaire de Kylian Mbappé est très supérieur à 8 PASS. L'article de L'Équipe illustre bien l'amalgame qui est fait entre cotisations patronales et cotisations salariales. Contrairement à la distinction que faisait tout à l'heure Mme Obono entre les dividendes et les salaires, qui me paraît tout à fait pertinente, le débat sur les cotisations salariales et patronales est circulaire et n'a rien à voir avec le pouvoir d'achat des salariés.

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Votre choix de fixer un plafond à 3 PASS et d'écraser les régimes autonomes, qui auraient pu perdurer au sein d'un système général, reste assez mystérieux pour moi. Vous dites qu'à terme, le bilan financier de cette affaire, entre la perte de cotisations et le versement des pensions, sera profitable au système. Mais vous ne le prouvez pas.

Par ailleurs, quand on examine le graphique 63 de l'étude d'impact, on s'aperçoit que votre réforme n'aura que très peu d'effets financiers – tout juste quelques dixièmes de points de PIB. On a le sentiment que cette réforme, sur le plan financier, n'offre aucune garantie structurelle d'économies. Avec ou sans réforme, la situation reste assez semblable.

La commission rejette l'amendement.

Elle examine ensuite les amendements identiques n° 6562 de M. Bastien Lachaud, n° 6565 de Mme Danièle Obono et n° 6573 de Mme Bénédicte Taurine.

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Notre collègue Cendra Motin a souligné que le PER n'était pas réservé aux riches et qu'il était ouvert à tous. Voilà une remarque intéressante ! La vérité, c'est que la baisse généralisée des pensions, organisée par cette réforme, va pousser tout le monde vers ces outils de capitalisation, les plus riches pouvant mettre de côté plusieurs SMIC par mois, les autres beaucoup. Ainsi le principe de la capitalisation pour les retraites complémentaires sera-t-il acté pour tout le monde. Le problème, c'est que ce système par capitalisation peut s'avérer très dangereux : en cas de krach boursier ou de mauvaise gestion, tous les investissements disparaîtront. C'est ainsi que les métallurgistes de Cleveland ont vu leur pension baisser de 20 % à 60 % pour éviter la faillite du fonds de pension dont ils dépendaient.

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Depuis qu'on a levé le lièvre BlackRock, on a vu tourner la vidéo d'une représentante de ce fonds de gestion d'actifs qui se félicitait que les classes moyennes, notamment les enseignants, aient une part de leur retraite dans des fonds de pension. Ce sont celles et ceux à qui il ne reste déjà presque plus rien qui vont tout perdre si une crise financière se produit.

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En demandant la suppression de l'alinéa 8, nous réaffirmons notre opposition à l'abaissement du plafond de cotisation de 324 000 à 120 000 euros annuels. Comme nous l'avons déjà dit, cette mesure va conduire à ce que les hauts salaires cessent de participer à l'effort collectif, ce qui n'est pas concevable pour nous.

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Dans les rangs de la majorité, j'ai entendu certains collègues dire que si l'argent du livret A est réorienté vers ces fonds, ce sera déjà une première étape. Pouvez-vous me dire si c'est un objectif que vous vous êtes fixé ? Si tel est le cas, je comprends mieux pourquoi le livret A a été amputé aussi radicalement.

La secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, Mme Agnès Pannier-Runacher, a bien résumé la situation : vous voulez que les fonds de capitalisation se multiplient comme les Smarties – et les Smarties c'est dégueulasse. Votre projet, c'est bien de multiplier les Smarties, ou les petits pains capitalisés, pour ceux qui en ont les moyens.

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Monsieur Lachaud, nous sommes en train de créer une « sécu des retraites », un système 100 % public qui concerne tous les revenus d'activité, avec un système de cotisation obligatoire. Ce faisant, nous créons les conditions de la confiance et vous devriez y être sensible. Quoi de mieux qu'un système public pour avoir une pension garantie ?

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Les pays où BlackRock a pu entraîner des dérives sont ceux où il n'existe pas de modèle de protection sociale. Nous, nous créons un système public dont le pilotage sera confié aux partenaires sociaux. Croyez-vous vraiment que les partenaires sociaux veulent des baisses de pensions ? Moi, je ne le crois pas. Ils ont montré, avec l'AGIRC-ARRCO, qu'ils étaient capables de piloter le système et ils le feront très bien, à l'avenir, dans la CNRU.

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Ce débat est surréaliste ! Vous nous expliquez que vous inventez quelque chose qui a déjà été inventé en 1945 : cela s'appelait la sécurité sociale qui donnait, elle, une vraie sécurité, puisqu'en cotisant, on savait ce qu'on aurait à la fin. Demain, avec votre système, on ne saura pas ce que l'on cotise, puisqu'on ne connaît toujours pas l'indicateur sur lequel la valeur du point et le prix du point seront calculés. Et on sait encore moins ce que l'on touchera. La seule chose que l'on sache, c'est qu'avec le plafonnement à 13 % du PIB de la somme de richesse qui doit servir à financer les retraites et l'augmentation du nombre de retraités, les pensions vont baisser. Avez-vous vraiment lu le programme ?

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J'avoue ne pas comprendre l'argumentaire qui vient d'être fait pour nous vendre le système dit universel – mais qui ne l'est pas – des retraites. La meilleure sécurité des retraites, c'est un système équilibré financièrement. Or on ne sait pas comment il sera financé. Vous dites que vous créez les conditions de la confiance mais, je ne suis pas certain que les Français aient confiance dans votre nouveau système. Les régimes autonomes, eux, ont confiance dans leur propre système, qui est bien géré.

Le système public ne garantit rien. Un système à points ne garantit rien non plus, puisque tout dépendra de la valeur de service du point et que vous ne nous donnez aucune réponse claire à ce sujet. Vous vantez le pilotage des partenaires sociaux, mais quand on lit précisément votre texte, on comprend qu'à tout moment, le Gouvernement – c'est-à-dire Bercy – pourra, par décret, prendre des arbitrages pour équilibrer le système. Nous allons passer d'un paritarisme de gestion à un paritarisme de caution. Ce n'est plus la même chose.

La commission rejette les amendements.

Puis elle est saisie des amendements identiques n° 6791 de M. Bastien Lachaud, n° 6794 de Mme Danièle Obono et n° 6802 de Mme Bénédicte Taurine.

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Poursuivons le débat sur la capitalisation. Après les métallurgistes de Cleveland qui ont perdu 20 à 60 % de leur pension pour éviter la faillite de leur fonds de pension, prenons l'exemple, plus près de nous, des Pays-Bas, où le système de retraite repose sur la capitalisation. Le pays fait face aujourd'hui à une crise majeure, du fait d'une forte augmentation du nombre de retraités et des répercussions de l'investissement massif de la Banque centrale européenne dans les banques et les fonds de pension après la crise de 2008. Avec cet argent gratuit, les banques et les fonds de pension ont cessé de vivre sur leur fonctionnement traditionnel et la longévité de leur portefeuille est devenue inférieure à leurs engagements. Les fonds de pension néerlandais étaient investis dans les dettes des États, ce qui est devenu moins rentable. Les taux sur les dettes des États sont aujourd'hui négatifs : il y a donc une perte d'argent.

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Pour justifier votre réforme, vous dites qu'il est anormal que les personnes qui ont des revenus très importants continuent à avoir des retours sur cotisation. Vous estimez que certains salariés n'ont aucun intérêt à continuer à participer au système dans son ensemble, mais vous êtes incapables de dire comment vous comptez corriger le déséquilibre financier que vous allez vous-mêmes créer en introduisant une exonération. Surtout, vous entamez le principe même de la solidarité. L'abaissement du plafond pose donc un problème à la fois financier et idéologique.

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Nous demandons de substituer au mot « trois » le mot « huit ». Au moment de la création de notre système de sécurité sociale nationale, Ambroise Croizat disait : « Cotiser selon ses moyens, recevoir selon ses besoins. » La retraite devrait assumer une visée redistributive et ne pas reproduire à l'identique les inégalités salariales.

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Monsieur Lachaud, cela fait cinq jours que j'essaie de répondre avec précision à toutes les questions qui me sont posées. Je trouve donc assez désagréable que vous arriviez au milieu du débat et que vous reposiez ces mêmes questions.

Avis défavorable.

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Vous nous présentez le régime de l'AGIRC-ARRCO comme un modèle. Ce régime a certes permis de compléter les retraites d'un certain nombre de salariés dans notre pays, mais il n'empêche qu'entre 1983 et 2018, le rendement du point de l'AGIRC-ARRCO a baissé de 40 % environ. Et, d'après des projections réalisées en septembre 2019 par la commission technique et financière de la caisse, il devrait baisser de 26,99 % d'ici à 2033. Je dis cela car ce n'est pas par plaisir que nous vous interrogeons sur le taux de rendement. Nous avons besoin d'engagements précis sur cette question. Vous dites que le point ne baissera pas, soit, mais qu'en sera-t-il du rendement ?

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Vous faites justement référence à Ambroise Croizat et vous rappelez sa célèbre formule : « Cotiser selon ses moyens, recevoir selon ses besoins. » J'aimerais évoquer la situation de deux personnes, deux femmes d'un certain âge, qui sont venues récemment à ma permanence. La première a perdu son mari au mois de septembre et, cinq mois après, elle ne touche toujours pas de pension de réversion. Le montant de cette pension est extrêmement difficile à calculer parce que son mari a été successivement ouvrier agricole, travailleur indépendant et salarié. La seconde a 600 euros de pension de réversion et un loyer de 500 euros qu'elle ne peut plus payer. Elle est venue me voir pour que je l'aide à trouver un logement social. Il est bel et bien urgent de réparer notre système pour mettre fin à de telles injustices. Il faut que les mots d'Ambroise Croizat deviennent une réalité, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.

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Citer Ambroise Croizat et s'en revendiquer chacun de son côté n'empêche pas d'être d'accord sur un constat. Le problème, c'est que nous ne pensons pas que votre réforme va améliorer le système actuel et corriger ses insuffisances. Le système a certes permis de réduire drastiquement la pauvreté des seniors, mais elle persiste. Les « gilets jaunes » retraités qui étaient sur les ronds-points ont assez expliqué qu'ils n'avaient souvent pas les moyens de se nourrir. Ce sont des situations insupportables !

Monsieur le secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, si nous vous posons les mêmes questions depuis plusieurs jours, c'est parce que vos réponses, quand vous nous en faites, ne font que confirmer nos craintes. Voilà pourquoi nous continuerons à les poser demain.

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J'ai déjà indiqué que la réforme ne changera pas grand-chose sur le plan financier. Rien, dans votre projet, ne garantit l'équilibre structurel du système, contrairement à ce que disait tout à l'heure une collègue de la majorité – qui ne faisait, en réalité, que décrire ce qu'est la sécurité sociale aujourd'hui. Pour équilibrer le système, il va falloir faire bouger des variables, comme on le fait déjà aujourd'hui. La différence, c'est qu'au lieu de toucher au nombre de trimestres ou au niveau des cotisations, on va désormais modifier la valeur du point ou sa revalorisation, en décalant les échelles entre valeur d'acquisition et valeur de service du point. On ne touche pas à l'âge légal parce que le Président de la République a dit qu'il ne fallait pas y toucher – sauf à ce que, sur la période, l'un de ses cinq ou six successeurs en décide autrement –, mais on touche à l'âge pivot, que le Conseil d'État a, d'ailleurs, déjà fait passer de 64 à 65 ans. Enfin, on se laisse la liberté d'augmenter les cotisations, et ce n'est même plus l'État qui le décidera, mais la caisse elle-même. La clef du débat, c'est donc bien l'évolution des paramètres.

La commission rejette les amendements.

Elle est ensuite saisie de l'amendement n° 22126 M. Sébastien Jumel.

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Les femmes seront les grandes oubliées du système de retraite par points. Six cas-types présentés pour les salariés du privé correspondent à des trajectoires typiquement masculines : cinq carrières complètes et une carrière heurtée caractérisée par un chômage de longue durée à partir de 42 ans. Aucun de ces six cas-types ne traite d'une femme avec enfant. Mathilde Larivière, maître de conférences du Conservatoire national des arts et métiers, a fait la démonstration que la retraite par points serait préjudiciable aux femmes. Vous haussez les sourcils : démontrez-nous le contraire ! Le présent amendement vise à substituer les trimestres aux points, pour vous forcer à répondre à ces questions.

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Je renouvelle mon attachement à la lisibilité du système par points. Je maintiens qu'il faut aujourd'hui des... « Jumel » pour comprendre le système actuel, tellement il est compliqué !

Avis défavorable.

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Nous aurions besoin d'un télescope pour voir où vous voulez nous emmener ! Les grandes oubliées, ce sont les mères, qui sont effectivement complètement absentes de vos préoccupations. Il y a un vrai loup sur la conversion dans le système à points des assurances de trimestres, que vous convertissez en pourcentage de points. Or, dans une loi, il y a toujours un phénomène incitatif ou dissuasif, et ce système inciterait des mères à ne jamais s'arrêter pour s'occuper des enfants. Le rapport à la retraite et aux enfants changerait complètement, or nous tenons absolument à préserver ces droits familiaux. En l'état, votre projet n'apporte aucune garantie sur ce point.

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Vous complexifiez le problème en prétendant unifier le système. En fait, vous allez créer des millions de spécificités, en fonction de l'individu, de sa carrière, etc. Les justifications que vous avancez ne correspondent pas à la réalité ; même la ministre du travail a eu du mal à expliquer ce système par points ! Le système actuel nécessite d'être amélioré et simplifié, même si la complexité est normale. Non seulement vous ne simplifiez rien, mais vous rendez la vie encore plus difficile aux plus vulnérables.

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Je suis ravie que tout le monde s'inquiète du sort des femmes : c'est notre préoccupation première et je vous invite à lire le titre III, qui ne traite quasiment que de cela. Notre projet de loi favorise les femmes : celles qui partaient à 67 ans pour annuler la décote partiront plus tôt ; elles auront une majoration de 5 % dès le premier enfant, ce qui n'est pas le cas actuellement ; des points leur seraient attribués en cas de chômage ou de maladie.

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Antoine Bozio, qui a inspiré le Président de la République, dit que les simulateurs et les cas types présentés dans l'étude d'impact sont d'une utilité « proche de zéro » – manière polie de dire qu'on n'y voit rien ! Les femmes seront les premières victimes de votre retraite par points.

La commission rejette l'amendement.

Puis elle examine l'amendement n° 21621 de M. Sébastien Jumel.

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Dans le système actuel, il est parfois difficile de faire valoir de véritables droits à la retraite, par exemple pour les agriculteurs. Nous avons donc cherché à les corriger à plusieurs reprises en déposant des propositions de loi. Le droit à la retraite a été abîmé et mérite de progresser dans notre pays. Mais le système que vous proposez sera-t-il plus efficace ? Nous avons fait la démonstration que ce n'est pas le cas.

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Nous avons fait le constat que certaines choses ne fonctionnaient pas dans le système actuel : alors travaillons sur les outils !

Avis défavorable.

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Le système actuel est tout de même porteur d'avancées sociales dont nous pouvons être fiers, notamment au regard de notre politique familiale. On nous mentionne toujours l'exemple des femmes obligées de travailler jusqu'à 67 ans. Mais d'autres femmes, parce qu'elles ont été mères, partent avant, car elles se voient accorder des trimestres supplémentaires. Vous présentez les 5 % dès le premier enfant comme une avancée : c'est à la fois vrai et faux. Dès aujourd'hui, les femmes salariées ont droit à huit trimestres dès le premier enfant.

Votre réforme reste obscure, car nous n'en connaissons toujours pas les modalités de financement : même le Conseil d'État a souligné qu'elle était profondément incomplète !

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Les femmes ne sont pas les grandes gagnantes de cette réforme, d'autant que les 5 % peuvent être pris par le père ou par la mère lors du calcul de la pension. Or, bien souvent, les pensions des hommes sont supérieures à celles des femmes : 5 % de plus, c'est toujours plus que 5 % de moins ! Dans ces conditions, c'est plutôt la pension de l'homme qui bénéficiera de cette augmentation de 5 %, confortant ainsi la vision très patriarcale de la situation des femmes.

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Le Gouvernement a récemment donné des précisions sur le système de retraite des avocats, expliquant que tout était quasiment réglé. Or le Conseil national des barreaux, réuni en assemblée générale les 7 et 8 février 2020, continue de dénoncer fermement les propositions qui leur sont faites, considérant qu'elles ne changent pas fondamentalement les choses. Il continue donc à demander le retrait du texte et appelle à la mobilisation. Les négociations ont-elles été arrêtées ? Comment la situation évolue-t-elle ?

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Dans le privé, huit trimestres sont accordés par enfant, contre deux trimestres dans le public. Certains déplorent que les trimestres disparaissent, mais ces huit trimestres représentent 4,6 % des 172 trimestres nécessaires pour atteindre les fameuses quarante-trois annuités. C'est bien pour cela que nous accordons 5 % par enfant : personne n'y perd !

La commission rejette l'amendement.

Elle est ensuite saisie des amendements identiques n° 6579 de M. Bastien Lachaud, n° 6582 de Mme Danièle Obono et n° 6590 de Mme Bénédicte Taurine.

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Je veux revenir sur le caractère néfaste de la capitalisation pour montrer combien cette réforme est profondément anti-écologique. Selon vous, soit les gens qui ne payent pas de surcotisation pourront consommer plus, ce qui n'est pas écologique, soit ils capitaliseront, ce qui ne l'est pas davantage. Reprenons l'exemple de BlackRock, qui explique agir pour la planète : en réalité, ses investissements se tournent la plupart du temps vers les gros pollueurs. Un tiers des membres du conseil d'administration de BlackRock est en effet lié à des entreprises du secteur des énergies fossiles. En 2018, les représentants de BlackRock ont voté contre 90 % des résolutions pour le climat soumises en assemblée générale.

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En ramenant le plafond de 324 000 euros à 120 000 euros, soit 3 PASS, vous créez un déficit supplémentaire : comment pouvez-vous, dans ces conditions, rendre le système plus équitable et plus lisible ?

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La situation est crispée parce que vous ne répondez pas à nos questions, monsieur le rapporteur. Les gens qui protestent actuellement dans la rue n'y sont pas par plaisir mais parce qu'ils attendent, eux aussi, des réponses. Commencez par répondre à nos questions et cela se passera mieux !

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Je viens d'arriver parce que j'étais avec des personnes qui nous ont expliqué pourquoi...

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C'est ici que nous débattons parce que nous sommes parlementaires avant tout. (Protestations parmi les députés des groupes La France insoumise et de la Gauche démocrate et républicaine.) J'aimerais que nous reprenions nos débats dans le calme. Madame Taurine, merci de conclure.

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Nous débarquons aujourd'hui, en effet, parce que nous venons porter les revendications de ceux qui se mobilisent sur le terrain contre votre réforme. Alors arrêtez de nous interpeller et de faire sans arrêt des remarques de ce type ! Je viens d'arriver : et alors ? Je n'en ai pas moins de légitimité que vous !

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Madame Taurine, je peux entendre qu'il soit nécessaire de se relayer pendant les débats mais, tout à l'heure, M. Lachaud m'a interpellé et quand j'ai voulu lui répondre, il était parti. Le but du dialogue qui s'est amorcé en commission est d'avoir des échanges de fond – et non de toucher le fond !

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Madame la présidente, il serait bon que les débats se calment un peu ! Je me suis absenté 5 minutes sur la totalité des débats aujourd'hui, il est dommage que le rapporteur décide de répondre à mes questions pendant ces 5 minutes alors qu'il ne l'a pas fait le reste du temps ! C'est regrettable. De plus, je rappelle que Mme Taurine n'est pas membre de cette commission et vient pour défendre ses amendements. On peut difficilement comparer le temps de présence des membres de la commission avec celui des députés qui viennent pour défendre leurs amendements ! Nous sommes tous des députés ici, avec la même légitimité !

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Moi, je suis ici depuis six jours et je ne peux pas défendre mes amendements parce que vous faites de l'obstruction !

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Dans l'exemple cité par notre collègue Marilossian, je ne suis pas sûr que les 5 % seront plus avantageux pour toutes les femmes. Ainsi, pour une femme séparée et mère d'un enfant ayant cotisé 152 trimestres sur 25 000 euros par an et souhaitant partir à la retraite à 62 ans, dans le système actuel, sa retraite s'élèvera à 13 747 euros par an, contre 12 497 euros avec le système universel, soit une perte de 1 250 euros par an représentant 9 %.

Autre exemple, un couple avec trois enfants : les deux ont travaillé pour un même salaire de 35 000 euros par an et ont cotisé 162 trimestres chacun. Ils veulent partir à la retraite à 62 ans. Dans le système actuel, la retraite de la femme sera de 26 456 euros, celle de son mari de 22 350 euros, alors que dans le système universel, la retraite de la femme sera de 20 423 euros, celle de son mari de 17 759 euros, ce qui aboutit à une perte pour le couple de 10 624 euros, soit 21 %. Vous mettez en avant les cas où les femmes sont gagnantes, mais il existe aussi des cas où les mères sont perdantes. Il faudra s'assurer, au titre III, qu'aucune mère ne sera perdante.

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On a touché le fond, en effet, lorsque notre collègue Lachaud a fait le parallèle entre écologie et capitalisation. Quand on n'a rien à dire, on disserte ! Ce n'est pas en déposant dix-sept amendements sur chaque alinéa que l'on parviendra à débattre sur le fond. Ces amendements ne veulent rien dire ! Débattons sur le fond et, de grâce, ne nous faites pas la leçon !

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Il est tout à fait normal que l'on ne soit pas présent jour et nuit en commission, tout comme il est normal d'aller sur le terrain. Le reproche ne peut pas en être fait à nos collègues. Le problème est plutôt celui de la méthode. L'article 13 traite du choix proposé par le Gouvernement de cotiser jusqu'à 3 PASS au lieu de 8. Le débat a très bien commencé puisque nous avons précisément abordé ce sujet ; puis, il a dérivé sur ceux des femmes, des avocats et de BlackRock. Pour la clarté des débats, et pour s'assurer d'obtenir les réponses à ses questions, mieux vaudrait s'en tenir à l'article que nous étudions et à l'amendement en discussion.

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Parce qu'il est peu vraisemblable que nous terminions l'examen des articles, chacun d'eux nous offre l'occasion de digressions qui ne nous permettent pas moins de débattre du fond. Nous avons eu de bonnes séquences, et je ne crois pas que cela soit vain. Plutôt que d'avoir des considérations méthodologiques, continuons de travailler comme nous le faisons : cela ne fonctionne finalement pas si mal que cela.

La commission rejette les amendements.

Puis elle examine les amendements identiques n° 6596 de M. Bastien Lachaud, n° 6599 de Mme Danièle Obono et n° 6607 de Mme Bénédicte Taurine.

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Je ne pense pas faire une digression en évoquant l'écologie et la capitalisation. L'article 13 ouvre la voie à la capitalisation pour les très hauts revenus, mais pas seulement puisque le niveau des pensions va baisser pour tout le monde, ce qui incitera à se tourner vers la capitalisation. Il faut bien mesurer toutes les conséquences des dispositions que nous adoptons. Pour notre groupe, ouvrir la voie à la capitalisation pose un problème écologique. D'ailleurs, selon Maxime Combes, économiste d'Attac, « Comme les places internationales boursières sont très liées aux résultats des compagnies pétrolières, le résultat des investissements opérés par BlackRock est dépendant des résultats de ces entreprises. BlackRock a donc structurellement intérêt à ce que ces compagnies pétrolières génèrent encore beaucoup de profits. »

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L'article 13 a pour objet de favoriser une forme d'épargne retraite qui servira, non pas à payer les retraites, mais à permettre aux fonds de pension d'investir dans la bulle financière. Voilà pourquoi, quand vous choisissez de favoriser l'épargne retraite, donc la capitalisation, et d'alimenter ainsi la bulle spéculative, vous favorisez les industries fossiles. Il y a une cohérence dans votre choix et, par conséquent, dans nos amendements.

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L'alinéa 10 porte sur l'intégration des salariés agricoles dans le régime universel : parlons du fond, c'est-à-dire du texte ! Quant aux préoccupations de M. Bazin pour les femmes, il pourra les exprimer dans le cadre de l'examen du titre III.

Avis défavorable aux amendements.

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Notre collègue Jumel a souligné l'importance de ne pas pénaliser les femmes avec enfants, un sujet qui n'est pas déconnecté du débat de fond puisqu'on a évoqué les carrières hachées. Une femme qui a eu une telle carrière peut être pénalisée dans le modèle avec 5 % supplémentaires si elle a cotisé moins de trente années. De même, avec la perte de l'effet de levier de la majoration de la durée d'assurance, si une femme veut partir à 62 ans, soit deux ans avant l'âge pivot de 64 ans, elle subira une décote de 10 % alors que, dans le système actuel, elle bénéficie de huit trimestres, soit précisément deux années.

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L'alinéa 10 intègre le dispositif du plafond dans le code rural et de la pêche maritime : nous sommes donc bien dans le sujet ! Nous contestons cette remise en cause de la solidarité dans les secteurs spécifiques aussi, car elle favorise un modèle économique global de la financiarisation. De plus, ce n'est pas dans l'économie productive que vous choisissez d'orienter les flux, mais dans l'économie financière, ce qui est problématique pour l'emploi réel, qui permettrait de financer les retraites. Nous poussons au maximum la logique des choix que vous proposez aujourd'hui pour montrer qu'ils se feront au détriment de l'intérêt général.

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Je suis d'accord qu'il y a de l'inquiétude chez les Français. C'est légitime : chaque réforme des retraites, chaque bouleversement du système social est allé avec son lot d'angoisse dans l'opinion. Il est normal qu'une réforme aussi complexe que celle du système des retraites suscite des interrogations. La représentation nationale a l'occasion d'offrir aux Français un débat de fond qui doit permettre de les éclairer et de lever un certain nombre d'inquiétudes. Or, monsieur Lachaud, par votre façon de défendre vos amendements, vous faites exactement l'inverse de ce que vous prétendez faire. Vous les prenez comme point de départ pour nous expliquer que nous serions en train de favoriser le système de retraite par capitalisation pour les hauts revenus, de manière à permettre d'enrichir un groupe de fonds de pension américain dont les investissements sont pourris et que, ce faisant, nous coupons des arbres et ruinons la planète... Vous vous livrez à un véritable lavage de cerveau ! Sachez qu'il y a des cerveaux qui ne moussent pas au lavage malgré les mots savonneux ! Vous êtes ici face à une majorité de parlementaires qui n'ont pas le cerveau qui mousse, pas davantage que les Français. Je vous propose donc d'arrêter cela et d'en revenir au texte.

La commission rejette les amendements.

Puis elle adopte l'article 13 sans modification.

Les travaux, suspendus à dix-sept heures, sont repris à dix-sept heures vingt.

Après l'article 13

La commission est saisie de l'amendement n° 19742 de M. Sébastien Jumel.

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Il convient de remettre à plat trente ans de politiques d'allégements sociaux qui ont fragilisé le financement par la cotisation de notre système de protection sociale, et incité à recourir au travail peu qualifié. Désormais, le montant des exonérations de cotisations sociales accordées aux entreprises sans condition atteint 66 milliards d'euros par an, soit 13 % de l'ensemble des recettes de la sécurité sociale. Nous proposons d'utiliser une partie de cette somme pour financer de nouveaux droits à la retraite.

Cet article supprime progressivement l'allègement de cotisations patronales remplaçant le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), qui grève les finances publiques de 22 milliards d'euros par an. Adopté en 2013, le CICE et le dispositif de réduction de cotisations sociales qui l'a suivi n'ont jamais fait la preuve de leur efficacité en matière de compétitivité et de création d'emplois, tout en incitant les employeurs à ne pas augmenter les salaires. De tels allégements, qui se font à l'aveugle, sans aucune contrepartie ni objectif clairement affiché, ne sont absolument pas efficaces et sont même contre-productifs.

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C'est l'éternel débat, et si l'on raisonnait à périmètre constant, je serais d'accord. Notre objectif est de recréer de l'emploi : plus l'assiette du nombre de salariés est grande, meilleure est la solidité de notre modèle social. Et si l'on augmente l'assiette, même si les taux sont plus bas, on s'y retrouve au niveau des cotisations.

Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Elle passe à l'amendement n° 19746 de M. Sébastien Jumel.

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Nous sommes attachés à l'économie réelle et même disposés à soutenir les entreprises lorsqu'elles sont vertueuses, qu'elles ont des politiques salariales positives, qu'elles mettent en place des plans de formation intégrant la gestion prévisionnelle de l'emploi et des compétences, ou bien lorsqu'elles ont une responsabilité environnementale avérée. D'où la proposition, par le présent amendement, de faire varier le montant des cotisations patronales : les entreprises peu vertueuses verraient augmenter leur taux de cotisation ; celles qui le sont plus, le verraient diminuer. On pourrait ainsi utilement financer le projet de loi sur le système de retraite, plombé par les exonérations patronales qui s'additionnent sans contrepartie.

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Nous avons mis en place un bonus-malus pour les employeurs de nombreux contrats à durée déterminée très courts : cela rejoint un peu votre idée.

Avis défavorable.

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Nous proposons d'utiliser ce levier pour orienter de manière beaucoup plus positive les stratégies des entreprises en termes d'embauches, de salaires, d'investissements, de formation des salariés. Il faut encourager tout ce qui peut aller dans la bonne direction et qui créera une dynamique économique positive, respectueuse de l'environnement et des humains. Tout cela peut, en outre, nous permettre de financer un véritable droit à la retraite. Il faut donc revoir complètement ce dispositif mis en place dans le cadre du CICE, qui ne sert qu'à grossir les dividendes d'un petit nombre de gens qui n'en ont pas besoin.

La commission rejette l'amendement.

Elle examine ensuite l'amendement n° 19743 de M. Pierre Dharréville.

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Vous avez fait le choix de restreindre le périmètre du financement et de ne surtout pas utiliser le levier de nouvelles ressources. À nos yeux, c'est là un des débats fondamentaux : pour vous, cela signifie que les variables d'ajustement se trouvent forcément dans l'âge de départ et dans le niveau des pensions ; pour nous, ce sont précisément des droits à garantir, qui demandent qu'on s'assure des ressources nécessaires. Or, depuis maintenant deux ans et demi, vous asséchez les ressources de la protection sociale.

Nous proposons ici d'aller chercher les ressources dont nous avons besoin, en abrogeant le dispositif Fillon de réduction générale des cotisations patronales, qui encourage les emplois peu qualifiés et les bas salaires. Cette disposition permettrait de ramener 20 milliards d'euros par an dans les caisses de la sécurité sociale. Afin de compenser, pour les petites et moyennes entreprises l'abrogation progressive de ce dispositif et les hausses de cotisations qui en découleraient, une aide publique directe serait accordée aux TPE-PME et structures du secteur tertiaire non marchand.

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Votre raisonnement serait juste si nous étions en vase clos. Or nous vivons dans un monde ouvert. Il est important d'augmenter la masse salariale globale, c'est-à-dire de réduire le chômage et de créer de la richesse que l'on pourra ensuite répartir. Je comprends votre intention, elle est louable, mais ce n'est pas la méthode que nous avons retenue.

Avis défavorable.

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Les exonérations massives que vous avez amplifiées n'ont pas produit sur l'emploi les résultats que vous venez de décrire. Toute une partie de cet argent est gaspillée dans la financiarisation et ne sert pas à créer de l'emploi. Or il y a des besoins dans notre pays auxquels il n'est pas répondu. La perte du tissu industriel, mais aussi de services publics, pèse sur les comptes de la sécurité sociale. Lorsque l'État réduit le périmètre des services publics, il porte atteinte à la vie des gens et, par ricochet, affecte le financement des retraites. Vous n'avez pas encore fait la preuve que votre politique contribue à créer des emplois.

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La question de l'augmentation des salaires, donc des cotisations, donc des ressources de la sécurité sociale, peut être posée de bien des manières. L'appréhender sous l'angle de l'égalité salariale entre les femmes et les hommes, c'est avoir en tête que l'égalité salariale ramènerait 3 milliards d'euros de recettes supplémentaires en cotisations. Envisager le partage de la valeur ajoutée dans l'entreprise, la limitation des écarts de rémunération, la préférence pour les stratégies industrielles plutôt que pour le court-termisme de marché, tout cela crée aussi de la richesse et de la redistribution.

Par ailleurs, on est souvent plus habile à dire qu'on a un problème de dépenses publiques plutôt que de recettes publiques. Il y a quand même un paquet de gens qui ne payent pas les impôts qu'ils devraient ! Le Gouvernement, je le lui accorde, a commencé à engager le bras de fer avec les GAFA au sujet de leur taxation, mais toutes les multinationales ne payent pas les impôts qu'elles devraient : 40 % du chiffre d'affaires des multinationales est consolidé dans les paradis fiscaux ; il manque 5 milliards par an au titre de l'impôt sur les sociétés en France, et même 20 % au niveau de l'Union européenne. C'est une vraie difficulté que les hyper-riches ne payent pas, parfois avec votre aide, les impôts qu'ils devraient. Quant à ceux qui sont vraiment très riches, ils se constituent eux-mêmes en société pour pouvoir disparaître de la circulation.

J'aimerais, par exemple, que l'on s'interroge sur le scandale des CumEx files : j'ai moi-même déposé plainte auprès du parquet national financier – j'imagine que cela a été transmis à Bercy.

La commission rejette l'amendement.

Elle passe à l'amendement n° 19745 de M. Pierre Dharréville.

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La question du financement des retraites a été résumée, d'une certaine manière, à l'allongement de la durée de cotisation – c'est-à-dire à l'âge de départ –, mais on pourrait très bien l'élargir aux taux et à l'assiette des cotisations. Au banquet des riches, l'assiette des salariés ne représente qu'une coupelle. On les met à contribution alors qu'ils n'ont que des miettes à manger. Notre amendement vise à reconstituer une véritable assiette en élargissant les contributions aux revenus financiers. Cela permettrait de dégager 30 milliards d'euros pour financer la protection sociale à la française et les retraites par répartition.

Il existe plusieurs manières d'accroître le financement, nous l'avons dit : par la parité entre les hommes et les femmes, par l'augmentation des salaires et par l'accroissement du niveau de qualification, qui améliorerait les carrières, donc les revenus, donc les recettes liées. Voilà la logique différente que nous défendons – la vôtre consistant à faire porter l'effort uniquement sur l'âge de départ à la retraite.

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Nous voulons bien distinguer ce qui relève des pensions de droit direct – ce sont les cotisations qui vont en assurer le financement – et ce qui relève de la solidarité – c'est l'impôt qui s'en chargera, par l'intermédiaire du Fonds de solidarité vieillesse universel.

Compte tenu des réductions de charges, qui sont réelles pour les bas salaires, les cotisations patronales ne représentent plus 60 % mais 50 % du financement du régime de base – on est à 60 % pour les régimes complémentaires. Toutefois, les grandes entreprises cotisent aussi à hauteur de 4 milliards d'euros au titre de la contribution sociale de solidarité des sociétés, de 12 milliards d'euros au titre de la CSG sur les revenus du capital et de placement, de 8 milliards d'euros par le biais de la taxe sur les salaires et de 5 milliards d'euros via le forfait social. On peut discuter du niveau, mais on ne peut pas dire que le capital ne finance pas la protection sociale.

Avis défavorable.

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Contrairement à vous, nous pouvons le dire en rappelant les mesures que vous avez adoptées depuis que vous êtes aux responsabilités : exit tax, flat tax, allégement de l'impôt de solidarité sur la fortune, exonérations de tous types, et bien entendu CICE assorti d'aucune contrepartie ni évaluation. Les chiffres consolidés par des économistes sérieux, notamment ceux de l'Observatoire français des conjonctures économiques, le montrent, la multiplication des cadeaux pour les détenteurs de capital et ceux qui se font du pognon en dormant n'a pas fait la preuve de son efficacité. Oui, nous pouvons le dire, il est urgent d'inclure les revenus financiers dans l'assiette des cotisations.

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J'aimerais savoir comment l'évolution des cotisations va s'articuler avec les exonérations en vigueur pour les employeurs. Quels seront demain les taux de cotisation effectifs en fonction du niveau de rémunération ?

Par ailleurs, les exonérations de cotisations sur les bas salaires ne concernent aujourd'hui que le secteur privé, dans le cadre d'un régime qui lui est propre. S'il y a demain un régime universel, certains employeurs publics ne bénéficiant pas d'exonérations à l'heure actuelle diront que leur situation est désormais identique et demanderont les mêmes exonérations pour leurs salariés payés au SMIC. Quelle réponse ferez-vous sur le plan juridique ?

La commission rejette l'amendement.

Elle est ensuite saisie de l'amendement n° 339 de Mme Géraldine Bannier.

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De nombreuses pensions de retraite, bien que leur niveau soit inférieur au montant de l'allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA), font l'objet de prélèvements au titre de la CSG et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS). Les faibles retraites versées à des personnes qui ont souvent eu une carrière complète sont ainsi encore amputées par des prélèvements fiscaux. Nous proposons d'exonérer de CSG et de CRDS les pensions inférieures au minimum vieillesse.

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Je crois qu'il y a une incompréhension. J'ai vérifié : le montant de l'ASPA est de 10 800 euros pour une personne seule et le seuil d'exonération, en ce qui concerne la CSG et la CRDS, a été fixé à 11 300 euros. S'agissant des couples, l'ASPA s'élève à 16 826 euros et le seuil d'exonération est de 17 300 euros. La seule manière de ne pas être exonéré est donc d'avoir d'autres revenus que l'ASPA. Sur le fond, je peux partager votre préoccupation : il s'agit de toutes petites pensions. Seulement, à moins qu'ils n'aient d'autres revenus, les allocataires de l'ASPA bénéficient d'une exonération.

Je vous propose donc de retirer l'amendement.

L'amendement est retiré.

La commission examine, en présentation commune, les amendements n° 12718 et n° 12720 de M. Jean-Paul Mattei.

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Je n'étais malheureusement pas là pour défendre l'amendement qui prévoyait de faire passer à 31,7 % le taux de la flat tax – je le regrette, car c'est une mesure que je défends depuis un certain temps. L'amendement n° 12718 demande au Gouvernement de nous remettre une évaluation de l'impact qu'aurait un relèvement de la flat tax sur les revenus du capital. L'objectif est d'améliorer le financement des régimes de retraite et de ne pas inciter – c'est un sujet dont nous avons beaucoup parlé – les acteurs économiques dont les revenus sont supérieurs à 3 PASS à glisser vers la distribution de dividendes. Mon amendement n° 12720 s'inscrit dans la même logique : il serait intéressant d'avoir des rapports permettant de faire le point.

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Je sais que c'est une question qui vous est chère – vous l'avez déjà abordée lors des réunions de notre groupe. Je dois dire que je ne maîtrise pas tous les effets de bord qui pourraient se produire. L'important, pour l'instant, c'est que le système soit lisible : les cotisations allant au coeur contributif et l'impôt servant à financer ce qui relève de la solidarité.

Je ne vois pas bien où pourrait s'insérer votre proposition, aussi préférerais-je que vous retiriez votre amendement.

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Je maintiens mon amendement. Il s'agit d'obtenir un rapport, et rien de plus. C'est un vrai sujet dont nous avons déjà beaucoup parlé et qui mérite des éclaircissements.

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Je soutiens l'amendement du camarade Mattei. Un rapport nous permettra d'être sûrs de placer le curseur au bon niveau.

Ce qu'a dit le rapporteur à propos de l'ASPA m'étonne. Vous savez qu'on prend en compte les donations et les successions – un remboursement peut être demandé. S'agissant des agriculteurs, pour lesquels la retraite minimum a été repoussée à la Saint-Glinglin, vous répondez qu'on pourra se tourner vers l'ASPA. Des terrains immenses sont transmis, et il faut payer la CSG et la CRDS en plus des droits de succession. Cela légitime tout à fait l'amendement qui a été retiré.

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Je suis favorable au rapport demandé. Cela permettrait d'avoir les réponses que le rapporteur n'a pas – il l'a dit. Nous sommes contre la flat tax, car elle va coûter énormément d'argent et elle remet en cause la solidarité, notamment l'idée selon laquelle on doit contribuer selon ses moyens. De nombreux économistes, dont Gabriel Zucman, ont montré que cette mesure favorise un évitement par le biais du versement de dividendes au lieu d'un salaire sur lequel les cotisations sont assises. Certains problèmes se posent donc. Le rapporteur a dit clairement qu'il ne sait pas quel peut être l'impact, que c'est compliqué. Cela justifie la remise d'un rapport : nous avons besoin de réponses précises. Vous qui êtes des partisans de l'équilibre financier, vous devriez être sensibles à cette question.

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Je voudrais également faire part de notre intérêt pour cet amendement. Si des membres de la majorité parlementaire demandent un rapport, c'est bien qu'on manque de données, d'études d'impact et de simulations éclairantes pour faire au mieux notre travail de législateur.

Je voudrais aussi revenir sur l'amendement précédent, qui a malheureusement été retiré. Il y a eu une rupture de confiance considérable à cause de la hausse de 25 % de la CSG que la majorité avait décidé d'appliquer : cela amputait sérieusement le pouvoir d'achat des retraités, notamment celles et ceux qui ont de toutes petites pensions. Il y a certes eu un rétropédalage, mais cette décision, qui était totalement inique, a sérieusement affecté la relation de confiance qui doit exister, normalement, entre l'exécutif et les retraités – actuels mais aussi futurs.

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Nous voterons, naturellement, en faveur de l'amendement n° 12718. Il est quand même singulier que vous le refusiez. Nous disons depuis plusieurs jours qu'il y a un problème d'information, que la représentation nationale n'est pas assez éclairée sur les tenants et les aboutissants de votre réforme, que l'on se fonde sur des hypothèses qui paraissent de plus en plus obscures. Il y aura peut-être, si cette loi passe, des ordonnances à valider. Il faudrait qu'on ait un peu le sentiment de servir un peu à quelque chose d'ici là – cela changerait.

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Il faut s'inscrire dans une dynamique plutôt que de regarder une photographie. Les oppositions font part de réticences au motif que la représentation nationale manquerait d'informations. Je ne fais pas cette analyse, mais je pense qu'il faudra être attentif, dans le cadre du système cible – nous espérons, en effet, que cette loi sera adoptée –, à ce qu'il n'y ait pas d'éviction en matière de recettes. Il y aura une cotisation avant 3 PASS et, au-delà, une contribution de solidarité. Pour un certain nombre de cadres dirigeants et de chefs d'entreprise, la tentation pourrait être grande, comme l'a très bien souligné Jean-Paul Mattei, de transformer les salaires en dividendes. Dans ce cas, il n'y aurait pas de contribution à la solidarité nationale. Cela ne concerne pas la situation actuelle : c'est dans les prochaines années qu'il faudra veiller à ce que la contribution de solidarité soit réelle. Nous pouvons adopter cet amendement tel quel ou bien le Gouvernement peut nous proposer de le retravailler d'ici à la séance publique dans une logique d'accompagnement du dispositif.

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Notre collègue Jean-Paul Mattei fait un vrai travail sur ce sujet depuis deux ans. Ce qui est demandé n'est pas un rapport d'information mais une projection, sur une base théorique. Arrêtez de dire que cela permettrait d'obtenir une éclaircie dans le brouillard que vous percevez. Comme nous ne sommes pas tous d'accord avec l'idée sous-jacente, à savoir une évolution de la flat tax – notre collègue n'a pas réussi à nous convaincre pour l'instant –, le rapport demandé n'est pas nécessairement opportun.

Quant à l'amendement n° 12720, il concerne un autre sujet, même si c'est encore de la prospective. Il serait intéressant de travailler sur cette question, un peu comme nous l'avons fait à propos de la flat tax et de ses effets dans le cadre de notre premier budget, mais la rédaction de l'amendement ne me paraît pas nécessairement très adaptée.

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Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, chargé des retraites

Les politiques économiques que M. Vallaud et d'autres députés ont contestées ont un intérêt : elles font baisser significativement le chômage. La principale source d'intégration dans la société est l'emploi. Entre le premier trimestre 2017 et le troisième trimestre 2019, on a enregistré 600 000 emplois supplémentaires, dont plus de 20 000 emplois industriels, alors qu'on n'avait fait que détruire de tels emplois dans notre pays jusqu'à une période récente. Ces chiffres proviennent de l'Institut national de la statistique et des études économiques et sont donc parfaitement vérifiables. La dynamique impulsée à l'apprentissage est également extrêmement intéressante. Il y a plus de 485 000 apprentis cette année, et le taux d'embauche s'élève à 80 %.

Vous vous demandez si nos choix ne sont pas trop favorables aux entreprises dans certains cas, mais ils sont directement positifs en matière d'emploi, et donc d'intégration et de niveau de vie. Si le pouvoir d'achat a augmenté sensiblement en 2019 – de plus de 2 % –, c'est notamment parce que nous avons adopté des mesures. Vous les estimez trop ciblées sur certains acteurs économiques, mais il faut regarder les résultats. Ils correspondent à ce que l'on attendait depuis plus de trente ans, c'est-à-dire une baisse significative du nombre de demandeurs d'emploi.

France Stratégie, qui est un organisme très sérieux, a engagé un travail sur le sujet que vous avez évoqué, monsieur Mattei, dans le cadre d'un comité d'évaluation au sein duquel l'Assemblée nationale est représentée – Mme Hai en fait partie. Un rapport a déjà été produit, et c'est un vrai pavé. Je vais émettre un avis défavorable à votre amendement, car je vous propose de regarder si les éléments figurant dans ce rapport peuvent alimenter votre réflexion. Nous pourrons ensuite en reparler.

La commission rejette successivement les amendements.

Section 2 : Dispositions applicables aux salariés et assimilés

Article 14 : Dispositions spécifiques aux salariés relatives à l'activité partielle

La commission est saisie des amendements de suppression n° 7115 de Mme Danièle Obono, n° 7123 de Mme Bénédicte Taurine et n° 21097 de M. Boris Vallaud.

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L'article 14 est une déclinaison des dispositions prévues par l'article précédent au sujet de l'abaissement du plafond et de la sécession des hauts revenus, que vous allez favoriser au profit de la capitalisation. Nous contestons, une fois encore, votre choix de faciliter des comportements visant à échapper, par l'intermédiaire de l'épargne retraite, à la solidarité inhérente au système par répartition. La flat tax est un exemple typique : cette mesure conduira certaines personnes à se rémunérer en dividendes plutôt que sous la forme d'un salaire. Or les retraites sont financées grâce aux salaires. Il faudrait non seulement supprimer l'article 14, mais aussi remettre en cause la flat tax.

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Nous demandons la suppression de l'article 14, qui prévoit, en ce qui concerne les temps partiels, une proratisation de la limitation à trois fois le plafond annuel de la sécurité sociale. Nous sommes autant défavorables pour les temps pleins que pour les temps partiels.

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Il y a, en effet, une continuité entre l'article 13 et l'article 14. Nous nous sommes déjà exprimés à plusieurs reprises sur la manière dont il faudrait garder tout le monde dans le futur système en organisant une redistribution.

J'ai presque eu un moment de joie lorsque j'ai cru que le secrétaire d'État allait répondre à mes questions. Seulement, je n'avais pas parlé de la politique économique du Gouvernement : mes interrogations, extrêmement précises, sont restées sans réponse. Je vais donc les reposer. Comment les évolutions des cotisations s'articuleront-elles avec les exonérations actuelles pour les employeurs ? Quels seront demain les taux effectifs des cotisations selon le niveau de rémunération ? Enfin, vous paraîtrait-il légitime que des employeurs publics puissent demander, comme c'est possible dans le privé aujourd'hui, à bénéficier d'exonérations de cotisations sociales, par exemple au niveau du SMIC ?

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Je n'ai pas toujours compris le rapport entre les prises de parole et l'article 14, très technique, qui prévoit uniquement une proratisation lorsqu'on applique le plafond aux temps partiels, qui sont une des caractéristiques de notre marché du travail.

Avis défavorable aux amendements.

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Nous réfléchissons depuis plusieurs heures à l'exception que constituent les revenus dépassant 120 000 euros. L'étude d'impact jointe à ce texte à trous a besoin d'être complétée au regard de l'avertissement que le président Mignola a lancé tout à l'heure sur l'incitation à transformer des salaires en dividendes. Les comportements qui seront encouragés par le nouveau système ont effectivement de quoi inquiéter. Il faut vraiment, d'ici à la séance publique, se poser toutes les questions liées à la fixation du plafond à 3 PASS – et on ne doit pas se contenter de demander un rapport. Quel sera le système de solidarité de demain ? Ceux qui ont des hauts revenus seront-ils inclus, afin que tout le monde – eux et la société dans son ensemble – soit gagnant ?

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Nous parlons bien du plafonnement, monsieur le rapporteur. L'article 14 est une mesure technique, certes, mais elle aura un effet dans le cadre du dispositif d'ensemble, qui a une orientation politique : vous choisissez de favoriser la sécession des plus hauts revenus, ce qui est contraire à l'idée même de la solidarité, et un certain type de fonctionnement économique.

Le secrétaire d'État a cité des chiffres dont il s'est félicité. Le problème est que vous allez privilégier la capitalisation et l'investissement dans la sphère financière qui fonctionne au détriment de l'économie réelle, productive. Vous allez contribuer au grossissement de la bulle aux dépens de l'emploi qui pourrait financer les retraites : vous créez un cercle vicieux.

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J'ai posé, il y a déjà quelques heures, une question qui concernait l'impact du plafonnement à 3 PASS sur la nature des rémunérations et les finances de la sécurité sociale. Il est dommage que nous n'ayons pas connaissance des éléments nécessaires.

L'article 14 est, par ailleurs, l'occasion de revenir sur une proposition défendue par la CFE-CGC, me semble-t-il, lors d'une audition qui a eu lieu la semaine dernière, au sujet du temps partiel subi – notamment par les femmes. Dans ce cas, on pourrait porter les cotisations patronales au niveau de celles versées pour un temps plein. Qu'en pensez-vous ?

La commission rejette les amendements.

Puis elle est saisie des amendements identiques n° 7132 de Mme Danièle Obono et n° 7140 de Mme Bénédicte Taurine.

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J'ai déjà évoqué le problème qui se pose si on favorise le financement de la bulle financière. L'économiste Patrick Artus a expliqué, dans un article auquel je vous renvoie, que les fonds de pension exigent un rendement du capital investi très supérieur au rendement économique du capital productif et que le seul moyen dont les entreprises disposent pour produire un tel rendement est d'augmenter l'effet de levier, c'est-à-dire le rapport entre la dette et les fonds propres. Ce processus signifie que l'économie productive, réelle, est soumise à des aléas et à des choix économiques purement comptables. En instaurant des dispositifs de plafonnement qui feront que les cotisations ne seront plus perçues et qui favoriseront l'épargne retraite, vous pousserez notre économie vers toujours plus de financiarisation, ce qui affaiblira le système dans son ensemble. Voilà pourquoi il faut supprimer l'article 14 alinéa par alinéa.

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Avis défavorable.

J'ajoute que Mme Obono n'est pas concernée par les mesures de proratisation : le groupe La France insoumise a largement dépassé le plafond du nombre d'amendements.

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Vous connaissez les principes qui nous animent : même si nous ne sommes pas directement concernés par une mesure négative ou défavorable, nous nous soucions de celles et ceux qui en subissent l'impact. Nous défendons l'intérêt général. C'est peut-être la différence entre nos positions ou nos traditions respectives. Le secrétaire d'État s'est félicité d'un certain nombre de résultats économiques. Pensez-vous que favoriser la financiarisation et le fait de jouer la retraite des gens à la bourse, au casino de la finance, permettra de stabiliser l'économie et aura un effet bénéfique pour l'activité, et donc pour le financement du système de retraite ?

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J'insiste sur la question que j'ai posée à propos des temps partiels subis. Que peut-on envisager dans ce domaine ?

La commission rejette les amendements.

Elle en vient aux amendements identiques n° 7162 de Mme Danièle Obono et n° 7170 de Mme Bénédicte Taurine.

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Les pressions des financiers sur l'économie réelle ont un impact direct sur les salariés, les cotisations et donc les retraites. Des entreprises font l'objet de ventes à la découpe qui conduisent à des licenciements boursiers – ils n'ont pas lieu pour des raisons économiquement justifiées, mais simplement pour augmenter les rendements. Si votre obsession, chers collègues de la majorité, est réellement d'assurer l'équilibre financier du système de retraite, vous devriez être obsédés par l'équilibre général du système économique, en vue de financer les retraites. Quand vous favorisez la bulle financière, je le redis, vous favorisez le déséquilibre et la volatilité permanente.

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Madame Obono, votre exposé sommaire mentionne les États-Unis, mais je ne pense pas que nous suivions leur modèle. Nous allons créer un système unique dont on nous reproche plutôt l'organisation à la Komintern.

Avis défavorable.

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Je ne sais pas ce qu'est un système « à la Komintern », et je pense que ce n'est pas du tout la bonne référence. En tout cas, vous n'allez pas créer un système unique.

Vous vous plaignez que nous répétons les mêmes arguments, mais c'est parce que vous présentez à chaque fois les mêmes justifications, que vous avez pourtant vous-mêmes démontées. Mme la garde des sceaux a rencontré, il y a quelques jours, les avocats qui se battent pour les spécificités de leur métier. Elle leur a annoncé des possibilités d'aménagement. Les négociations que vous engagez avec les avocats, les policiers et d'autres secteurs que vous choisissez selon des critères très arbitraires, pour leur permettre d'avoir la chance, ou la malchance, de ne pas être inclus dans le nouveau système, contredisent vos propres affirmations : vous ne créez pas un système unique. Même le Conseil d'État le dit.

La commission rejette les amendements.

Elle passe aux amendements identiques n° 7179 de Mme Danièle Obono et n° 7187 de Mme Bénédicte Taurine.

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Il s'agit, cette fois, de supprimer l'alinéa 3. Selon l'Institut des politiques publiques, « les 0,1 % des ménages les plus aisés gagneront 3,9 % de revenu disponible de plus en moyenne en 2020 du fait des mesures des budgets 2018, 2019 et 2020 ». Il y a une cohérence, qui est de permettre à une minorité ou à une fraction particulière de la population de bénéficier de vos politiques économiques – en l'occurrence, d'échapper à la contribution solidaire qui est prévue par le système par répartition. C'est ce que nous remettons en cause.

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Quand je suis interpellé sur une question de fond, je cherche à répondre. Face à des demandes systématiques de suppression des articles alinéa par alinéa, je me contente, en revanche, d'émettre un avis défavorable.

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Nous demandons la suppression de chaque alinéa, mais nous développons à chaque fois des arguments. J'essaie de présenter, depuis que nous examinons cet article, les raisons pour lesquelles nous pensons que le dispositif proposé favorise la sécession des hauts revenus, y compris dans le cadre d'un système de proratisation – c'est ce que fait l'article 14. Nous vous interpellons à travers nos amendements, nombreux, sur la logique générale qui est la vôtre. Pensez-vous que favoriser une fuite en avant va stabiliser et équilibrer le système ? Je crois que c'est une question de fond.

La commission rejette les amendements.

Puis elle est saisie des amendements identiques n° 7196 de Mme Danièle Obono et n° 7280 de Mme Bénédicte Taurine.

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Il s'agit maintenant de supprimer l'alinéa 4. Nous voulons rappeler, à travers cet amendement, que le Gouvernement ne nous propose qu'un horizon de chiffres, de convergence des taux de cotisation, de convergence européenne des taux d'imposition, d'efficacité, de simplification et d'économies, pour plusieurs milliards d'euros. À quoi cela servira-t-il ? Allez-vous améliorer le bien-être grâce à une meilleure retraite dont on pourra profiter ? Ou bien, comme vous l'avez dit, notamment vous, monsieur le secrétaire d'État, faudra-t-il simplement travailler plus ?

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Avis défavorable.

Comme vous ne parlez pas du fond, je vais en profiter pour donner une information à M. Dharréville – je n'avais pas les éléments en tête tout à l'heure. Ceux qui sont en activité à temps partiel, qui peuvent parfois ne pas se constituer assez de droits, pourront cotiser sur la base d'une assiette complète, s'ils le souhaitent. Ce sera possible dans le privé et de droit pour les fonctionnaires. C'est prévu à l'article 27.

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Je ne peux pas laisser sans réponse la remarque du rapporteur. Je ne sais pas ce qu'est le fond pour vous. Il est vrai qu'en Macronie les mots veulent dire tout et son contraire... Le sens de l'action politique et le service rendu à la population ne sont-ils pas des questions de fond pour vous, des questions qui devraient nous intéresser en tant que parlementaires ? Vous avez l'obsession de l'efficacité, de la rentabilité et de l'équilibre financier. Mais cela ne devrait-il pas constituer des outils, des moyens au service de quelque chose ? Nous vous demandons à quoi et à qui vont servir ces dispositifs de proratisation en matière de plafonnement. Concrètement, cela aidera les hauts revenus à éviter de contribuer à la solidarité nationale. Je crois que c'est une question de fond qui mériterait des réponses.

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S'agissant de la forme, quand le rapporteur a fait, au début, une réponse portant sur le fond de l'article, il ne donne ensuite qu'un avis défavorable à la suppression des alinéas.

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Je remercie le rapporteur pour sa réponse. Vous dites qu'on pourra cotiser, de manière volontaire, sur la base d'une assiette supérieure à celle du temps partiel auquel on est astreint. C'est une chose, mais la proposition que j'ai citée consiste à créer une automaticité pour l'employeur : il cotiserait, en cas de temps partiel subi, comme s'il s'agissait d'un temps plein. Cela permettrait de constituer des droits, bien sûr, mais aussi d'exercer une forme de dissuasion à l'égard du temps partiel subi. C'est une formule un peu différente.

La commission rejette les amendements.

Elle en vient aux amendements identiques n° 7283 de M. Éric Coquerel, n° 7289 de Mme Danièle Obono et n° 7297 de Mme Bénédicte Taurine.

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Ces dispositions relatives au prorata sont importantes. Elles induiront une retraite par capitalisation pour ceux qui cotisent moins et qui toucheront des pensions réduites, mais elles coûteront d'abord 72 milliards d'euros à l'État. Votre projet est censé régler les déficits, mais quand les gens qui auront cotisé entièrement demanderont, légitimement, la pension qui leur revient, à partir de 2025, il y aura moins de cotisations. L'AGIRC-ARRCO a calculé que cela représenterait à peu près 3,5 milliards d'euros par an. Votre texte commence par créer des déficits, et je me demande bien qui va les compenser sinon l'État, c'est-à-dire nous.

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Si j'avais une réponse de fond, la discussion pourrait progresser. La logique est bien de cotiser en fonction de ses moyens ! Dites-moi clairement qu'avec la baisse du plafonnement vous ne favorisez pas l'évitement des plus hauts revenus. Débattons-en chiffres contre chiffres !

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En 2019, les actionnaires du CAC40 ont reçu 60 milliards d'euros de dividendes, soit un montant supérieur au niveau record de 2007. Le Gouvernement aurait pu s'attaquer à ce régime spécial.

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Monsieur Coquerel, l'article 14 concerne le temps partiel et la proratisation du plafond. Monsieur Dharréville, je suis très sensible au sujet que vous avez évoqué. Certaines grandes surfaces, par exemple, préfère avoir trente salariés à temps partiel, quand elles pourraient en avoir vingt à temps plein, afin de disposer d'un volant plus large et d'être plus flexibles. Nous devons réfléchir à un système pour éviter ce type de situations. Madame Obono, nous vous avons répondu maintes et maintes fois.

Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Elle examine ensuite les amendements identiques n° 7300 de M. Éric Coquerel, n° 7306 de Mme Danièle Obono et n° 7314 de Mme Bénédicte Taurine.

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Monsieur le rapporteur, j'ai encore une question pour vous. Le projet de loi est si flou et si peu évalué que nous sommes obligés de creuser en permanence. J'ai cru comprendre que ce sont des décrets qui allaient fixer les dispositions applicables au temps partiel. Nous sommes en train de voter des blancs-seings ! Pouvez-vous m'en dire plus ?

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Si nous avions des réponses, nous passerions à d'autres questions – sachez que nous en avons encore beaucoup. Ne pensez-vous pas qu'il y a suffisamment d'évitement de participation à la solidarité nationale, quand des entreprises comme Sanofi distribuent 3,8 milliards d'euros aux actionnaires en 2019, Total, 8,5 milliards d'euros, et BNP-Paribas, 3,7 milliards ? Le choix de distribuer aux actionnaires plutôt qu'aux salariés qui ont produit la richesse pèse sur l'équilibre financier que vous recherchez.

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Il existe mille et une possibilités de faire des temps partiels. Pour un salarié qui travaillerait deux jours chez l'un et trois chez l'autre, la proportion serait facile à établir. Mais pour celui qui travaille en libéral et en temps salarié, c'est plus compliqué. Comme nous ne pouvons pas évoquer la multitude infinie des cas, cela paraît logique que l'Assemblée nationale n'entre pas dans un luxe de détails.

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Vous ouvrez donc bien une usine à gaz ! Le système est quand même beaucoup plus simple aujourd'hui ! Vous êtes en train de nous dire qu'en fait de retraite universelle, vous allez inventer quasiment autant de cas particuliers qu'il en existe dans le temps partiel. C'est une boîte de Pandore, à propos de laquelle même une partie du patronat s'interroge, parce que vous exonérez de cotisations les revenus au-delà de 10 000 euros mensuels, soit trois plafonds annuels de sécurité sociale au lieu de huit auparavant. Vous compliquez indéfiniment les choses ! Voilà une bonne démonstration de l'inutilité de votre réforme !

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La proratisation du plafond du temps partiel sert avant tout aux gens qui doivent cumuler plusieurs travails pour s'en sortir. Cela leur permet de ne pas cotiser avec de tout petits salaires sur un plafond complet. Ainsi, quelqu'un qui gagne 500 euros auprès d'un employeur ne cotise que sur la base de 300 euros, parce qu'il travaillera pendant une quotité de temps correspondant à ce plafond. Il ne cotise donc pas plus qu'il ne devrait. L'article protège les gens qui ont de petits salaires et qui doivent cumuler plusieurs emplois. Voilà ce que vous voulez supprimer !

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Vous avez beau nous l'expliquer comme vous voulez, des petits salaires, ça fait des petits points, qui font des petites pensions. Comme vous avez libéralisé le code du travail et ouvert la boîte de Pandore...

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Boîte à gaz ou usine de Pandore ? On s'y perd !

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.. sur la précarisation, ce seront des petits points, des petits points, toujours des petits points. Vous réinventez la chanson de Gainsbourg !

La commission rejette les amendements.

Elle passe aux amendements identiques n° 7317 de M. Éric Coquerel, n° 7323 de Mme Danièle Obono et n° 7331 de Mme Bénédicte Taurine.

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Les articles 14 et 15 concernent bien les salaires au-dessus de 10 000 euros ?

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J'ai bien compris qu'il s'agissait des décrets relatifs aux plafonds pour le temps partiel ! Mais aussi du passage de huit plafonds à trois plafonds pour les hauts revenus...

Madame la présidente, pouvez-vous demander au collègue de la majorité qui fait tout le temps des commentaires d'arrêter. C'est vraiment pénible !

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Je ne cesse de demander du silence, je n'y peux rien !

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Vous le faites bien avec nous ! Vous avez même coupé le sifflet à Adrien Quatennens !

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Je l'ai fait à tout le monde, monsieur Coquerel ! Il n'y a pas deux poids deux mesures. Monsieur Coquerel, nous avons acté des règles lors d'une réunion du bureau. Si vous n'êtes pas là depuis le début de la semaine, j'en suis navrée pour vous. Je vais dénoncer vos méthodes ! Cela fait cinq jours que je me fais pourrir mon téléphone, mon Twitter, mes Facebook, mes mails, par des gens de votre formation politique, qui me reprochent de couper tel ou tel de votre groupe et déversent un tombereau d'insultes. C'est une honte ! Aucun autre groupe ne me fait cela, parce que tout le monde respecte les règles. Nous ne sommes pas dans la rue, mais à l'Assemblée nationale. (Vifs applaudissements parmi les députés des groupes La République en Marche et du Mouvement Démocrate et apparentés.)

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Madame la présidente, j'étais présent lors de la séance où vous avez décidé du passage d'un temps de parole de 2 minutes à 1 minute. Par ailleurs, si vous voulez que nous regardions ensemble dans le détail, groupe par groupe, la manière dont nous nous faisons pourrir sur internet, le concours est ouvert ! Pour ma part, je ne vous ai pas pourrie sur internet.

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C'est seulement qu'il y a une vidéo où mon collègue se fait couper la parole. En tant que présidente, vous devez garantir la qualité des débats. Or l'un de vos collègues passe son temps à intervenir hors micro. Je vous demande simplement de faire respecter les règles.

Pour en revenir au débat, comme Sébastien Jumel, je trouve que, dans la droite ligne de ceux qui vous ont précédés, vous avez continué de remettre en question le contrat à durée indéterminée comme socle du code du travail. Vous êtes bien obligés d'en tenir compte désormais et d'adapter votre réforme.

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Nous ne sommes pas sur Twitter ou Facebook ! Nous essayons d'illustrer par divers exemples les raisons pour lesquelles nous voulons supprimer votre texte alinéa par alinéa. Nous sommes dix-sept à tourner en réunion, mais nous suivons tous attentivement le débat. Ceux qui ne sont pas là aujourd'hui sauront ce qui s'est passé et viendront reposer les questions auxquelles nous n'aurons pas obtenu de réponses.

Mme Motin nous a fait la grâce de nous expliquer comment fonctionnait la proratisation. Mais si nous en parlons, c'est que votre réforme introduit un dispositif qui va multiplier les cas particuliers par décret, ce qui, pour nous, est problématique.

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Monsieur Coquerel, je ne sais même pas s'il y a quelques centaines de salariés à temps partiel qui dépassent trois plafonds de la sécurité sociale. En revanche, il faut pouvoir tenir compte de la proratisation pour les salariés qui ont une activité à temps partiel afin de compléter leurs revenus, typiquement les agriculteurs. Madame Obono, de ce point de vue, la situation ne change pas. Les salariés qui ont exercé plusieurs activités sont aujourd'hui polypensionnés. En fonction des régimes, certains qui n'ont travaillé qu'une année valident plus que quatre trimestres, quand d'autres ont des conditions plus défavorables. Vous pouvez critiquer le capital, mais vos remarques n'apportent tout de même pas grand-chose sur la pluriactivité.

Avis défavorable.

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Vous avez argué d'une réforme de simplification, alors que ce n'est pas du tout le cas, puisque vous vous donnez les moyens, par le biais des décrets, de vous adapter à la complexité des cas. Nos remarques illustrent au moins qu'un des objectifs de votre réforme n'est pas atteint !

La commission rejette les amendements.

Puis elle est saisie des amendements identiques n° 7334 de M. Éric Coquerel et n° 7416 de Mme Bénédicte Taurine.

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Je vous remercie, monsieur le rapporteur, non pas de m'avoir répondu, mais d'avoir bien voulu échanger sur le sujet. Dans un bon système, la retraite serait estimée par rapport aux meilleurs salaires. Nous sommes pour le retour aux dix meilleures années, qui éviterait de pénaliser les gens travaillant à temps partiel. Votre adaptation est la preuve même du problème que pose la retraite par points, en prenant en compte l'ensemble de la carrière.

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Il peut y avoir des accidents professionnels, si bien que, même en fin de carrière, des salariés doivent compléter leurs revenus par des activités à temps partiel. Or, aujourd'hui, le calcul peut leur être défavorable, alors que le système par points est plus facile, fidèle et lisible. Je vous conseille vraiment d'examiner cette méthode sans a priori politique.

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Il y a un autre moyen, monsieur le rapporteur : le retour aux dix meilleures années ! À force d'avoir dérégulé le marché du travail, le temps partiel augmente. Vous avez dit quelque chose de profondément vrai, qui devrait vous pousser à vous interroger, s'agissant des fins de carrière en temps partiel. En demandant aux gens de travailler plus longtemps, sachant qu'un senior sur deux arrivera à l'âge de la retraite au chômage, vous aggravez la situation. Cela n'a rien d'idéologique : une pension calculée sur l'ensemble d'une carrière sera toujours moindre que sur les dix meilleures années.

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Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, chargé des retraites

Le tableau 7 de l'étude d'impact, page 117, montre en quoi il est plus intéressant que le calcul soit fait sur quarante-trois ans, plutôt que sur vingt-cinq. On voit ainsi l'effet particulièrement redistributif de la réforme, étant donné que les salariés au SMIC et ceux qui ont des salaires moyens voient leur pension progresser, alors que ceux qui ont des très gros salaires, supérieurs à 80 000 euros par an, voient leur pension diminuer. La direction de la sécurité sociale, qui a conçu les tableaux, ne sont pas soumis à des pressions politiques. Ils produisent des éléments objectifs. Ce ne sont pas des agents du Gouvernement, mais des fonctionnaires qui font bien leur boulot et vous donnent des éléments intéressants pour nourrir votre réflexion.

La commission rejette les amendements.

Elle examine ensuite les amendements identiques n° 7419 de M. Éric Coquerel, n° 7425 de Mme Danièle Obono et n° 7433 de Mme Bénédicte Taurine.

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Monsieur le secrétaire d'État, nous avons étudié très sérieusement votre étude d'impact ; le Conseil d'État a également dit ce qu'il en pensait. Le tableau 7 compare des pensions indexées sur l'inflation et d'autres sur les salaires ! Vous comparez des carottes et des pommes de terre ! Toute votre étude d'impact est de la même eau, pour essayer de nous démontrer que la situation va s'améliorer... Ne faites pas de cette étude d'impact, largement remise en question par le Conseil d'État, la référence pour répondre à nos questions !

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Si nous tournons en rond, c'est que vous avez détruit le peu de confiance que certains pouvaient avoir. Après deux ans de travail sur la question, nous dites-vous, aucun des modèles dont vous avez proposé des simulations ne résiste à une étude critique ! Le problème n'est pas tant les personnes qui ont réalisé les projections que l'orientation que vous avez donnée à celles-ci et sur laquelle vous vous fondez.

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Selon le rapport de la commission des finances du Sénat sur la politique fiscale de votre gouvernement, les cent plus gros contribuables ont gagné 1,7 million d'euros grâce à des réformes que vous disiez faire en direction des plus bas salaires. Comment voulez-vous que les gens croient que vous faites une réforme qui s'adresse à ceux qui en ont le plus besoin, comme les agriculteurs, alors que vous faites exactement l'inverse depuis que vous êtes au gouvernement ?

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Monsieur Coquerel, ce n'est pas une surprise, nos philosophies économiques divergent. Mais vous avez soulevé une vraie question, celle des seniors et de la fin de carrière. Comment mieux faire vieillir les Français au travail ? Faut-il organiser un départ progressif ? Si les corps sont plus usés à 60 ans qu'à 20 ans, on a aussi, à cet âge, une expérience à transmettre. Comment faire bénéficier les autres salariés de cette expérience, tout en limitant l'impact sur les corps ? Si j'entends la problématique du vieillissement du corps, je sais aussi, pour avoir des exemples précis dans mon entourage, que des gens peuvent mal vivre un départ brutal à la retraite, qu'ils voient comme une mort sociale. La question du temps partiel est également très importante. Nous devrons nous pencher sur tous ces sujets et engager les politiques nécessaires.

Avis défavorable aux amendements.

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Je remercie le secrétaire d'État de nous avoir renvoyés au tableau 7. Le calcul oublie un élément : la baisse du taux de remplacement, qui sera de 8 % pour un départ à 64 ans et de 18 % pour un départ à 62 ans. Les cas présentés dans le tableau sont, en réalité, perdants par rapport à la situation actuelle.

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Excellente intervention, monsieur Vallaud !

Monsieur le rapporteur, vous avez parlé de bien vieillir au travail. Mais, à partir du moment où l'on vieillit, on a le droit d'arrêter de travailler.

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Mais quand est-ce qu'on vieillit ? On vieillit tout le temps un peu.

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Selon votre définition de la société, la seule finalité sociale serait le travail. De notre point de vue, la société ne doit pas permettre de bien vieillir au travail, mais d'arrêter de travailler à un certain âge, afin que chacun puisse s'épanouir grâce aux loisirs ou à l'engagement associatif, qui peuvent d'ailleurs éviter cet effet de rupture sociale dont vous avez parlé. Mes deux grands-parents étaient ouvriers. Aucun ne m'a dit avoir trouvé dure la rupture ! L'un est mort six mois après sa retraite. Ils n'ont pas pu en profiter, parce qu'ils avaient travaillé jusqu'à 65 ans.

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Cher rapporteur, vous devriez être conseiller en communication ! Voilà un beau slogan : « apprendre aux gens à bien vieillir au travail ». C'est un résumé de la réforme assez flippant ! La vie se scinde en plusieurs moments : celui du travail, qui peut être épanouissant, mais aussi le temps de libération que représente la retraite. Et quand bien même, comment bien vieillir au travail sans prendre en compte les éléments de pénibilité, de maladies professionnelles, de décote, de travail partiel subi, qui obligent à cotiser encore plus longtemps ? On se croirait dans le monde des Bisounours ! Personne ne voudrait quitter son travail, mais y rester le plus longtemps possible, voire mourir à son poste. Je ne suis pas sûr que cela fasse un projet de société.

Quant au tableau 7, je pensais que ma lecture de la note de bas de page vous exonérerait de le citer de nouveau. Il est caduc ! Lisez plutôt : il est écrit que les paramètres ne sont pas pris en compte. Arrêtez de citer des tableaux à la con !

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Nous siégeons en commission depuis 16 heures lundi. Nous sommes en train de discuter de la modification du code rural et de la pêche maritime. Or nos échanges relèvent de la discussion générale. Nous travaillons en commission, et cela est bien normal, car nous devons à nos électeurs et à notre statut de député de travailler sérieusement. Je n'ai pas manqué une minute de réunion ! Mais nous ne cessons de débattre sur les mêmes sujets, sans jamais parler du fond ! C'est normal que l'on perde notre temps, mais à ce point... Je commence vraiment à saturer, aussi bien pour ce qui est des réponses du rapporteur et du secrétaire d'État, qui ne sont pas forcément dans le sujet, que des orateurs hors sujet. Recadrons-nous ! Nous le devons au peuple français.

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Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, chargé des retraites

Monsieur Jumel, vous ne deviez pas être très attentif tout à l'heure, quand j'ai expliqué que, pour faire fonctionner des modèles statistiques et étudier une variable, il fallait figer les autres. Le tableau 7 est un bon tableau, dont les données sont vérifiables par tous ceux qui ont l'habitude de faire un peu de statistiques. Même un samedi en fin de journée, il faut mesurer ses propos.

Monsieur Coquerel, je vous ferai la même réflexion. Nous ne mélangeons pas les pommes de terre et les carottes. C'est un tableau objectif : à gauche, l'évolution actuelle des salaires portés au compte sur la base de l'inflation ; à droite, notre proposition dans le système universel, avec des points qui évolueront avec les salaires, sur la base d'un indicateur qui vous a fait réagir pendant près de 2 heures. La comparaison est en tout point juste.

La commission rejette les amendements.

Elle passe à l'examen des amendements identiques n° 7436 de M. Éric Coquerel, n° 7442 de Mme Danièle Obono et n° 7587 de Mme Bénédicte Taurine.

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Monsieur le secrétaire d'État, j'entends bien vos leçons. Vous considérez une situation donnée avec un âge de départ à la retraite de 62 ans. Mais, du fait de la baisse du taux de remplacement, les gens vont perdre de l'argent. Imaginons qu'on oblige les gens à travailler jusqu'à 85 ans, peut-être que, pendant un an, ils profiteraient de leur vie, en touchant une très forte pension, mais seulement un an, soit pendant beaucoup moins longtemps que dans le système actuel. Votre étude d'impact, tout comme votre système, ne tient pas compte de l'âge du départ à la retraite. Or nous savons tous qu'il va être repoussé au-delà des 65 ans !

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Le secrétaire d'État vient de défendre l'objectivité de ses tableaux. Mais, comme l'a fait remarquer Sébastien Jumel, dans le tableau 7, il ne s'agit pas de cas-types traduisant l'effet du système universel dans son ensemble. On ne peut donc pas en déduire le montant final de la pension. Or, monsieur Mattei, c'est ça la réponse que les Françaises et les Français attendent ! Ils nous ont élus pour que nous contrôlions l'action du Gouvernement et que nous garantissions l'intérêt général. Mais, au bout de deux ans de dialogue, de débats et de simulations, votre majorité est incapable d'apporter ces réponses. On pousse une majorité de salariés à faire le grand saut vers un inconnu, dont les éléments objectifs montrent qu'il sera moins-disant. C'est pourquoi nous ne vous croyons pas.

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Les interventions ne concernant pas le sujet, avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Puis elle adopte l'article 14 sans modification.

Article 15 : Dispositions relatives à la transmission pour les salariés et assimilés

La commission examine les amendements de suppression n° 581 de M. Thibault Bazin, n° 704 de M. Pierre Dharréville, n° 7590 de M. Éric Coquerel, n° 7596 de Mme Danièle Obono, n° 7604 de Mme Bénédicte Taurine, n° 21098 de M. Boris Vallaud et n° 22450 de Mme Constance Le Grip.

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L'article est important, puisqu'il a trait à la période transitoire permettant la convergence des taux et des assiettes des régimes de retraite de base et complémentaire aujourd'hui applicables aux salariés et assimilés vers les taux et assiettes applicables dans le cadre du système universel, qui semble ne pas vraiment l'être, soit dit en passant. Il est regrettable qu'un sujet aussi important soit réglé par une ordonnance. En effet, ces questions suscitent de l'inquiétude. C'est à la représentation nationale d'assumer des choix en matière de convergence, qui ont des incidences financières et supposent des choix de société. Vous nous avez prouvé hier soir, sur un autre sujet, que vous pouviez éviter les ordonnances. Faisons en sorte, d'ici à la séance, d'en éviter une autre.

Par ailleurs, vous ne nous avez toujours pas répondu : la conférence de financement travaille-t-elle, comme nous, le samedi ou ses travaux n'avancent-ils pas trop ? J'espère que la conférence de financement est en marche...

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L'article 15 habilite le Gouvernement à produire des ordonnances sur les assiettes et les taux de cotisations sociales des régimes complémentaires dans la période transitoire. Il comporte plusieurs éléments importants : le taux de cotisation sociale, fixé à 28,12 % dans le système que vous proposez, implique une convergence des taux et des assiettes qui diffèrent aujourd'hui entre les régimes de retraite ; l'ordonnance va également modifier le régime fiscal et social des dispositifs de retraite supplémentaire pour les hauts salaires, et nous craignons que cela n'incite à la capitalisation pour la tranche salariale qui ne sera plus soumise à cotisation ; enfin, le manque à gagner en cotisations pour les régimes complémentaires s'élèvera à 4 milliards d'euros par an en 2025.

Vous nous dites que les ordonnances vont vous donner le loisir de consulter sur tous ces sujets. Je me permets de vous faire observer qu'en général, c'est l'inverse : on consulte avant de produire des ordonnances. Vous prenez les choses à l'envers, et nous nous opposons à votre volonté de légiférer ainsi. Votre texte prévoit vingt-neuf ordonnances pour régler des points précis du futur système, et c'est insupportable !

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Le mot « ordonnance » est peu compatible avec la démocratie parlementaire – malheureusement, la Ve République en est assez loin –, et avec la délibération collective d'une assemblée. Non seulement votre projet de loi met à bas et transforme radicalement le système de retraite, qui est un des deux piliers de notre patrimoine social, mais il le fait par la voie d'ordonnances, y compris sur des points qui seront réglés après que nous l'aurons voté, en particulier à l'issue de la conférence de financement des retraites qui s'achèvera en avril. Nous ne pourrons donc pas voter cette loi en connaissance de cause. Pour toutes ces raisons, nous demandons à supprimer l'article 15.

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L'article 15 donne habilitation au Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures concernant la réduction progressive des différences d'assiette et de taux de cotisation des différents régimes de retraite complémentaire, ainsi que les conditions et les limites dans lesquelles les parts de cotisation seront dues respectivement par les employeurs et les salariés. Nous avons bien compris qu'il s'agissait de favoriser la capitalisation, puisque ce système va rendre plus attractifs les dispositifs de retraite supplémentaire pour les salaires compris entre 3 et 8 PASS. Nous nous y opposons, et nous aimerions savoir pourquoi vous souhaitez favoriser ce type d'épargne retraite.

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Dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d'État a souligné « que le fait, pour le législateur, de s'en remettre à des ordonnances pour la définition d'éléments structurants du nouveau système de retraite fait perdre la visibilité d'ensemble qui est nécessaire à l'appréciation des conséquences de la réforme ». Suivant cet avis, nous demandons la suppression de l'article 15.

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Nous sommes face à un texte à trous, qui dessaisit le Parlement à de nombreuses reprises – vingt-neuf ordonnances sont prévues, et cent décrets. S'agissant d'un texte de loi aussi fondamental, sur un sujet qui touche l'ensemble des Français, cela est tout à fait désobligeant de la part du Gouvernement.

Au-delà de l'article, pendant que nous discutons en commission spéciale, par exemple de la revalorisation des traitements des enseignants et des chercheurs, nous apprenons que les différents scenarii présentés dans le cadre des négociations entre M. Blanquer et les organisations syndicales, n'ont finalement rien à voir avec les montants de revalorisation qui avaient été annoncés par le ministre lui-même devant le Parlement. Ils prévoient une augmentation de l'ordre de 200 millions d'euros chaque année, avec des primes qui seraient versées à hauteur de 50 à 150 euros aux enseignants des échelons 2 à 6, soit 25 à 30 % des effectifs.

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À mon tour, je souligne l'extrême générosité avec laquelle le Gouvernement a cru bon de recourir aux ordonnances pour cette réforme présentée comme très importante : pas moins de vingt-neuf ordonnances sur soixante-cinq articles. Si l'on y ajoute la mise en oeuvre de la procédure accélérée et le caractère extraordinairement lacunaire des perspectives financières souligné par le Conseil d'État, qui nous met en présence d'un texte à trous dépourvu de son volet financement, nous déplorons une méthode qui n'est pas du tout respectueuse de l'institution parlementaire et qui nuit très clairement à la lisibilité d'ensemble de cette réforme.

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Nous avons d'abord défini les principes généraux de la réforme, puis les catégories professionnelles concernées, et ensuite le système cible au regard du mode de calcul de la pension et de répartition des taux de cotisation entre employeur et salarié. Nous en sommes maintenant à l'organisation de la transition vers cet objectif. L'article 15 concerne les dispositions relatives à la transmission pour les salariés. Il « habilite le Gouvernement à prévoir par voie d'ordonnance les transitions nécessaires à la mise en place du système universel, s'agissant des travailleurs salariés et assimilés ».

Pour l'essentiel, la modification des cotisations se fera à la marge, car le taux de nombreux salariés se trouvent déjà autour du taux-cible évoqué. Mais il s'agit aussi d'assurer une montée progressive des niveaux de cotisations pour les salariés du secteur public affiliés à l'Institut de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques (IRCANTEC) ainsi que la situation spécifique de certains publics – nous les étudierons un par un, et les enseignants ne sont pas du tout concernés.

Avis défavorable aux amendements.

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La transition recouvre des enjeux très importants, qui dépassent la simple question du calage juridique ou financier. Elle est susceptible de menacer la cohésion nationale et intergénérationnelle du fait des distorsions et inégalités qu'elle introduira entre les différentes générations qui cohabiteront durablement sur le marché du travail – les personnes nées avant et après 1975, et celles nées à partir de 2004. Nous avons bien du mal, nous parlementaires, à en mesurer l'impact pour vérifier que les choses iront dans le bon sens, mais les employeurs pourraient en profiter pour adapter leur politique salariale en fonction de la génération à laquelle les salariés appartiennent. Il est important que cette question soit mise sur la table et non laissée au soin d'ordonnances, afin que l'on puisse en débattre d'ici la séance publique.

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Compte tenu des sommes financières en jeu et du nombre de personnes concernées, on ne peut pas réduire la transition à un problème technique qui ne regarderait pas la représentation nationale. Par rapport à tous les textes que nous sommes régulièrement amenés à examiner, notamment les projets de loi de finances (PLF) et projets de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), celui-ci n'est pas suffisamment technique pour qu'il nous soit demandé de fermer les yeux et d'attendre. Il revêt des enjeux économiques, sociaux et budgétaires considérables qui, à ce stade, sont impossibles à cerner.

Ce matin, nous avons discuté de la transition pour les rémunérations comprises entre 3 et 8 PASS, et les explications de M. le rapporteur ne nous ont pas convaincus. Elles ont cependant laissé penser qu'il est peut-être mieux informé par le Gouvernement que le reste de la représentation nationale. À cet égard, il ne me semble pas anormal de revendiquer une égalité de traitement entre parlementaires. Or une telle égalité n'existe pas à l'heure actuelle, et nous nous opposons avec vigueur à ce qui nous apparaît comme une obstruction au débat parlementaire.

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J'ai déjà dit que vous aviez fait voeu d'allégeance et d'obéissance ; ici, on pourrait parler de voeu d'abstinence. L'article 15 n'est pas une paille ! Il habilite le Gouvernement à prévoir, sur une période transitoire de vingt ans, « la convergence des taux et des assiettes des régimes de retraite de base et complémentaire ». Pour tenir compte de l'abaissement du plafond de cotisation, l'ordonnance pourra également « modifier les règles d'assujettissement à cotisations et contributions sociales ainsi qu'à l'impôt » ; enfin, elle pourra prévoir les conditions dans lesquelles est assuré le financement des régimes de retraite complémentaire. C'est un chèque en blanc laissé au Gouvernement, l'effacement du Parlement ! Elle est là, l'obstruction et la dévalorisation du Parlement dont vous nous accusez ! Vous êtes pris en flagrant délit. Les amendements que nous avons déposés, ce n'est rien par rapport au renoncement que vous incarnez. Le mesurez-vous ? Avez-vous compris que, même vous, vous n'êtes pas respectés à travers cet article ? Ce n'est pas possible !

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Nous n'avons pas de leçons à recevoir de vous !

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J'en ai malgré tout à vous donner ! Vous êtes des parlementaires godillots !

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Nous ne sommes pas là pour nous faire insulter ; nous passons à l'orateur suivant !

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Par nature, comme bon nombre de parlementaires, je ne suis pas favorable aux ordonnances par lesquelles le pouvoir législatif délègue, sur des questions importantes, une partie de son pouvoir à l'exécutif. Au cours de mon expérience de parlementaire, j'ai eu à discuter de grands textes fondamentaux éthiques et bioéthiques ou sociétaux, mais aussi techniques, telle la réforme de la taxe professionnelle sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy. Nous procédons aujourd'hui à une réforme qui va faire évoluer les fondamentaux de la retraite telle que la connaissaient nos concitoyens depuis 1945. À mon sens, nous traitons son aspect politique lorsque nous abordons les carrières longues ou hachées, les petites retraites ou encore la pénibilité. L'article 15 me paraît être une nécessité technique ; en tant que législateur – je parle ici en mon nom propre et au nom du groupe UDI, Agir et Indépendants –, je considère que nous pouvons la déléguer au pouvoir exécutif.

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L'article 15, que vous essayez de faire passer pour un article technique, est un article situé au milieu du triangle des Bermudes que représente votre réforme par points. Il s'agit, par exemple, de régler par ordonnance la question de l'acquittement des cotisations qui excèdent le plafond prévu par l'article 13 du projet de loi pour les régimes de retraite complémentaire. Nous sommes en plein dans ce que je dénonçais tout à l'heure : du fait de l'abaissement des cotisations pour les revenus les plus élevés, des sommes importantes devront être réglées aux pensionnés ; comme vous ne savez pas, à l'heure actuelle, où vous allez les trouver, vous renvoyez la question à une ordonnance, en prétendant avec toupet qu'il s'agit d'un problème technique. Que vous légifériez par ordonnance montre que vous ne savez pas comment vous dépêtrer de cet engrenage dans lequel vous avez mis le doigt. Ces périodes de transition, qui vont coûter des dizaines de milliards d'euros à notre pays, mieux vaut en effet qu'elles ne passent pas par le Parlement si vous voulez pouvoir appliquer votre loi. L'article 15 est crucial.

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Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, chargé des retraites

Monsieur Bazin, je ne peux pas vous dire si la conférence sur l'équilibre et le financement des retraites se réunit aujourd'hui ou demain. Comme je vous l'ai dit précédemment, c'est Jean-Jacques Marette qui a été chargé de la présider. Toutefois, je peux vous donner quelques éléments supplémentaires à propos des deux réunions qui auront lieu dans les semaines qui viennent.

Un premier groupe de travail se réunira pour travailler à l'approfondissement de la trajectoire du scénario de référence établi par le COR, selon cinq axes : l'analyse rétrospective sur la base des études d'impact de 2010 et 2014 ; les écarts constatés entre les projections effectuées par le COR dans ses rapports de juin 2016 et de novembre 2019 ; l'évaluation de l'impact sur l'équilibre du futur système de l'addition des quarante-deux régimes de retraite ; la nécessité ou non de réactualiser les dernières données du COR à la lumière des évolutions des deux ou trois derniers mois ; les conséquences de nos travaux sur le scénario de référence. Cette réunion aura lieu le 18 février.

Le second groupe, qui doit travailler sur la gouvernance et les outils de pilotage, se réunira le 20 février. Il doit se pencher sur les dispositifs prévus au titre IV du projet de loi, dont j'espère que nous aurons l'occasion de débattre ; établir des comparaisons entre les régimes actuels – Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (CNAV), AGIRC-ARRCO, IRCANTEC et Caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL) ; effectuer des comparaisons internationales. Ce groupe consacrera enfin une séquence aux critères de soutenabilité et aux réserves, en reprenant les éléments des projets de loi organique et ordinaire et les études comparatives que je viens d'évoquer, à la fois entre régimes et aux échelles nationale et internationale.

Deux belles séquences de travail sont donc à venir. Je rappelle que trois séquences sont prévues, et que le 6 avril aura lieu une nouvelle assemblée plénière.

La commission rejette les amendements.

Elle examine ensuite les amendements identiques n° 7607 de M. Éric Coquerel, n° 7613 de Mme Danièle Obono et n° 7810 de Mme Bénédicte Taurine.

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Nous n'avons toujours pas obtenu de réponse aux questions que nous avons posées au cours de la discussion précédente. Cela ne m'étonne pas, car nous avons pointé, au sein des groupes d'opposition, le danger de légiférer par voie d'ordonnance sur des questions dont la majorité et le Gouvernement ne savent même pas aujourd'hui comment ils les règleront.

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L'amendement tend à supprimer le premier alinéa de l'article 15, par lequel le Gouvernement est habilité à légiférer par voie d'ordonnance sur un certain nombre de mesures. Comme l'a dit notre collègue Sébastien Jumel tout à l'heure, c'est la crédibilité même de nos travaux au sein de cette commission qui est en cause : à quoi bon passer toutes ces heures à examiner le problème dans tous les sens – je crois, pour ma part, que c'est utile sur un sujet aussi complexe et important –, si c'est pour se dessaisir au final ? S'agissant d'un sujet aussi fondamental que l'ouverture des retraites à la capitalisation, le principe même de l'ordonnance me paraît tout à fait problématique.

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Cette habilitation n'a pas d'autre objet que la réduction très progressive des écarts sur vingt ans. Quel est le public visé ? Vingt millions de salariés sont déjà très proches de la cible. Trois millions de salariés contractuels affiliés à l'IRCANTEC ont un taux de cotisation situé autour de 10-10,5 % ; il faut qu'ils passent à 11,25 %, ce qui représente une augmentation de 0,75 à 1,25 point sur vingt ans. Trois millions de métiers très spécifiques ont des différences de taux de cotisation employeur ou de répartition entre la part patronale et la part salariale. Si nous devions aborder une par une toutes ces catégories, nous perdrions de vue le rôle du Parlement, qui est de se préoccuper de la globalité du système et d'affirmer une volonté de transition très progressive. Nous avons l'ambition de créer un système universel, et surtout pas de modifier brutalement la situation de ceux dont la carrière professionnelle est en cours. Une approche progressive, cela me paraît la base d'une politique adaptée pour changer sans bouleverser.

Avis défavorable aux amendements.

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Vous allez tout de même modifier des taux de cotisation, ce qui va avoir un impact concret. Vous nous demandez de vous laisser faire, et c'est cela que nous n'acceptons pas. J'ai consulté l'étude d'impact. À la page 385, concernant l'article 15, le point n° 4 « analyse des impacts des dispositions envisagées » tient en deux lignes : « l'analyse précise des conséquences attendues de la mesure sera effectuée dans la fiche d'impact de l'ordonnance prise sur le fondement de la présente habilitation ». Vous nous demandez de nous prononcer sur cette base ! Comprenez que nous soyons en désaccord avec cette perspective.

Monsieur le secrétaire d'État, vous nous indiquez des dates de réunions et vous nous dites qu'il y aura un rendu le 6 avril. Revenez nous voir le 6 avril ! Faites les choses dans l'ordre ! Aujourd'hui, vous n'êtes pas prêts.

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Je remercie M. le secrétaire d'État d'avoir répondu aux questions posées par Thibault Bazin et Éric Woerth à propos du calendrier de travail connu à ce stade de la conférence de financement. Je veux, moi aussi, au nom des Républicains, m'étonner solennellement de ce calendrier, qui vient percuter de plein fouet notre propre calendrier d'examen parlementaire. Nous sommes censés débuter l'examen de ce texte en séance publique le 17 février, et l'achever par un vote solennel en séance le 3 mars. Ce calendrier est assez abracadabrantesque ; il fait peu de cas du respect que l'on doit à l'institution parlementaire et, partant, aux Françaises et aux Français qui se posent des questions. Nous le répétons calmement, sans aucune agressivité, la logique et le bon sens auraient commandé de changer le calendrier et la méthode, et de faire travailler l'Assemblée nationale autrement.

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Je remercie M. le secrétaire d'État de nous avoir donné le calendrier mais, en effet, que fait-on là ? De quoi parle-t-on ? On aurait pu ajouter le calendrier de travail sur l'emploi des seniors, celui sur la pénibilité, et les résultats de la mission Fragonard sur les droits familiaux de retraite. Vous faites tout n'importe comment ; on se croirait dans un jeu de Mikado. Revenez quand vous serez prêts ! Cela nous épargnerait beaucoup de peine, car nous passons notre temps à poser des questions sans obtenir de réponses. À force de les reformuler jusqu'à trois fois, on s'épuise. Que le Gouvernement cesse de faire de l'obstruction parlementaire !

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Monsieur le rapporteur, vous nous expliquez qu'il n'est pas souhaitable d'entrer dans le détail technique. Ce n'est pas ce que nous demandons ! Le problème que nous pointons, c'est que nous sommes censés accepter votre période de transition sans savoir comment elle va être financée, alors que nous savons qu'elle va coûter beaucoup d'argent – plus de 70 milliards d'euros, vous ne le contestez pas. Étonnamment, alors que l'équilibre financier est votre mantra, vous nous expliquez ici que ce n'est pas grave de ne pas savoir comment vous allez procéder. Ce n'est pas un choix technique, mais bien un choix politique. En proposant cette habilitation à prendre des mesures par voie d'ordonnance, vous dessaisissez le Parlement d'un droit fondamental et de sa responsabilité – la nôtre – vis-à-vis des Françaises et des Français.

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L'article 15 déroule tout de même, dans ses alinéas 2, 3, 4 et 5, un fil rouge qui fournit des éléments précis sur ce que comporteront les ordonnances. Peut-être faut-il rappeler ce qu'est une ordonnance, car je me demande parfois si nous vivons dans la même temporalité. Il ne s'agit pas d'ordonnances de droit divin ou des ordonnances de Charles X, mais bien des ordonnances constitutionnelles prévues par l'article 38 de la Constitution de la Ve République. Ce n'est pas le fait du prince. Elles impliquent un vrai respect du Parlement, et elles seront d'ailleurs ratifiées. Cela s'appelle une procédure législative par délégation, au terme de laquelle nous serons amenés à intervenir pour ratifier. J'ai l'impression que nous ne parlons pas du même régime politique. Relisez précisément l'article 15, tout y est très clair, et nous pourrons enfin avancer réellement dans notre travail.

La commission rejette les amendements.

Puis elle est saisie des amendements identiques n° 7813 de M. Éric Coquerel, n° 7819 de Mme Danièle Obono et n° 7828 de Mme Bénédicte Taurine.

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N'en déplaise à notre collègue Hammouche, ce n'est pas parce qu'on ne vit pas sous le régime de Charles X qu'on ne peut pas considérer le recours aux ordonnances comme pas tout à fait démocratique, et même pas digne d'un régime parlementaire. C'est surtout que vous voulez détruire un système qui était assez simple et qui, s'il n'était pas géré de la manière la plus démocratique qui soit – pour ma part, je me serais bien passé des organisations patronales –, assurait au moins la participation des partenaires sociaux au processus de décision. Vous transférez ces prérogatives à l'État, et vous le faites de la manière la moins démocratique qui soit, c'est-à-dire en faisant peser sur le Parlement la contrainte de la règle d'or, qui fera des déficits et de ce que vous appelez le « coût du travail » l'alpha et l'oméga de la fixation des pensions de retraite. En outre, vous prévoyez de contourner la représentation nationale en recourant aux ordonnances, et même en disant aux parlementaires qu'ils n'auront pas à connaître la fin du film avant de légiférer à son sujet, puisque la conférence de financement est loin d'avoir livré les conclusions de ses travaux.

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M. Hammouche, s'emballant, en est déjà arrivé à l'alinéa 6, mais nous sommes très attachés à examiner le texte dans l'ordre, alinéa par alinéa, et nous n'en sommes qu'à l'alinéa 2. Celui-ci dispose que c'est « par dérogation à l'article 13 de la présente loi », qui lui-même portait sur la question des plafonds, que le Gouvernement est habilité à prendre par voie d'ordonnance un certain nombre de mesures. Nous sommes donc tout à fait fondés à demander que l'alinéa en question soit supprimé.

Pour vous, il ne s'agit que de déléguer – c'est normal, on le fait depuis des décennies. Pour notre part, nous considérons que ce n'est pas normal, qu'il s'agit d'un chèque en blanc sur des sujets qui relèvent non pas de considérations techniques mais de véritables choix politiques.

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L'article 13 régit le système futur. Il est donc nécessaire d'y déroger pendant la phase de transition entre le système actuel et le système futur. Par ailleurs, comme l'a expliqué Brahim Hammouche, cette transition s'effectuera dans un cadre défini. Au demeurant, imaginez que le Parlement doive déterminer, tous les ans, au 1er janvier, l'évolution du taux de cotisation de chaque profession, normalement fixé par décret, pendant vingt ans !

Avis défavorable.

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Nous avons un petit désaccord sur la portée de ces dispositions. Je perçois, en effet, une forme de banalisation de la procédure des ordonnances. De fait, depuis 2017 au moins, il y a été recouru de façon répétée. Et, en l'espèce, sur les soixante-cinq articles que compte le texte – auxquels s'ajoutent les cinq articles du projet de loi organique – vingt-neuf renvoient à une ordonnance. C'est considérable ! Qui plus est, le Gouvernement ne fournit pas d'éléments suffisamment précis sur ses intentions. On ne peut pas banaliser ainsi cette pratique. Faut-il rappeler que nous avons été élus pour écrire la loi ? Au prétexte de laisser à Emmanuel Macron tout le loisir de mettre en oeuvre comme il l'a imaginé l'une de ses promesses de campagne, vous usez d'une méthode qui marque un nouvel abaissement du Parlement, dans un cadre institutionnel où sa place est déjà fort restreinte.

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Monsieur le rapporteur, tout d'abord, tout cela est rendu nécessaire par ce projet de loi : vous complexifiez tout. En fait de régime universel, vous êtes en train d'instaurer, comme le Président de la République l'a lui-même reconnu, autant de régimes qu'il y a de Français. C'est donc à la majorité qu'incombe la responsabilité de cette situation. Ensuite, vous ne pouvez pas affirmer qu'il s'agit de détails qu'il est normal de régler par ordonnance. Encore une fois, nous parlons de la période de transition, pendant laquelle des cotisations ne rentreront plus : cela représente des dizaines de milliards d'euros ! Comment peut-on légiférer par ordonnance lorsque de telles sommes sont en jeu ?

La commission rejette les amendements.

Elle examine ensuite l'amendement n° 22644 du Gouvernement.

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Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, chargé des retraites

Cet amendement a pour objet de permettre aux régimes d'affiliation d'utiliser, s'ils le souhaitent, pendant la période de convergence des barèmes de cotisation des salariés, leurs réserves financières afin de faciliter la convergence vers le barème de cotisation du système universel de retraite en finançant une prise en charge partielle des cotisations. Les régimes qui se voient offrir cette possibilité sont l'AGIRC-ARRCO, l'IRCANTEC pour les salariés de droit public ainsi que les caisses autonomes des salariés experts-comptables, officiers ministériels et avocats.

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Monsieur Coquerel, le taux de cotisation à l'IRCANTEC, par exemple, est passé de 10,5 % à 11,25 %. Faut-il vraiment que la loi définisse ce taux chaque année pendant vingt ans ? Est-il vraiment nécessaire que l'Assemblée nationale détermine la manière dont l'assiette et le taux de cotisation des commissaires-priseurs judiciaires ou des artistes-auteurs, par exemple, doivent évoluer ? Il me semble qu'un tel niveau de détail ne relève pas du Parlement.

Quant à l'amendement du Gouvernement, j'y suis évidemment favorable.

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J'en apprends chaque jour un peu plus ! Alors que les barreaux et toutes les professions libérales sont vent debout contre la réforme, M. le secrétaire d'État nous glisse, l'air de rien, un amendement qui vise à renvoyer à une ordonnance la définition des modalités et conditions selon lesquelles on va piquer dans les réserves des caisses autonomes. C'est un truc de fou !

Quant au calendrier que vous avez eu la gentillesse de nous communiquer, monsieur le secrétaire d'État, il confirme que, pendant que nous discuterons dans l'hémicycle, l'essentiel se jouera ailleurs. Arrêtez de délirer en prétendant que l'obstruction affaiblit le Parlement : c'est vous qui l'abaissez !

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Il s'agit bien, ici, de la manière dont les réserves de ces régimes seront ponctionnées pour financer « des taux d'appel de cotisation inférieurs à 100 % ». Cette question ne peut pas être réglée par ordonnance car, là encore, ce ne sont pas de petites sommes. En outre, je rappelle qu'il est impossible, me semble-t-il, d'utiliser les réserves de certaines caisses, car elles ont été constituées par tous les salariés et pas uniquement par ceux qui relèvent d'elles.

Par ailleurs, que vous soyez contraint de nous proposer un tel amendement témoigne, une fois de plus, de ce que vous construisez une usine à gaz. Je le dis sans aucun mépris mais j'ai le sentiment, quand je regarde le visage de nos collègues du groupe La République en Marche lors des échanges que nous avons, qu'ils ne comprennent pas plus que beaucoup de Français ce qui est en train de se jouer. De fait, vous complexifiez un système qui fonctionnait depuis des décennies – certes, de manière insatisfaisante parce que plusieurs réformes sont revenues sur des acquis sociaux –, qui plus est en reculant l'âge de départ à la retraite et en diminuant le taux de remplacement. Vous n'y arriverez pas, chers collègues !

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Il me serait agréable que nos collègues de l'opposition, en tout cas certains d'entre eux, ne déduisent pas de leur incompréhension feinte une prétendue incompréhension de la majorité. Il va de soi que le pilotage du système de transition durant les vingt années à venir implique impérativement qu'on laisse aux partenaires sociaux la possibilité d'utiliser les réserves de ces caisses. De fait, les ordonnances de l'article 15 ont surtout pour objet, comme la plupart des autres ordonnances prévues dans le projet de loi, non pas de laisser des trous, mais de faire de la place aux partenaires sociaux et à la concertation. En l'espèce, il est très important que, pour chaque métier, ceux-ci puissent discuter, organisme de gestion par organisme de gestion et caisse par caisse, de l'aménagement de la période de transition, et qu'ils aient la possibilité – c'est l'une de leurs revendications – d'utiliser éventuellement leurs réserves. Cela, la majorité l'assume.

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Permettez-moi de vous lire un petit extrait du Contre-projet de réforme des retraites de La France insoumise : « Mobiliser les réserves immédiates. [...] Des sommes sont d'ores et déjà disponibles et inemployées. Les réserves financières entreposées dans les différents régimes spécifiques de retraite et dans le Fonds de réserve pour les retraites représentent un stock de 130 milliards d'euros. » Nous avons bien compris, chers collègues de La France insoumise, que vous n'aviez demandé l'avis de personne. Sinon, vous auriez eu le courage de vos idées et vous auriez déposé des amendements pour proposer cette solution au lieu de proposer de supprimer le renvoi à une ordonnance. Nos collègues du groupe Les Républicains, par exemple, ont déposé des amendements pour que l'âge légal de départ à la retraite soit fixé, comme ils le souhaitent, à 64 ans puis à 65 ans. Vous n'avez pas le courage de vos idées ; vous ne faites que de l'obstruction, point !

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Je tiens également à m'insurger, au nom du groupe Les Républicains, contre cet amendement du Gouvernement. Nous avons déjà indiqué à plusieurs reprises à quel point nous déplorions le recours, que nous qualifions d'abusif, à la procédure des ordonnances dans ce texte aux enjeux financiers et sociétaux si importants. Cet amendement, qui étend le champ de l'ordonnance de l'article 15, suscite d'autant plus notre suspicion qu'il pourrait offrir une plus grande souplesse dans l'utilisation des réserves des différents régimes. Nous y sommes donc défavorables.

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Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, chargé des retraites

Si le Gouvernement souhaite étendre l'habilitation, c'est pour offrir une option et en aucun cas pour contraindre qui que ce soit. Il suffit de lire le libellé de l'amendement : il ne peut pas instiller le doute dans l'esprit d'une personne de bonne foi. Il s'agit de permettre aux caisses concernées, si elles le souhaitent, d'utiliser leurs réserves, et ce pour aider les salariés qui pourraient, pendant la période de transition qui durera vingt ans, devoir faire face à une augmentation de leurs cotisations. Encore une fois, nous offrons une possibilité, que les caisses pourront utiliser ou non.

La commission adopte l'amendement.

Elle est ensuite saisie des amendements identiques n° 7838 de M. Éric Coquerel, n° 7848 de Mme Danièle Obono et n° 7866 de Mme Bénédicte Taurine.

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Ce dispositif n'est pas fait pour les salariés, monsieur le secrétaire d'État ; il doit permettre que le produit des cotisations qu'ils ont acquittées puisse leur être versé sous forme de pension parce que vous allez baisser les cotisations dans les années à venir. Cette mesure est donc bien due à la transformation que vous opérez ; elle n'est pas en faveur des salariés. Vous faites passer cet amendement parce que vous ne savez pas où aller chercher l'argent.

Madame Motin, il faut lire l'ensemble de notre contre-projet. Tout d'abord, nous ne nous arrêtons pas aux réserves que vous avez mentionnées : nous évoquons également les 52 milliards d'euros d'exonérations sociales qui ne servent pratiquement à rien et dont on pourrait mobiliser une partie, les emplois à créer qui permettraient de faire rentrer des cotisations... Ensuite, il y a une différence entre le fait de mobiliser les fonds de réserve pour permettre aux salariés de partir plus tôt à la retraite avec des pensions plus élevées et le fait de les mobiliser dans le cadre de la destruction massive à laquelle vous vous livrez, en reculant l'âge de la retraite et en abaissant les pensions. Pardonnez-moi, mais la finalité n'est pas la même.

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Madame Motin, si vous avez pu lire notre contre-projet, c'est que nous l'avons imprimé et diffusé en invitant tout le monde à en prendre connaissance. Il est donc curieux de prétendre que nous aurions honte de nos propositions. Et puisque l'alinéa 3 de l'article 15 a trait aux régimes de retraite supplémentaire, j'ajoute que, dans notre contre-projet, il est inutile de favoriser ces régimes, car nous proposons que les salariés perçoivent une retraite décente. Je vous invite à lire l'ensemble de nos propositions, qui sont cohérentes.

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Le Gouvernement a essayé de faire passer un amendement en douce : ni vu ni connu, je t'embrouille ! Cela dit, je constate qu'il y a deux poids deux mesures, car les propositions que nous avons faites pour aller chercher de l'argent ailleurs afin de financer, le cas échéant, les retraites n'ont pas été incluses dans le périmètre. Je suis donc étonné par la méthode. Par-dessus le marché, je le répète, je ne crois pas que cette question puisse être réglée par ordonnance ; elle mérite une véritable discussion. Là encore, nous élargissons la marge de manoeuvre du Gouvernement dans un domaine sur lequel nous n'aurons aucune prise.

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Puisque nous n'avons pas obtenu de réponse à notre question, je la réitère : pourquoi le Gouvernement n'a-t-il pas inclus la question des régimes de retraite supplémentaire dans le dialogue, la concertation qui s'est déroulée au cours des deux dernières années ? Si tel avait été le cas, nous aurions pu débattre ici des cas-types élaborés sur le fondement de ces échanges. En fait, vous avez passé deux ans à faire des tableaux sans mener une véritable concertation, puisque la majorité des organisations syndicales vous ont dit que votre projet ne faisait pas l'affaire. Le fait de recourir à des ordonnances signe votre échec ; si nous tournons en rond aujourd'hui, la responsabilité vous en incombe.

La commission rejette les amendements.

Puis elle examine les amendements identiques n° 7880 de M. Éric Coquerel, n° 7888 de Mme Danièle Obono et n° 7903 de Mme Bénédicte Taurine.

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Il s'agit toujours de la même problématique, qu'a rappelée M. Jumel à propos de l'amendement que vous avez eu le toupet de faire passer avec la mauvaise foi qui vous caractérise, monsieur le secrétaire d'État.

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Un député du groupe la République en marche

Vous pouvez parler !

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Ah oui, je peux parler de la mauvaise foi du secrétaire d'État. Du reste, le Conseil d'État est manifestement du même avis, même s'il le dit en d'autres termes, en ce qui concerne l'étude d'impact.

Cet amendement a, là encore, pour objet de dénoncer la manière dont le Gouvernement entend gérer par ordonnance l'écart entre l'acquittement des cotisations et leur versement.

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Il s'agit de supprimer l'alinéa 4 de l'article 15, qui vise à autoriser le Gouvernement à légiférer par ordonnance « afin de prévoir l'aménagement d'un régime fiscal et social favorisant les versements des salariés et de leurs employeurs dans le cadre de dispositifs de retraite supplémentaire ». N'ayant toujours pas obtenu de réponse, je réitère notre question : pourquoi pensez-vous qu'il faille favoriser ces dispositifs délétères pour la stabilité du système lui-même et l'ensemble de l'économie ?

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission rejette les amendements.

Elle est ensuite saisie des amendements identiques n° 8161 de M. Éric Coquerel, n° 8168 de Mme Danièle Obono et n° 8366 de Mme Bénédicte Taurine.

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Il s'agit ici de supprimer l'alinéa 5 de l'article 15, qui traduit la même volonté de légiférer par ordonnance que les alinéas précédents.

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Si nous tournons en partie en rond, c'est parce que nous n'obtenons aucune réponse. Dès lors que vous demandez au Parlement de se dessaisir de son pouvoir de légiférer au profit du Gouvernement, la moindre des choses serait que celui-ci explique en quoi la logique de son action justifie le recours à cette procédure. Pourquoi voulez-vous favoriser la capitalisation alors qu'elle déséquilibre le système ?

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Puisque nous arrivons au terme de notre réunion et que certains Français suivent nos travaux, je voudrais rappeler que, s'agissant de la méthode, qui a été attaquée tout à l'heure, le Conseil d'État, auquel on s'est beaucoup référé ces derniers jours, évoque « une procédure approfondie de concertation, notamment avec les partenaires sociaux ». Et il ajoute : « En outre, de mai à décembre 2018, une procédure originale de participation citoyenne a été organisée, conduisant à la tenue d'ateliers participatifs et à la mise à disposition d'une plateforme. » Ce n'est pas neutre.

Par ailleurs, nous aurons appris aujourd'hui que les ordonnances, ce n'est pas bien, et que les préciser, ce n'est pas bien non plus. Heureusement qu'un psychiatre est dans la salle ; il pourra peut-être nous aider...

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Il est vrai que refaire sans arrêt la même chose sans en tirer les conclusions peut relever de la pathologie. Je pourrais donc vous retourner le compliment, cher collègue. Au demeurant, la concertation est si réussie et originale que nous assistons à des mobilisations tous les samedis et que vous êtes parvenus à vous mettre à dos une majorité de la population et des organisations syndicales.

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Notre collègue Christophe n'a pas lu l'avis du Conseil d'État jusqu'au bout, car celui-ci relève que le recours aux ordonnances n'est pas justifié en toutes circonstances, et il fait explicitement référence à ce sujet aux dispositions transitoires pour les cotisants aux deux systèmes. Si vous citez l'avis du Conseil d'État, citez-le à propos.

La commission rejette les amendements.

Puis elle examine l'amendement n° 21622 de M. Sébastien Jumel.

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Monsieur Christophe, en fait de grand succès, nous avons vu quel a été le résultat de la concertation. Cela dit, je retire cet amendement, que je retravaillerai en vue de la séance publique.

L'amendement est retiré.

La commission est ensuite saisie de l'amendement n° 779 de Mme Constance Le Grip.

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Aucune disposition de nature législative ne précise que les taux de cotisation vieillesse à la charge des artistes-auteurs correspondent à la part salariale. Le présent amendement propose donc de combler ce vide juridique. Les artistes-auteurs ne relevant pas de l'assurance chômage, la hausse de la CSG intervenue au 1er janvier 2018 n'a pas pu être compensée sur la cotisation d'assurance chômage. C'est seulement depuis le 1er janvier 2020 qu'ils ont obtenu, à force de protestations, de bénéficier d'une compensation pérenne sur leurs revenus artistiques, prenant la forme d'une prise en charge par l'État d'une fraction de leurs cotisations vieillesse de base.

Il convient donc de maintenir, dans le cadre de la mise en place du système universel, ce dispositif que les organisations représentant les artistes-auteurs ont eu beaucoup de mal à négocier avec les ministères compétents. Ce faisant, nous apaiserions les fortes inquiétudes exprimées par cette profession ô combien respectable.

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Je vous remercie d'avoir appelé mon attention sur la situation des artistes-auteurs, que je connaissais mal. Votre amendement reprend les dispositions de l'article L. 382-3 du code de la sécurité sociale, que nous ne supprimons pas, en vue de maintenir le principe de l'acquittement des seules cotisations salariés. Or ce principe est bien maintenu par le II de l'article 16, qui prévoit une prise charge par l'État de leurs cotisations patronales.

Votre amendement fait également référence au plafond retenu. S'agissant d'un dispositif qui pèse sur les deniers publics, il est normal que la prise en charge de l'État soit plafonnée au niveau d'un seul PASS, soit 41 136 euros. Pour le reste, les règles du droit commun s'appliquent. Enfin, il est bien prévu une faculté de surcotisation pour les artistes-auteurs afin qu'ils puissent aller jusqu'au minimum de pension s'ils le souhaitent.

Votre amendement est ainsi largement satisfait dans l'esprit. C'est pourquoi je vous invite à le retirer.

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Je retournerai vers les organisations qui ont appelé mon attention sur la situation des artistes-auteurs et qui sont tout aussi capables que nous, voire davantage, d'analyser la situation présente et future, et je verrai s'il y a lieu d'apporter certaines précisions. À ce stade, je maintiens donc l'amendement.

La commission rejette l'amendement.

Puis elle adopte l'article 15 modifié.

La séance est levée à vingt heures cinq.

Membres présents ou excusés

Réunion du samedi 8 février 2020 à 15 heures

Présents. – M. Thibault Bazin, M. Thierry Benoit, Mme Aude Bono-Vandorme, Mme Brigitte Bourguignon, Mme Céline Calvez, M. Lionel Causse, M. Jean-René Cazeneuve, M. Paul Christophe, Mme Christine Cloarec-Le Nabour, M. Olivier Damaisin, M. Yves Daniel, M. Dominique Da Silva, M. Pierre Dharréville, Mme Nicole Dubré-Chirat, Mme Catherine Fabre, M. Éric Girardin, M. Guillaume Gouffier-Cha, M. Fabien Gouttefarde, Mme Carole Grandjean, Mme Florence Granjus, M. Brahim Hammouche, Mme Danièle Hérin, M. Régis Juanico, M. Sébastien Jumel, Mme Célia de Lavergne, Mme Marie Lebec, M. Didier Le Gac, Mme Constance Le Grip, Mme Monique Limon, M. Jacques Maire, M. Jacques Marilossian, M. Jean-Paul Mattei, M. Jean François Mbaye, M. Thierry Michels, M. Patrick Mignola, Mme Cendra Motin, Mme Zivka Park, M. Vincent Thiébaut, M. Nicolas Turquois, M. Boris Vallaud, M. Olivier Véran, Mme Corinne Vignon, M. Éric Woerth

Assistaient également à la réunion. – M. Éric Coquerel, M. Bastien Lachaud, M. Gilles Le Gendre, Mme Danièle Obono, Mme Bénédicte Taurine