Mission d'information sur la gestion des évènements climatiques majeurs dans les zones littorales de l'hexagone et des outre-mer

Réunion du mardi 24 juillet 2018 à 14h00

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

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L'audition débute à quatorze heures cinq.

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Mes chers collègues, nous poursuivons nos travaux avec l'audition de M. Rémy Rioux, directeur général de l'Agence française de développement (AFD), accompagné de M. Charles Trottmann, directeur de cabinet général, de Mme Zolika Bouabdallah, chargée des relations avec le Parlement, et de M. Bertrand Willocquet, responsable des opérations outre-mer.

Je rappelle que cette mission d'information a été créée par le Bureau de l'Assemblée nationale afin d'étudier les politiques publiques en matière d'anticipation et de gestion de crise d'évènements climatiques majeurs en zone littorale ainsi de reconstruction, avec la volonté de faire un point particulier sur ce qui s'est passé aux Antilles après le passage des cyclones Irma et Maria.

Par ailleurs, le Bureau a souhaité que cette étude couvre bien l'ensemble du territoire hexagonal et ultramarin, tout en analysant particulièrement la situation des Antilles, notamment celle de Saint-Martin, île qui a été très touchée par le cyclone Irma. La mission d'information, est composée de vingt-neuf députés ; M. Yannick Haury, qui en est le rapporteur, sera suppléé aujourd'hui par M. Bertrand Bouyx.

Nous arrivons aux conclusions de nos travaux. Dans un premier temps, nous avons entendu des représentants du monde scientifique afin de faire le point sur l'état des connaissances dans le domaine du changement climatique. Nous avons aussi rencontré ceux qui font la loi – les divers ministères, services et directions – mais aussi ceux qui organisent la gestion de crise, afin de savoir comment le ministère de l'intérieur et les services assurent la protection des personnes et des biens.

Nous étudions maintenant la dernière phase, celle de la reconstruction ; nous avons ainsi entendu la Fédération française de l'assurance (FFA) afin de savoir comment il est procédé à l'indemnisation des préjudices subis. Il nous a donc paru important de terminer ce cycle d'auditions en recevant les acteurs du financement, ce qui vaut à l'AFD d'être présente aujourd'hui, car elle se situe au coeur du dispositif étatique de soutien et d'aide au développement. En effet, l'action de l'Agence porte sur les régions en voie de développement, mais aussi sur les outre-mer ; nous souhaitons donc savoir comment s'articule votre action dans ces domaines.

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Pouvez-vous nous décrire les missions générales de l'AFD, sa gouvernance, les modalités de prise de décision ? Il y a 2 500 projets menés chaque année, comment sont-ils sélectionnés ?

Quelle est la part de l'action de l'AFD consacrée au changement climatique ? Pouvez-vous distinguer entre les subventions et les prêts ? Comment le réchauffement climatique et la montée des eaux, sont-ils intégrés en amont des projets ?

Quelles sont les actions en cours pour les reconstructions après les cyclones ?

Pouvez-vous identifier, au sein des subventions, les actions spécifiquement consacrées à la prévention des évènements climatiques majeurs ?

Pouvez-vous nous décrire l'action de l'Agence à la Martinique et en Guadeloupe ?

A-t-elle mobilisé des moyens spécifiques pour la reconstruction de Saint-Barthélemy ? Y a-t-il des actions spécifiques en faveur des réseaux de télécommunications ? Y a-t-il eu une action particulière vis-à-vis de Saint-Martin ?

Enfin, au sein des projets portant sur le littoral, conduisez-vous une réflexion particulière sur la fragilisation des côtes : recul du trait de côte, lutte contre les sargasses, préservation des récifs coralliens, construction de digues, etc. ?

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Rémy Rioux, directeur général de l'Agence française du développement (AFD)

Nous sommes très honorés d'avoir l'occasion de présenter l'Agence française de développement à la mission d'information.

L'Agence est votre agence, elle va bien ; elle est en forte croissance depuis quelques années. Le Président de la République et le Gouvernement ont tracé une trajectoire d'augmentation de l'aide publique au développement, en prévoyant d'y consacrer jusqu'à 0,55 % de notre revenu national en 2022. L'Agence a passé le montant de 10 milliards d'euros de financement en 2017, ce qui fait d'elle un instrument très significatif sur le plan international.

Ses moyens vont continuer de croître au cours des prochaines années, à la fois pour son activité de prêts, qui représente 80 % de notre action, ainsi que pour son activité de dons qui va probablement progresser de 15 % à 25 % d'un montant total qui ne pourra qu'être plus élevé.

Nous sommes présents dans 110 pays ; bien sûr, nous n'intervenons pas dans l'Hexagone, mais dans tout l'outre-mer français, qui représente 15 % de notre activité, ce qui est très important et très stratégique. Par ailleurs, depuis maintenant plus de dix ans, la lutte contre le changement climatique constitue l'une de nos grandes signatures. Nous avons pris ce virage très tôt ; il représente la moitié de nos financements, dont on peut mesurer le rapport coûts-bénéfices dans l'évolution du changement climatique. Toutes les banques de développement du monde commencent à mesurer ce rapport au sein de leurs portefeuilles, et la Banque mondiale, de son côté, s'est fixé un objectif de 28 %.

Nous cherchons une nouvelle frontière stratégique ne se bornant plus seulement à mesurer les bénéfices climats de nos projets, nous voulons devenir une agence « 100 % Accord de Paris ». Ce qui signifie que tous nos projets doivent contribuer, ou à tout le moins ne pas dégrader, les trajectoires résilientes de développement « bas carbone » que les États, selon les dispositions de cet accord, doivent décider et déclarer d'ici 2020 devant la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC), s'ils en respectent les termes. Ces trajectoires doivent être financées, encouragées et accélérées ; ce qui constitue le rôle des institutions de développement et de lutte contre le changement climatique.

Au sein de cet écosystème, l'AFD se situe déjà en tête des initiatives, et nous souhaitons aller plus loin.

L'Agence est très concernée par les travaux de votre mission d'information, car elle constitue un instrument d'accompagnement parmi d'autres lors des crises. Nous le sommes avec nos caractéristiques propres, car nous sommes une maison d'ingénieurs, et non une banque commerciale. Nous apportons beaucoup de contenus issus de nos divisions techniques, dans le cadre d'un investissement non lucratif à long terme. À ce titre, nous sommes très complémentaires d'autres instruments publics ou d'actions et d'investissements privés.

En effet, les instruments publics ne fondent parfois leurs interventions que sur des subventions, alors que l'AFD apporte l'effet d'échelle d'une activité de prêt qui permet de mobiliser des montants financiers plus importants. Par ailleurs, dans la mesure où nous ne sommes pas une banque privée, nos produits sont à plus long terme ou à taux réduit, ce qui peut être particulièrement important dans les phases de reconstruction.

Nous avons en outre pour caractéristique de travailler à la fois en France et à l'étranger. Nous avons donc beaucoup à apprendre – dans ce monde en commun qui est désormais notre devise – de la façon dont on gère les catastrophes naturelles dans d'autres pays. En effet, lorsqu'un cyclone ou un tremblement de terre frappe le territoire national, il est malheureusement bien rare qu'il s'arrête aux frontières de notre pays. Les crises connaissent donc des dimensions régionales et l'AFD se doit de toujours plus avoir la capacité à intégrer ce fait.

La stratégie que nous développons est double, car nous accompagnons les acteurs de l'urgence, et l'Agence constitue aussi un instrument de prévention durable des crises.

Accompagner les acteurs de l'urgence signifie prendre très vite le relai afin d'engager rapidement une démarche de reconstruction. C'est ce que nous avons fait à Saint-Martin après le passage d'Irma en prenant le relai des acteurs de l'urgence par le truchement d'un soutien financier aux collectivités. À cette fin nous avons immédiatement suspendu pour six mois, que nous prolongerons sans doute six mois de plus, les échéances de nos prêts à la collectivité de Saint-Martin.

Nous avons mis en place en urgence un préfinancement pour l'établissement des eaux et de l'assainissement, pour un montant de 3,6 millions d'euros, nous avons aussi travaillé au fonds de renforcement de capacité des collectivités locales. Nous avons par ailleurs très rapidement dépêché nos experts techniques ; entre le mois d'octobre 2017 et le mois de mars dernier, nous avons effectué cinq missions de départements techniques portant sur le développement urbain, sur la santé, sur l'eau et l'assainissement et sur les transports afin de trouver les meilleures solutions de reconstruction.

Bien entendu, ces équipes de l'AFD interviennent indifféremment dans nos outre-mer et à l'étranger. C'est ainsi que s'accumule sur le plan technique une somme d'expériences de reconstruction très diversifiée, sur laquelle nous pouvons nous appuyer.

Ainsi sommes-nous, en 2008, intervenus très rapidement en Chine lors du tremblement de terre du Sichuan, et les autorités chinoises nous en ont su gré. Nous travaillons aussi, en coopération avec le département de Meurthe-et-Moselle, en Équateur, Etat qui a subi plusieurs tremblements de terre, et à qui nous avons accordé un prêt de 100 millions de dollars Nous sommes également intervenus à Banda Aceh, en Indonésie, après le tsunami ; nous sommes présents en Haïti et en Bolivie.

À Saint-Martin, nous sommes désormais passés à une phase d'appui à la reconstruction. Nous y avons mis en place un dispositif d'assistance multisectoriel pour douze mois, qui sera sans doute reconduit pour douze autres mois, pour un montant se situant entre 1 million et 1,5 million d'euros, afin de permettre à la collectivité de coordonner la reconstruction. Nous avons déployé une aide technique en dépêchant sur place trois experts, qui renforceront la capacité d'ingénierie et de suivi des projets, la structuration des services, le montage de dossiers de financement européens, ainsi que la qualité de service, particulièrement dans le secteur de l'eau et de l'assainissement.

En réponse à votre question, je rappelle que l'Agence française de développement est un service public de l'État doté d'un conseil d'administration, qui a connaissance de tous les projets, soit directement, soit via des comités spécialisés. Dans cette instance siègent quatre parlementaires et quatre suppléants, ainsi que des représentants des ministères concernés : affaires étrangères, finances, outre-mer et intérieur. Enfin des personnalités qualifiées représentent les différentes parties prenantes : la recherche, le secteur privé et les organisations non gouvernementales. L'AFD présente ses projets à l'ensemble de ces interlocuteurs. Ainsi, à Saint-Martin, c'est à sept parties prenantes que nous apporterons des financements. S'agissant de la dimension régionale de nos actions, à la suite du passage l'ouragan Irma, nous sommes intervenus à Cuba, durement frappé, et à qui nous avons accordé, au mois de juillet dernier, un prêt souverain de 20 millions d'euros pour la réhabilitation des services d'eau et d'assainissement.

Après le passage du cyclone Maria, nous sommes intervenus à la Dominique, en République dominicaine et auprès de l'Organisation des États de la Caraïbe orientale car, dans les Antilles, l'océan Indien et le Pacifique, les capacités d'alerte et de réponse se construisent de plus en plus à l'échelle régionale.

Dans le cadre de l'accompagnement des acteurs de l'urgence, nous entretenons avec la Croix-Rouge un partenariat ancien, depuis 2009, particulièrement dans l'océan Indien où nous appuyons les réseaux d'alerte et de gestion des catastrophes naturelles en mettant l'accent sur les populations les plus vulnérables. Nous avons mobilisé des financements significatifs pour la plateforme d'intervention régionale de l'océan Indien (PIROI) située à La Réunion. Nous disposons de 8 millions d'euros pour la période 2018-2019 pour renforcer encore cette plateforme ainsi que ses équivalents pour la zone Amériques-Caraïbes (PIRAC) et pour le Pacifique Sud (PIROPS), en nous appuyant sur l'expérience acquise avec la Croix-Rouge dans l'océan Indien.

Dans le cadre de notre mission de développement, outre nos préoccupations de moyen et long terme, qui impliquent d'intervenir très rapidement dans les situations d'urgence, nous sommes aussi présents dans le cadre de la prévention durable des aléas climatiques. Avant la crise, nous avons la responsabilité d'améliorer le bâti et les politiques publiques afin d'être plus résilients lorsque celle-ci survient.

Aussi, dans le cadre de sa nouvelle stratégie outre-mer la structure de l'AFD a-t-elle évolué puisque les départements « outre-mer » et « étranger » ont été supprimés au profit d'un département dit « des trois océans », qui regroupe les territoires ultramarins de la République et les États voisins.

L'idée présidant à cette transformation est de financer et d'encourager les liens et les phénomènes d'intégration régionale au sein de chacun des bassins océaniques, et de contribuer à faire de nos territoires ultramarins des exemples de développement durable. Il nous revient ainsi d'être à la tête de l'innovation dans le domaine du développement durable, de la façon de construire et de la résilience aux crises. Nous pourrons ainsi exporter ces modèles dans l'ensemble de la zone et bien sûr, au-delà, car il fait bien partie de la mission de l'Agence d'établir ces liens qui font parfois défaut.

Nous accompagnons par ailleurs de plus en plus la transition écologique outre-mer. Les prêts consacrés à l'environnement augmentent régulièrement au sein de notre portefeuille, passant de 15 % de l'activité en 2013 à 31 % aujourd'hui. Nous n'avons donc pas encore atteint les 50 % évoqués au début de mon propos, mais nous sommes sur le bon chemin. Et la logique de l'Agence n'est évidemment pas de réserver un traitement particulier aux territoires ultramarins, mais, dans l'esprit des objectifs du développement durable des Nations unies, de les emmener dans cette transition avec tous les pays du monde.

De son côté, la stratégie d'atténuation du changement climatique représente un des principaux secteurs d'intervention de l'Agence à l'étranger comme en France ; elle passe en grande partie par le recours aux énergies renouvelables et à l'efficacité énergétique.

Nous avons ainsi doté de près de 35 millions d'euros ENERCAL, le principal énergéticien de Nouvelle-Calédonie. Nous déployons depuis 2017 un nouveau produit financier, équivalent du Fonds vert des Nations unies pour le climat, en commençant par les collectivités du Pacifique. Il s'agit d'un prêt à taux zéro, auquel nous ajoutons des éléments de subvention, ce qui représente une nouveauté dans notre activité ultramarine, car il s'agit, en dehors de la période de crise, de renforcer les maîtrises d'ouvrage et de pratiquer le renforcement de capacités pour un montant de 1,5 million d'euros pour trois ans.

La ministre a d'ailleurs été suffisamment convaincue par cette première phase dans le Pacifique, pour l'étendre, après débat au Parlement, à l'ensemble des outre-mer, ce à quoi nous employons cette année ainsi qu'à l'avenir.

Par ailleurs, l'adaptation est le parent pauvre de la lutte contre le changement climatique, alors que les financements de l'atténuation sont en progression régulière, mais un effort doit être fourni dans la gestion des conséquences inévitables du réchauffement climatique. Ce secteur concerne nos programmes portant sur l'agriculture, l'eau et l'assainissement. Nous disposons de cet instrument spécifique que constitue l'initiative Pacifique annoncée par le Président de la République lors de son déplacement en Australie et en Nouvelle-Calédonie il y a quelques semaines, et que nous sommes en train de bâtir avec les pays ayant souhaité rejoindre cette coalition. En fonction des résultats obtenus, il sera possible de poursuivre ce mouvement dans d'autres bassins océaniques.

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Je reviendrai sur la dernière question que je vous ai posée : au sein des projets portant sur le littoral, conduisez-vous une réflexion particulière sur la fragilisation et la préservation des côtes, qui se traduit par le recul du trait de côte, la lutte contre les sargasses, la préservation des récifs coralliens et la construction de digues ?

Cette question concerne tous les départements littoraux, même si les localisations géographiques sont très diverses ; en tout état de cause, elle nous préoccupe tous.

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Rémy Rioux, directeur général de l'Agence française du développement (AFD)

Nous conduisons dans ce domaine des expériences à l'étranger ; j'en reviens toujours à cette richesse, ainsi ce matin étais-je en compagnie du ministre des finances du Sénégal, car les problèmes d'érosion côtière sont particulièrement graves. Nous conduisons un projet de renforcement de digues et de lutte contre cette érosion à Saint-Louis du Sénégal, dont nous ne manquerons pas de tirer les enseignements.

En outre-mer, nous avons financé entre 2005 et 2011 le projet « Initiatives Corail pour le Pacifique » – Coral Riff Initiatives for the Pacific (CRISP) –, qui contribuait à la protection et à la gestion durable des récifs coralliens ainsi qu'à la mise en oeuvre de ces capacités dans les collectivités du Pacifique. Ce programme, qui a réuni 15,7 millions d'euros, a rendu possible l'amélioration des méthodes de surveillance des récifs et des ressources exploitées sur une surface de plus de 800 kilomètres carrés.

Nous réfléchissons par ailleurs à un programme de succession portant sur les récifs coralliens du Pacifique.

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Bertrand Willocquet, responsable des opérations outre-mer

Le projet Restoration of Ecosystem Services and Adaptation to Climate Change (RESSCUE), mené avec le Programme régional océanien de l'environnement (PROE), vient prendre la suite du projet CRISP. Il vise à pérenniser la gestion intégrée des zones côtières en zone pacifique en articulant les deux territoires français – Polynésie et Nouvelle-Calédonie – d'un côté, Fidji et Vanuatu de l'autre. Le suivi des régions côtières au sein des bassins versants est ainsi poursuivi, notamment en Nouvelle-Calédonie.

Dans le cadre des divers projets financés par le Fonds vert dans le Pacifique, nous menons une série d'actions en faveur du suivi et du maintien du trait de côte, mais aussi de la lutte contre les inondations dues aux débordements de rivières, par la restauration d'enrochement de sites.

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Il est vrai que le Fonds vert a aussi soutenu des actions comme la consolidation de berges. Le projet RESCCUE est également intervenu dans l'île de Moorea, en Polynésie française, qui connaît une sérieuse érosion de son trait de côte.

J'ai d'ailleurs demandé que des éléments supplémentaires soient apportés sur l'étude réalisée pour la reconstruction de cet espace, qui a nécessité des travaux importants en zone littorale car ils ont été l'occasion de mettre en oeuvre des actions innovantes contre l'érosion du trait de côte.

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Quel est votre engagement dans la lutte contre la pollution maritime, singulièrement celle due à la présence de plastiques, qui constitue une volonté forte de Mme Brune Poirson, secrétaire d'État auprès du ministre de la transition écologique et solidaire ?

Quels ont été les divers moyens mis en place après le passage de l'ouragan Irma ? Certaines des personnes entendues par la mission ont en effet considéré qu'il était possible de faire un peu mieux dans la gestion de crise, particulièrement immédiatement après l'évènement. Avez-vous anticipé cette situation, le cas échéant, comment ? Quelles ont été les actions respectives de la Marine nationale et de la marine de commerce, qui est sur place en Guadeloupe ?

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Bertrand Willocquet, responsable des opérations outre-mer

Dans le domaine de la lutte contre la pollution de l'océan par les plastiques dans la zone Pacifique, des projets sont en discussion au sein du PROE. L'AFD a l'intention d'associer l'initiative franco-européenne « Adaptation-biodiversité » à ce projet, ce qui devrait faire partie des projets que nous souhaitons financer à l'avenir.

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Rémy Rioux, directeur général de l'Agence française du développement (AFD)

La création du département de trois océans est un signal international devant être entendu par nos maisons de développement, singulièrement au regard de l'Objectif du développement durable (ODD) n° 14 des Nations unies, qui est de conserver et d'exploiter de manière durable les océans, les mers et les ressources marines.

La préoccupation doit être celle des populations, des territoires et des enjeux, mais il faut y incorporer les questions d'économie maritime et d'économie bleue, y compris dans leurs aspects les plus déplaisants comme les pollutions et le pullulement, de plus en plus menaçant, des sargasses. Prendre en compte la dimension régionale dans nos stratégies va nous conduire à proposer des solutions au problème que vous avez soulevé.

Dans la gestion de crise post-Irma, je rappelle que notre rôle est financier, et consiste à aider les collectivités sur ce plan afin qu'elles puissent rebondir. Pourrions-nous faire mieux ? Là est la question.

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Bertrand Willocquet, responsable des opérations outre-mer

Notre rôle ne relève pas de l'immédiateté. En revanche, nous aidons les acteurs appelés à intervenir directement ; c'est le cas des actions que nous avons menées en faveur du réseau de la Croix-Rouge, les fameuses plateformes d'intervention régionale. Nous avons aidé la Croix-Rouge à monter des systèmes de prépositionnement de matériels comme des kits de santé, etc. Nous agissons ainsi dans les territoires ultramarins, mais également dans les pays avoisinants.

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Sur ce point particulier, comment l'AFD intervient-elle concrètement ? Des lignes de crédit sont-elles libérées ?

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Bertrand Willocquet, responsable des opérations outre-mer

La Croix-Rouge est une ONG qui ne dispose pas de ressources particulières ; elle ne saurait donc s'endetter, et les subventions qui lui sont versées sont financées par les autorités nationales.

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Rémy Rioux, directeur général de l'Agence française du développement (AFD)

L'AFD est dotée d'un guichet de subventions destinées à la société civile, à ce titre nous disposons de plus de 90 millions d'euros, et les aides que nous allouons relèvent en partie du droit d'initiative. Les ONG nous font des propositions, généralement pour des actions situées dans des États étrangers, mais, dans le cadre d'une logique d'échelon régional, comme dans le cas de ces plateformes océaniques, ces interventions sont éligibles à ce guichets.

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Je mets à profit l'occasion qui m'est offerte pour vous annoncer que les mots « mer » et « océan » ont été, au stade du projet débattu, intégrés dans notre Constitution par des amendements. L'inclusion symbolique de ces termes dans la loi fondamentale aura pour objet de mettre demain en lumière les aspects prioritaires de la lutte pour la préservation de ces espaces et ces écosystèmes.

Par ailleurs, au titre de son expérience dans l'outre-mer et dans d'autres territoires, je souhaiterais recueillir l'appréciation de l'Agence au sujet d'une amélioration de la coopération régionale. Quel jugement portez-vous sur l'implication des territoires d'outre-mer ? Si elle vous paraît insuffisante : comment l'améliorer ?

Dans le contexte post-Cotonou et pré-Brexit, quel est votre point de vue sur la réflexion internationale portant sur la révision des outils de financement des pays et territoires d'outre-mer (PTOM) du Pacifique, qui concernent des projets d'atténuation et d'adaptation, et sont partagés avec d'autres îles de la région ?

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Rémy Rioux, directeur général de l'Agence française du développement (AFD)

Au sein de l'Agence, nous avons cassé les silos hérités de l'histoire qui limitaient notre imagination ; nous avons donc franchi cette frontière. Il est toutefois trop tôt pour dire jusqu'où nous irons dans cette direction, mais soyez assurés de notre résolution de réaliser, avec les moyens qui sont les nôtres, des financements, des actions et des liens.

Au demeurant, les projets n'appartiennent pas à l'AFD, mais aux acteurs, nous pouvons les encourager et les aider, à la condition qu'ils existent, et nos outre-mer et leurs environnements régionaux ont probablement des volontés et des capacités différentes… Ce qui réclame une certaine adaptation de notre part.

Ainsi avons-nous changé l'organisation de notre réseau et créé des directions régionales du groupe AFD ; nous allons désigner à La Réunion un directeur régional qui ne sera pas le directeur « Réunion », mais réfléchira à l'accompagnement de projets à dimension régionale. À chacun des trois océans correspondra donc un directeur dont la réflexion sera constamment orientée vers cette dimension.

Nous allons tenter de mixer les instruments, particulièrement financiers, dans ce sens. Nous conduisons une large réflexion, portant sur une meilleure gestion des moyens provenant du Fonds européen de développement régional (FEDER) et du Fonds européen de développement (FED). Car, pour construire un projet régional, les procédures du FEDER et du FED se conjuguent, ce qui est un cauchemar.

C'est pourquoi, dans le cadre de la refonte des instruments financiers, nous avons demandé au Gouvernement de plaider en faveur d'une procédure unique auprès des institutions européennes, ce qui nous permettrait d'accéder à des financements européens pour des projets régionaux conduits dans les trois océans de façon plus rapide et massive. Dans le contexte du Brexit que vous avez mentionné, madame la présidente, notre pays et ses territoires ultramarins disposent de capacités d'expertise et de financement dont souvent leurs voisins ne disposent pas.

Il existe une dimension offensive et de rayonnement qui impose de faire évoluer certaines règles et de mobiliser plus de financements, y compris, s'agissant de Bruxelles, de subventions, pas de prêts, il s'agit d'éléments que nous pourrons intégrer dans nos prêts afin de les rendre plus attractifs.

Par ailleurs, ces directeurs régionaux de l'AFD noueront un dialogue beaucoup plus intense et régulier avec les organisations régionales, ce que nous ne faisions pas vraiment. Le directeur de La Réunion, par exemple, ne dialoguait qu'avec les acteurs et les entrepreneurs de La Réunion, car il n'était pas particulièrement mandaté pour parler avec la Commission de l'océan Indien (COI). Désormais, un membre de notre organisation rencontrera ainsi régulièrement les responsables de l'organisation régionale compétente afin de proposer des actions pertinentes à cet échelon.

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Bertrand Willocquet, responsable des opérations outre-mer

Les territoires ultramarins sont déjà quelque peu intégrés politiquement dans ces organismes, qu'il s'agisse de la COI, de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), de la Commission du Pacifique Sud (CPS) ou du PROE.

La présence de directeurs régionaux va considérablement faciliter le dialogue entre ces grands organismes par lesquels nous devons souvent passer, au sein desquels la voix de chaque territoire français est entendue, et les responsables régionaux dans les départements d'outre-mer (DOM) ainsi que les responsables territoriaux du Pacifique afin de construire des projets à l'échelle réellement régionale.

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Pouvez-vous nous apporter des éléments supplémentaires au sujet du préfinancement en urgence au profit de l'établissement des eaux et de l'assainissement à Saint-Martin après le passage de l'ouragan Irma ?

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Bertrand Willocquet, responsable des opérations outre-mer

La communauté de Saint-Martin ne disposait effectivement plus de financements suffisants. Nous lui avons donc versé un préfinancement afin qu'elle touche par avance les subventions de l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques (ONEMA) et de l'État pour la construction d'une station d'épuration des eaux usées dans le Quartier d'Orléans.

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J'ai rencontré le Conseil national des missions locales (CNML), qui m'a dit avoir libéré une emprise foncière à cet effet.

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Bertrand Willocquet, responsable des opérations outre-mer

En tout état de cause, ce préfinancement a permis la réalisation de cet équipement bien plus rapidement que la trésorerie de l'établissement local ne l'aurait pu.

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Puisque vous êtes présents dans l'ensemble des territoires, êtes-vous également intervenus à Saint-Barthélemy dans le cadre du passage du cyclone ?

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Bertrand Willocquet, responsable des opérations outre-mer

Nous n'avons pas reçu de demande de la part de la communauté de Saint-Barthélemy.

L'audition s'achève à quatorze heures quarante-cinq.

Membres présents ou excusés

Réunion du mardi 24 juillet 2018 à 14 heures

Présents. - M. Bertrand Bouyx, Mme Maina Sage

Excusés. - M. Yannick Haury, M. Jean-Hugues Ratenon

Assistait également à la réunion. - M. Jimmy Pahun