Commission d'enquête sur l'égal accès aux soins des français sur l'ensemble du territoire et sur l'efficacité des politiques publiques mises en œuvre pour lutter contre la désertification médicale en milieux rural et urbain

Réunion du jeudi 14 juin 2018 à 8h30

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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  • est-ce
  • exercice
  • infirmière
  • installation
  • médecin
  • médecine
  • profession
  • rémunération

La réunion

Source

Jeudi 14 juin 2018

La séance est ouverte à huit heures quarante.

Présidence de M. Alexandre Freschi, président de la commission d'enquête

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La commission d'enquête procède à l'audition de M. Nicolas Revel, directeur général, et Mme Véronika Levendof, responsable des relations avec le Parlement de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS).

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Notre commission reçoit ce matin M. Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), et Mme Véronika Levendof, responsable des relations de la CNAMTS avec le Parlement.

Je précise que cette audition est ouverte à la presse et rediffusée en direct sur un canal de télévision interne. Elle sera ensuite consultable sur le site internet de l'Assemblée nationale.

Conformément aux dispositions de l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958, les personnes entendues déposent sous serment. Je vous demande donc de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.

M. Nicolas Revel et Mme Véronika Levendof prêtent successivement serment.

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Je vous donne la parole pour une intervention liminaire.

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Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

Beaucoup de nos concitoyens sont inquiets face à l'évolution de la démographie médicale. Le phénomène est composé d'un certain nombre d'éléments presque paradoxaux : une augmentation globale du nombre de médecins en exercice en France sur les dernières années ; une stagnation des médecins exerçant de manière libérale, qui contraste avec la rotation forte des médecins exerçant sous un mode salarié ; une médecine générale plutôt en légère progression globale, mais qui va être en réduction forte s'agissant des généralistes libéraux, sur une période de temps qu'il est difficile de fixer précisément mais qui se situe, dirais-je, entre cinq et dix ans ; des médecins relevant d'autres spécialités médicales, dont le nombre global progresse fortement, y compris, quoique légèrement, chez les spécialistes libéraux, mais pour lesquels on note, en revanche, un phénomène de concentration géographique, reflet du choix d'installation des médecins.

On voit donc bien qu'un sujet d'accès aux soins se pose, voire se pose de manière aiguë, même si c'est une question d'une petite dizaine d'années en médecine générale, et qu'il s'agit d'un phénomène plus structurel, celui de la concentration des lieux d'exercice, pour les autres spécialités.

Le premier levier d'action, à savoir la régulation coercitive, est un levier d'action qui a trouvé à s'employer de manière globalement efficace, je crois. Nous y reviendrons cependant, car il y a beaucoup de contournements possibles pour les professions autres que la profession de médecins : sages-femmes, infirmières ; demain, masseurs-kinésithérapeutes et peut-être chirurgiens-dentistes. Toutes ces professions voient du reste leurs effectifs croître en matière d'exercice libéral.

S'agissant des médecins libéraux, j'imagine que nous reviendrons sur ce sujet dans le courant de l'audition. La position de l'assurance maladie, qui évolue dans un cadre législatif fixé par le Parlement, a été de s'interroger sur les leviers d'actions à sa disposition aujourd'hui, notamment sur une régulation s'appuyant sur les conditions de conventionnement de certaines professions ou encore sur le levier incitatif que constituent les aides à l'installation dans des zones dites sous-dotées.

Pour l'avenir, quatre leviers essentiels me paraissent devoir être privilégiés. D'abord, le dispositif des consultations avancées de spécialistes doit être singulièrement renforcé. Nous sommes en train de finaliser l'amélioration d'un contrat que nous avons créé dans la convention de 2016 ; il bonifie la valeur des actes et consultations réalisés par des médecins qui exercent de manière ponctuelle, mais régulière, dans des zones sous-dotées.

Le deuxième levier d'action d'avenir est celui des stages. Aujourd'hui très concentrés en milieu hospitalier, ils me semblent devoir être plutôt répartis entre les différents modes d'exercice et devoir donner lieu à des incitations plus fortes sur le territoire.

Notre troisième levier d'action est la télémédecine. Nous finalisons un sixième avenant à la convention médicale, qui va permettre d'intégrer dans le droit commun, aussi bien en ville qu'à l'hôpital, des actes de télémédecine qui me paraissent très importants : les téléconsultations et les téléexpertises.

Le quatrième levier d'action me paraît être le plus important, même si les trois premiers le sont aussi. Il s'agit de l'organisation des soins sur les territoires. J'ai pour ma part la conviction que, dans dix ans, nous n'aurons pas de levier décisif si nous souhaitons contraindre davantage les installations. Ce qui me paraît être en revanche être un élément-clé, c'est d'optimiser la ressource médicale qui exerce aujourd'hui au quotidien dans les territoires.

Les modes d'exercice y sont cloisonnés, isolés et non coordonnés. Il faut donc les revisiter. Nous connaissons beaucoup de pistes, sur lesquelles un consensus est en train de se construire progressivement. Il faut maintenant définir des leviers qui permettent, dans les deux ou trois prochaines années, de faire évoluer les choses, qu'il s'agisse du regroupement d'exercices – mais tout le monde ne se regroupera pas dans les mêmes structures physiques ou juridiques –, ou de modes d'exercice beaucoup plus coordonnés, incluant une délégation de tâches et de compétences. L'idée serait de permettre à des structures ou à des territoires de mieux partager, ou d'optimiser, le temps médical, en partageant la prise en charge. Cela répondrait à ces deux grands enjeux que sont le suivi des pathologies chroniques et le soin non programmé, enjeux sur lesquels nous sommes en butée aujourd'hui.

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Qu'est ce qui n'a pas marché dans notre pays, depuis quinze ans, pour qu'on en soit arrivé là ? Vous avez en effet pu observer, monsieur le directeur général, que nous avons pris comme titre de commission d'enquête exactement la mission que vous vous êtes assignée, c'est-à-dire apporter des soins à tous sur l'ensemble du territoire.

Deuxièmement, quel est votre bilan des conventions signées en matière de conventionnement sélectif ? Je rappelle que cela n'existe pas pour les médecins. Au vu du bilan pour les professions pour lesquelles cela a été pratiqué, quelle est votre vision pour une possible application aux médecins ? C'est ma troisième question.

Quatrièmement, quel est votre bilan des modes de rémunération établis en 2015 ? L'évolution en est tout de même singulière.

Cinquièmement, qu'est-ce qu'on fait pour redonner aux carrières privées un peu d'appétence ou d'attractivité, de sorte que les jeunes y reviennent ?

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Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

Les phénomènes qui sont à l'oeuvre depuis quinze ans ont conduit à cette situation où, comme je vous l'ai dit en introduction, nous avons davantage de médecins en exercice en France au cours des dernières années. Simplement, nous avons principalement des médecins qui travaillent sur un mode salarié, et pas nécessairement dans les territoires où ils seraient le plus à proximité des patients, en un mot là où sont les besoins de santé.

D'abord, l'exercice salarié est devenu plus attractif que l'exercice libéral, parce qu'il semble répondre davantage aux aspirations d'un nombre important de jeunes médecins. À quoi cela tient-il ? D'une part, je dirais, à une aspiration à un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie familiale ; d'autre part, à une aspiration à rester dans un cadre d'exercice plus collectif, parce qu'il se situe dans des structures hospitalières ou dans des structures de villes qui sont plus larges. De ce fait, l'exercice professionnel se concentre en effet sur le temps médical. Par définition, c'est moins le cas pour un médecin libéral, qui exerce le plus souvent seul aujourd'hui ; il se trouve ainsi soumis à des horaires plus importants et à une charge globale qui est celle de la gestion d'un cabinet.

Le deuxième élément tient à la répartition géographique observée. Sans épuiser toutes les hypothèses, il y en a une qui nous paraît relativement évidente. Nous sommes en face d'une évolution sociologique de la profession médicale. Il y a désormais plus de femmes que d'hommes qui sortent de ces études – à un âge avancé de leur vie, puisqu'elles sont fort longues. Cela se répercute sur les choix d'implantation territoriale. Quand elles choisissent un exercice salarié, elles sont en effet attirées par le milieu hospitalier. Des effets de concentration s'opèrent, parce que les établissements hospitaliers ne maillent pas le territoire de manière uniforme.

Quant aux médecins qui choisissent un mode d'exercice libéral, il y a chez eux une certaine tentation de se diriger vers des spécialités autres que la médecine générale, et dans des zones plus urbaines que rurales, plus concentrées que dispersées. Cela correspond bien à des problématiques familiales, mais aussi à la volonté d'exercer sous une forme mixte, à la fois libérale et hospitalière.

Voilà les phénomènes qui sont à l'oeuvre.

Nous n'avions pas, il y a quinze ou vingt ans, d'autres règles du jeu. Vu ce que sont les cycles d'études, il aurait en effet fallu faire preuve d'une certaine anticipation. Pour qu'un contrat passé entre la nation et de jeunes étudiants en médecine produise des effets, il faut qu'il ait des conséquences claires au moment où ils s'engagent dans cette voie. Or nous n'avons pas dit : « Vous n'aurez pas le choix de votre mode d'exercice et vous n'aurez pas le choix de votre lieu d'exercice pendant un certain nombre d'années. ».

Je ne sais pas si cette évolution interviendra demain, mais elle n'est évidemment pas anodine. Elle nécessite un préavis vis-à-vis des intéressés. C'est un choix qui peut tout à fait être envisagé, en prévoyant une prise en charge des études. Le législateur a toujours la possibilité de le faire.

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Il peut aussi ne pas y avoir de conventionnement dans une zone hyper dense, ce qui est moins coercitif que d'indiquer à quelqu'un l'endroit où il doit s'installer.

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Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

L'outil de régulation que serait la fermeture des zones surdotées apparaît, quand je lis les rapports et les expressions qui y sont employées, comme l'outil qui semble le plus raisonnable. C'est lui qui contraint finalement le moins, tout en s'inspirant de ce que nous observons et de ce que nous avons fait pour d'autres professions.

Mais je pense qu'il n'aura pas les effets escomptés s'agissant des médecins. Prenons les généralistes : où sont les zones surdotées en médecine générale aujourd'hui ? Il y a, dans toutes les zones, plus de départs que d'arrivées… Vous ne trouverez donc aucune zone surdotée en médecine générale, hormis peut-être quelques micro-quartiers à Paris. L'observation vaut quand bien même vous raisonneriez en termes relatifs, en disant : « Je ne veux pas savoir si le nombre de médecins couvre ou non les besoins de santé d'un territoire, mais je vais, par principe, dire que les 10 % du territoire où on trouve l'intensité la plus forte sont, par définition, surdotés. » Quand, dans ces départements, les départs ne seront pas comblés, il ne sera pas très simple d'expliquer qu'il n'y a pas de possibilité de remplacer ces médecins.

Paradoxalement, d'ailleurs, dans les dispositifs qui concernent aujourd'hui les infirmiers et les sages-femmes, et demain les kinésithérapeutes, il y a une arrivée pour un départ, c'est-à-dire que nous n'organisons pas la déflation des effectifs. Appliquer demain la même règle du un pour un dans toutes les zones dites surdotées passerait donc à côté du problème, s'agissant des médecins.

Prenons maintenant les autres spécialités médicales.

On peut, en ce domaine, de manière tout à fait objective, identifier des situations de surdensité. À Paris, dans certaines spécialités, il y a un nombre considérable de professionnels ; les délais de rendez-vous, dans certaines spécialités, sont incroyablement rapides par rapport à bien d'autres territoires en France.

Mais, si nous fermons des possibilités de conventionnement, en ophtalmologie par exemple, sur le territoire parisien, est-ce que cela fera une installation dans un territoire sous-doté ?

Je ne crois pas, car je pense que les médecins concernés s'installeront à la périphérie de la zone sous-dotée, d'autant que les patients sont prêts, sur certaines consultations très spécialisées, à se déplacer.

Je pense donc que ce levier, qui apparaît comme nouveau et susceptible de produire des résultats, ne produira pas, en fait, ceux qu'on en attend. Par ailleurs, nous aurons une crispation assez forte vis-à-vis des médecins, qui considèreront qu'on est en train d'entraver la liberté d'installation. La priorité me semble être plutôt, dans les trois prochaines années, de ne pas forcément ouvrir des conflits avec eux, mais de mener au contraire avec eux un travail qui les engage et les amène à évoluer dans leur mode d'exercice et dans leurs conditions d'exercice.

La vraie bataille des prochaines années sera de faire que des médecins qui exercent aujourd'hui de manière isolée travaillent demain de manière coordonnée. Voilà la bataille à mener pour optimiser le temps médical.

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Mais alors, comment expliquez-vous, au nom du raisonnement que vous tenez, qu'on soit allé jusqu'à donner 50 000 euros à des généralistes pour s'installer dans des zones sous-dotées, y inclus des exonérations fiscales ? Car cela a été fait et continue d'être fait, alors même que vous dites qu'on ne réussira pas à les envoyer dans ces territoires. Le raisonnement ne vaut-il pas pour les spécialistes comme pour les généralistes ?

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Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

Je pense au cas d'un médecin qui a décidé de s'installer dans une zone en coeur de métropole. Vous ne l'emmènerez pas dans une zone sous-dotée parce que vous avez fermé le coeur des métropoles. Un médecin souhaitant s'installer dans une zone large qui n'est pas nécessairement le coeur d'une métropole peut, en revanche, être sensible à un signal économique conçu pour que, entre plusieurs zones, il en choisisse une qui soit plus particulièrement sous dense, du fait d'une aide financière spécifique.

Nous ne prétendons donc pas opérer des changements radicaux de choix géographique d'installation, mais seulement amener certains médecins à définir plus finement leur choix. Souvent, ceux-ci attendent d'ailleurs les zonages que les agences régionales de santé (ARS) sont en train de définir et de publier, région par région, car ils souhaitent savoir où sont les zones sous-denses pour bénéficier de ce type d'aide financière.

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Avez-vous une idée de la part prise par cette aide financière dans la décision des praticiens de s'installer à tel ou tel endroit ?

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Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

Cette aide financière a été élaborée avec les structures auxquelles appartiennent les jeunes médecins. C'est eux qui nous ont amenés à aborder le sujet dans la discussion préparatoire à la convention 2016.

Nous partions d'un dispositif existant, puisqu'en 2011 un certain nombre d'aides avaient déjà été définies dans le champ conventionnel. D'ailleurs, elles venaient davantage soutenir les médecins en exercice dans ces zones que, plus spécifiquement, les médecins qui venaient s'y installer.

Dans la négociation de 2016, il n'aurait pas été de bonne politique de supprimer purement et simplement ce dispositif. Cela n'aurait pas été forcément bien compris. J'ai en revanche pris le parti d'essayer de le concentrer. Non pas en supprimant complètement les aides aux médecins déjà installés, mais en les réduisant, parce que ce sont des médecins qui n'ont pas de problème de revenus – ils sont même plutôt débordés.

J'ai considéré que la priorité était de « concentrer les feux » sur l'installation. Les jeunes médecins nous ont eux-mêmes dit que ce qui leur importait était d'avoir une aide rapide à l'installation. En effet, ils veulent pouvoir couvrir les dépenses liées à cette installation par une aide qui arrive très vite.

Les 50 000 euros que vous évoquez sont ainsi la somme, additionnée et améliorée, des mesures antérieures. L'aide annuelle qui durait trois ans a finalement été regroupée. On l'a améliorée. Ce n'est pas énorme, car on ne l'a pas doublée, mais on a fait en sorte que cette aide arrive très rapidement.

Voilà donc quelque chose qui n'est pas uniquement une création issue des services de la CNAMTS. En outre, même si les chiffres sont encore modestes aujourd'hui, parce que les zonages ARS ne sont pas encore complètement réalisés, on voit bien, objectivement, que des médecins regardent cela avec intérêt.

J'en viens à la régulation démographique pour les professions qui en sont dotées, comme celle des infirmières. Le dispositif existe depuis 2010 ; il a permis de faire face aux défis posés par une profession dont l'effectif est extrêmement dynamique. Nous avons réussi à réduire la dispersion et les écarts entre zones, que nous appelons, dans notre jargon, l' « indice de Gini » des infirmières.

Cet indice de dispersion était de 0,355 en 2008 et il s'est réduit à 0,315 en 2017. Il y a donc un petit peu moins d'infirmières dans les zones surdotées et un peu plus dans les zones sous-dotées. C'est un dispositif qui est totalement porté par la profession. Nous sommes en train, en ce moment même, de négocier un accord conventionnel avec les infirmières libérales. Il porte sur de nombreux sujets. Elles demandent de ne pas durcir un certain nombre de règles. On observe en effet que la fermeture de zones surdotées conduit des infirmières à s'installer dans des zones intermédiaires, afin de pouvoir exercer en réalité, au quotidien, une large part de leur activité dans les zones surdotées. Dans la convention, nous sommes donc en train d'imaginer des verrous supplémentaires pour limiter ce type de phénomène.

Avec les masseurs-kinésithérapeutes, nous avons aussi conclu un accord conventionnel fin 2017. Il introduit, ou réintroduit, le dispositif qui avait été signé en 2012, mais censuré par le Conseil d'État faute de base législative. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 en fournit désormais une.

Avant que le Conseil d'État ne censure ce dispositif, il avait cependant produit de premiers effets. Là aussi, nous sommes en effet en face d'une profession très dynamique dans sa progression démographique. Ce sont donc des dispositifs utiles, même s'ils sont imparfaits, car il y a forcément des voies de contournement. Leur intérêt reste cependant d'autant plus important que nous sommes en face de professions dont l'effectif croît de 3 % à 4 % par an.

J'en viens au dossier médical partagé (DMP). L'assurance maladie en a récupéré la responsabilité en 2016, conformément à la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé. Nous avons commencé à déployer le DMP dans neuf caisses primaires et allons le déployer dans la France entière à l'automne, c'est-à-dire en octobre prochain.

Nous essayons de comprendre ce qui avait conduit à son échec au cours des dix dernières années. Pour que le dispositif connaisse le succès, il faudrait en effet qu'il y ait beaucoup de DMP ouverts, alors qu'il n'y en a que 500 000.

Pour ouvrir un DMP, il faut qu'un médecin muni de sa carte professionnelle de santé (CPS) en face d'un patient muni de sa carte Vitale, prenne le temps de le faire. Or, est-ce la priorité, aujourd'hui, que de demander à des médecins de se consacrer à ce sujet ?

Nous avons donc, premièrement, prévu beaucoup de modalités possibles pour ouvrir un DMP. Les professions de santé, à commencer par les médecins, pourront continuer à le faire. Les patients assurés pourront le faire directement en ligne, ce qui n'était pas le cas auparavant, ou encore à l'accueil des caisses primaires, comme la loi le prévoit. Nous accueillons ainsi beaucoup de monde dans les caisses primaires.

Mais, surtout, nous demanderons aux pharmaciens et aux infirmières d'ouvrir des DMP. C'est déjà prévu dans la convention passée avec les pharmaciens et nous sommes en train d'examiner ce point avec les infirmières en ce moment même. Voilà comment nous pouvons envisager d'ouvrir rapidement des millions de DMP. Je rappelle qu'il faut une décision du patient pour qu'il y ait ouverture de son DMP.

Deuxièmement, il faut qu'il y ait des données dans le dossier. Ce n'était pas le cas auparavant, de sorte que nous commençons par injecter dans le DMP deux années de consommation de soins tels qu'ils sont enregistrés dans nos bases. L'information est présentée de manière médicalisée pour que ce soit une donnée utile aux professionnels de santé.

Mais nous voudrions compléter ces premières données par toutes les informations médicales utiles venant des établissements de santé, des laboratoires de biologie, des cabinets médicaux de ville… Ce travail est en cours. Progressivement, les systèmes d'information permettront l'alimentation automatique du DMP.

Troisièmement, il faut que les patients considèrent que le DMP leur est utile et qu'il soit pour eux une réalité. Nous avons donc d'emblée réfléchi à mettre à la disposition des patients une application mobile leur permettant d'accéder très facilement à leurs informations médicales. Cette application est aujourd'hui disponible sur le Store. Elle passe encore par des modes d'authentification très sécurisés que la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) nous a demandé de respecter. C'est parfois un peu lourd, mais nous verrons comment essayer de simplifier l'accès.

Tels sont les trois éléments qui nous permettent d'espérer que le DMP devienne ce carnet de santé numérique pour les patients et cet outil de coordination pour les professionnels dont se dotent tous les pays ayant un système de santé un peu organisé, structuré et coordonné.

Sur le bilan des rémunérations de 2015, suite à une négociation tenue en 2014, il y a eu un règlement arbitral, le 2 février 2015, sur les maisons et pôles de santé, c'est-à-dire sur les structures d'exercice pluriprofessionnel regroupé.

Comme il s'agissait d'un règlement arbitral, nous avons repris la négociation en 2017. Ainsi, nous avons conclu un accord conventionnel avec toutes les professions de santé le 20 avril 2017. Aujourd'hui, un peu plus de 500 structures sont donc conventionnées. Elles bénéficient d'une aide moyenne qui approche les 70 000 euros par an et qui couvre notamment des obligations d'ouverture, en termes d'amplitude horaire.

Ce qui fait la valeur ajoutée de ces structures, c'est cependant la notion de travail collectif et de coordination. Nous rémunérons donc une fonction de coordination au sein de la structure et finançons des systèmes d'information partagée parce qu'il n'y a pas de travail coordonné sans information partagée.

La question est de savoir si nous allons voir un nombre croissant de structures entrer dans ce dispositif. Nous observons, entre 2016 et 2017, une progression un peu plus forte que ce que nous avions anticipé au moment de la négociation de cet accord. En particulier, les structures rassemblent davantage de professions de santé et accueillent davantage de patients que ce que nous avions anticipé il y a un an. Il y a donc une dynamique qui se poursuit.

Nous souhaitons l'accélérer. La seule vérité sera celle des chiffres des deux ou trois prochaines années. Du réseau de l'assurance maladie, nous recevons des retours positifs : un certain nombre de médecins et d'équipes de soins primaires s'intéresseraient à ce dispositif. Il ne sera pas, évidemment, la seule réponse, mais il en constitue certainement une, très importante et très structurante.

Pour augmenter la capacité de réponse à la demande médicale, je pense en effet que le vrai levier est de travailler sur l'organisation des soins et l'optimisation de la ressource médicale existante.

Je pense notamment aux communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), car tout le monde ne souhaitera pas constituer une société interprofessionnelle de soins ambulatoires (SISA) et s'associer. Il s'agit ainsi de prendre les ressources médicales qui existent et de faire en sorte que le médecin passe prioritairement son temps à soigner, que son temps médical « se libère », parce qu'on dégage plus de temps pour le soin. Cette délégation de certaines tâches à d'autres professions de santé, dans un cadre juridique et financier équilibré, me paraît être une réponse pragmatique.

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Quels seraient les freins à la mise en place de dispositifs comme celui-ci ?

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Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

Du fait du poids de l'histoire et des habitudes, les professions de santé privilégient un exercice libéral. Certes, il peut y avoir des regroupements : des cabinets comptent aujourd'hui deux ou trois médecins, voire davantage ; des regroupements de cabinets infirmiers ou de kinésithérapie existent aussi. Mais il n'y a pas, aujourd'hui en France, d'appétence forte pour des structures d'exercice plus collectives. Ce n'est pas le modèle dans lequel chaque profession se projette.

S'il y a des maisons de santé, il y en a moins qu'il n'en faudrait. Nous sommes très loin du modèle qu'on peut observer dans d'autres pays autour de nous, où des structures de soins primaires atteignent d'emblée une taille critique.

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Qu'est ce qui permettrait ce changement de paradigme par rapport à ce que vous décrivez ? Qu'est ce qui permettrait de surmonter ces difficultés à travailler ensemble et à se coordonner ?

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Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

C'est en effet la question décisive, celle de savoir quels sont les leviers qui pourraient, demain, conduire des professionnels à évoluer dans leur mode et leur méthode d'exercice.

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Le premier frein, sont-ce vraiment les habitudes des médecins et leur façon d'exercer, ou bien est-ce autre chose ? Est-ce une mentalité à changer, ou faut-il plutôt chercher du côté administratif, opérer des changements dans le fonctionnement d'autres institutions ?

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Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

Les jeunes générations privilégient très fortement le travail dans des équipes regroupées, si possible pluriprofessionnelles. Peu de jeunes médecins viennent s'installer de manière isolée. Quand on en voit et qu'on les retrouve quelques années plus tard, on observe, d'ailleurs, que leur tâche est évidemment beaucoup plus difficile. Quand on examine le flux des installations, c'est cependant un phénomène minoritaire, du moins en médecine générale.

En revanche, l'essentiel des médecins en exercice aujourd'hui est en exercice depuis de nombreuses années, parfois vingt ans, parfois trente ans. Ils ont pris des habitudes, gèrent un cabinet qui tourne et ne manquent pas de travail. Leur dire qu'il est urgent de modifier leur cadre d'exercice pour déplacer leur cabinet et s'associer avec des professionnels qu'ils ne connaissent pas n'est pas nécessairement évident, quand on a des journées aussi chargées.

La vraie question est de savoir comment nous parvenons, dans les prochaines années, à envoyer des signaux, économiques et autres, suffisamment forts pour que les lignes bougent. Je ne crois pas, là encore, à une forme de menace. J'ai parfois entendu des propositions de déconventionnement de tous ceux qui ne seraient pas en mode d'exercice coordonné d'ici quelques années. Je ne crois pas à un déconventionnement de qui que ce soit, compte tenu de l'importance de l'enjeu des médecins dans les territoires.

En revanche, je crois qu'il est très important que les pouvoirs publics, l'assurance maladie et la stratégie nationale de santé portée par le Gouvernement soient extrêmement clairs sur la ligne à atteindre, mais aussi que le travail soit réalisé avec les syndicats médicaux et avec les unions régionales des professionnels de santé (URPS). Car ce sont eux aussi qui seront, autant que les ARS et l'assurance maladie, les vrais ambassadeurs de ce nouveau mode d'exercice. À l'appui de quoi, il faudra au demeurant mettre en place les aides financières nécessaires.

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Je partage votre analyse. La prise en charge de la maternité a été revalorisée ces dernières années, mais elle reste aujourd'hui notoirement insuffisante au regard du montant des revenus d'un médecin. Quant à la prise en charge de la maladie, le délai de carence est très largement supérieur à ce qui se pratique partout ailleurs. Ne pensez-vous pas qu'il faudrait, de ce point de vue, rapprocher autant qu'il est possible le mode d'exercice libéral du statut salarié, de façon à faciliter l'installation en libéral ?

S'agissant du DMP, qui va se déployer dans les prochains mois, le Président de la République parlait hier de l'importance de la prévention. Je me réjouis qu'elle devienne enfin une priorité de santé publique. Est-ce que vous pensez que, dans le DMP, on pourrait intégrer un parcours de prévention permettant aux médecins de protection maternelle et infantile (PMI) de communiquer avec le médecin scolaire, avec les médecins du travail, avec le médecin généraliste et, éventuellement, avec d'autres praticiens ?

Ma troisième question portera sur l'organisation territoriale. Vous avez dit à juste titre, monsieur le directeur général, qu'il fallait favoriser la coordination, dans les territoires, entre les médecins et les autres professionnels de santé. Mais on sait aussi que la permanence des soins ne serait alors pas toujours assurée, ou systématiquement assurée, par les médecins. Or, aujourd'hui, une infirmière qui travaille à toute heure du jour et de la nuit n'est pas rémunérée sur des périodes de temps de garde. Est-ce qu'il peut être possible d'imaginer que, demain, d'autres professionnels de santé que les médecins puissent être rémunérés au titre des gardes qu'il pourrait effectuer dans le cadre de la permanence des soins ?

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Vous avez évoqué les aides à l'installation. Le retour est visiblement mitigé si on examine l'apport que la société peut en tirer. Vous êtes par ailleurs très méfiant et très inquiet au sujet des mesures coercitives, point de vue que je partage.

En revanche, je pense qu'un médecin, dans son cycle d'études, devrait avoir comme passage obligé un stage dans le cabinet d'un médecin exerçant en libéral. Il y aurait à cela deux bénéfices : la découverte de l'exercice libéral de la profession et la découverte d'un territoire, base d'un possible choix de vie. Je pense que les médecins en place doivent aussi être incités à former un confrère. De quelle manière pourrait-on les accompagner ?

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On parle beaucoup des jeunes médecins, on parle de mesures coercitives, on parle de l'attractivité des zones concentrées des grandes agglomérations… Mais est-ce que vous explorez les possibilités d'aller plutôt vers une sensibilisation des médecins qui exercent déjà depuis plusieurs années ? On peut en effet s'installer dans une grande agglomération, puis, quand on a un peu plus d'âge et que les enfants sont partis, avoir peut-être envie de recommencer une forme de vie. Comment travaillez-vous là-dessus ?

La question de la prévention vient aussi d'être abordée. En ce domaine, est-ce que vous vous intéressez à la médecine thermale ?

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Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

Vous avez évoqué la question des revenus de substitution pendant la maternité. Vous savez que nous avons évolué sur ce sujet, puisque, maintenant, depuis un avenant conclu il y a un, il existe une aide conventionnelle d'un peu plus de 3 000 euros par mois pendant trois mois, qui s'ajoute aux éléments de revenus déjà prévus par le régime de prestations versées aux médecins libéraux. C'est un élément nouveau significatif qui apporte, je crois, une réponse forte.

S'agissant en revanche des arrêts de maladie, il y a, en effet, un délai de carence de 90 jours. Le sujet a été évoqué dans nos négociations de 2016. Mais nous avons buté sur le fait que la convention n'a pas la possibilité juridique de modifier ces règles, car elles relèvent de la loi. Ce délai de carence devrait être ramené à une durée moindre, et la contribution des médecins s'ajuster en conséquence, pour équilibrer le régime. Le cas échéant, il faudrait prévoir aussi une prise en charge des cotisations pour les médecins en secteur 1 ou pour ceux qui, étant en secteur 2, ont souscrit à l'option tarifaire maîtrisée. Pour le reste, nous ne prenons pas en charge les cotisations maladie des médecins du secteur 2. Aujourd'hui, d'ailleurs, ces médecins ont cependant la possibilité de souscrire des contrats de prévoyance supplémentaire.

Le DMP pourra-t-il contenir des éléments permettant d'organiser un parcours de prévention ? Il serait évidemment utile que le DMP rassemble toutes les informations à la fois, y compris celles qui pourraient relever de la prévention, de même qu'il serait utile qu'il puisse être « accessible » à tous les professionnels que le patient consulte, rencontre ou contacte.

Je pense que le DMP a vocation à être un instrument très puissant de rassemblement de l'information. Il faut évidemment essayer de faire en sorte que cette information soit la plus structurée et la plus synthétique possible, pour éviter qu'il ne devienne une immense bibliothèque où les médecins perdent beaucoup de temps à rechercher et trouver l'information utile. Mais le DMP ne sera pas forcément le seul outil de coordination entre des professionnels qui auront probablement, demain, aussi vocation à se doter de systèmes plus enrichis, en termes de coordination, sur des territoires donnés.

En revanche, le DMP apportera une vraie fonction de partage de l'information, puisqu'il couvrira toute la population et, potentiellement, l'ensemble de la consommation de soins, d'où qu'elle vienne. Ce DMP accessible en tout point du territoire par tous les professionnels de santé formera comme une sous-couche ou une méta-couche permettant d'enrichir des systèmes d'information plus localisés et plus thématisés ayant eux vocation à se développer demain.

Quant à l'organisation territoriale et à la question de savoir comment on rémunère la garde éventuellement prise en charge par d'autres professionnels de santé que les médecins, une permanence des soins est déjà intégrée dans le fonctionnement même des cabinets infirmiers, dont les membres se relaient sur la semaine et le week-end. Donc, à ce stade, je suis réservé sur le fait de devoir rémunérer cette notion de permanence, aujourd'hui déjà assurée par un partage du temps qui s'opère relativement bien.

D'ailleurs, en ce moment, je négocie avec les syndicats infirmiers et cette demande ne m'est pas exprimée. Une permanence a été instituée pour les chirurgiens dentistes. Mais, aujourd'hui, je ne sens pas de demande qui s'exprime fortement de la part d'autres professions.

Sur les aides à l'installation, dont vous dites qu'elles ne produisent pas l'effet escompté, elles n'ont certes pas d'effet décisif, mais personne n'a jamais pensé non plus que ce pourrait être le cas. Elles représentent un budget somme toute raisonnable. Le dispositif dont nous sommes partis en 2016 coûtait 30 millions d'euros par an, à comparer aux 23 milliards d'euros que représentent les honoraires. Quand on retire de ces 30 millions d'euros ce qui était dédié aux médecins déjà installés, et qu'on isole la partie ciblée sur les jeunes qui s'installent, on arrive à 10 millions d'euros par an.En tout état de cause, j'assume complètement le fait qu'à un moment donné, un jeune médecin qui décide de s'installer dans un territoire sur lequel les besoins de santé sont avérés puisse recevoir une aide à son installation. Je ne vois pas où est la difficulté à proposer ce type de dispositif.

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Mais, si vous n'êtes pas en mesure de montrer que c'est efficace, comment pouvez-vous maintenir ces aides ? Je ne comprends pas que vous puissiez agir ainsi si vous ne savez pas si elles sont efficaces ou non.

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Pour compléter ce que dit notre président, j'en viens à l'avenant de la convention médicale de 2007, qui prévoyait une majoration de 20 % des honoraires des généralistes libéraux exerçant dans des zones sous-dotées. Le coût s'élevait à 20 millions d'euros pour 773 bénéficiaires en 2010, selon la Cour des comptes, qui a aussi indiqué que l'apport net induit de médecins s'élevait à… 50 en trois ans !

Sur les options de la convention médicale de 2011 relatives à la démographie ainsi qu'à la santé territoriale et à l'aide à l'installation, je rappelle que 90 % des médecins bénéficiaires étaient des médecins déjà installés. Le montant moyen des aides versées aux nouveaux médecins était en outre inférieur à celui des aides versées aux médecins déjà installés.

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Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

C'est pourquoi nous avons très fortement réduit, dans la négociation du nouvel accord de 2016, la partie du dispositif qui aidait les médecins déjà installés. Nous avons décidé de recentrer le dispositif sur l'aide à l'installation de nouveaux médecins dans ces zones. Les zonages ARS sont en train d'être réalisés, avec une extension du nombre de zones. Nous ferons le bilan de ce dispositif tout récent le moment venu, quand on aura suffisamment d'historique pour juger.

Mais je connais déjà des exemples très précis de médecins qui ont, en effet, entre plusieurs territoires d'installation possibles, privilégié un territoire éligible à cette aide, territoire parfois même placé en zone extrêmement sous-dense. Donc, en supprimant cette aide, on aura effectivement économisé 10 millions d'euros. Mais je ne suis pas sûr que, ce faisant, on aura fait avancer la cause de l'installation dans les zones sous-denses.

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Dans un récent rapport, relatif aux dépenses de 2016, le montant était estimé à 46 millions d'euros.

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Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

Il s'agit alors de l'ensemble des professions de santé, y compris des professions de santé pour lesquelles nous avons des dispositifs de régulation des zones surdotées. Or, quand on met en place des dispositifs de régulation interne sur des zones surdotées, nous mettons aussi en place des incitations pour les zones sous-dotées. C'est symétrique.

Pour ce qui est des médecins, nous avions trente millions d'euros sur ce dispositif, dont les deux tiers allaient aux médecins déjà installés, ce que j'ai modifié. Aujourd'hui, un médecin déjà installé va recevoir seulement un tiers de ce qu'il recevait précédemment. Nous allons ainsi concentrer l'aide sur les jeunes installés. Je pense que c'est un signal qu'il faut maintenir. Nous verrons, dans trois ou quatre ans, si ce signal a conduit ou non des médecins, non à choisir entre le centre de Toulouse et le fin fond du Lot, mais à opérer des choix de localisation sur un territoire donné : par exemple, dans un département, d'aller plutôt dans le canton ou dans les zones où les besoins en santé sont les plus forts.

Quand il y a sous-densité médicale, d'autres handicaps s'attachent aussi souvent au territoire concerné, qui manque parfois d'attractivité. Le fait de proposer une aide à l'installation peut donc avoir du sens. On peut décider de la supprimer, mais je pense que cela ne fera pas avancer la cause des déserts médicaux. La supprimer pour le seul motif qu'elle ne serait pas décisive serait aujourd'hui une erreur.

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Confirmez-vous, monsieur le directeur général, qu'on va traverser dix années extrêmement difficiles ? Tous ceux qui sont passés avant vous sur ce fauteuil nous ont bien expliqué qu'en termes de démographie, le pire était devant nous. On ne saurait donc dire : « On verra bien dans trois ou quatre ans ce qui se passe ! »

S'agissant des ARS, je déplore que l'étude des zonages accuse un décalage de deux ans par rapport à la réalité. Comment la CNAMTS n'est-elle pas capable d'établir la meilleure cartographie, alors que, disposant par définition des feuilles d'assurance maladie, elle doit connaître la localisation des praticiens ?

Deuxièmement, vous avez dit qu'on verrait quelles sont les aides financières à mettre en place. Mais n'est-il pas destructeur de dire que, tant qu'on ne se sera pas rendu maître des leviers financiers, on n'arrivera pas à rétablir un exercice libéral de l'activité professionnelle ? Connaissez-vous, d'ailleurs, d'autres professions libérales pour lesquelles il y a des aides financières ? Je suis prêt à voir les contre-exemples.

Troisièmement, notre collègue a posé une très bonne question sur la prévention. Mais je pense qu'il faut une personne sur qui faire reposer l'organisation de la prévention, une tête de pont percevant une rémunération pour appliquer le schéma de prévention. Que se passe-t-il en effet si vous ne faites pas de médiation ? Prenons l'exemple de ma petite ville de Châteaudun, qui est en train de perdre son centre de médecine du travail. Comment les salariés vont-ils aller à Chartres ? Les deux villes ne sont pas reliées par le train. Nous avons besoin, me semble-t-il, d'un plan extrêmement ambitieux.

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Vous parlez, monsieur le directeur général, d'aide aux installations pour les jeunes médecins. Mais, tout au début, en préambule, vous disiez que presque toutes les zones sont sous-dotées. Cela signifierait qu'il devrait y avoir une aide à l'installation massive pour tous les médecins qui vont sortir des études et qui veulent bien être généralistes libéraux, quelle que soit leur zone d'exercice. Mais est-ce bien le noeud du problème ?

Je reviens toujours à la question des mentalités, sur les possibles délégations de tâches, sur la coordination et sur la prévention. Qui va effectivement se charger de ces sujets ? J'ai l'impression qu'on pose des rustines financières qui nous laisseront sans solution dans trois, quatre ou cinq ans, quand on sera vraiment au creux de la vague.

Est-ce que vous croyez vraiment que le médecin qui sort d'une faculté de médecine et qui sait que tout le monde l'attend à bras ouverts, quel que soit le secteur où il va aller, sera sensible à l'aide financière que vous allez lui apporter et que celle-ci va changer la donne ? Il y a peut-être d'autres solutions à envisager avec les syndicats de médecins et avec les professionnels de santé, pour arriver à des solutions gagnant-gagnant pour tout le monde, et surtout pour la société.

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Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

Je vous ai dit que j'avais hérité d'un dispositif qui avait été en quelque sorte détourné, puisqu'on rémunérait davantage les médecins déjà installés que les nouveaux arrivants. C'est pourquoi, si nous avons maintenu ce dispositif, nous l'avons recentré sur les nouveaux installés. Je pense que le supprimer purement et simplement n'aurait pas été compris. Et ce ne sont pas les dix ou quinze millions d'euros que cela coûte qui constituent l'enjeu de notre affaire.

Lorsque je vous ai présenté tout à l'heure les quatre leviers d'action à notre disposition, je n'y ai pas inclus les aides à l'installation. Au nombre des quatre leviers, il y a en revanche les stages, qui sont évidemment un élément très important. La convention de 2016, pour la première fois, a d'ailleurs introduit une rémunération du maître de stage.

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Seriez-vous prêt à la revaloriser ? Certes, une aide financière ne relève pas normalement de vos missions…

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Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

Si, bien sûr. Nous fixons les rémunérations des médecins conventionnés : nous pouvons les rémunérer pour leur acte, pour leur système d'information, pour leurs murs, pour leur installation, pour leur équipement, pour la protection sociale… Nous fixons ainsi le cadre financier de l'exercice économique des médecins conventionnés. C'est au coeur de nos missions.

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La rémunération du maître de stage pourrait donc entrer dans le champ. Fin 2014, 90 % des aides à l'installation allaient bien à des médecins déjà installés…

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Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

Dans l'accord de 2016, j'ai modifié ce dispositif pour faire que ce ne soit justement plus le cas : on a réduit drastiquement les aides aux médecins déjà installés, vu qu'il y avait un effet d'aubaine n'ayant pas lieu d'être. En revanche, j'ai maintenu le dispositif en le concentrant sur les médecins qui décident de s'installer dans une zone sous-dense.

Car, si toutes les zones sont en tension, il y en a qui sont, aujourd'hui, objectivement plus en tension que d'autres. L'autre solution était de supprimer purement et simplement les aides existantes.

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Mais on ne vous a pas dit de les supprimer. Il s'agit d'en mesurer l'effectivité.

Comment fait-on pour que les choses aillent mieux alors qu'elles s'aggravent ? Il y a l'outil de formation. Je propose depuis longtemps des stages dans le cadre de l'internat. Nous avons vu le président de la conférence des doyens sur ce sujet. Pour les maîtres de stage, comment peut-on les rémunérer un peu plus qu'on ne le fait ? Dans l'artisanat, une petite rémunération est donnée aux maîtres de stage.

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Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

Aujourd'hui, on a aujourd'hui une rémunération des maîtres de stage qui est versée par les facultés de médecine. Cette aide n'est pas énorme. Donc, en 2016, alors que ce n'est pas notre rôle, nous avons décidé de mieux rémunérer les maîtres de stage, grâce à une majoration de 50 % de l'indemnité de stage versée aux médecins libéraux qui accueillent des internes et des externes en stage en ville.

Peut-être faudrait-il aller jusqu'à la multiplier par deux, trois ou quatre, en considérant que l'assurance maladie doit se substituer aux facultés de médecine et que c'est à nous d'apporter l'essentiel de la rémunération des maîtres de stage. Je crois d'ailleurs aussi qu'il faudrait réfléchir à la rémunération des internes eux-mêmes, sujet qui nous échappe aujourd'hui, puisqu'ils ne sont pas conventionnés.

L'élément-clé à suivre dans les prochaines années, ce ne sont pas les aides à l'installation, mais le soutien financier puissant que nous devrons apporter aux médecins et autres professionnels de santé qui décident de travailler différemment. Mettre en place des aides financières ne suffira pas. Pour qu'ils se saisissent des nouvelles opportunités, il va falloir qu'il y ait une forme de mobilisation collective, institutionnelle et professionnelle, nationale et territoriale, pour que, dans les deux ou trois années qui viennent, les pratiques et les organisations évoluent. Si elles ne le font pas, nous serons devant un échec majeur. Mais les ingrédients de cette approche ne sont pas si simples à assembler. Il ne suffira pas, ni d'écrire des rapports ni de signer des conventions nationales à la CNAMTS.

Quand il s'agit d'amener des médecins ou des professionnels qui ont un exercice lourd à des réunions, le soir, où on leur explique qu'il faut qu'ils travaillent différemment en s'associant à d'autres, en se coordonnant, en investissant sur des fonctions administratives de coordination des outils informatiques, c'est-à-dire en faisant plus que ce qu'ils font déjà, ce n'est pas la perspective d'une superbe aide financière qui sera nécessairement déterminante.

Il va plutôt falloir, à un moment donné, trouver le cadre de responsabilité qu'il appartiendra aux pouvoirs publics, mais aussi aux syndicats professionnels, de porter, pour que quelque chose se passe, qui prenne la forme d'une sorte d'électrochoc.

Vous savez, que des annonces seront faites par le président de la République dans les prochaines semaines ; elles ne porteront pas que sur l'hôpital, si je comprends bien. Car la question de l'hôpital et la question de l'organisation des soins de ville sont totalement connectées. Je m'attends donc à des initiatives fortes qui interviendront prochainement.

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On peut faire le constat que la médecine libérale n'attire plus. Il y a actuellement plus de médecins salariés que de médecins libéraux. Or, moins il y aura de médecins libéraux, plus les territoires sensibles connaîtront de difficultés. Comment faire, dès lors, pour que les médecins s'installent en libéral ?

Je ne crois pas que ce soit un problème de rémunération. Il faut plutôt rendre du temps médical au médecin. Actuellement, les médecins sont surchargés par des tâches administratives, par l'informatique… J'étais encore médecin il y a peu et je recevais tous les jours, ou presque, des papiers de la sécurité sociale dont je ne comprenais même pas le sens ; la plupart du temps, il s'agissait de remboursements. Je n'y répondais même pas et les mettais dans un tiroir. Je n'avais pas le temps, car mon boulot, ce n'était pas de remplir des papiers, mais de soigner des personnes. Comment faire pour rendre la médecine libérale plus attractive et qu'est-ce que vous avez imaginé pour y contribuer ?

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Je vais prendre l'exemple de la petite ville de Sarlat, qui compte 9 000 habitants. Depuis longtemps, les médecins s'y sont organisés en centres de santé, assistés ou non de secrétariats. Pensez-vous que la transmission de ces cabinets soit plus facile ?

Mon autre question concerne la télémédecine. N'y aura-t-il pas de risque de surconsommation, quand elle va se répandre ? Comment vont être décidés les tarifs des consultations et les remboursements ?

S'agissant du DMP, offrira-t-il aussi le moyen d'envoyer au pharmacien une ordonnance qui sera directement lisible ? Actuellement, on recourt souvent au fax, ce qui peut poser des problèmes de discrétion.

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Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

S'agissant de la sensibilisation de médecins qui sont déjà en exercice, et dont on pense qu'ils pourraient peut-être envisager de changer leur lieu d'exercice, nous n'avons pas de schémas déjà définis, mais nous souhaitons proposer, là aussi, une incitation financière, qui cible plutôt des médecins spécialistes – je vous ai dit qu'ils étaient de plus en plus nombreux à s'installer dans des zones urbaines.

Nous proposerions une revalorisation de 25 % de leurs actes et consultations quand ils vont exercer dans une zone sous-dense. Je ne crois guère que nous arriverons à dissuader des spécialistes de s'installer dans des zones globalement bien pourvues et à les persuader de venir plutôt, avec leurs familles, dans des zones qui ne le sont pas. Je pense, en revanche, qu'il peut être tout à fait rationnel et intéressant de leur proposer des consultations avancées, une fois par mois, notamment dans des maisons et pôles de santé qui peuvent les accueillir.

Sur l'attractivité de la médecine libérale, il est vrai qu'en termes relatifs nous connaissons une stagnation du nombre de médecins libéraux. Leur nombre ne diminue pas, mais la médecine salariée augmente. En termes relatifs, il y a donc, évidemment, un décrochage. Mais nous n'avons pas moins de médecins libéraux aujourd'hui qu'il y a cinq ans, seulement une baisse des médecins généralistes et une légère hausse des médecins spécialistes.

À quoi tient cette attractivité du mode salarié ? À l'absence de l'insécurité personnelle liée à l'exercice libéral. Deux points sont à prendre en considération. D'abord, quand on est médecin salarié, on se concentre sur sa vocation médicale ; on n'a pas à gérer la complexité globale de l'exercice professionnel dans toutes ses dimensions. Ensuite – et cela compte beaucoup pour les jeunes – l'exercice dans des structures collectives est plus attractif que dans des cabinets médicaux qui sont encore souvent de petite taille.

L'assurance maladie est très consciente de ce que l'une de ses contributions est d'essayer de simplifier l'exercice quotidien de la profession de médecins. Concrètement, nous avons essayé d'identifier ce que pouvaient être des leviers de simplification. Il y en a deux. Comme vous l'avez parfaitement dit, monsieur Isaac-Sibille, le gros des courriers que vous recevez correspond aux « indus », c'est-à-dire aux cas où vous avez réalisé un tiers payant et où vous n'êtes pas rémunéré de l'acte que vous avez réalisé.

Dans le cadre de la réforme du tiers payant, nous avons modifié les choses très concrètement, pour tenter de réduire ou supprimer toutes les causes de rejet. Nous avons défini les deux principaux types de rejet qui ne devraient pas exister. Le premier était celui du patient hors parcours ; cela représentait 30 % des cas. Dans ce cas, nous ne payions pas le médecin pour l'acte ou la consultation qu'il avait effectué. Il y a un an et demi, ce motif de rejet a été supprimé.

Le deuxième motif de rejet que nous avons supprimé est celui relatif aux problèmes des droits de l'assuré : l'assuré a changé de caisse primaire ou de régime, ou bien il ne bénéficie plus – ou pas encore – de l'exonération du ticket modérateur… Quand il y avait un décalage entre la facturation des médecins et les droits, le rejet était automatique. Nous avons désormais introduit une règle selon laquelle le médecin facture sur la base de la carte Vitale et des droits lus sur cette carte, quand bien même ces droits ne sont plus à jour. Il n'y a plus de rejet pour ce motif, c'est à nous d'en faire notre affaire.

Que fait-on, par ailleurs, pour les gens qui n'ont pas leur carte Vitale ? Nous avons mis en place un système de vérification des droits en ligne, qui effectue la facturation sur la base des droits qui sont à jour dans nos bases. Pas moins de 50 % des médecins y recourent déjà. Cela réduit drastiquement le nombre des rejets, qui constituaient la pollution quotidienne dont vous me parliez.

Les affections de longue durée (ALD) constituent une autre source d'encombrement, notamment pour les généralistes. L'une de leurs charges administratives consiste à opérer régulièrement le renouvellement de ces ALD. Nous l'avons doublement simplifiée. D'une part, depuis un an, nous avons levé les contrôles a priori sur toute une série de pathologies pour lesquelles le taux d'avis favorables était déjà de 98 % ou 99 %. Après cette levée des contrôles, quelques mois ont passé et le nombre d'ALD a légèrement augmenté, mais nous connaissons maintenant exactement les mêmes chiffres qu'auparavant. C'est donc moins de travail pour les médecins, grâce à un téléservice désormais utilisé par les médecins dans 60 % des cas.

Deuxièmement, s'agissant des ALD pour lesquelles le renouvellement est automatique car ce sont des pathologies pour lesquelles il n'y a pas de guérison possible, nous déchargeons complètement le médecin de cette tâche. En revanche, nous lui demandons, pour les autres patients au sujet desquels la question doit être posée et tranchée, d'instruire la demande auprès de l'assurance maladie. Nous allons ainsi réduire de 70 % les formalités liées au renouvellement.

Depuis deux ans, nous avons donc fourni des réponses reconnues et saluées par les médecins libéraux, avec lequel je suis en dialogue permanent.

Est-ce que les centres de santé ou les structures collectives d'exercice sont des structures plus attractives que l'exercice libéral classique isolé ? La réponse est oui, puisque, quand on regarde ce que sont les choix d'exercice des jeunes générations, on constate qu'elles privilégient – plébiscitent même – des formes d'exercice de ce type, qu'elles soient salariées ou libérales, dans des maisons, pôles de santé ou centres de santé.

Par définition, quand on est dans ce type de structure et qu'arrive le départ à la retraite d'un des médecins, il y a de plus fortes chances d'attirer un jeune médecin qu'il n'y en a pour un médecin travaillant seul dans un cabinet situé dans une zone où il y a beaucoup de pression.

S'agissant de la télémédecine, nous avons introduit deux axes dans le droit commun des actes médicaux, à savoir la téléconsultation et la téléexpertise. Nous avons laissé dans le champ expérimental la télésurveillance des patients, car c'est un objet plus difficile à cerner. Je ne crois pas que la téléconsultation sera inflationniste ; une téléconsultation requiert en effet du médecin le même temps médical qu'une consultation « présentielle ». Le temps médical étant contraint, je ne crois pas que, parce qu'on bascule des consultations présentielles vers des téléconsultations, il y aura plus de consultations.

J'espère d'ailleurs que les téléconsultations vont se développer. Nous ferons en sorte que le dispositif puisse intégrer d'autres professions que le médecin. Après avoir signé un accord avec les médecins, nous voulons signer des accords avec les infirmières, avec les pharmaciens et avec d'autres professions. On voit bien l'intérêt d'avoir une télé consultations pour un patient ou une patiente à domicile qui est en perte d'autonomie et qui ne peut plus aller au cabinet médical.

Le médecin n'a pas forcément le temps de venir en visite ; l'infirmière qui passe tous les jours pourrait déclencher une consultation qui ne serait peut-être pas intervenue aussi rapidement, mais qui est médicalement très utile.

Les téléexpertises ne jouent pas, quant à elles, sur l'espace, c'est-à-dire sur le temps de transport et la difficulté d'aller vers le médecin. Dans la téléexpertise, il n'y a en effet pas de patients présents : un médecin requiert l'expertise, par messagerie sécurisée, d'un autre médecin, à partir d'éléments cliniques documentés, pour obtenir un retour, souvent de second recours, sur une situation clinique complexe. Notre dessein est d'accélérer le temps de la réponse médicale, là où aujourd'hui il faut aller en consultation, puisque seules les consultations sont rémunérées. Demain, une telle expertise serait rémunérée, intervenant beaucoup plus rapidement que n'interviendrait une consultation en bonne et due forme.

Nous devons évidemment régler la question des prescriptions, que ce soit dans le cas de la télémédecine ou de manière générale. La plupart des pays autour de nous se sont dotés d'un dispositif de prescription électronique et dématérialisé. La France, de ce point de vue, est en retard. Je viens de lancer, dans trois territoires, une expérimentation portant sur une prescription électronique et dématérialisée entre médecins et pharmaciens. Je suis en pleine discussion avec les syndicats nationaux sur une possible extension de ce dispositif et j'envisage de passer à une généralisation dans les trois ans. Cela suscite des questions et des craintes auxquelles nous sommes en train de répondre, mais je pense que ce sera évidemment totalement nécessaire si on veut avancer.

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Malgré les aides dont nous parlons ici, on se rend bien compte que, malgré tout, il y a des zones où il n'y a pas de médecin, ou dans lesquelles les médecins prêts à partir à la retraite ne trouvent pas de remplaçant. Voilà la situation dans les zones sous-denses, comme vous les appelez. Le refléchage des aides dont vous avez parlé est-il trop récent pour se prêter à évaluation aujourd'hui ?

D'autre part, existe-t-il une aide pour les étudiants qui accepteraient d'aller pratiquer dans ces zones déficitaires ? Que prévoyez-vous, dans ce cas, pour les maîtres de stage qui assureraient le relais avec les jeunes étudiants ?

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Pour pratiquer la médecine, y compris en zone rurale, nous avons besoin d'infirmières. Peut-on évoquer leur cas ici ce matin ? Elles créent souvent un lien social important, puisque ce sont elles qui passent dans les familles, accompagnent les malades qui en ont besoin et leur prodiguent les soins. Or ces soins, pour peu qu'ils soient répétitifs, sont rémunérés à des niveaux que je qualifierais d'extrêmement faibles.

De surcroît, votre organisme semble assez pointilleux s'agissant de leurs indemnités kilométriques. Il y a un risque que ces infirmières, notamment en zone de montagne, renoncent progressivement à aller chez les patients faute d'une rémunération correcte. Elles ne demandent pas d'aide à l'installation ou d'autres subventions ou aides financières, mais attendent tout simplement d'être rémunérées à un juste niveau, et notamment au regard du service qu'elles apportent en matière de santé et de lien social. J'insiste aussi sur cet aspect-là.

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En zone urbaine, cela pose aussi des difficultés, en termes de stationnement, vu le coût du parking.

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J'ai été interpellée par une ancienne infirmière, qui m'a posé la question de savoir si la profession d'aide-soignante libérale était à l'étude. Il pourrait être très utile, dans nos zones rurales, que les infirmières puissent salarier une aide-soignante. Est-ce que ces possibilités sont d'actualité ?

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Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

Encore une fois, je ne vous ai pas dit aujourd'hui que je misais prioritairement, dans les leviers stratégiques, sur les aides à l'installation. J'ai seulement souhaité maintenir cet élément, parce qu'il existe déjà, mais en le recentrant sur ce qui nous paraissait être le coeur du sujet. Pour le reste, ce n'est pas là-dessus que les choses vont se jouer, mais sur les conditions d'organisation des soins et des conditions d'exercice.

Par ailleurs, il existe un dispositif qui n'est pas du ressort de l'assurance maladie et qui permet de contractualiser avec des étudiants en médecine, en finançant une partie de leurs études, en contrepartie de quoi ils s'engagent à exercer dans des zones déficitaires pendant un certain nombre d'années. C'est le contrat d'engagement de service public (CESP). Il n'a fonctionné que modérément, mais tous les différents outils doivent pouvoir être mobilisés, même si aucun n'est en lui-même décisif.

S'agissant du maître de stage, sa rémunération de droit commun relève de la faculté qui l'indemnise du temps qu'il consacre à cette activité. Nous y avons rajouté une couche d'aide supplémentaire, conventionnelle. Je suis convaincu que nous devrions certainement aller plus loin sur les stages, parce que, de la même manière que les internes occupent une fonction soignante très importante dans les établissements de santé, on pourrait tout à fait imaginer qu'ils occupent aussi une fonction soignante en médecine de ville. Il faut le favoriser davantage.

S'agissant des infirmières, je partage tout à fait ce que vous avez dit quant à leur rôle. Leur profession est aujourd'hui la profession du domicile. Ce sont elles qui suivent les patients ayant des problèmes de déplacement et de perte d'autonomie.

J'en viens aux indemnités kilométriques dont vous avez parlé. Les infirmières ont une rémunération qui est liée à leurs actes, mais aussi à leur déplacement. S'agissant de leurs indemnités de déplacement, 90 % d'entre elles sont, non pas kilométriques, mais forfaitaires, ce qui ne donne lieu à aucune difficulté. En revanche, dans les zones de montagne, nous sommes bien confrontés à un problème d'indemnités kilométriques, car nous y observons une pratique non conforme à la réglementation : des infirmières, par exemple, qui font une tournée pendant la journée et qui nous facturent chaque visite à domicile en comptant un trajet aller-retour entre le domicile de chaque patient et leur cabinet, comme si elles y revenaient entre chaque visite.

Il faut donc que nous sachions identifier les infirmières dont le volume d'honoraires est presque davantage lié à ce système de facturation en étoile qu'à leurs actes. Il y a évidemment un détournement, d'autant qu'une jurisprudence a conforté notre lecture de la nomenclature. Nous avons voulu reprendre le sujet avec les syndicats. Nous sommes en train, aujourd'hui, de négocier – des discussions vont avoir lieu encore cet après-midi – avec les syndicats nationaux d'infirmières, sur toute une série de sujets, dont celui-là. Si ce système de facturation en étoile s'est développé, cela renvoie sans doute à la spécificité de l'exercice en montagne, avec des temps de trajets plus longs d'un point à un autre. Nous sommes donc en train de réfléchir à un plafonnement : à la journée, il ne serait plus possible de nous facturer plus d'un certain quantum – 200, 250 ou 300 kilomètres – au titre du déplacement. Nous cherchons donc une solution qui maintiendra le système, mais plafonnera son emploi, pour éviter les pratiques qui nous apparaîtraient complètement déviantes.

Quant à la notion d'aide-soignante libérale, on voit bien aujourd'hui que la structure des honoraires des infirmières est très liée aux actes médico-infirmiers (AIS), c'est-à-dire non des actes techniques, mais plutôt des soins de nursing pour des personnes âgées. C'est un état de fait. Je n'ai pas connaissance, aujourd'hui, d'une quelconque réflexion qui consisterait à ce que l'on crée une profession d'aides-soignantes exerçant à titre libéral.

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Cela pourrait être attractif, donc, dans les territoires ruraux, pour l'accompagnement des personnes âgées. Il y a des structures qui salarient des aides-soignantes, mais peut-être leur donner la possibilité d'exercer à leur compte permettrait-il d'étendre le champ des accompagnements possibles.

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Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

Le métier d'aide-soignant s'exerce de manière salariée. Je sais que certaines structures infirmières salarient des aides-soignantes et que certains syndicats infirmiers réfléchissent à ces sujets. Mais, à ce stade, je n'ai pas de projet de créer une profession libérale conventionnelle des aides-soignantes.

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Je pense que l'exercice libéral incite à multiplier les actes, alors qu'à l'hôpital on voit, à mon avis, les patients de manière plus confortable. Tout cela est lié à la rémunération à l'acte. Quand on songe que la rémunération du généraliste est fixée à 25 euros, il y a quand même un vrai problème.

J'ai vu récemment qu'une mutuelle avait contractualisé, avec un syndicat, une visite de prévention à 125 euros, pouvant éventuellement durer trois quarts d'heure, dans une démarche de médecine de qualité. Une telle remise à niveau des honoraires ne pourrait-elle être une solution pour valoriser la médecine libérale ?

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Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

Dans la convention que nous avons signée en août 2016, il est prévu de revaloriser globalement les honoraires des médecins de 1,3 milliard d'euros. Nous sommes par ailleurs comptables de la soutenabilité du système d'assurance maladie…

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Je vous repose la question. À votre avis, combien un médecin devrait facturer par heure ? Je ne dis pas par consultation, mais par heure ; nous ferons la division ensuite.

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Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

Je connais les revenus professionnels des médecins, dans toutes les spécialités. On peut les prendre et les rapporter au nombre d'heures… Le revenu moyen d'un généraliste s'élève à plus de 83 000 euros. Pour les spécialistes, la dispersion est plus forte. La solution est-elle d'investir massivement dans la revalorisation des actes ? Non, à mon sens.

J'ai vu cette visite de prévention financée par un assureur complémentaire privé. Il sait pouvoir la financer à ce niveau, parce qu'il sait qu'elle ne concernera pour lui qu'un nombre très réduit de patients. Et je ne sais pas si cette visite durera trois quarts d'heure ou non, car personne ne chronomètre les consultations dans les cabinets médicaux.

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Je vous pose donc la question directement : quelle est la moyenne de malades vus par un généraliste chaque jour ?

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Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

Entre 20 et 30. Oui, une trentaine de consultations par jour.

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Vous nous dites que la revalorisation ne sert à rien ?

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Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

Je ne voudrais pas que mon propos, qui est retransmis, soit mal interprété. Nous avons, en 2016, procédé à des revalorisations importantes des actes et des consultations médicales : 1,3 milliard d'euros. Ce n'est pas rien, et cela montre que nous avons souhaité investir fortement sur l'exercice libéral, en assumant une priorité en faveur des médecins généralistes.

Pourquoi vous dis-je aujourd'hui que la priorité, en termes d'investissements, ne me paraît pas être la valeur des actes ? Parce qu'il me paraît plus essentiel d'investir dans l'organisation et dans la structuration des soins, c'est-à-dire dans les moyens donnés directement aux médecins qui veulent exercer de manière mieux coordonnée.

Il faut investir directement dans l'appui administratif, dans des outils et des ressources humaines permettant que des maisons et des pôles de santé se créent, de sorte que les CPTS soient non seulement une organisation informelle de médecins, mais apportent aussi des appuis administratifs, des ressources et des outils informatiques. C'est ainsi que l'exercice coordonné va se construire. En augmentant demain les rémunérations de chacun des médecins libéraux, je ne suis pas certain que nous les conduirions directement à décider d'investir ce supplément de rémunération dans des outils partagés avec leurs confrères. Mieux vaut directement rémunérer ce qui constitue le levier décisif d'un exercice coordonné.

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Vous venez de dire : « je suis pas certain ». C'est déjà différent de votre réponse de tout à l'heure. Une maison de santé pluridisciplinaire (MSP) n'est pas payée par les médecins, mais, dans 95 % des cas, par la puissance publique. Elle offre aux médecins des conditions économiques extraordinaires, ce qui constitue une aide indirecte – que nous ne remettons d'ailleurs pas en cause. Mais nous voudrions voir comment on peut améliorer les choses.

Sur la télémédecine, est-ce que vous imaginez un dispositif où c'est un médecin qui s'occupe de tout ? Ou êtes-vous prêt à ce que des infirmiers et infirmières, jouissant d'une compétence particulière, puissent faire de l'orientation ?

Actuellement, vous êtes en discussion avec les infirmiers sur l'avenant 6 de leur convention, et sur les dispositions relatives aux conseils de consultation et à la surveillance clinique. Pour que les actes du médecin soient possibles, il faut confier à des infirmiers, à des biologistes et à des pharmaciens un certain nombre d'actes. Seriez-vous prêt à évoluer sensiblement sur ce sujet ?

Je prendrai l'exemple de la surveillance d'un traitement anticoagulant. Est-il nécessaire d'aller chez le médecin tous les trois mois ? Certainement pas ! Pour la surveillance d'une hypertension, est-il nécessaire d'aller chez le médecin tous les trois mois ? Certainement pas non plus, sauf s'il y avait, évidemment, une augmentation très importante de la tension. Pour la surveillance d'un diabète, c'est exactement la même chose.

Êtes-vous prêt à foncer sur les délégations de tâches, mot certes un peu impropre pour les professionnels, ou du moins sur la répartition des tâches et la réorganisation des agents ? Vous êtes en effet contre la coercition, vous ne voulez pas non plus de régulation. Quant aux études médicales, nous savons que les décisions d'aujourd'hui n'apporteront des réponses que dans cinq ans ou dix ans, d'autant plus que les syndicats de jeunes internes nous demandent quatre années d'internat de médecine générale, et non plus trois à l'heure actuelle...

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Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

Je cherche d'abord des solutions pragmatiques et efficaces. Je ne pense pas que ces solutions de type coercitif et de régulation contraignante produiront les résultats que vous en attendez dans les prochaines années. En effet, je pense qu'une des réponses sera d'optimiser le temps médical en recentrant le médecin sur son expertise propre. Car il existe des espaces de délégations de tâches et de compétences, termes à choisir évidemment minutieusement, selon celui que chacun privilégie.

Quant à elle, l'assurance maladie fixe les éléments de rémunération dans le cadre réglementaire applicable.

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Il y a des obstacles législatifs, à l'heure actuelle, qui interdisent une téléconsultation avec une infirmière. En médecine du travail, ce sont pourtant des infirmières qui effectuent, grâce à la télémédecine, l'orientation vers des médecins et assurent le suivi des patients.

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Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

C'est un peu différent. Aujourd'hui, une téléconsultation est une consultation médicale. Une telle consultation, dans le droit actuel, a lieu avec un médecin.

Demain, avec les infirmières de pratique avancée (IPA), vous aurez la possibilité que des médecins, dans le cadre de protocoles formalisés, délèguent à des infirmières un certain nombre de tâches, comme le suivi de patients chroniques. Dès que le cadre réglementaire aura été posé, nous le déclinerons dans le champ des rémunérations conventionnelles.

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Vous avez dit tout à l'heure que vous étiez en discussion avec les syndicats de pharmaciens. Écarte-t-on toute idée de cabine de télémédecine dans les pharmacies ? Les maires ruraux nous disent être prêts à en installer dans les petits villages.

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Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

Il pourra tout à fait y avoir une infirmière, aux côtés d'un patient, pour déclencher demain une consultation. Les infirmières en pratique avancée pourront également être parfois à l'autre bout d'une téléconsultation.

Quant aux officines de pharmacie, nous prévoyons de décliner le déploiement de la télémédecine, non seulement avec les infirmières, mais aussi avec les pharmaciens. Les pharmaciens et leurs syndicats nationaux savent que nous ouvrirons « à l'été », donc en juillet, en août ou en septembre, une négociation relative à un avenant qui portera sur divers autres sujets prévus. Évidemment, les officines peuvent être des lieux pertinents pour accueillir une cabine de télémédecine. Cela a un coût, par ailleurs. Il faut donc être certain de pouvoir les rentabiliser. S'il y a cependant des aides financières, tant mieux pour les pharmaciens.

Cela permettra à des patients atteints dans leur mobilité de ne se déplacer que jusqu'à la pharmacie, sans avoir à parcourir dix ou quinze kilomètres. De la télémédecine depuis les pharmacies ? Ma réponse est positive.

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Enfin, une dernière question, pour moi, sur le DMP. C'est très important. On a parlé du volet prévention, mais je ne suis pas sûr d'avoir bien entendu la réponse. Le volet prévention pourrait-il, oui ou non, figurer dans le DMP ? Pour moi, le DMP doit couvrir le parcours de soins complet.

Est-ce que vous seriez prêt à autoriser l'accès à l'ensemble du dossier médical par segment ? Hier, le président de la République évoquait fort justement la surconsommation en de nombreux domaines… Nous avons auditionné SOS Médecins : ils n'ont pas accès au DMP !

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Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

Le jour où le DMP se sera développé, SOS Médecins arrivera chez un patient et accédera évidemment à son DMP. Le DMP est construit pour être accessible à tous les professionnels de santé, mais un professionnel de santé n'a pas le droit d'aller consulter le DMP de n'importe quel patient qu'il ne suit ni ne connaît, par simple curiosité. En revanche, quand il a une relation de soins avec ce patient, il peut accéder au DMP, comme SOS Médecins le pourra également.

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Le fait d'exercer dans certaines zones peut être parfois perçu comme dévalorisant, car ces zones sont peu attractives. Est-ce qu'on pourrait envisager, par exemple, la création d'un label « médecin de campagne », auquel on attacherait un certain nombre de particularités qui distinguerait les médecins qui en bénéficieraient des autres médecins ?

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Nicolas Revel, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

Ce type de piste ne ressort pas directement du champ d'intervention de l'assurance maladie.

Si vous proposez de moins rémunérer des médecins en leur disant que ce n'est pas grave parce qu'on les appelle « médecin de campagne », c'est un sujet auquel on peut toujours réfléchir, mais je ne suis pas sûr d'avoir beaucoup de partenaires de jeu pour aller dans cette direction…

Néanmoins, nous sommes tous demandeurs, dans une certaine mesure, d'une valorisation non monétaire d'un certain nombre d'engagements professionnels. Il y a des pistes intéressantes, mais ce ne sont pas des objets que l'assurance maladie peut aborder facilement dans le champ des conventions négociées. Seul un syndicat pourrait faire aboutir un tel projet, qui reste cependant une belle idée.

L'audition se termine à dix heures vingt-cinq.

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Membres présents ou excusés

Réunion du jeudi 14 juin 2018 à 8 h 30

Présents. – Mme Jacqueline Dubois, M. Jean-Paul Dufrègne, Mme Emmanuelle Fontaine-Domeizel, M. Alexandre Freschi, M. Jean-Carles Grelier, M. Cyrille Isaac-Sibille, M. Christophe Lejeune, Mme Monica Michel, Mme Stéphanie Rist, M. Vincent Rolland, Mme Nicole Trisse, M. Philippe Vigier

Excusés. - M. Jean-Pierre Cubertafon, Mme Agnès Firmin Le Bodo