Commission d'enquête sur les maladies et pathologies professionnelles dans l'industrie risques chimiques, psychosociaux ou physiques et les moyens à déployer pour leur élimination

Réunion du mercredi 18 avril 2018 à 14h00

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • CRAMIF
  • TMS
  • dossier
  • maladie
  • prévention
  • reconnaissance
  • Île-de-france
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La réunion

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L'audition débute à 14 heures.

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Nous auditionnons aujourd'hui la Caisse régionale d'assurance maladie d'Île-de-France (CRAMIF). Pour 4,6 millions de salariés – soit un quart de la population active en France –, cet organisme est chargé de trois missions en lien direct avec le sujet qui nous intéresse : elle fixe et notifie aux entreprises leurs taux de cotisation accidents du travail - maladies professionnelles (AT-MP) ; elle attribue les pensions d'invalidité ; enfin, elle développe une politique de prévention des risques professionnels visant à préserver la santé et la sécurité des salariés, à améliorer leurs conditions de travail et à réduire le nombre et la gravité des accidents du travail et des maladies professionnelles.

Pour remplir ces missions, elle dispose d'une équipe pluridisciplinaire de cent cinquante ingénieurs, contrôleurs de sécurité, médecins, formateurs, psychologues et ergonomes.

Nous recevons M. David Clair, directeur général de la CRAMIF, et M. François Blanchard, ingénieur-conseil régional. Conformément aux dispositions l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958, les personnes entendues déposent sous serment. Je vous demande donc de bien vouloir prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

MM. David Clair et François Blanchard prêtent serment

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David Clair, directeur général de la Caisse régionale d'assurance maladie d'Île-de-France (CRAMIF)

Vous l'avez rappelé, la CRAMIF exerce trois principaux métiers. En premier lieu, nous gérons des prestations sociales – vous l'avez rappelé –, et notamment les 103 000 pensions d'invalidité des assurés d'Île-de-France. Par ailleurs, nous versons l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante pour l'Île-de-France, mais aussi pour certaines caisses d'assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT) en région, sur délégation. Enfin, nous finançons certaines prestations d'appareillage.

Notre deuxième métier tourne autour de l'action sanitaire et sociale. Nous mettons à disposition des assurés un service social chargé de les accompagner en cas de problème de santé : accès aux droits et aux soins, prévention de la désinsertion professionnelle, accompagnement des sorties d'hospitalisation et du bien vieillir. Dans ce cadre, la CRAMIF gère une école de service social de dimension nationale, chargée de la formation initiale et continue des assistantes sociales. Enfin, nous assurons le fonctionnement d'un important centre de santé à Paris et d'une structure de conseil dans le domaine du handicap.

Nous troisième métier – celui qui vous intéressera le plus – concerne la gestion des risques professionnels. Cela passe tout d'abord par un important travail de prévention, principalement réalisé par nos cent cinquante préventeurs, ingénieurs-conseils ou contrôleurs de sécurité. Ce sont des techniciens expérimentés et de haut niveau, agréés et assermentés. Ils sont chargés de contribuer à l'amélioration des conditions de travail et à la baisse de la sinistralité sur les lieux de travail. Leurs modes d'intervention sont variés, du conseil au contrôle, en passant par des enquêtes et de l'information.

La coordination régionale de nos actions de prévention est fondamentale, mais notre présence sur le terrain l'est tout autant : nos ingénieurs-conseils et contrôleurs de sécurité sont répartis au sein d'antennes départementales, au plus près des entreprises et du tissu économique, afin de prendre en compte les spécificités locales.

Nous agissons dans le cadre de programmes de prévention nationaux et régionaux, les priorités étant fixées par les partenaires sociaux, les risques professionnels relevant de la gestion paritaire.

En région parisienne actuellement, le Grand Paris et ses différents chantiers sont un enjeu majeur en termes de prévention des risques professionnels. Pour mémoire, quatre-vingts gares nouvelles, deux cents kilomètres de métro souterrain, soixante-dix mille logements supplémentaires, de nouvelles zones d'activités économiques vont être construits au cours des prochaines années. Nous souhaitons intervenir dès la conception des chantiers ou des nouvelles zones d'activités économiques, afin de prévenir le plus en amont possible les risques professionnels.

La gestion des risques professionnels passe également par la tarification : nous fixons les taux de cotisation AT-MP pour les cinq cent mille établissements situés en Île-de-France. Si vous le souhaitez, je pourrai revenir sur la façon dont la tarification est utilisée en prévention.

Enfin, nous sommes chargés de la réparation des risques professionnels. Nous gérons l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante. Nous contribuons également à la préparation des dossiers examinés en comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP). Enfin, depuis le 1er janvier, nous assurons la gestion de la commission de réparation du compte professionnel de prévention (C2P). Elle était auparavant gérée par la branche retraite.

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François Blanchard, ingénieur-conseil régional de la CRAMIF

Nos préventeurs veillent à transformer les situations dangereuses de travail – c'est ce que nous appelons la prévention primaire. Nous pouvons nous appuyer sur la réglementation, notamment les neuf principes généraux de prévention, qui visent à supprimer les risques avant de donner des instructions aux salariés.

Nos interventions en entreprise s'articulent autour de trois piliers : l'action en entreprise, la capitalisation et le déploiement. Le déploiement consiste à mettre en place des partenariats et à développer des actions de communication afin de toucher plus d'entreprises que celles que nous pourrions directement contacter. La capitalisation s'assimile à une forme d'ingénierie de prévention : en analysant les demandes de prévention d'un secteur avec l'appui des ingénieurs-conseils, nous proposons des recommandations et des mesures de prévention. Il nous arrive même de nous appuyer sur les partenaires sociaux, les comités techniques régionaux pouvant définir des règles de l'art, ce qui nous permet d'aller parfois plus loin que la réglementation.

Quant à l'action en entreprise, elle peut être déclenchée par un programme national ou régional, mais également par un accident grave ou mortel du travail, par un signalement du médecin du travail ou par des statistiques. Nous nous déplaçons alors en entreprise pour observer les situations réelles de travail en nous appuyant, le cas échéant, sur le document unique d'évaluation des risques professionnels (DUERP) préparé par l'entreprise, qui permet d'identifier ces risques. Nous estimons la gravité et la probabilité d'occurrence des risques auxquels les salariés peuvent être exposés – et donc des accidents du travail. Cette estimation n'est pas une évaluation, car elle est réalisée de manière objective : nous calculons la gravité et la probabilité d'occurrence des risques et vérifions ensuite que l'entreprise les maîtrise. En effet, selon les termes du code du travail, l'évaluation des risques est du ressort de l'employeur : il doit les estimer, puis construire un plan d'action pour réduire les risques identifiés comme prioritaires. Enfin, il doit vérifier que ce plan a permis de diminuer le niveau de risque sans en créer de nouveaux.

À l'issue du bilan, le contrôleur de sécurité ou l'ingénieur-conseil propose un plan d'action pour l'entreprise à la CRAMIF : formations, documentations, intervention de nos laboratoires spécialisés lorsque le risque est difficile à estimer. Nous pouvons nous appuyer sur trois laboratoires : un laboratoire de toxicologie industrielle pour les risques chimiques, un laboratoire des biocontaminants (LBC) pour les risques biologiques et un centre de mesures physiques pour les risques physiques – de type vibrations, bruit ou ventilation.

Le cas échéant, le code de la sécurité sociale nous permet d'utiliser différents outils pour mobiliser l'entreprise : la tarification est le premier de ces outils. Les études réalisées par l'Institut de recherche et documentation en économie de la santé (IRDES) démontrent son intérêt en la matière. Nous pouvons majorer ou de minorer le taux de cotisation des entreprises : la minoration peut aller jusqu'à 25 % et touche soit la majoration liée au risque trajet, soit le taux collectif pour les entreprises de moins de vingt salariés. La majoration des taux de cotisation est particulièrement encadrée : elle est décidée par les partenaires sociaux, après présentation du dossier au comité technique régional qui doit émettre un avis favorable. Elle peut atteindre 200 % – soit une multiplication par trois du taux de cotisation de l'entreprise.

Nous utilisons cet outil puissant avec parcimonie et tact, mais il est important. En effet, comme l'inspection du travail, nos contrôleurs de sécurité et nos ingénieurs-conseils, assermentés et agréés, interviennent à l'intérieur de l'entreprise. Mais, sachant qu'ils peuvent majorer son taux de cotisation, l'entreprise est vraiment à leur écoute…

Par ailleurs, lorsqu'elles signent des contrats de prévention, des aides financières sont disponibles pour les entreprises de moins de cinquante salariés – et de moins de deux cents salariés dans certains cas. En outre, même si c'est beaucoup plus rare – une ou deux entreprises sont concernées tous les deux ou trois ans –, nous pouvons apporter une subvention aux entreprises de toutes tailles qui mettent en oeuvre une démarche de prévention innovante.

Enfin, des trophées attribués par la CRAMIF mettent en valeur les actions des entreprises. Une vidéo des entreprises lauréates est mise en ligne sur notre site et, pour les personnels, un dispositif de récompense est prévu par le code de la sécurité sociale.

Pour conclure, je rappellerai que l'article L. 215-1 de ce code souligne le rôle clé de la CRAMIF en matière de développement et de coordination de l'ensemble des acteurs de la prévention au niveau régional.

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Je vous remercie pour ces exposés précis. Comment recensez-vous les maladies professionnelles lorsqu'elles ont été déclarées ? Qu'est-ce que cette déclaration déclenche ? Avec quel degré de précision sont établies les responsabilités ?

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David Clair, directeur général de la Caisse régionale d'assurance maladie d'Île-de-France (CRAMIF)

En Île-de-France, le processus de reconnaissance d'une maladie professionnelle est partagé entre la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) et la CRAMIF. Le processus débute par une demande de reconnaissance de la part de l'assuré, instruite par la caisse primaire. Si la pathologie est inscrite au tableau des maladies professionnelles, la reconnaissance est alors présumée et la caisse primaire décide seule. Lorsque ce n'est pas le cas, le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) prend le relais et le service prévention de la CRAMIF peut être sollicité pour apporter des éléments permettant d'établir – ou non – le lien entre la pathologie et la situation professionnelle de la personne.

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François Blanchard, ingénieur-conseil régional de la CRAMIF

Chaque année, 11 000 maladies professionnelles sont reconnues en Île-de-France. Les CPAM nous sollicitent pour trois cent dossiers, afin de savoir si nous disposons d'éléments concernant la situation de travail du salarié, mais également celle de l'atelier, de l'entreprise, voire du secteur. Même si, bien entendu, nous ne connaissons pas toutes les entreprises et tous les postes de travail, nous apportons des éléments de réponse qui constituent une aide à la décision. Le système de reconnaissance complémentaire géré par le CRRMP représente quant à lui un peu plus de 2600 dossiers en Île-de-France. Nous les analysons tous et les taux de reconnaissance qui en sont issus ne sont pas atypiques par rapport aux autres régions françaises.

Au total, nous travaillons donc chaque année sur environ trois mille demandes de reconnaissance de maladies professionnelles. Ces dossiers alimentent une base de données, nous permettant ainsi de gagner en productivité – nous disposons désormais d'informations sur de nombreux métiers et entreprises. Nous les partageons depuis peu avec les CPAM d'Île-de-France. Il nous semble important de les aider dans le traitement des dossiers et la reconnaissance des maladies, tout en réduisant le nombre de dossiers qui nous sont soumis.

Comme l'a indiqué M. Clair, la décision de reconnaissance est toujours prise par la CPAM, mais les décisions du CRRMP – constitué de trois médecins – s'imposent à elle.

Qu'est-ce que cette reconnaissance déclenche ? 85 % des maladies professionnelles reconnues sont des troubles musculo-squelettiques (TMS), principalement référencés dans le tableau n° 57 du régime général. La prédominance absolue des TMS rend les autres maladies professionnelles quasiment invisibles, même si celles liées à l'amiante, référencées dans le tableau n° 30, arrivent en deuxième position. Quelques dizaines de cas sont liés au bruit. En termes de ciblage des politiques de prévention, ces statistiques ne nous facilitent pas la tâche – sauf pour les TMS, qui, il faut le rappeler, ont des effets assez rapidement négatifs sur la santé du salarié. En effet, lorsque des situations dangereuses de manutention ou des gestes dangereux perdurent, les troubles musculo-squelettiques se déclenchent rapidement. Cela facilite le ciblage des actions de prévention car nous pouvons facilement repérer les secteurs ou les entreprises concernées et transformer les situations de travail.

Pour les autres maladies professionnelles, les délais de reconnaissance sont parfois très longs – jusqu'à quarante ans dans le cas de l'amiante. Le travail des préventeurs ne peut donc pas s'appuyer sur la sinistralité : il doit être basé sur l'observation et la caractérisation des situations de travail à un moment donné. On sait désormais que les fumées de soudage sont cancérogènes. Nous faisons donc en sorte que les entreprises qui travaillent le métal mettent en oeuvre des mesures de prévention selon les principes généraux de prévention – procédés non polluants, captage à la source, protections collectives plutôt qu'individuelle. Nous intervenons directement sur ces situations dangereuses pour les transformer.

Les petites entreprises – jusqu'à 200 salariés – privilégient souvent les contrats de prévention, notamment pour les risques chimiques. En effet, mettre en place une protection phonique, des systèmes de ventilation ou un traitement acoustique dans un local est souvent coûteux, tout en apportant rarement des gains de productivité importants. Le retour sur investissement de ce type d'équipement étant insuffisant pour ces entreprises, les contrats de contrats de prévention et les aides financières simplifiées permettent de soutenir les projets de prévention des entreprises. Dans ce cadre contractuel, la CRAMIF finance en moyenne 25 à 27 % de l'investissement. Les valeurs varient selon le type de dispositif mis en place. Cela peut aller de la formation à des outils de manutention ou des chariots permettant de réduire significativement les efforts de manutention des salariés et donc d'améliorer sensiblement leur productivité.

Qu'en est-il des responsabilités ? Le sujet est presque simple pour nous… Nous intervenons en tant qu'assureur des entreprises pour les risques encourus par leurs salariés et réparons les dommages. La CRAMIF ne se pose donc pas la question de la responsabilité : en cas d'accident mortel, nous chercherons à comprendre techniquement la genèse de l'accident. L'encadrement réglementaire de nos interventions est léger : nos actions sont couvertes par douze articles du code de la sécurité sociale et notre démarche, pragmatique, est celle d'assureurs. La recherche de la responsabilité relève de l'inspection du travail, qui vérifie si l'entreprise a bien respecté les obligations réglementaires prévues par le code du travail.

Nos techniciens de haut niveau sont formés à la prévention et disposent d'un bagage universitaire important et d'une expérience de l'entreprise avant d'entrer à la sécurité sociale. Le poids des partenaires sociaux est également important : lorsqu'une décision de majoration de cotisations est prise, elle est votée par les partenaires sociaux. Cela signifie que les collèges employeurs et salariés s'accordent pour inciter l'entreprise en question à mieux prévenir les risques professionnels.

Avant ces majorations, deux tiers des injonctions portent leurs fruits. Mais pour certaines entreprises, il faut en passer par cette sanction, d'abord de 25 %, puis de 50 %, voire de 200 %. Notre objectif est uniquement d'inciter les entreprises à faire de la prévention, et pas de rechercher des responsabilités. C'est d'ailleurs très confortable lorsqu'on intervient dans l'entreprise après un accident mortel : l'inspection du travail recherche les responsabilités ; nous cherchons à comprendre ce qui s'est passé d'un point de vue technique.

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On a le sentiment qu'un certain nombre de données sont ou pourraient être disponibles mais que l'on ne les exploite pas pleinement : on compile aujourd'hui des déclarations de maladies professionnelles, mais en affectant la responsabilité de la maladie uniquement à l'employeur, sans analyser précisément les postes producteurs de maladies. Ne se passe-t-on pas d'un outil utile à la prévention dans les entreprises ? N'est-ce pas une faille dans l'organisation des dispositifs et leur complémentarité ?

Vous nous avez indiqué que vous majoriez les taux de cotisation « avec parcimonie », mais ces majorations ont-elles un impact en termes de prévention ? Fonctionnent-elles ? J'ai pu constater des écarts de taux extrêmement faibles – de l'ordre de 0,8 % – entre une petite association n'ayant déclaré aucune maladie professionnelle et un ou deux accidents du travail bénins et une grande multinationale ayant produit plusieurs cancers. Dans ce cadre, quelle est l'effectivité du caractère préventif de ces majorations ?

Vous avez également évoqué le caractère massif des TMS dans les statistiques. Est-ce représentatif de la réalité des maladies professionnelles ? J'ai bien entendu vos explications sur le déclenchement parfois très tardif de certaines maladies. Mais ces statistiques ne doivent-elles justement pas attirer notre attention sur la sous-évaluation des maladies professionnelles dans notre pays ?

Quel regard portez-vous sur le document unique ? Est-il utile, efficace ? Les entreprises le remplissent-elles dans l'esprit de la loi et de leur environnement ?

Comment abordez-vous la problématique des sous-traitants et intérimaires ? Notre système permet-il de les identifier correctement ?

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David Clair, directeur général de la Caisse régionale d'assurance maladie d'Île-de-France (CRAMIF)

S'agissant de la tarification, vous citez un cas d'espèce, celui d'une petite association et d'une grande entreprise. Peut-être que, dans cet exemple, la différence de taux n'est pas très importante. Mais il faut se souvenir que la tarification est construite sur la base d'un système à trois niveaux : pour les entreprises de moins de vingt salariés, la tarification est forfaitaire et dépend de l'appartenance de l'entreprise ou de l'association à un secteur d'activité. Si le secteur d'activité a un fort taux de sinistralité, cela se reporte sur l'association ou l'entreprise en question. Leur action en matière de prévention n'a donc aucun effet sur leur taux de cotisation. Pour les entreprises de vingt à cent quarante-neuf salariés, le taux est mixte : il prend en compte l'appartenance à un secteur d'activité, mais également, de façon progressive, la sinistralité de l'entreprise. À partir de cent cinquante salariés, le taux dépendra intégralement de la sinistralité engendrée par l'entreprise.

Le système est construit pour que les efforts réalisés pour maîtriser les risques professionnels soient pris en compte de manière croissante en fonction de la taille de l'entreprise. À cela s'ajoutent, comme l'a précisé M. Blanchard, les majorations ou minorations qui peuvent également avoir un impact sur le comportement de l'entreprise.

Vous avez évoqué une éventuelle sous-évaluation des maladies professionnelles. En comparaison des accidents du travail qui font l'objet d'une déclaration obligatoire par l'employeur, la reconnaissance des maladies professionnelles est liée à une déclaration – volontaire – du salarié… Si l'on veut limiter la sous-évaluation, il faut réfléchir à la manière de mieux informer les salariés des modalités de déclaration des maladies professionnelles, de constitution du dossier et des pièces venant l'appuyer.

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François Blanchard, ingénieur-conseil régional de la CRAMIF

En effet, en voyant son taux de cotisation augmenter, une entreprise sera incitée à mettre en place des mesures afin de limiter les situations dangereuses qui génèrent ces TMS. En revanche, cela n'aura aucun effet sur l'entreprise qui, par exemple, faisait de la projection d'amiante plus de vingt ans auparavant. Peut-être cette entreprise existe-t-elle encore, peut-être a-t-elle disparu… Les situations dangereuses remontent aux années 1970 et 1980. Ce sont les limites du modèle.

Des débats ont eu lieu sur l'intérêt de mutualiser ou pas le coût des risques professionnels. Il est essentiel de réussir à maintenir le coût des maladies professionnelles sur le compte AT-MP de l'entreprise.

C'est vrai, la disponibilité des données est un problème. Certaines données sont propres à l'entreprise, leur appartiennent, et nous ne pouvons effectivement pas les divulguer – nous prêtons serment. Mais il y a les statistiques collectives. Nous pouvons donc analyser les statistiques issues des « données CNAM », qui nous permettent ensuite d'orienter notre action ou l'action d'autres acteurs.

Nous mettons à disposition des entreprises, sur le site de la CRAMIF, un guide très riche, qui permet aux entreprises de se situer par rapport à leur coverage, par rapport à leur code APE, et de connaître les évolutions.

Nous sommes également capables de travailler avec les services interentreprises de santé au travail et, sur la base des entreprises adhérentes qu'ils nous indiquent, de leur fournir des éléments statistiques et de les aider dans leur diagnostic par rapport à ces entreprises. Bien entendu, s'il est possible d'identifier une entreprise parce qu'elle est seule sur le secteur, on ne donne pas de statistiques. On met en place des verrous pour ne pas divulguer des informations. Si le médecin du travail veut avoir des informations, on lui dit que nous ne sommes pas à même de les lui fournir par ce biais-là, et qu'il doit s'adresser à l'entreprise.

Nous essayons donc d'exploiter les données statistiques. Cela nous aide dans le ciblage des entreprises.

Tout à l'heure, je vous ai parlé des limites par rapport aux risques chimiques, dont les effets sont différés et que l'on ne retrouve pas à travers les statistiques. Depuis une petite dizaine d'années, des tentatives ont été faites pour essayer de voir comment tracer l'exposition des salariés à des situations dangereuses. Une démarche avait notamment été engagée par la branche, pour amener les entreprises à déclarer volontairement les postes de travail et les produits cancérogènes concernés. Cette démarche a été arrêtée.

Il y a eu ensuite le volet « pénibilité » – avec ses dix facteurs, dont les risques chimiques, les situations de travail répété, etc. – qui a été bouleversé par les ordonnances de la fin de l'année 2017. C'était une façon de tracer des situations de travail pour lesquelles les salariés pouvaient déclencher des maladies professionnelles à plus long terme.

Aujourd'hui, le dossier détenu par le médecin du travail joue un rôle essentiel dans cette démarche de traçabilité des expositions des salariés.

Mais avant de continuer, il me semble important de vous préciser la façon dont nous travaillons. Nous intervenons en Île-de-France dans à peu près 2 % des établissements. Sur les 500 000 établissements, nous en voyons donc un peu moins de 10 000 par an. Cela nous permet malgré tout de toucher de l'ordre de 22 à 23 % des salariés, et de l'ordre de 33 à 34 % des accidents du travail – nous allons là où il y a du grain à moudre.

Nous ne touchons que 2 % des entreprises, alors que la médecine du travail et les services de santé au travail voient l'ensemble des salariés – même si, aujourd'hui, ils ne les voient plus tous les ans – et ils sont capables de suivre les situations de travail susceptibles de générer des maladies professionnelles.

On peut s'interroger sur la traçabilité et sur l'enregistrement – ou pas – des situations de travail. Car on voit bien qu'il y a des difficultés, des appréhensions de part et d'autre, des tensions avec les partenaires sociaux. On s'en aperçoit à travers les discussions que l'on peut avoir avec le collège employeur et le collège salarié. J'ai tendance à dire qu'il y aurait peut-être une réflexion à mener pour essayer de se dégager de la situation actuelle.

On devrait peut-être se remémorer le compromis social de 1898 : un accord avait été passé entre le collège patronal et le collège des salariés pour dire qu'on ne discuterait pas la responsabilité de l'employeur, mais qu'en revanche, la réparation serait forfaitaire. Cela évite que le salarié ne soit amené à contester devant les tribunaux et à rechercher la responsabilité de l'employeur.

Je me pose la question de savoir si aujourd'hui, on ne devrait pas rechercher un compromis social autour de la pénibilité, de la retraite, des produits cancérogènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction (CMR). Il serait peut-être intéressant de voir comment lever l'obstacle de la responsabilité qui, aujourd'hui, bloque tout et finit par s'opposer à la transformation des situations dangereuses. Je rappelle que notre métier est de transformer les situations dangereuses. On peut en effet se poser la question lorsque l'on discute avec les partenaires sociaux, et lorsque l'on constate que la déclaration par l'employeur de situations dangereuses, pourtant prévue de longue date dans le code de la sécurité sociale, n'a jamais véritablement rempli ses objectifs.

Vous parlez des failles sur l'organisation. Je pense qu'indirectement, vous vous interrogez sur les troubles musculo-squelettiques et les risques psychosociaux.

La direction des services techniques de la CRAMIF regroupe sept services techniques, dont les trois laboratoires dont je parlais tout à l'heure. La prévention des TMS et des risques psychosociaux est traitée par le service technique « risques organisationnels », qui emploie des ergonomes, des psychologues, des ingénieurs et des formateurs.

L'idée est bien de lier la prévention des TMS et des risques psychosociaux à l'organisation du travail. Compte tenu des ressources et du temps dont on dispose, on ne peut pas amener l'entreprise à faire directement de la prévention comme on peut le faire sur les risques chimiques, mécaniques, les risques de chute de hauteurs, etc. Il est toutefois important que l'entreprise sorte du déni, qu'une véritable analyse soit faite, qu'un diagnostic puisse être porté et qu'un plan d'action soit mis en place.

Il ne suffit pas de faire un diagnostic, il faut construire un plan d'action. Là, le rôle des partenaires sociaux et des représentants du personnel au sein de l'entreprise est essentiel. Le dialogue social est indispensable si l'on veut que les entreprises construisent par elles-mêmes, avec leurs propres ressources – éventuellement en se faisant appuyer par des consultants – une véritable politique de prévention des TMS et des risques psychosociaux, qui tourne autour de l'organisation et des moyens matériels qui peuvent être proposés.

L'organisation du travail joue un rôle essentiel dans la prévention des TMS. Cela m'amène à faire le lien avec le programme national de prévention, TMS Pros dont vous avez probablement entendu parler : en 2014, on a identifié 8 000 entreprises au niveau national. Sur 2 millions d'entreprises, c'est à la fois peu et beaucoup. Mais cela représentait à peu près un tiers des maladies professionnelles et un tiers des indemnités journalières payées par la sécurité sociale. On avait donc bien ciblé ce 0,4 % d'entreprises. À travers ce programme que nous avons conduit pendant quatre ans, nous avons amené une majorité d'entreprises à mettre en place une politique de prévention du risque de TMS, selon une méthodologie éprouvée, proposée, construite avec l'INRS.

L'ambition d'une telle action n'était pas de faire à la place de l'entreprise, mais d'amener l'entreprise – en y associant le CHSCT et les partenaires sociaux à l'intérieur de l'entreprise – à transformer son organisation et les moyens qui peuvent être mis en oeuvre, et donc à réduire les situations dangereuses, afin de réduire, à terme, le nombre de maladies professionnelles reconnues au titre des TMS.

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Je souhaiterais aborder la concurrence qui semble exister entre le dispositif de reconnaissance des maladies professionnelles et le dispositif de reconnaissance de l'invalidité. Dans nos auditions, cette difficulté a été pointée par plusieurs interlocuteurs. Dans la mesure où vous gérez les deux dispositifs, comment parvenez-vous à les articuler ? Là encore, que faudrait-il changer ?

Enfin, faudrait-il revoir la procédure suivie devant les CRRMP ? Est-ce qu'il y manque quelque chose ? Le système n'est-il pas dissuasif pour ceux qui voudraient faire reconnaître une maladie et se disent que finalement, cela va leur demander trop d'efforts ?

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David Clair, directeur général de la Caisse régionale d'assurance maladie d'Île-de-France (CRAMIF)

Je vais répondre à propos de la concurrence éventuelle entre le processus de reconnaissance de l'invalidité et celui de la maladie professionnelle.

D'abord, vous dites que la CRAMIF gère les deux. Oui et non. On gère en effet la reconnaissance de l'invalidité jusqu'à l'attribution de la pension, le service médical intervenant sur l'aspect médical. En revanche, comme je l'ai expliqué tout à l'heure, on gère uniquement les informations qui sont données pour aider les CRRMP à reconnaître le caractère professionnel de la maladie. La partie amont du processus est gérée par la caisse primaire.

Ensuite, le fait qu'il y a deux processus différents est-il légitime ? Mais déjà, quelles sont donc les différences ?

Premièrement, l'invalidité ne peut être reconnue qu'à partir du moment où il y a une réduction des deux tiers de la capacité de gain, alors qu'il n'y a pas de condition similaire dans la reconnaissance d'une maladie professionnelle.

Deuxièmement, les ressources ne sont pas prises en compte de la même manière. Effectivement, dans les deux cas, on prend bien en compte le salaire, mais dans le cas de l'invalidité, on prend aussi en compte les autres ressources. On va donc vérifier, tout au long du versement de la pension d'invalidité, que les autres ressources n'ont pas changé ; le cas échéant, cela peut faire varier le niveau de la pension.

Troisièmement, la couverture santé issue de la pathologie est différente : pour la maladie professionnelle, les soins sont gratuits et la prise en charge des IJ est plus importante que dans le cadre de l'invalidité, où on se limite à la législation de l'assurance-maladie stricto sensu.

Pour moi, on ne peut pas vraiment parler de concurrence. Selon moi, ces différences sont liées à l'existence d'un consensus social qui amène à renforcer la prise en charge des conséquences de la maladie professionnelle, par rapport à une maladie qui ne serait pas d'origine professionnelle.

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François Blanchard, ingénieur-conseil régional de la CRAMIF

Le CRRMP intervient sur un certain nombre de dossiers, pour lesquels la demande de « reconnaissance de maladie professionnelle » n'entre pas dans les conditions prévues dans un tableau des maladies professionnelles. Je rappelle que dans ces tableaux, des pathologies sont listées, avec des délais de prise en charge et une liste limitative ou indicative des postes et des métiers qui peuvent être concernés. C'est un compromis social, qui est décidé au niveau du comité d'orientation des conditions de travail (COCT), et qui fait l'objet de discussions entre les partenaires sociaux.

Lorsque l'une des conditions administratives n'est pas remplie – le délai de prise en charge ou le métier – le CRRMP est saisi par la CPAM. Je peux vous donner cet exemple : on est sur un délai de prise en charge de trois mois, mais le salarié en est à quatre ; faut-il continuer, ou pas, à refuser la reconnaissance ? C'est au CRRMP d'apprécier. Ces dossiers, relevant de l'alinéa 3 de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, sont relativement simples. Peut-être pourrait-on imaginer d'autres dispositions pour fluidifier leur traitement.

L'alinéa 4 du même article s'applique lorsque la pathologie n'est pas encore reconnue comme maladie professionnelle, et n'est donc pas encore dans un tableau. C'est alors au corps médical d'analyser les éléments du dossier et d'émettre un avis – entre trois médecins, ce qui permet d'avoir une majorité – sur le caractère professionnel de la pathologie, c'est-à-dire sur le lien qui peut être fait entre la situation de travail et la pathologie dont souffre la personne.

Quelles améliorations pourrait-on imaginer ?

En Île-de-France, depuis la fin de l'année 2017, on a commencé à travailler sur la dématérialisation des dossiers. Dans certaines CPAM, on utilise encore aujourd'hui des dossiers papier, qui sont relativement importants, qui génèrent du temps de traitement, des coûts et de la main-d'oeuvre pour les mettre sous pli. La dématérialisation a été mise en place entre la CPAM et la DRSM. À la CRAMIF, nous nous inscrivons aussi dans cette démarche, qui doit effectivement permettre de fluidifier les échanges et de gagner en productivité au niveau de la région. Pour autant, ce n'est pas facile parce que les dossiers sont complexes, touffus et qu'il est souvent nécessaire de travailler avec deux écrans.

L'amélioration des tableaux de maladies dépend du dialogue social, des partenaires sociaux qui discutent, négocient, et se mettent d'accord sur les conditions. Nous – c'est-à-dire la CPAM, le service médical et la CRAMIF – apportons des éléments, mais nous ne faisons qu'appliquer les textes, et donc les décisions qui s'imposent.

Enfin, la procédure de reconnaissance des maladies professionnelles a-t-elle un caractère dissuasif ?

Elle commence par la déclaration du salarié ou de ses ayants-droit. Ce n'est pas l'entreprise qui déclare. Il faut donc réussir à convaincre le salarié qu'il est possible de faire reconnaître le caractère professionnel de sa pathologie.

En Île-de-France, on a développé depuis une quinzaine d'années un site internet qui est plutôt destiné aux médecins traitants. On y trouve des éléments qui peuvent les aider à conseiller leurs patients : les pathologies qu'ils peuvent identifier, les métiers qui peuvent être concernés, les tableaux qui pourraient correspondre.

Par ailleurs, un travail a été fait en concertation avec la CNAM autour du cancer de la vessie. Lorsqu'une personne est atteinte, on va essayer de retracer son parcours professionnel, puis de l'inciter à faire une demande de reconnaissance de maladie professionnelle – même si la décision sera peut-être défavorable.

Dans cette logique-là, je citerai le cas intéressant d'une association de la Seine-Saint-Denis, GISCOP93 (groupement d'intérêt scientifique sur les cancers d'origine professionnelle en Seine-Saint-Denis), qui travaille avec l'hôpital Avicenne. Cette association accompagne les salariés qui ont malheureusement un cancer, pour essayer de reconstruire leur parcours professionnel – ce qui est très compliqué. Les résultats de son travail sont modestes en nombre. Mais ils montrent qu'ainsi, les demandes de reconnaissance sont plus nombreuses et que l'accompagnement est plus fréquent. Cette association s'adresse à des populations dont la capacité à constituer les dossiers est limitée. Il est vrai que c'est complexe, et les ayants-droit sont également démunis face à une telle situation. L'apport de cette association est donc significatif et intéressant.

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Avez-vous une idée du nombre de dossiers de demande de reconnaissance « hors tableau » qui arrivent chez vous, chaque année, en CRRMP, et du nombre de ceux qui aboutissent ?

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François Blanchard, ingénieur-conseil régional de la CRAMIF

Ces chiffres sont approximatifs : 25 % du nombre de dossiers relèvent de l'alinéa 4 ; et 75 % de l'alinéa 3. Quant au taux de reconnaissance, et donc de décisions favorables, on est plutôt aux alentours de 40 à 45 % pour l'alinéa 4, et de 65 à 70 % pour l'alinéa 3. Il n'est pas évident, pour nous, d'obtenir l'information. Mais notre unité chargée de ces contributions à reconnaissance mène tout un travail pour savoir, in fine, quelles sont les décisions prises.

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François Blanchard, ingénieur-conseil régional de la CRAMIF

Il y a quatre ou cinq ans, il était bien au-delà d'un an ; aujourd'hui, il est plutôt de l'ordre d'un an. Nous avons à peu près quinze jours pour instruire les dossiers. Le goulet d'étranglement se situe au niveau du CRRMP.

En Île-de-France, le CRRMP organise à peu près deux sessions par mois, qui traitent à chaque fois 22 dossiers. Comme je viens de le dire, on reçoit les dossiers une quinzaine de jours auparavant. Nous devons donc être réactifs, pour interroger les différentes unités qui ont pu travailler dessus : laboratoires ; antennes départementales ; direction du service technique. Nos médecins conseillers médicaux peuvent également apporter leur contribution.

Le fait que l'on emploie des ingénieurs chimistes participe à la qualité des réponses apportées – sans oublier cette base de données, qui nous fournit des éléments d'appréciation et de comparaison. Je rappelle que l'ingénieur-conseil régional est consulté par le comité, mais qu'il ne participe pas à la décision. Et je précise enfin qu'en Île-de-France, on ne présente que des dossiers papier, mais que ceux-ci requièrent tout de même un certain temps de travail.

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Depuis le début de cette audition, on parle des entreprises. M. Dharréville a fait allusion au cas des associations. Mais qu'en est-il de l'État ? Quelles responsabilités a-t-il vis-à-vis de ses agents, où qu'ils soient ? Quelles procédures de contrôle existent ? Un autre organisme a-t-il la charge de ce contrôle ?

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David Clair, directeur général de la Caisse régionale d'assurance maladie d'Île-de-France (CRAMIF)

La CRAMIF est compétente pour les salariés du régime général, donc les salariés de droit privé. En d'autres termes, par rapport à la question que vous posez, nous sommes hors champ, sauf exception – les personnes qui, par leur statut, relèveraient du régime général.

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François Blanchard, ingénieur-conseil régional de la CRAMIF

Nous intervenons essentiellement dans les collectivités territoriales et dans la fonction hospitalière, où le nombre de salariés non fonctionnaires, qui relèvent donc du régime général, est significatif. Ainsi, nous sommes amenés à interpeller les collectivités territoriales et les hôpitaux en tant qu'employeurs.

On peut aussi interpeller le donneur d'ordres, dans sa fonction de maître d'ouvrage – y compris l'État. Nous pouvons intervenir et interpeller, par exemple, la collectivité territoriale qui construit une école ou un bâtiment régional, en tant que constructeur maître d'ouvrage.

On peut, de façon un peu plus indirecte, travailler avec l'État sur un certain nombre de chantiers. Cela s'explique par le fait que nous sommes proches des ministères.

La semaine dernière, nous avons eu une réunion technique avec l'INRES et la DGT pour voir comment améliorer les foreuses, et discuter de leur conformité aux normes. Sur d'assez nombreux sujets, nous pouvons intervenir et conseiller la DGT ou la DIRECCTE.

Nous intervenons aussi auprès du ministère chargé de la culture, qui est un maître d'ouvrage important en Île-de-France. Récemment, à Paris, des chantiers majeurs ont suscité un grand émoi : le fait de nettoyer les façades exposait de façon significative certains salariés à l'inhalation de poussières contenant du plomb. Devant des situations de saturnisme avéré, la CRAMIF a été amenée à interpeller les entreprises et donc, indirectement, à se retourner vers le maître d'ouvrage pour voir comment régler le problème.

Voilà comment on intervient. Mais, en principe, on n'intervient pas, sauf exception – par exemple, en cas de décès d'un salarié au régime général dans un ministère.

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Qui est votre homologue, pour les agents de l'État ?

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François Blanchard, ingénieur-conseil régional de la CRAMIF

Vous me posez une colle. J'aurais tendance à dire que ce sont les inspections générales qui interviennent.

S'agissant des collectivités territoriales, nous avons eu des coopérations, même si elles sont un peu moins nourries aujourd'hui, avec les centres interdépartementaux de gestion – les CIG Petite Couronne et CIG Grande Couronne. Nous en avons aussi avec la Ville de Paris, qui est un employeur très important – 50 000 travailleurs au bas mot.

Les collectivités territoriales adhèrent au CIG – adhésion parfois obligatoire, en fonction de leur nombre d'habitants. Le CIG joue alors une fonction d'inspection du travail. Des coopérations peuvent être organisées entre le CIG et le contrôle de sécurité des ingénieurs-conseils. On a mis en place de très belles coopérations avec le CIG Petite couronne sur la prévention des TMS, sur les risques psychosociaux, sur les risques routiers – les thèmes majeurs sur lesquels nous intervenons. De son côté, le CIG sert de relais, le cas échéant, auprès des communes et des conseils départementaux.

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Messieurs, je vous remercie vivement pour toutes ces précisions.

L'audition s'achève à 15 heures 15.

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Membres présents ou excusés

Réunion du mercredi 18 avril 2018 à 14 heures

Présents. – Mme Delphine Bagarry, M. Julien Borowczyk, M. Bertrand Bouyx, M. Pierre Dharréville, M. Brahim Hammouche, M. Frédéric Reiss

Excusée. – Mme Hélène Vainqueur-Christophe