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Guillaume Kasbarian
Question N° 36122 au Ministère auprès de la ministre de la transition écologique


Question soumise le 9 février 2021

M. Guillaume Kasbarian appelle l'attention de Mme la ministre de la transition écologique sur l'intégration à la réglementation environnementale 2020 de la prise en compte du stockage temporaire au moyen de l'analyse de cycle de vie (ACV) dynamique simplifiée. En effet, alors qu'il n'existe pas de consensus scientifique sur la méthode d'ACV dynamique et que sa simplification par la DHUP n'a fait l'objet d'aucune validation scientifique, cette mesure a été présentée par le ministère de la transition écologique comme visant à faire passer la part de la construction bois de 10 % à plus de 50 % du marché de la construction individuelle et collective à l'horizon 2030. Or une telle évolution n'a fait l'objet d'aucune étude d'impact, ni quant à l'effectivité des gains réalisés en décarbonation, ni quant à la capacité de la filière bois forêt à répondre à cette demande, ni quant à l'impact de cette exploitation accrue des forêts françaises sur leur biodiversité et leur performance carbone. Enfin, toujours sur le plan environnemental, l'ACV dynamique simplifiée ne prend pas en compte les émissions du bois de construction sur le long terme, puisqu'il les traite comme des produits carbo-négatifs alors qu'ils émettent environ 100 kilogrammes de gaz à effet de serre par mètre cube en fin de vie. Les industriels producteurs des matériaux remis en cause par la mesure soulignent qu'ils ont engagé des investissements massifs au titre de la décarbonation de leurs produits, et que le sens de ces investissements, auxquels on ne laisse pas le temps de porter leurs fruits, se trouve réduit à néant. Ils déplorent également que, du fait de cette ACV dynamique, la RE 2020 ne puisse que se traduire par une déstabilisation profonde de leur tissu industriel situé au cœur des territoires, avec des plans sociaux inévitables à l'échelle de la filière de la construction maçonnée. Cela semble incohérent avec les ambitions de relance, de réindustrialisation et de promotion des boucles courtes. Il souhaite donc savoir si le Gouvernement entend faire évoluer le projet de RE 2020 vers une plus grande neutralité entre les matériaux, afin de promouvoir davantage l'objectif de décarbonation plutôt qu'un matériau en particulier.

Réponse émise le 15 juin 2021

Les annonces du Gouvernement en date du 24 novembre 2020 sur la future réglementation environnementale (RE2020) ont depuis fait l'objet d'une intense et riche consultation de l'ensemble des parties prenantes et organisations professionnelles, notamment au sein du Conseil supérieur de la construction et de l'efficacité énergétique (CSCEE), qui a rendu son avis le 26 janvier 2021. L'ensemble des points portés à l'attention du Gouvernement ont été versés au débat et pris en compte dans le cadre de cette consultation. À l'issue de cette phase de concertation, les détails de la mise en œuvre de la RE2020 pour l'ensemble des logements neufs ont été annoncés le 18 février 2021. Globalement, les exigences fixées par la RE2020, reflet des orientations du Gouvernement pour la transition écologique dans le secteur du bâtiment, demeurent inchangées, qu'il s'agisse de sobriété énergétique, de sortie des énergies fossiles, d'amélioration du confort d'été ou de décarbonation de la construction tout le long du cycle de vie. La RE2020 sera ainsi l'une des réglementations les plus ambitieuses d'Europe pour les bâtiments neufs et contribuera directement à l'atteinte de nos objectifs de lutte contre le changement climatique et à la tenue de nos engagements internationaux en la matière. Cela étant, la concertation a permis de procéder à plusieurs ajustements du projet de réglementation afin d'en assurer sa mise en œuvre et son succès, tout en conservant son ambition initiale. En particulier, l'entrée en vigueur de la RE2020 sera finalement fixée au 1er janvier 2022, après une publication des textes d'ici la fin du premier semestre 2021. Conservant un calendrier rapide de mise en œuvre, cette date, qui fait l'objet d'un large consensus, laisse les quelques mois nécessaires à l'ensemble de la filière et notamment aux concepteurs et promoteurs pour mettre leurs projets à venir en conformité avec les nouvelles exigences. Le Gouvernement a donc tenu compte des alertes quant au risque de précipitation que faisait courir le calendrier initialement proposé.  De la même manière et afin d'assurer que la trajectoire fixée par la RE2020 permette aux innovations et développements industriels nécessaires de se déployer à temps, les autres jalons prévus par la RE2020 seront décalés d'un an par rapport à ce qui était envisagé (les dates de 2024, 2027 et 2030 devenant ainsi 2025, 2028 et 2031). En matière d'énergie, des dispositions transitoires seront prises, d'une part pour les maisons individuelles construites sur des parcelles ayant déjà fait l'objet d'un permis d'aménager avec desserte de gaz, d'autre part pour les réseaux de chaleur, pour à la fois encourager le développement et la décarbonation. En matière de construction, la place croissante que seront amenés à prendre le bois et les matériaux biosourcés dans le futur de la construction a été soulignée. La réglementation reposera sur une exigence de résultat et non de moyens et permettra de faire place à la diversité des modes constructifs en favorisant la mixité des matériaux. Si les constructions futures recourront donc de manière accrue au bois et matériaux biosourcés, cette nouvelle réglementation encouragera également le recours aux matériaux géosourcés (comme la pierre de taille ou la terre crue) et aux matériaux plus usuels (brique et béton notamment) selon leur trajectoire de décarbonation. Toutes les filières et tous les métiers seront ainsi pleinement mobilisés par le mouvement engendré par la RE2020. À cet égard, la méthode d'analyse en cycle de vie dite « dynamique » (ACV), qui valorise le stockage du carbone, comme le prévoit la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, dite Loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (Elan), du 23 novembre 2018, est bien conservée. Dans le même temps, des ajustements par rapport au projet initial concernant les seuils carbone en construction ont été présentés afin d'assurer qu'à l'horizon 2031 (dernier jalon fixé par la RE2020), des modes constructifs variés auront leur place et que, sous réserve de leurs engagements de décarbonation, tous les matériaux continueront d'être utilisés, selon leurs atouts respectifs. Entre autres signes de ce souci de la mixité des matériaux et des modes constructifs, un Appel à manifestations d'intérêt (AMI) spécialement dédié à la mixité des matériaux a été lancé, financé par le programme d'investissements d'avenir (PIA 4). Fidèles à l'intention première du Gouvernement et fruits des multiples retours de terrain et de professionnels, les précisions apportées au projet de réglementation doivent permettre de trouver un point d'équilibre entre ambition et pragmatisme, exigences et maîtrise des coûts, et de garantir ainsi la pérennité de la RE2020. Grâce à un suivi précis dans le temps via un observatoire dédié, la trajectoire progressive que la RE2020 dessine pourra être ajustée au mieux. Aussi la RE2020 donne tout son sens au mot de transition. Tout en plaçant la France parmi les pionniers du bas-carbone en Europe, elle reste attentive à la réalité du monde de la construction et donne le temps nécessaire pour faire des évolutions à venir de véritables opportunités. Pour plus de détails sur la RE2020, le dossier de presse dédié du 18 février 2021 est consultable sur le site du ministère : https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/2021.02.18_DP_RE2020_EcoConstruire_0.pdf.

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