Intervention de Patricia Lemoine

Séance en hémicycle du jeudi 18 février 2021 à 21h00
Fiscalité des droits de succession et de donation — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatricia Lemoine :

Comme ils l'ont fait en commission la semaine dernière, les membres du groupe Agir ensemble tiennent à remercier sincèrement Mme Christine Pires Beaune pour la qualité de ses travaux.

La fiscalité des donations et des successions est un sujet particulièrement complexe dont les implications dans la vie de nos concitoyens sont majeures. Le texte que vous nous proposez est accompagné d'un exposé des motifs nourri, malgré un manque de données fournies par l'administration fiscale que nous ne pouvons que déplorer.

La proposition de loi ouvre des pistes intéressantes qui ont l'avantage de la lisibilité, ce qui n'est pas peu de chose en matière de fiscalité – et, qui plus est, de fiscalité en matière de donations et successions. À l'évidence, il s'agit d'un enjeu important qui mérite un débat ouvert et constructif au regard des constats que vous avez rappelés : inégalité du patrimoine, risque d'une société de rentiers et panne de l'ascenseur social, pour ne citer que ceux-là.

Cela étant dit, le texte souffre de plusieurs travers. Les deux premiers ne sont pas de votre fait, madame la rapporteure, mais ils sont particulièrement bloquants. Une réforme significative des DMTG – droits de mutation à titre gratuit – telle que vous la proposez ici ne peut s'entendre en dehors d'une réflexion plus globale sur la fiscalité du patrimoine. Le changement de paradigme que vous appelez de vos v? ux doit s'intégrer dans une réforme plus large ; or l'absence de données précises fournies par l'administration fiscale ne permet pas, en l'état, de mener sereinement une réforme d'ampleur sur les DMTG.

Sur le fond, nous constatons plusieurs points de désaccord avec la réforme que vous présentez. Vous proposez notamment de passer à un barème unique, quel que soit le lien de parenté entre le donateur et le donataire. Si nous comprenons la philosophie de cette proposition, nous ne la partageons pas. Nous pensons en effet qu'un barème distinct pour les donations en ligne directe a du sens et que nous devons le préserver, tout en y apportant des modifications pour mieux prendre en compte les réalités familiales de notre époque.

J'ajoute qu'il serait intéressant d'encourager les donations du vivant afin qu'elles bénéficient aux classes d'âge qui en ont le plus besoin. Comme vous le rappelez dans votre exposé des motifs, les successions interviennent de plus en plus tard, profitant ainsi à des personnes dont le besoin en capital est moins fort. Je suis persuadée qu'il faut améliorer le système actuel pour encourager davantage les donations afin de permettre aux jeunes générations de bénéficier d'un apport en capital au moment où ils en ont le plus besoin. Il me semble qu'il s'agit là d'un angle mort de votre proposition de loi.

Nous pensons, enfin, que l'alignement de la fiscalité de l'assurance-vie sur la fiscalité des successions n'est pas opportun à ce stade sans étude d'impact préalable approfondie. Eu égard au montant des encours et au contexte actuel, la fiscalité de l'assurance-vie doit être maniée avec beaucoup de précaution. Il faut en revanche lui redonner son rôle initial, que vous avez rappelé dans votre propos liminaire : l'investissement dans l'économie réelle. Plusieurs initiatives sont déjà en cours sur ce point, qu'il faut amplifier et encourager.

Ainsi, si nous reconnaissons la qualité du travail de notre collègue Pires Beaune et la nécessité de réformer la fiscalité des donations et successions, les solutions proposées n'ont pas recueilli toute notre adhésion. De plus, comme nous le disons depuis le début de la crise, l'heure n'est pas à l'augmentation de la fiscalité, dans un contexte particulièrement mouvementé. Pour toutes ces raisons, notre groupe votera contre cette proposition de loi.

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