Intervention de Adrien Quatennens

Séance en hémicycle du mercredi 16 décembre 2020 à 15h00
Stratégie vaccinale contre la covid-19

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAdrien Quatennens :

Nous déplorons qu'une nouvelle fois le Parlement ne soit pas associé à la définition de la stratégie à adopter face à la pandémie que connaissent notre pays et le monde depuis bientôt un an. Certes, le débat est toujours utile et nécessaire, mais celui que nous avons aujourd'hui ne sera suivi d'aucun vote, d'aucune prise de décision qui appartiendrait à la représentation nationale.

Depuis le début de la crise, il nous a été demandé de voter pour ou contre la confiance envers votre gouvernement, mais jamais aucune des propositions issues de vos oppositions n'a retenu votre attention. C'est le cas des travaux du groupe La France insoumise qui, depuis le mois de mars, vous aura transmis une quinzaine de propositions de loi, cinq plans dont un plan complet de déconfinement, quatre guides dont un guide de protection des salariés, et plus récemment encore, un plan d'alternative au confinement. Non, le monarque décide de tout, tout seul ou en s'appuyant sur un gouvernement parallèle, soumis au secret défense, le fameux conseil de défense.

Bien sûr, nous savons qu'il n'est pas simple de prendre des décisions face à une crise sanitaire, mais les errements multiples dans la gestion de celle-ci et la perte de confiance qui en a résulté auraient dû vous amener à changer de stratégie. Nous savons que nous n'en avons pas fini avec ce virus et encore moins avec ses conséquences économiques et sociales. Or les Français ont besoin de voir le bout du tunnel. Le vaccin suscite beaucoup d'espoirs, mais la stratégie vaccinale doit être transparente ; elle doit s'adapter aux incertitudes et se combiner à une stratégie thérapeutique et préventive.

La moitié des Français ne veulent pas se faire vacciner, ce qui ne signifie pas pour autant qu'ils seraient par principe anti-vaccins ou auraient succombé à des thèses complotistes : les inquiétudes existent, les doutes sont réels, ils doivent être levés. Tout est allé très vite, comparativement aux délais habituels de mise sur le marché d'un vaccin, et l'on peut s'en féliciter. Mais les technologies employées sont différentes d'un vaccin à l'autre, et une technologie nouvelle, l'ARN messager, va être employée. Aussi les données à notre disposition sont-elles encore très partielles et la HAS a-t-elle reconnu que les recommandations vaccinales seraient amenées à évoluer à mesure que de nouveaux éléments seraient disponibles. L'efficacité des vaccins et leur sécurité, la durée d'immunité, qui n'est pas encore établie, les caractéristiques de la maladie sont autant de points sur lesquels la transparence des autorités sanitaires contribuerait à lever nombre d'interrogations légitimes.

La transparence s'impose également dans le domaine économique et le secret des affaires ne doit pas y faire obstacle. La structure des coûts et des prix, le lieu de production, le régime de propriété intellectuelle, le régime de responsabilité nous intéressent. Pourtant, pour le moment, nous avons davantage pu constater les effets de certaines annonces sur les cours des bourses que nous n'avons obtenu d'informations s'agissant des contrats passés.

La pandémie est mondiale. Le vaccin devrait donc être un bien commun de l'humanité. Or on sait que, d'ores et déjà, les pays les plus riches, qui représentent 15 % de la population mondiale, ont fait main basse sur 80 % des stocks promis, alors que vacciner toute la population de la planète coûterait moins de 1 % de ce que va coûter la pandémie à l'économie mondiale.

Je l'ai dit, monsieur le Premier ministre, la stratégie vaccinale doit se combiner à une stratégie thérapeutique et préventive, et je m'étonne de si peu vous entendre parler de la perspective d'un traitement contre la covid-19, alors qu'à Lille, l'Institut Pasteur est en train de mettre au point un médicament dont les résultats sont attendus en mai prochain.

Je renouvelle à cette tribune notre proposition de création d'un pôle public du médicament en France, pour mettre le médicament au service de l'intérêt général, en intégrant la recherche fondamentale et la production des molécules indispensables. Il n'est pas supportable que 80 % de nos médicaments soient importés : il faut produire en France.

De même, il faut mettre un terme immédiat aux fermetures de lits à l'hôpital, qui se poursuivent en ce moment même.

Enfin, en cas de troisième vague, il est urgent de préparer les alternatives au confinement. Renforcement des protocoles sanitaires, organisation de roulements dans tous les secteurs de la société où cela est possible : déployons les grands moyens – quoi qu'il en coûte – pour limiter au maximum la circulation du virus, tout en permettant que la vie continue.

En résumé, un vaccin aux conditions que j'ai citées, un traitement, des mesures de prévention, un protocole sanitaire et une alternative au confinement seraient, de notre point de vue, les ingrédients d'une bonne stratégie pour en finir avec cette pandémie.

La France, sans ses salles de cinéma, sans ses théâtres ou ses concerts, sans ses bars et ses restaurants, ce n'est plus vraiment la France. L'Assemblée nationale prend parfois des allures de grand théâtre ; et pourtant nous sommes ouverts.

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