Intervention de Jean Castex

Séance en hémicycle du mercredi 16 décembre 2020 à 15h00
Stratégie vaccinale contre la covid-19

Jean Castex, Premier ministre :

Voici un an qu'est apparu, en Chine, le coronavirus responsable de la crise sanitaire la plus grave que notre pays ait eu à affronter depuis plus d'un siècle. La deuxième vague qui frappe l'Europe entière depuis le début de l'automne est d'une violence redoutable. Le virus ne perd pas en intensité. Bien au contraire, il continue à progresser, à faire des victimes et à gagner de nouvelles aires géographiques, selon des règles qui échappent toujours à la pleine compréhension des scientifiques. En ce sens, ce virus nous invite toutes et tous à l'humilité. La pandémie se traduit aussi, en France comme ailleurs, par la mise en place de restrictions importantes qui mettent à rude épreuve nos concitoyens déjà éprouvés par plus de dix mois d'efforts.

La situation sanitaire reste aujourd'hui préoccupante. Comme vous le savez, nous avons atteint, depuis une dizaine de jours, un plateau ancré à un niveau qui ne nous permet pas de garantir une pleine maîtrise de la circulation virale, d'autant que nous approchons des fêtes de fin d'année, une période à risque. Aujourd'hui encore, nous comptons une personne hospitalisée toutes les minutes et une personne admise d'urgence en réanimation toutes les sept minutes. L'arrivée du vaccin et le lancement maintenant imminent de la campagne vaccinale dans notre pays constituent cependant un motif d'espoir. Nous allons pouvoir enfin nous doter de l'arme qui nous permettra de surmonter la crise.

Les vaccins suscitent de nombreuses questions chez nos concitoyens. C'est pourquoi, le 2 décembre dernier, j'ai présenté, avec les ministres compétents, les grandes lignes de la stratégie vaccinale de la France. Cependant, l'importance de l'étape que l'arrivée des vaccins va représenter dans la lutte contre la pandémie justifie pleinement, selon moi, que la représentation nationale puisse en débattre en amont de son déploiement. C'est pourquoi j'ai souhaité, avec M. le ministre des solidarités et de la santé, Olivier Véran, dans le cadre fixé par l'article 50-1 de la Constitution, préciser devant vous les fondements de notre stratégie vaccinale, les modalités de sa mise en oeuvre, mais aussi la façon dont nous l'intégrons à notre dispositif global de lutte contre le virus.

Fondamentalement attaché au rôle du Parlement, je crois aux vertus de la délibération collective. Au-delà de la séance d'aujourd'hui, j'ai souhaité instaurer un cadre de dialogue pérenne avec le Parlement sur la crise sanitaire. Le 7 décembre dernier, un comité permanent a été créé à cette fin. Il est composé des présidents des deux assemblées et des présidents de l'ensemble des groupes parlementaires.

Alors que le niveau d'immunité collective reste insuffisant et que la science n'a pas encore mis au point des traitements antiviraux pleinement efficaces, le vaccin peut être la solution qui permettra de protéger durablement nos concitoyens face au virus. Les objectifs que nous assignons à la campagne vaccinale sont clairs. En ciblant d'abord les publics les plus vulnérables, nous cherchons à réduire la mortalité attribuable à la covid-19 et à prévenir les hospitalisations, en particulier les admissions en soins intensifs et en réanimation. Nous espérons ainsi préserver notre système de santé dans la durée et permettre à notre pays de retrouver un fonctionnement normal, avec la reprise progressive et intégrale de son activité.

Si l'arrivée du vaccin est porteuse d'espérance, elle nous place collectivement, et le Gouvernement au premier chef, face à un défi majeur. Les responsabilités de l'État sont grandes. C'est la raison pour laquelle je souhaite vous dire, en toute transparence, comment nous entendons les assumer.

Nous préparons cette échéance depuis de longs mois et plusieurs étapes majeures ont déjà été franchies.

La première a été la sécurisation de nos approvisionnements en vaccin. Dès le printemps dernier, vous le savez, la France a été à l'initiative de la constitution d'une task force européenne qui permettra aux États membres d'acquérir les vaccins ensemble, afin de peser plus fort dans les négociations et d'éviter que nos pays ne se livrent à une compétition acharnée afin d'être les premiers servis. Concrètement, cette task force nous a permis d'obtenir des prix très attractifs et surtout identiques pour tous les pays européens, ainsi que des garanties sur la transparence des données. En outre, tous les vaccins seront livrés à chaque pays européen au même moment.

Grâce à ce mécanisme, la France a précommandé près de 200 millions de doses, qui permettront de vacciner 100 millions de personnes, puisque, vous le savez, deux injections seront nécessaires pour la plupart des vaccins. Nous serons livrés au fur et à mesure que les vaccins obtiendront leur autorisation de mise sur le marché. À ce stade, nous comptons bien entendu sur les vaccins les plus avancés, c'est-à-dire ceux de Pfizer et de Moderna. D'autres, ceux d'AstraZeneca et de Janssen, se situent en phase 3 des essais cliniques et pourraient être disponibles dans les mois qui viennent, même s'il faut rester prudents à ce stade quant aux échéances précises étant donné les incertitudes liées aux essais en cours. Alors que la demande internationale est actuellement très forte pour les premiers vaccins en phase d'autorisation et que les chaînes de production sont mises sous tension, nous savons que nous entrons dans une période cruciale et nous serons particulièrement attentifs à garantir la livraison des doses commandées dans les délais prévus.

La deuxième étape est la définition de notre stratégie vaccinale et l'identification des publics à vacciner en priorité. Sur ce point, notre ligne directrice est claire : ce sera celle fixée par une autorité médicale indépendante, la Haute Autorité de santé – HAS. Dans son avis rendu public le 30 novembre dernier, celle-ci nous recommande de donner la priorité aux personnes qui présentent un risque de développer une forme grave de la maladie en raison de leur âge et de facteurs de comorbidité. C'est la raison pour laquelle notre campagne débutera, conformément à cet avis, par les personnes les plus âgées accueillies dans les EHPAD.

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