Intervention de Pascal Brindeau

Séance en hémicycle du mardi 8 décembre 2020 à 15h00
Parquet européen et justice pénale spécialisée — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPascal Brindeau :

Ce projet de loi, adopté par le Sénat en première lecture, comporte deux volets : le premier met en oeuvre le règlement européen créant un parquet européen ; le deuxième porte sur la justice spécialisée, en particulier en matière environnementale.

Sur le premier point, je l'ai dit, le groupe UDI et indépendants se félicite de ce progrès en matière de coopération européenne puisque, pour reprendre ma formule, les frontières nationales arrêtent les magistrats et les policiers mais elles n'arrêtent pas, malheureusement, les délinquants, particulièrement la grande délinquance. La création d'un parquet européen en matière de lutte contre la fraude aux intérêts financiers de l'Union européenne est un premier pas.

Nous souhaitons depuis longtemps que cette coopération renforcée puisse intervenir en matière de lutte contre la grande délinquance et de lutte contre le terrorisme. Elle sera un étage supplémentaire de coopération, après le renseignement et la police et avant la justice demain.

Nous regrettons – mais la France n'y est pour rien – que seuls vingt-deux États de l'Union européenne aient souhaité adhérer à ce dispositif, et nous formons le voeu que son efficacité convaincra demain d'autres pays d'y adhérer, d'autant – et c'était un élément de la négociation au niveau européen – que les parquetiers délégués placés sous l'autorité du procureur européen seront nationaux et non européens.

Si nous nous félicitons, donc, de cette mise en oeuvre, nous avons quelques réserves quant aux prérogatives dont disposeront le procureur européen et les procureurs délégués. La culture judiciaire française est fondée, nous le savons, sur une séparation stricte entre le ministère public, représentant les intérêts de l'État et de la société, qui n'a pas de pouvoir d'instruction, et le juge d'instruction, à qui est dévolu le pouvoir d'instruire dans tous les actes de procédure.

Par la force des choses et pour l'efficacité du dispositif, nous créons aujourd'hui un parquet dont les membres exerceront, outre les attributions du procureur de la République, certaines prérogatives du juge d'instruction.

Si nous comprenons la logique de ce choix, nous demandons que des précautions soient prises concernant l'étendue de ces pouvoirs. Nous avons d'ailleurs dépose des amendements afin qu'au-delà des actes de privation de liberté, qui restent dévolus au juge des libertés et de la détention, une séparation plus nette des pouvoirs soit instaurée, notamment en matière de mise en examen.

D'autres questions restent selon nous en suspens, mais le ministre y répondra peut-être.

Nous avons compris que les procureurs européens délégués seraient nommés, par voie de détachement, sur le contingent des magistrats actuellement en exercice. Même si vous répondrez sans doute que plus aucun poste de magistrat n'est vacant dans notre pays, nous attendons vos éclairages : qu'adviendra-t-il de ceux que les magistrats concernés occupent actuellement et qu'ils devront abandonner ?

S'agissant de la justice spécialisée, nous nous félicitons qu'elle se développe sur les questions environnementales, qui sont souvent très complexes.

Nous avons noté l'extension prévue de la procédure de transaction. Pourtant, là aussi, j'ai des objections. Pourquoi la réserver aux seules personnes morales ? Pour un même contentieux, celles-ci y auraient accès alors que pour les personnes physiques, il faudrait forcément en passer par un procès !

En outre, l'éligibilité à cette transaction, à cette négociation de peine, n'est pas soumise à ce stade à une reconnaissance préalable de culpabilité par les personnes morales concernées. Cela ne me semble pas logique, mais peut-être aurons-nous l'occasion d'en débattre.

Pour le reste, notre groupe est favorable au texte.

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