Intervention de Gérard Leseul

Séance en hémicycle du jeudi 26 novembre 2020 à 15h00
Intégration des objectifs de développement durable dans le processus législatif — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérard Leseul :

Nous avons également déposé de très nombreuses propositions de loi, des centaines d'amendements, notamment dans le champ social, en faveur d'un travail décent, d'une juste rémunération ou encore contre la réintroduction des néonicotinoïdes ; ces dispositions n'ont malheureusement pas été adoptées.

Toutes nos propositions s'inscrivent dans la logique des ODD et de la feuille de route de la France, car nous prenons à coeur ces objectifs, notamment le contrôle au regard des ODD des orientations prises par le Gouvernement, auquel la France s'est engagée en 2015. Or, au-delà de son aspect engagé, sympathique, cette proposition de résolution invite le Gouvernement à se saisir des ODD en les intégrant à notre Constitution, afin qu'ils constituent au besoin un motif d'irrecevabilité de propositions parlementaires. Autant nous pouvons adhérer aux considérant, autant la proposition elle-même ne tient pas. La Constitution permet déjà de contrôler l'action de l'État en la matière. La Charte de l'environnement de 2004 a valeur constitutionnelle ; nombre d'ODD, comme l'égalité entre les sexes, la paix, la justice, l'efficacité des institutions ou encore une éducation de qualité, sont garantis par notre Constitution, comme d'ailleurs par les articles 2 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, dont découle une obligation de protection des populations.

Parfois, voire souvent, nous pouvons même regretter que le garant de la constitutionnalité de nos travaux censure de bonnes dispositions, visant par exemple à lutter contre l'évasion fiscale en imposant aux holdings un reporting public, ou à garantir la protection et le partage du sol face à la spéculation foncière. Celles-ci, parmi d'autres, ont été censurées au nom du droit de propriété et de la liberté d'entreprendre, déduite par le Conseil constitutionnel de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Alors, oui : il faut faire bouger la Constitution. Dans l'esprit de ce que d'autres pays européens connaissent déjà, cette réforme devrait passer par l'ajout suivant à son article 34 : « La loi détermine les mesures propres à assurer que l'exercice du droit de propriété et de la liberté d'entreprendre respecte le bien commun. » C'est en effet cette notion fondamentale de « bien commun » qui lui fait défaut.

Il est malheureux que nous ne puissions amender cette proposition de résolution. Très concrètement, nous aurions plutôt souhaité qu'elle demande au Gouvernement d'indiquer obligatoirement, lors du dépôt d'un projet de loi, le ou les ODD visés par sa démarche ; la même obligation serait bien sûr appliquée aux propositions de loi et aux amendements. Cela permettrait à la présidence de l'Assemblée nationale de répertorier, de cartographier les textes législatifs par rapport aux ODD. Au terme de chaque session parlementaire, nous bénéficierions ainsi d'un panorama des avancées réelles. Cette dernière mesure ne nécessite pas de réforme constitutionnelle, mais seulement de la bonne volonté. Le groupe Socialistes et apparentés s'abstiendra donc lors du vote de cette proposition de résolution.

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