Intervention de Maud Petit

Séance en hémicycle du mardi 6 octobre 2020 à 15h00
Encadrement de l'image des enfants sur les plateformes en ligne — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMaud Petit :

Soyons fiers, mes chers collègues, d'être le premier Parlement au monde à vouloir encadrer l'exploitation commerciale de l'image des enfants, une pratique très courante sur les réseaux sociaux !

La première lecture à l'Assemblée nationale avait déjà permis d'enrichir un texte essentiel pour le respect et la protection des droits des mineurs. L'intention du Sénat était de renforcer cette orientation et le groupe Mouvement démocrate MoDem et démocrates apparentés partage cette volonté. Rappelons qu'en quelques heures, une vidéo en ligne peut devenir virale et avoir un impact important sur la vie de la personne exposée. De plus en plus de vidéos exposent des adolescents ou de jeunes enfants – voire des bébés – dans diverses scènes du quotidien, et il s'agit d'un phénomène mondial.

Le déploiement massif du numérique nous amène à légiférer aujourd'hui afin d'établir des règles garantissant droits et protection. Il est d'autant plus nécessaire de donner un cadre aux usages du numérique lorsque ceux-ci impliquent des enfants, parfois très jeunes. En effet, derrière une apparence de légèreté existe bel et bien le danger d'utiliser l'enfant comme un outil publicitaire, au détriment de son bien-être et de ses droits, sans que les parents ou les responsables légaux aient toujours conscience de la portée de ces pratiques.

Nous l'avons dit, la présente proposition de loi pose des règles précises pour encadrer ce phénomène en s'inspirant du régime qui s'applique aux enfants travaillant dans le spectacle et le mannequinat. En effet, à partir du moment où elles génèrent des revenus, ces pratiques s'apparentent à une activité professionnelle. C'est d'ailleurs parce que ces activités sont à l'origine d'importants revenus, à la fois pour les parents et pour les plateformes, qu'il est impératif d'entourer ces usages d'un cadre juridique jusqu'ici inexistant. Par cette loi, inédite en Europe et dans le monde, la France témoigne de sa volonté de lutter contre les dérives du numérique et de protéger ses mineurs.

C'est dans cette perspective que l'article 3 encadre les horaires de travail et ouvre un droit à rémunération pour le mineur, ces sommes pouvant être déposées sur un compte de la Caisse des dépôts et consignations jusqu'à sa majorité, ceci dans le cas où l'enfant aura donné son assentiment ou que l'autorisation individuelle prévue à l'article 1er aura été fournie. Le Sénat a ajouté un point de vigilance important à la fin de l'article concernant le placement de produit dans un programme diffusé sur une plateforme de partage de vidéos et dont le sujet principal est un enfant de moins de seize ans.

En première lecture, notre groupe avait rappelé l'importance de l'implication des plateformes numériques dans ce processus ainsi que l'enjeu fondamental d'une sensibilisation aux risques liés à ces pratiques. L'adoption de chartes explicitant ces risques est de ce point de vue une réelle avancée. Le groupe MoDem avait insisté sur les risques de dommages psychologiques durables. Ces chartes sont nécessaires en ce qu'elles engagent les plateformes à assumer leurs responsabilités et les parents à s'informer sur la réalité de ces pratiques numériques.

Le travail des sénateurs a permis que le CSA promeuve l'adoption de ces chartes par les plateformes de partage de vidéos : ce sera un moyen supplémentaire de mettre en exergue ces chartes, qui doivent être connues du plus grand nombre. De plus, ce nouvel article prévoit la publication périodique d'un bilan de l'application effective de ces chartes, ce qui contribuera aussi à la visibilité et la pérennisation du dispositif.

Cette deuxième lecture confirme l'ambition originelle de la proposition de loi : protéger les mineurs des risques de surexposition et d'atteinte à leur image, mais aussi sensibiliser les adultes qui les entourent aux enjeux du numérique, et responsabiliser les plateformes, sans qui rien ne pourra évoluer. La pédagogie et l'information sont, nous le croyons, les meilleurs outils pour prévenir les risques de ces pratiques émergentes et nous soutiendrons les initiatives qui iront en ce sens.

Nous voyons aujourd'hui l'aboutissement d'un travail rigoureux et commun dans la création d'un cadre législatif pragmatique et fonctionnel, parfaitement adapté au sujet qui nous occupe. Le groupe Mouvement démocrate MoDem et démocrates apparentés votera donc avec conviction en faveur de cette proposition de loi et tient à saluer l'engagement de tous les parlementaires dans la protection de notre jeunesse.

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