Intervention de Nicole Belloubet

Séance en hémicycle du lundi 22 juin 2020 à 16h00
Mesures de sureté à l'encontre des auteurs d'infractions terroristes — Présentation

Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice :

Ces rapports ont retenu toute mon attention et les services de mon ministère travaillent pour améliorer, dans le respect des libertés fondamentales, tant l'évaluation que la prise en charge des personnes condamnées pour des faits de terrorisme ou présentant des signes de radicalisation.

La remise en liberté de détenus condamnés, potentiellement toujours radicalisés en dépit du travail réalisé, appelle cependant des mesures spécifiques.

Il est de notre devoir de mettre tout en oeuvre pour garantir la sûreté de nos concitoyens. Le Gouvernement s'y est déjà attaché dans le cadre du dispositif issu de la loi SILT du 30 octobre 2017, qui a ouvert la possibilité de soumettre ces personnes à une mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance. Mais la durée de ces mesures administratives, limitée à un an, comme l'a rappelé la présidente de la commission des lois, peut paraître insuffisante. La création d'un cadre judiciaire pour cette surveillance des personnes condamnées est en outre plus cohérente avec le dispositif d'ensemble que nous appelons de nos voeux.

Le projet de soumettre des personnes qui ont purgé leur peine à un nouveau régime judiciaire restrictif de liberté doit cependant susciter la plus grande vigilance. Il ne saurait en effet être question d'instaurer – ou de laisser penser que nous sommes prêts à instaurer – une quelconque forme de justice prédictive, chimère qui est la négation même de l'idée de justice puisqu'elle revient à condamner pour un temps long en se fondant sur un simple soupçon, niant de fait tout droit à la réhabilitation.

Le respect de nos valeurs impose que le régime applicable aux terroristes ne se transforme pas en un labyrinthe dont l'issue serait illusoire. Veillons à ce que les mesures que nous élaborons ne les enferment pas davantage dans leur misanthropie au lieu de permettre leur réinsertion, laquelle doit rester notre objectif, a fortiori lorsqu'ils n'ont pas commis de crime de sang.

Le travail réalisé par la présidente de la commission des lois et le député Raphaël Gauvain, qui s'appuie sur un avis très étayé du Conseil d'État, a permis de dégager une solution d'équilibre qui conjugue efficacité des mesures et objectivité, limite raisonnable dans le temps et contrôle du juge. Cet équilibre essentiel me parait devoir être préservé.

L'article unique de la proposition de loi prévoit ainsi d'introduire dans le code de procédure pénale un dispositif permettant au juge d'imposer aux personnes condamnées pour des faits de terrorisme ayant purgé leur peine d'emprisonnement des mesures de sûreté, qui ne doivent pas être confondues avec une peine. Les peines et les mesures de sûreté diffèrent essentiellement par leurs buts. Alors que les peines tendent, à titre principal, à punir l'auteur d'une infraction, les mesures de sûreté, telles que celles ici proposées, visent exclusivement à prémunir la société contre la dangerosité de certains individus.

La commission des lois de cette assemblée a considérablement enrichi le texte initial en prenant notamment en considération l'avis rendu par le Conseil d'État le 11 juin dernier, ce qui, évidemment, me satisfait. Je souhaite toutefois m'arrêter sur deux points particuliers du texte adopté en commission : le bracelet électronique mobile…

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