Intervention de Sébastien Chenu

Séance en hémicycle du jeudi 11 juin 2020 à 15h00
Taux réduit de tva pour l'hébergement touristique et la restauration — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSébastien Chenu :

Parmi les conséquences de la crise sanitaire accompagnant le covid, on dénombre évidemment les fermetures administratives obligatoires qui ont concerné le secteur de l'hôtellerie, de la restauration et du tourisme, lequel a été à l'arrêt pendant deux mois. La grande majorité des hôtels et des restaurants ne retrouveront pas une activité normale avant plusieurs mois. Je salue l'inventivité dont ces professionnels ont fait montre ces dernières semaines. Plus d'un million de salariés sont au chômage complet ou partiel, 1 milliard de repas n'ont pas été servis et quelque 13 milliards d'euros de chiffre d'affaires ont été perdus – ils ne seront pas rattrapés. Sans mesures de soutien fortes et immédiates, de nombreux établissements ne survivront pas à ce choc inédit.

Le dispositif de chômage partiel a maintenu dans l'emploi des milliers de salariés et préservé des compétences qui seront essentielles pour la reprise de l'activité. Les prêts garantis par l'État profitent d'abord aux entreprises dont la situation financière est la plus solide. Ils ne sont pas assez nombreux ; de plus, de nombreux entrepreneurs témoignent du refus de leur banque habituelle de leur accorder ces prêts sollicités et pourtant garantis, donc, par l'État – aucune disposition n'oblige en effet les établissements bancaires à accorder à leurs clients des crédits, même garantis par l'État. Ainsi, faute de trésorerie suffisante, les entreprises les plus fragiles n'ont pas pu reprendre leur activité à l'occasion du déconfinement. Quant aux entrepreneurs qui ont eu la chance d'obtenir des prêts et qui ont pu traverser la crise sanitaire, le plus dur reste cependant à venir. Avec un chiffre d'affaires proche de zéro pendant deux mois, les acteurs du secteur ont vu leur trésorerie se dégrader fortement : c'est un nouveau modèle économique qu'ils doivent désormais inventer pour survivre. À terme, il faudra bien assumer le remboursement des emprunts, quand l'activité reprendra presque normalement, si – nous l'espérons tous – une deuxième vague épidémique ne réduit pas à néant ces efforts considérables. Les incertitudes sont encore grandes, et rien ne garantit que les entreprises réussissent à dégager les marges de manoeuvre nécessaires pour faire face aux échéances de leurs emprunts et au paiement de leur loyer. Dans ce contexte, toutes les mesures d'urgence visant à préserver l'emploi, ainsi que la survie de tous les acteurs économiques, y compris les fournisseurs, producteurs, agriculteurs et pêcheurs, sont les bienvenues et toutes les propositions doivent être étudiées attentivement – ce que nous faisons aujourd'hui.

La proposition de loi que nous examinons vise à diminuer le taux de la TVA applicable au secteur de l'hôtellerie-restauration de 10 à 5,5 %, jusqu'au 31 décembre 2020. Contrairement à la baisse du taux de TVA décidée en 2009, celle-ci a pour objectif d'augmenter les recettes directes et d'améliorer les marges des entreprises pour qu'elles reconstituent leur trésorerie. La diminution de l'activité touristique, l'instauration de mesures sanitaires et la probable baisse du pouvoir d'achat des clients, l'absence de touristes dans les mois à venir, vont entraîner de manière mécanique une chute du chiffre d'affaires des établissements de l'hôtellerie, de la restauration et du tourisme. La baisse du taux de TVA de 10 à 5,5 % est donc la bienvenue. Cependant, elle ne suffira pas à sauver nos hôtels et nos restaurants et devra faire partie intégrante d'un vaste plan de relance et de soutien de l'activité. Pour notre part, nous avions proposé une aide directe aux PME ou TPE, sous la forme d'un forfait de 1 500 euros pour chaque entreprise et de 1 000 euros par salarié, pour préserver les liquidités des établissements et ainsi les aider à affronter le redémarrage de l'activité. Tel n'a pas été le choix du Gouvernement – nous le regrettons. Le 23 avril dernier, j'ai ici même lancé un appel à sauver nos hôtels et nos restaurants, en dénonçant l'insuffisance des mesures prises par le Gouvernement, qui se résumaient alors à un simple report de charges, et non à une annulation, pour la période de confinement. Seule la suppression de l'ensemble des charges, pour la période allant du 15 mars au 31 décembre 2020, soulagerait les trésoreries exsangues. En complément, nous sommes favorables au maintien du dispositif d'activité partielle dans certains secteurs, jusqu'au 15 mars 2021.

Les collectivités locales devraient s'associer à cet effort, en exemptant les entreprises de l'hôtellerie-restauration du paiement des taxes et des impôts locaux pour l'année 2020. Maintenir les commerces de proximité, les petits restaurants et les activités d'hôtellerie est indispensable pour ne pas voir la désertification des centres-villes s'accentuer. Les acteurs du secteur sont des entrepreneurs courageux ; ils savent qu'on ne peut pas tout attendre des pouvoirs publics. Néanmoins, il n'est pas admissible que les assureurs ne prennent pas leurs responsabilités et refusent d'indemniser les pertes d'exploitation de leurs clients : qu'attendez-vous, monsieur le secrétaire d'État, pour mobiliser le monde de l'assurance, comme le veut votre devoir ? Un état de catastrophe sanitaire devrait être reconnu juridiquement dans les futurs contrats d'assurance. La situation particulièrement fragile des entreprises de l'hôtellerie-restauration et du tourisme ne permet pas de tergiverser davantage ; il est temps de déployer dans les plus brefs délais un plan de relance ambitieux pour sauver nos hôtels et nos restaurants. Cette baisse temporaire de la TVA y aurait toute sa place ; elle n'est évidemment pas suffisante en tant que telle, mais il s'agit d'une première pierre à l'édifice : nous la soutiendrons.

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