Intervention de Stéphanie Kerbarh

Séance en hémicycle du mercredi 20 mai 2020 à 15h00
Débat sur l'opportunité d'une quatrième révolution industrielle écologique et numérique

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphanie Kerbarh :

Au nom du groupe La République en marche, je remercie tout d'abord nos collègues du groupe MODEM et apparentés d'avoir inscrit ce sujet à l'ordre du jour de notre semaine de contrôle.

Ce débat ne naît pas de nulle part, il n'est pas intemporel, mais il arrive après deux présentations importantes. La première s'est déroulée au niveau européen, le 11 décembre 2019 : le pacte vert a défini la marche à suivre pour que le continent atteigne la neutralité carbone d'ici à 2050. La seconde a eu lieu au niveau national, le 15 octobre 2019 : selon les grandes orientations du pacte productif, l'objectif était de construire un nouveau modèle français respectueux de l'environnement pour atteindre le plein-emploi.

Surtout, le présent débat est organisé après un événement mondial majeur : la pandémie du covid-19. En révélant notre dépendance dans de nombreux domaines économiques stratégiques, cette crise sanitaire a remis à l'ordre du jour l'impératif de souveraineté. Cette volonté ne rime pas avec repli sur soi et fermeture des frontières, elle passe par une reconquête de nos industries stratégiques.

Nous devons nous reposer sur une logique d'économie circulaire et de responsabilité sociétale, environnementale et territoriale. Plusieurs travaux doivent ainsi être engagés : l'élaboration d'un mix énergétique par le développement des énergies renouvelables, la sobriété énergétique des modes de production et de transport, la permaculture, l'allongement de la durée de vie des produits, le recyclage des matériaux.

L'extraction des matières premières, en lien étroit avec l'économie circulaire, présente un intérêt stratégique jusqu'à maintenant très peu considéré. En France, seulement 18 % des entreprises connaissent l'intégralité de leur chaîne d'approvisionnement, apprend-on dans un rapport sur la vulnérabilité des approvisionnements des entreprises, publié début juin.

Or nous voyons se dessiner un risque d'inflation, voire la possibilité d'interruption des approvisionnements. Ce risque est connu pour certains métaux : en Europe, l'essentiel des secteurs de la métallurgie, de l'électronique, de la chimie et de l'énergie dépendent de manière cruciale de ressources métalliques extraites en majeure partie en Chine et en Afrique.

Les conséquences environnementales et sociales de l'exploitation minière font l'objet d'une grande attention, voire d'une méfiance de la part de nos concitoyens. Cependant, les conciliations sont possibles. Nous pouvons envisager une refonte du code minier, fixant les conditions d'une exploitation minière durable et responsable tout au long du cycle de vie d'une mine.

L'économie circulaire nous permettra de renforcer la position des entreprises françaises et européennes dans la compétition pour les ressources. Pour ce faire, nous devons accompagner et soutenir l'évolution et la transformation de l'outil de production.

Pour être réaliste, il faudra également appliquer à l'étranger les règles que nous nous appliquerons à nous-mêmes en matière d'exploitation responsable car nous aurons toujours besoin de faire appel à des ressources de pays partenaires, dans le cadre d'une relation fondée sur le respect et la bienveillance.

La quatrième révolution industrielle sera aussi territoriale. En déclinant l'économie circulaire dans la relation inter-entreprises, les déchets de l'une peuvent devenir la matière première de l'autre, afin de créer des symbioses industrielles. L'écologie industrielle s'inscrit alors dans une stratégie de développement économique et régional durable.

Deuxième pilier de cette révolution : le numérique, ce formidable vecteur de développement de l'économie et de l'éducation dont, ces derniers temps, nous avons vu les mérites mais aussi les limites. La France, qui dispose d'indéniables atouts dans ce domaine, doit joindre ses talents à ceux des autres membres de l'Union européenne pour assurer une véritable souveraineté numérique à l'échelle du continent.

Nous devons faire des progrès en matière de protection et de sécurisation de nos données. Il est ainsi nécessaire d'investir massivement dans les technologies quantiques, la cybersécurité et les infrastructures de stockage et de traitement des données, afin de garantir la sécurité et la souveraineté. C'est l'enjeu du futur. Pour citer Michel Paulin, directeur général du fournisseur français de services de stockage de données, OVH, il faut créer la souveraineté des valeurs.

Il s'agit de favoriser les investissements publics et privés dans les entreprises soucieuses de leur empreinte écologique et de leurs performances extra-financières. Cela passe aussi par l'utilisation stratégique de la commande publique, en intégrant des spécifications et des critères en faveur de la protection et de la mise en valeur de l'environnement, du progrès social et du développement économique.

Cette quatrième révolution industrielle sera inclusive en ce qu'elle instaurera un dialogue entre toutes les parties prenantes : fournisseurs, acteurs du territoire, salariés et représentants de la société civile. Ce dialogue portera tant sur l'identification des impacts négatifs et sur la manière d'y remédier que sur l'optimisation des impacts positifs et le renforcement du lien social.

Sans attendre et sans crainte, entrons alors pleinement dans cette révolution industrielle qui permettra d'atteindre l'équilibre entre le développement économique, la souveraineté, le progrès social et la protection de l'environnement. La quatrième révolution industrielle sera soutenable ou ne sera pas.

Avant de laisser ce micro, je dédie mon intervention à tous les salariés de la papeterie UPM-Chapelle-Darblay, en Normandie.

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