Intervention de Béatrice Descamps

Séance en hémicycle du jeudi 30 janvier 2020 à 15h00
Ouverture du marché du travail aux personnes atteintes de diabète — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBéatrice Descamps :

De nos jours, être atteint d'une maladie chronique – le diabète par exemple – limite ou interdit l'accès à certaines professions et peut ralentir voire compromettre l'évolution professionnelle. Les témoignages à ce sujet sont nombreux.

Les discriminations sur le lieu de travail se traduisent également en chiffres. Si je prends l'exemple de patients diabétiques, on constate que 16 % d'entre eux estiment avoir été victimes d'une discrimination provoquée par leur diabète dans leur vie professionnelle ou lors d'un recrutement ; que 23 % estiment avoir été victimes d'une discrimination dans leur vie professionnelle au moment de la découverte de leur diabète ; et que 33 % ont décidé – cela n'est pas anodin – de cacher leur diabète au travail, par crainte d'être mis à l'écart ou de rencontrer des difficultés.

Est-il normal d'avoir peur de dire que l'on est diabétique ? Choisir de cacher sa maladie rend souvent sa gestion quotidienne plus difficile. Pourtant, de nombreux diabétiques font ce choix. L'article 4 de la présente proposition de loi trouve ici toute son importance.

Le diabète, comme bien d'autres maladies chroniques, reste associé à des stéréotypes susceptibles d'inciter à la stigmatisation. Les règlements professionnels interdisent encore certains métiers à ceux qui en souffrent, en dépit des immenses progrès thérapeutiques et des évolutions technologiques permettant, par exemple, d'améliorer l'équilibre du diabète, grâce aux progrès de l'auto-surveillance glycémique.

Je rencontre souvent des jeunes – parmi lesquels Hakaroa Vallée – qui s'interrogent sur leur avenir professionnel. J'ai également eu l'occasion, à plusieurs reprises, de travailler avec la fédération française des diabétiques, et de me pencher sur les difficultés spécifiques provoquées par d'autres maladies chroniques, telles que la sclérose en plaques.

Les acteurs concernés effectuent un travail remarquable. Je sais que nous sommes nombreux, sur ces bancs, à travailler avec eux. Or notre rôle de législateur est d'être à l'écoute, de nous interroger, de légiférer et de suivre l'application de la loi. Tel est le sens de l'article 3 qui nous invite à nous interroger sur les réglementations visant à interdire certains métiers.

Je me réjouis ici que les auditions menées par la rapporteure nous aient amenés à élargir la portée du texte aux maladies chroniques dans leur ensemble. Il s'agit d'une avancée bienvenue vers une inclusion accrue sur le marché du travail. Vous l'avez rappelé, madame la ministre, 20 millions de Français sont concernés.

Nous sommes tous d'accord, me semble-t-il, sur la nécessité de dresser un état des lieux des règlements professionnels concernés. Au demeurant, la présente proposition de loi, déposée au mois de novembre 2018, a été largement cosignée, rencontrant un écho sur chacun de nos bancs. Depuis lors – et même auparavant – , d'autres initiatives fondées sur la même conviction ont été prises.

J'avais moi-même interrogé le Gouvernement à ce sujet devant la représentation nationale. Mme la ministre des solidarités et de la santé m'avait alors répondu qu'il était nécessaire de garantir un accompagnement vers l'emploi, afin que les patients ne se voient pas opposer une incompatibilité de principe avec certaines professions. Le Gouvernement a lancé plusieurs travaux sur le sujet, afin de faire évoluer les textes, sans résultats réellement aboutis jusqu'à présent.

Il nous semble donc légitime que le Parlement reprenne la main – de concert avec vous, madame la ministre – et se fasse le porte-voix des aspirations de nos concitoyens. Bien entendu, il ne s'agit pas de prendre des risques ni de mettre en danger quiconque, mais de faire preuve d'un esprit de responsabilité tout en continuant à préserver la sécurité de chacun.

Mener une réflexion sur ce sujet est essentiel. Tel est le sens de l'article 2 qui vise à basculer d'un système d'interdiction a priori vers un système d'évaluation de l'état de santé au cas par cas.

Il va de soi que nous soutenons la proposition de loi de notre collègue Agnès Firmin Le Bodo. Rappelons que la commission des affaires sociales l'a adoptée à l'unanimité. Comme l'a indiqué Mme la ministre des solidarités et de la santé il y a quelques mois, en réponse à la question que j'évoquais plus haut : « La médecine progresse, la société inclusive doit progresser également. »

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