Intervention de Gérard Cherpion

Séance en hémicycle du mercredi 8 janvier 2020 à 15h00
Débat sur la mise en oeuvre des ordonnances de la loi travail

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérard Cherpion :

La réforme du code du travail voulue par le Président la République et que le Gouvernement a mise en oeuvre dès juillet 2017 avait deux objectifs clairement inscrits dans le projet de loi, dont le titre était sans ambiguïté : « projet de loi pour le renforcement du dialogue social ». Renforcer le dialogue social et simplifier le code du travail : voilà deux axes souhaités par le groupe Les Républicains, qui a donc appuyé cet engagement en votant pour le projet de loi, qui devait permettre un retour au développement des entreprises et de l'emploi.

Il est regrettable de constater qu'en ne s'appuyant pas sur les liens forts existants entre les parlementaires, les territoires et les entreprises, le Parlement est devenu une simple chambre d'enregistrement des textes de l'exécutif, alors que la coconstruction des textes avec l'ensemble des partenaires garantissait la qualité et l'acceptation des projets par tous. C'est ainsi que les espoirs qu'il avait créés ont été déçus.

La presse quotidienne régionale cite ce jour des éléments communiqués par l'INSEE et qui sont sans appel : après une légère baisse dont on ne peut que se réjouir, le chômage est reparti à la hausse dans neuf des dix départements de la région Grand Est. Cela semble d'ailleurs en contradiction avec l'augmentation de près de 10 % du nombre de création d'entreprises, également signalée par l'INSEE. En fait, ces créations étant pour la plupart des microentreprises, créées par des autoentrepreneurs, souvent trop peu préparés – vous avez hélas ! supprimé l'obligation de suivre un stage de formation – , leur taux de survie est faible. Ils sont d'ailleurs nombreux à venir dans nos permanences chercher conseils et appui, alors que dans les Vosges le représentant de l'État reste très en retrait s'agissant des problèmes économiques et sociaux.

Je voudrais donner un exemple des tergiversations de votre ministère en ce qui concerne les CSE. Si l'objectif de simplification était louable, l'application montre ses limites. En effet, en décembre 2019, entre 15 et 20 % de CSE n'étaient pas encore en place. Alors que vous annoncé au début du mois dernier que 50 000 instances uniques étaient désormais installées, 21 000 procès-verbaux de carence ont été transmis au ministère du travail. Les partenaires sociaux avaient d'ailleurs souhaité un report d'application de quelques mois mais vous l'avez refusé. Que se passerait-il pour ces entreprises, madame la ministre, si le délit d'entrave venait à être retenu ? Les conséquences seraient alors catastrophiques !

Par ailleurs, le document intitulé « questionsréponses sur le CSE », diffusé le 18 décembre dernier par le ministère du travail, opère un recul notoire en restreignant le droit d'accès à la formation « santé, sécurité et conditions de travail », qui dure de trois ou cinq jours selon la taille des entreprises, aux seuls membres de la commission SSCT et en excluant tous les autres membres du CSE. Cette position est incompréhensible et contraire à la volonté du législateur. En effet, votre ministère cite pour se justifier une ancienne version de l'article L. 2315-18 du code du travail alors que le Parlement a ouvert le droit à la formation à tous les membres du CSE, pourtant moins nombreux depuis la réforme.

Cette disposition est d'autant plus incompréhensible que dans le cadre de la réforme des retraites, les aspects dits de pénibilité sont enfin au centre des débats. Or qui plus que les entreprises, les CSE, les partenaires sociaux et les branches est à même de déterminer quelles tâches sont pénible avec les services de santé au travail ? C'est cela, un dialogue social responsable, qui nécessite la formation de tous les acteurs. Comptez-vous donc revenir sur cette mesure ?

Du côté des entreprises, beaucoup de chantiers ont été ouverts, comme elles le souhaitaient, mais l'évolution contradictoire des textes et la difficulté à les appliquer les rendent plus circonspectes et prudentes dans la réalisation de leurs projets, et cela se ressent sur la croissance. Pour les partenaires sociaux, le paritarisme de gestion n'a pas survécu au décret de l'assurance chômage, devenant un paritarisme de caution. La conséquence est la méfiance, quand le progrès social, comme le progrès économique, nécessite de la confiance et de la stabilité.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.