Intervention de Éric Woerth

Séance en hémicycle du mardi 7 janvier 2020 à 15h00
Financement de l'économie dans le cadre de la transposition de l'accord du comité de bâle de 2017 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Woerth :

Depuis la crise de 2008, le comité de Bâle, groupe de superviseurs chargé d'écrire les textes de la régulation bancaire mondiale, a considérablement renforcé la robustesse du système bancaire, dont le superviseur européen nous dit, stress tests à l'appui, qu'il est aujourd'hui plus solide – ce qui est le cas. Nous pouvons nous en réjouir : c'était en effet indispensable.

En 2017, le comité de Bâle a adopté un accord technique destiné à apporter les derniers ajustements à ce corpus de règles refondé. Les travaux de transposition de cet accord en droit européen ont déjà commencé et devraient se poursuivre à un rythme rapide dans les prochains mois.

Tout cela serait bel et bon si le Comité de Bâle et l'Autorité bancaire européenne n'avaient pas récemment estimé que cet accord contraindrait les banques européennes – notamment les banques françaises – à augmenter leurs fonds propres de quelque 25 %, ce qui est évidemment considérable. Certains prétendent que cette hypothèse est maximaliste : peut-être, mais elle est chiffrée. Cela représente plusieurs centaines de milliards d'euros additionnels pour des établissements qui assurent plus de 75 % du financement de l'économie européenne. Les banques américaines, en revanche, ne seraient touchées par ces mesures qu'à hauteur d'une augmentation de 1,5 % de leurs fonds propres !

Le sujet, mes chers collègues, est naturellement technique, mais il est surtout politique ; c'est tout l'objet de la proposition de résolution.

En effet, il s'agit tout d'abord de décider du niveau adéquat de sécurité du système de financement de notre économie. Cette sécurité a un coût puisqu'elle immobilise en fonds propres des centaines de milliards d'euros qui pourraient autrement être consacrés au financement direct de l'économie – surtout dans une phase de transition comme celle que nous traversons, où les besoins sont considérables, pour dire le moins. Le débat, les divergences sont certes possibles sur ce qui est insuffisant ou excessif, mais, in fine, il s'agit d'une décision d'opportunité qui incombe aux gouvernements.

Or ce sont les gouvernements qui, dans le cadre du G20, ont plusieurs fois donné un mandat politique très clair au Comité de Bâle – d'ailleurs repris par le Conseil et le Parlement européens. Ce mandat était double : il consistait d'une part à ne pas augmenter les exigences globales de fonds propres, et d'autre part à ne pas créer de différences importantes entre certaines régions du monde – en particulier l'Europe et les États-Unis. L'accord technique de 2017 – comme le Comité de Bâle lui-même et l'Autorité bancaire européenne l'ont montré, à leur corps défendant mais chiffres à l'appui – ne respecte ni l'une ni l'autre de ces deux conditions.

Si le sujet est politique, c'est aussi parce que notre souveraineté économique et financière est en jeu. Nous devons éviter de créer une situation de dépendance excessive du financement des entreprises, notamment des secteurs stratégiques que sont la défense, l'énergie et d'autres, à l'égard des marchés de capitaux asiatiques et américains, et de leurs banques d'affaires.

Mes chers collègues, cette proposition de résolution est originale, car elle fait l'objet d'un consensus politique large – à défaut d'être unanime – au sein de l'Assemblée. Notons qu'elle est cosignée par les présidents des groupes Les Républicains, La République en marche, MODEM, UDI-Agir et Libertés et territoires, ainsi que par les membres de la commission des finances qui appartiennent à ces groupes. En 2016 déjà, alors que la majorité – vous en conviendrez – était différente, …

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