Intervention de Dominique Potier

Séance en hémicycle du vendredi 25 octobre 2019 à 15h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 — Article 46

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Potier :

Il vise à ouvrir la discussion sur la question du financement. Le rapport du Gouvernement était prévu pour le mois d'avril dernier, selon la loi EGALIM – pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole. En fait, il n'est disponible que depuis quinze jours ou trois semaines, si tardivement que nous n'avons pas eu le temps de l'expertiser, d'organiser des auditions et de le critiquer. Je me permets cette remarque dans le cadre du travail de coconstruction.

Ce rapport comporte une proposition qui s'inspire d'un amendement que j'avais soutenu en commission lors de l'examen de notre proposition de loi, en janvier dernier, visant à renoncer à proroger la redevance sur les pollutions, et à s'appuyer plutôt sur le chiffre d'affaires. Nous nous étions inspirés, à l'époque, des travaux de M. Bruno Le Maire sur les GAFA – les gérants du numérique – , que nous avions transposés au financement de la phytopharmacie. Dans ce cadre, nous imaginions que l'on pourrait taxer les chiffres d'affaires.

À la suite d'un arbitrage intergouvernemental qui tendait à éviter la création d'une nouvelle taxe, vous vous êtes appuyée sur la taxe de phytopharmacovigilance. Je connais bien cette taxe, puisque je suis l'auteur de l'amendement qui en est à l'origine dans la loi de 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt. Cette taxe a un objectif très précis : elle vise à établir la nocivité d'un produit dans la durée, au-delà de la mise sur le marché. L'interdiction récente du métam-sodium, utilisé par les producteurs de mâche nantaise, est le fruit de cet amendement et des fonds dévolus grâce à une faible taxe sur le chiffre d'affaires des firmes.

Personne ne veut remettre en cause cette taxe précieuse qui permet de renseigner l'utilisation de molécules et de produits pour l'ANSES – l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail.

Cependant, s'appuyer sur cette taxe pour financer l'indemnisation des victimes de pesticides pose à mon sens trois problèmes au moins.

Tout d'abord, il y a un conflit d'intérêts potentiel. Le même organisme peut-il à la fois étudier la nocivité des produits et être impliqué dans la réparation pour les victimes ? Cela pose un problème déontologique et éthique.

Il y a ensuite la question de la nature du collecteur. Je connais bien l'ANSES, même si vous la connaissez bien mieux que moi, madame la ministre. J'ai assisté à ses réformes, comme le déplafonnement de ses moyens, sur lequel nous avons beaucoup travaillé durant la dernière législature. L'ANSES, jusqu'à nouvel ordre, n'est pas un collecteur d'impôt. Pour tout vous dire, je ne suis pas certain que l'agence ne soit pas victime d'opérations d'optimisation fiscale – j'ose les mots « fraudes fiscales » – de la part des firmes. Elle n'est tout simplement armée pour leur résister et assurer correctement la collecte.

Enfin, il pourrait y avoir concurrence entre sa mission d'évaluation de la nocivité des produits et sa mission d'indemnisation des victimes.

Pour toutes ces raisons, il nous semble qu'il faut au moins cranter une évolution minimale en pourcentage, ce que nous proposons dans un amendement d'appel qui est le seul à avoir passé le filtre du service de la séance. On peut cranter cette progression pour pouvoir satisfaire aux exigences de la réparation et de la prévention.

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