Intervention de Jean-Hugues Ratenon

Séance en hémicycle du mardi 23 juillet 2019 à 15h00
Modernisation de la distribution de la presse — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Hugues Ratenon :

En effet, vous vous apprêtez à diviser la distribution des titres de presse en trois niveaux. D'un côté, les titres considérés comme relevant de l'information de politique générale devront continuer à se structurer autour des sociétés coopératives, et seront donc diffusés avec la même efficacité qu'aujourd'hui.

De l'autre, les titres agréés par la commission paritaire des publications et agences de presse pourront signer des accords interprofessionnels. Ainsi, ils auront accès aux réseaux de distribution, donc aux points de vente. Quant aux autres titres – on en compte environ 1 850 – , ils seront moins aidés et devront conclure des accords de gré à gré avec les 23 000 marchands.

Ici se cache une profonde atteinte au pluralisme et à la liberté de la presse ! La liberté que vous brandissez est encore celle du fort contre le faible. Les petits titres ont-ils les moyens de démarcher les 23 000 points de vente ? Non. Tous n'y seront donc pas distribués.

À l'heure actuelle, l'impartialité et le pluralisme sont assurés, car les points de vente de la presse n'ont pas voix au chapitre sur la presse qu'ils distribuent, ce qui garantit également la mise à l'écart de l'opinion politique du vendeur.

Or, avec ce projet de loi, cette contrainte concernera uniquement les titres d'information de politique générale. Dès lors, que dire du sort réservé à la presse spécialisée ou à la presse assurant la visibilité des combats des minorités ?

Chacun se souvient du kiosquier ayant refusé, il y a quelques mois, de distribuer le journal sportif L'Équipe, dont la une était consacrée à l'homosexualité dans le sport. On imagine que ce kiosquier devait également refuser de vendre une revue comme Têtu.

Outre le critère politique, le critère de rentabilité et de l'intérêt économique jouera à plein. De toute évidence, dans les grandes villes, où le public est plus diversifié qu'ailleurs, la diversité des titres sera plus importante.

Notre rôle consiste aussi à faire en sorte que ce genre de situation ne puisse se produire. Chacun de nos concitoyens a le droit de trouver les titres de presse qui lui plaisent, dans le point de vente le plus proche de chez lui, où qu'il se trouve et quelles que soient les opinions du kiosquier.

En évoquant l'approvisionnement géographique des kiosquiers, je ne peux m'empêcher de dire un mot de La Réunion. Sur mon île, certains magazines arrivent avec plusieurs jours – parfois plusieurs semaines – de retard sur leur publication dans l'Hexagone. Le présent projet de loi ne fera qu'accroître la fracture entre nos territoires.

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