Intervention de Cédric O

Séance en hémicycle du mardi 18 juin 2019 à 15h00
Agences publiques et instances consultatives nationales — Discussion générale

Cédric O, secrétaire d'état chargé du numérique :

Pour commencer, madame Magnier, le Gouvernement partage votre constat et l'objectif que vous visez avec cette proposition de résolution, comme l'ont d'ailleurs montré les annonces du Président de la République et du Premier ministre. Il y a, monsieur le président Chassaigne, du déterminisme historique – un sujet que vous maîtrisez mieux que moi – dans la volonté de « rationaliser » – pardon pour ce terme – le fonctionnement de tous ces comités et commissions en « ule » et autres terminaisons.

Malgré ce soutien de principe, je voudrais apporter quelques nuances et différences d'appréciation dirimantes.

Tout d'abord, les termes de la résolution en témoignent, la première difficulté à laquelle nous sommes confrontés quand il s'agit de traiter le sujet des agences et autres comités est de déterminer leur champ.

Sans entrer dans l'exégèse des termes juridiques, trois types d'établissements existent. Il s'agit tout d'abord de ceux que nous pouvons caractériser par une approche de droit budgétaire. Ce sont les établissements publics au sens du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, dit GCBP, c'est-à-dire les personnes morales qui disposent d'un comptable public et appliquent les règles de comptabilité publique. Nous en comptons environ 1 300.

Dans la deuxième catégorie entrent ceux que nous caractérisons par une approche budgétaire. La notion pertinente est alors celle des opérateurs de l'État. Nous en comptons 484, parmi lesquelles l'ensemble des universités et le CNRS.

Enfin, dans une approche statistique de comptabilité nationale entrent des organismes divers d'administration centrale, au nombre de 700, dont la définition est donnée par l'INSEE au regard des règles du système européen des comptes nationaux. Ces 700 organismes sont, pour partie seulement, opérateurs, et tous sont soumis au GBCP. Ainsi, les universités sont des ODAC mais le CNOUS – Centre national des oeuvres universitaires et scolaires – , qui n'est pas majoritairement piloté par l'État, ne l'est pas.

Plus globalement, sans entrer dans la casuistique administrative, la question des agences de l'État est au coeur de l'attention du Gouvernement et des parlementaires. La dernière circulaire du Premier ministre, en date du 5 juin, y consacre d'ailleurs une partie entière et met en oeuvre certaines recommandations formulées dans cette proposition de résolution.

Les ministères ont remis leur copie et nous ne devrions pas tarder à recevoir les propositions du Gouvernement à ce sujet.

Vous l'avez rappelé, madame Magnier, l'augmentation du nombre de ces structures et leur classification complexe peut avoir pour conséquence de diluer l'information disponible et de nuire au pilotage des politiques publiques. Le Gouvernement, conscient de la situation, a pris plusieurs mesures pour remédier à ces deux défauts. Les plus significatives sont la mise en place d'une annexe au projet de loi de finances, le jaune « opérateurs » – qui regroupe dans un document unique l'information financière sur les opérateurs – ; le plafonnement, depuis 2014, des taxes affectées aux organismes ; la mise en place, dès 2009, d'un plafond d'emploi législatif et, depuis 2016, l'harmonisation des règles comptables et budgétaires dans le cadre du décret GBCP.

Le mode d'action publique offert par les agences ne comporte pas que des risques et des inconvénients, ce que vous avez été nombreux à relever, mais offre une modalité particulière de déploiement de l'action de l'État, grâce à la création de structures plus spécialisées, parfois moins lourdes, pouvant impliquer directement des parties externes à l'État dans leurs décisions.

Le Gouvernement partage donc globalement votre analyse – même s'il adopte une tonalité plus positive – et s'efforce de répondre aux enjeux du pilotage des établissements publics nationaux. Il applique d'ailleurs déjà une partie des dispositions que vous proposez.

Parmi ces propositions figure la création d'une nouvelle annexe au projet de loi de finances présentant l'ensemble des agences de l'État et leur budget consolidé. Le Gouvernement est attaché à la disponibilité et à la qualité des données financières des établissements publics. Pour que celles-ci gagnent en fiabilité et en lisibilité, le choix a été fait, avec le Parlement, de se concentrer sur le périmètre stratégique des opérateurs et de ne pas s'étendre à l'ensemble des agences de l'État.

Par conséquent, le jaune détaille les caractéristiques des opérateurs qui sont, rappelons-le, définis par trois critères cumulatifs : une activité de service public qui puisse se rattacher directement à une politique publique menée par l'État ; un financement assuré majoritairement par l'État ; un contrôle direct par l'État via l'exercice d'une tutelle pouvant orienter les décisions stratégiques.

Les opérateurs représentaient 82 % des dépenses totales des établissements publics nationaux en 2018 et 92 % des dépenses de personnel. Rendre les documents budgétaires plus exhaustifs ferait donc peser un risque conséquent sur la fiabilité des données envoyées par des structures plus petites et moins stratégiques, sans que le pilotage par l'État en tire nécessairement un gain significatif.

Vous proposez ensuite d'adopter une règle normative pour encadrer la création de nouvelles entités administratives rattachées aux administrations centrales, en posant comme conditions préalables la suppression, la transformation ou la fusion d'entités existantes et la réalisation d'une étude d'impact. Le Gouvernement partage ces préoccupations, au point que la récente circulaire du Premier ministre, en date du 5 juin, contient des mesures très similaires. Outre une revue systématique des agences de petite taille destinée à interroger leur pertinence – quitte à conclure à la nécessité d'en fusionner certaines, voire de les supprimer – , la règle suivante a été édictée : toute nouvelle création devra s'effectuer à nombre constant, après suppression, fusion ou transformation d'une autre structure concourant à la même politique publique ou appartenant au même ministère. Le secrétariat général du Gouvernement est chargé d'appliquer ces mesures de rationalisation.

Vous proposez également d'évaluer périodiquement l'efficience et la pertinence de chacune des entités administratives existantes. Mais cette évaluation est faite, aujourd'hui, de manière continue, notamment dans le cadre de la procédure d'élaboration du budget dont elle est un élément incontournable. Ainsi, le jaune « opérateurs » 2020 recensait cinq suppressions d'opérateurs et une fusion, toutes décidées au cours de la phase budgétaire, sur la base d'une analyse de l'efficience et de la pertinence de ces structures.

Vous proposez enfin de fusionner les instances consultatives avec le Conseil social, économique et environnemental. Mais je partage les avis des députés Michel Lauzzana et Stella Dupont : cette proposition ne peut être retenue car le CESE a vocation à faire participer la société civile ou les secteurs économiques aux décisions publiques, alors que beaucoup des instances consultatives que vous citez ont trait, uniquement, au fonctionnement de l'État et à l'activité administrative – par exemple, la commission de déontologie de la fonction publique ou le comité d'harmonisation de l'audit interne de l'État. Ces fonctions, indispensables à la qualité de l'action publique, n'entrent pas dans la mission du CESE, même après rénovation.

Nous partageons l'esprit de la proposition de résolution de Mme Lise Magnier mais certains paramètres d'exécution ne nous semblent pas pertinents. Pour cette raison, je lui donnerai un avis défavorable.

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