Intervention de André Chassaigne

Séance en hémicycle du mardi 18 juin 2019 à 15h00
Agences publiques et instances consultatives nationales — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne :

Là encore, une fois n'est pas coutume, nous partageons l'avis de Clemenceau.

Aussi devons-nous nous montrer intraitables envers les commissions, comités, agences, conseils ou autre créés pour masquer l'inaction du Gouvernement.

Prenons un exemple tout récent : les annonces du Président de la République sur la transition écologique. En conclusion du grand débat, et alors que la question de la transition écologique était à l'origine de la crise des gilets jaunes, nombreux étaient ceux qui attendaient des décisions fortes. Nous étions de ceux qui attendaient que le Gouvernement nous propose enfin, en matière de transition écologique, des mesures audacieuses qui s'adressent aux plus démunis, les premières victimes du dérèglement climatique. C'était sans compter sur l'audace du Président et de sa majorité à ne plus se cacher derrière la communication politique. Après la création, il y a à peine quelques mois du Haut Conseil pour le climat, le Président a eu ce coup de génie : créer un conseil de défense écologique et une convention citoyenne, alors qu'existent déjà une bonne soixantaine de comités chargés de la transition énergétique. À l'heure où le Premier ministre veut mettre au régime sec les agences publiques qui emploient moins de cent salariés, il mérite une palme d'or pour cette manoeuvre sublime !

Du reste, si nous devons nous préoccuper de la multiplication de ce type d'agences ou instances consultatives, nous devons aussi nous préoccuper du sort de celles qui sont aujourd'hui menacées. Prenons l'exemple de l'Office national des forêts, au coeur de la question écologique. Certes, l'ONF n'est pas a priori menacé par l'appétit de « rationalisation » du Gouvernement, puisqu'il emploie aujourd'hui près de 9000 personnes. Et pourtant ! Le Gouvernement travaille au démantèlement du service public forestier pour le confier au privé.

C'est pourquoi, le 7 juin dernier, ses agents se sont à nouveau mobilisés, après plusieurs années d'alerte, pour dénoncer la privatisation de la gestion des forêts publiques qui se profile désormais de manière évidente. Les suppressions d'emplois se poursuivent quand, dans le même temps, l'Office se voit dépossédé toujours plus de ses compétences. Les agents s'inquiètent, à juste titre, d'un rapport interministériel dont les conclusions ont été maintes fois reportées – peut-être seront-elles dévoilées à la faveur de la torpeur de l'été ? Elles viseraient notamment à confier la gestion des forêts communales à des prestataires privés. Le décret relatif à la simplification de la procédure d'autorisation environnementale, soumis à consultation publique, est aussi au coeur des inquiétudes, et pour cause : les quatre axes traités par ce projet de décret malaxaient les expressions « chewing gum », que la majorité préfère qualifier de « disruptives ». Je ne résiste pas au plaisir de vous les livrer : « dématérialisation », « mieux proportionner », « rapidité », « fluidification » : autant d'objectifs brandis pour permettre tout simplement de faciliter et accélérer la destruction de notre patrimoine forestier.

Comment, aujourd'hui, ne pas se mettre en colère contre l'hypocrisie de ce gouvernement, qui envisage, purement et simplement, de supprimer la consultation de l'ONF pour des opérations de déboisement dans les forêts publiques, pour décider d'autoriser ou non la transformation d'une forêt en zone commerciale ou en lotissement ! L'État se passerait donc de l'ONF qui protège et gère les forêts depuis des siècles, comme le soulignent les syndicats. Oui, hypocrisie d'un gouvernement qui nous demandait la semaine dernière de lui accorder sa confiance en nous promettant une « accélération » sur l'écologie, et qui prend dans le même temps des mesures pour faciliter le changement d'usage des sols, pourtant la première cause de la disparition de la biodiversité.

Je ne peux malheureusement poursuivre sur ce sujet qui mériterait à lui seul un débat, mais je crois avoir fait la démonstration que la bonne foi est nécessaire dans le traitement du sujet que nous propose le groupe UDI.

Or si nous ne doutons pas de la bonne foi des auteurs de cette proposition de résolution, permettez que nous mettions très sérieusement en doute celle du Gouvernement quand il nous dit vouloir « rationaliser » les agences publiques. Combien d'agences laissera-t-il au bord du chemin, malgré leur utilité évidente, pour mieux installer des organes qui ne servent qu'à camoufler son inaction ou son désengagement ?

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