Intervention de Valérie Thomas

Séance en hémicycle du jeudi 23 mai 2019 à 9h30
Accord de coopération avec la belgique dans le domaine de la mobilité terrestre — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaValérie Thomas :

L'accord entre le Gouvernement de la République française et le gouvernement du Royaume de Belgique relatif à leur coopération dans le domaine de la mobilité terrestre, que nous examinons aujourd'hui, s'inscrit dans un contexte de partenariat renforcé qui entend répondre à des enjeux de compétition stratégique.

Nous sommes aujourd'hui dans un contexte géopolitique en pleine mutation : le monde est en évolution et recomposition permanente. L'ordre international est ébranlé, fragilisé et contesté – il a montré ses limites au Levant, notamment – et les États-Unis envoient de plus en plus souvent des messages brouillés à l'Europe.

La France est très impliquée dans la résolution des crises internationales et son engagement, qui est non seulement nécessaire à notre sécurité mais qui vise aussi les valeurs humanistes et universelles qu'elle incarne, est reconnu à travers le monde. C'est dans ce contexte que l'accord entre la France et la Belgique prend tout son sens. Il s'inscrit dans un processus qui lie la France et la Belgique dans une stratégie commune de défense : celle-ci s'appuie en premier lieu sur leur appartenance commune à l'OTAN, qui demeure la pierre angulaire de notre défense européenne. Cette alliance a permis le partage d'une culture stratégique, l'interopérabilité des équipements et des procédures, la connaissance mutuelle et la confiance. C'est bien sur ces acquis que s'appuie cet accord.

Néanmoins, il est un espace où beaucoup reste à construire : l'espace européen. L'enjeu majeur aujourd'hui est bien de renforcer l'indépendance de l'Europe qui protège.

Des jalons ont été posés pour créer une Europe de la défense : c'est notamment celui de la coopération structurée permanente – CSP. Ce principe, pourtant inscrit dans le traité de Lisbonne, n'avait jamais été activé. C'est l'initiative franco-allemande à l'automne 2016 qui a permis de mettre en chantier ce renforcement de l'Europe de la défense, lequel se traduit par un engagement des pays à faire davantage et mieux ensemble pour la défense. Ce sont désormais vingt-cinq pays de l'Union européenne, dont la France, qui ont décidé de franchir un cap majeur en matière de coopération de défense.

La CSP est bien une ambition commune pour faire plus et mieux, à travers des engagements orientés vers les missions les plus exigeantes. Ce sont aussi et surtout des projets concrets pour renforcer la sécurité des Européens, face à des menaces communes, comme la persistance d'une menace terroriste djihadiste qui frappe toutes nos sociétés et nos populations, ou le retour des stratégies de puissance des États, rendant le monde plus imprévisible et plus menaçant.

L'Europe de la défense et l'idée de favoriser une culture stratégique commune entre les états européens sont également portées par l'initiative européenne d'intervention – IEI. Elle a été lancée le 25 juin 2018 par la signature d'une lettre d'intention par les ministres de la défense de neuf pays européens. Initiative ambitieuse à caractère résolument opérationnel, l'IEI vise à favoriser l'émergence d'une culture stratégique européenne commune et à créer les conditions préalables à de futurs engagements coordonnés et préparés conjointement sur tout le spectre de crise. Construite autour d'un socle restreint d'États européens ayant démontré leur volonté politique et leur capacité militaire d'assumer un engagement en opérations au service de la sécurité européenne, une fois consolidée, l'initiative pourra être élargie à d'autres États européens remplissant ces mêmes conditions.

La déclaration de Meseberg de juin 2018, faite par Angela Merkel et le président Macron, est également un jalon, une nouvelle étape dans la création de l'Europe de la défense. Son objectif est bien de rendre l'Union européenne davantage capable d'agir sur les questions de politique de sécurité commune. Elle s'attache à développer une culture commune non seulement dans les systèmes d'armement, mais aussi dans les missions de nos armées. En matière de politique étrangère, des engagements forts ont été pris pour envisager un conseil de sécurité européen.

Enfin, dans cette construction de l'Europe de la défense, le Parlement européen vient d'approuver un accord partiel sur la création et la dotation financière du Fonds européen de la défense pour 2021-2027. C'est une nouvelle étape.

L'accord entre la France et la Belgique, parce qu'il est unique et innovant, est donc bel et bien une nouvelle pierre à l'édifice de l'Europe de la défense. La construction de cette Europe n'est donc plus une chimère. Il faut y voir non pas un acte de défiance à l'égard de nos alliés historiques, ni une forme de protectionnisme, mais plutôt la prise en main par l'Europe de son destin, afin d'assurer la protection de 500 millions d'habitants. Une Europe qui protège et une voix qui porte : c'est dans cette dynamique que je vous propose d'adopter cet accord.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.