Intervention de Olivier Dussopt

Séance en hémicycle du mardi 14 mai 2019 à 15h00
Transformation de la fonction publique — Discussion générale

Olivier Dussopt, secrétaire d'état auprès du ministre de l'action et des comptes publics :

Je tiens d'abord à remercier les orateurs de la discussion générale. En guise de réponse, je commencerai par rappeler ce que le texte ne comprend pas. Plusieurs sujets ont en effet été évoqués à plusieurs reprises car ils sont au centre d'autres discussions, mais ne figurent pas dans le texte.

Contrairement à ce que j'ai entendu, notamment de la part de M. Peu, le texte ne prévoit pas de rendre obligatoire la rémunération au mérite. Il comporte deux mécanismes qui se rapportent à la rémunération : le premier vise à procéder à une harmonisation en autorisant la fonction publique hospitalière, à l'instar des fonctions publiques d'État et territoriale, à bénéficier de mécanismes d'intéressement collectif ; le second ouvre la possibilité – sans en faire une obligation – d'introduire une part variable, donc une forme de rémunération au mérite si vous préférez ce terme, dans la rémunération des contractuels – ce qui n'est pas le cas actuellement.

Deuxième sujet qui n'est pas abordé mais a été au coeur de nombre d'interventions parmi lesquelles celle de M. Pascal Brindeau et de M. Philippe Vigier hier soir : l'implantation des services publics. Il est question dans ce texte de gestion des ressources humaines, d'organisation du dialogue social, mais pas d'implantation des services publics.

Toutefois, j'entends la nécessité, soulignée par M. Vigier, Mme Dubré-Chirat et Mme Karamanli, de prévoir – ce que nous faisons au travers du titre IV – des outils d'accompagnement à la mobilité pour permettre la déconcentration que nous appelons de nos voeux, le réinvestissement de territoires ruraux et périurbains en y transférant des services publics aujourd'hui installés dans de grandes villes, des métropoles ou en région parisienne.

De la même manière qu'il n'envisage pas une réorganisation géographique des services publics, le texte ne s'intéresse pas à la révision des missions, contrairement à ce que M. Dharréville semble craindre.

Enfin, il ne s'inscrit pas dans une logique d'extinction du statut. La situation n'est pas comparable à celle qu'a connue il y a plusieurs années l'entreprise France Télécom – qui depuis a pris un autre nom. Il s'agissait alors d'arrêter de recruter sous statut et de n'embaucher que des contractuels.

La meilleure illustration de mon affirmation réside dans la réforme, par la voie réglementaire, à laquelle nous travaillons, des concours de la fonction publique afin de les rendre plus lisibles, plus adaptés aux besoins en matière de recrutement, plus justes, d'assurer dans la fonction publique une plus grande diversité, donc une meilleure représentativité de la société française, et de développer les voies d'accès, comme l'apprentissage, à la position de titulaire. Si nous étions dans une logique d'extinction, notre démarche ne viserait pas à revaloriser les concours et à en garantir le maintien ainsi que la primauté.

M. Gouffier-Cha et Mme Dubré-Chirat ont rappelé les objectifs du texte. Je les remercie d'avoir souligné notre volonté d'apporter de nouvelles souplesses tout en leur associant de nouveaux droits, notamment celui de mieux maîtriser sa carrière et de choisir son évolution professionnelle ainsi que la garantie d'une forme de portabilité.

Pour répondre à M. Marleix, qui m'a interrogé, hier comme en commission, sur les rémunérations les plus importantes, je confirme le chiffre déjà indiqué en commission : selon une étude de l'INSEE, le centile, soit 1 %, des fonctionnaires les mieux payés dans notre pays, gagne plus de 6 430 euros nets par mois, soit une rémunération moyenne nette de 7 800 euros et brute d'un peu plus de 9 800 euros. Cela concerne environ 50 000 agents dans toute la fonction publique.

Ce sujet doit être distingué d'un autre débat que vous avez ouvert tout aussi légitimement sur les fonctionnaires rémunérés hors échelle lettre. Ces derniers ne font pas tous partie du centile le mieux rémunéré puisqu'ils sont hors échelle lettre sur certains gardes dont les rémunérations sont inférieures aux montants que j'ai cités, notamment au sein du ministère de l'éducation nationale.

Vous avez estimé à 70 000 le nombre de fonctionnaires hors échelle lettre. Avec une autre méthode, sur laquelle nous pouvons nous entendre, notamment en retraitant les bonifications indiciaires, nous parvenons au nombre de 57 000. Deux raisons expliquent l'augmentation depuis 1985 du nombre des fonctionnaires hors échelle ainsi que de leur part dans la fonction publique : d'une part, l'allongement des carrières, qui s'est traduit par une présence plus durable dans les grilles, laquelle aboutit à une sortie de la nomenclature en lettres ; d'autre part, le resserrement des échelles de traitement – l'écart entre les différentes échelles de traitement est passé de 1 à 7,06 en 1985 à 1 à 4,6 aujourd'hui.

Nombre d'entre vous – M. Vigier, Mme Dubré-Chirat, Mme Karamanli – ont évoqué les outils pour accompagner la mobilité – nous aurons l'occasion d'y revenir lors de l'examen du titre IV. Certains ont souligné la nécessité de clarifier au préalable les compétences, voire d'un nouvel acte de décentralisation. Cela ne me semble pas opportun à moins de souhaiter un report de cette réforme. Les outils que nous proposons en matière de mobilité – le maintien des rémunérations, l'accompagnement des transitions professionnelles, la formation – répondent au besoin d'accompagnement.

Le sujet de la déontologie a été abordé à de multiples reprises, notamment par Mme Untermaier et Mme Vichnievsky, laquelle a rappelé hier son attachement et son combat pour garantir la probité des responsables publics. Il y a un instant, s'est exprimé Fabien Matras, dont je tiens à nouveau à saluer l'apport essentiel au débat de notre assemblée sur la déontologie, à la suite du rapport qu'il a corédigé avec M. Marleix. Je suis très heureux que les travaux de la commission nous aient permis d'avancer. Nous aurons l'occasion dans les prochaines heures de débattre afin d'enrichir éventuellement le dispositif proposé par les parlementaires afin de fixer un cadre aussi utile, efficace et juste que possible.

S'agissant du temps de travail, nous recherchons l'équité. C'est le sens de la disposition visant la fonction publique territoriale et qui oblige les collectivités territoriales à renégocier, dans l'année qui suivra le renouvellement des assemblées délibérantes, les protocoles encore en vigueur relatifs au temps de travail antérieurs à 2001 et prévoyant un temps de travail inférieur à 1 607 heures.

De nombreuses collectivités l'ont déjà fait, parfois en réponse à des remarques de la chambre régionale des comptes. M. Bernalicis a évoqué la situation d'une ville qui m'est chère, Annonay. La chambre régionale des comptes avait pointé l'inégalité résultant de l'attribution de jours d'ancienneté qui s'appliquait dans la fonction publique territoriale depuis 1970. Par des délibérations du 6 mars et du 12 avril 2018 – s'agissant de l'agglomération pour cette dernière – , la situation a été rectifiée. Nous l'avons fait de notre propre chef, comme nombre de collectivités : régions, départements, communes et agglomérations. Il faut néanmoins accompagner les collectivités qui ne l'auraient pas encore fait et ne l'envisageraient pas spontanément.

J'ai relevé un point d'accord : l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Le texte a été enrichi – je salue l'apport de la délégation aux droits de femmes et de sa rapporteure, Mme Laure Gayte. Nous aurons peut-être l'occasion de l'améliorer encore dans le cadre de l'engagement que nous avons pris vis-à-vis de nos partenaires, les employeurs publics, tous signataires, et les organisations syndicales – sept des neuf organisations représentatives étant également signataires – , d'être fidèles à l'accord intervenu entre eux.

M. Nadot a déploré la moindre ambition en matière de handicap dans le domaine sportif. Je ne partage pas cette appréciation. Les dérogations et adaptations en matière de concours, de parcours professionnels et de promotion sont élargies à d'autres types de handicap que ceux recensés aujourd'hui. La référence à un handicap physique est ainsi supprimée dans les textes qui régissent l'accès à la fonction publique pour permettre la prise en compte d'autres formes de handicap. Ces dispositions, qui viennent s'ajouter à celles qui avaient été intégrées à la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, constituent un véritable progrès.

Enfin, nous y reviendrons sans doute lors de l'examen de l'article 28, M. Nadot a évoqué les détachements automatiques. J'espère à cette occasion vous démontrer, d'une part, que le détachement automatique ou d'office est un outil pensé plus largement que pour le seul domaine sportif et, d'autre part, qu'il est juridiquement bien plus protecteur que le détachement volontaire que nous connaissons aujourd'hui.

Nous avons fait un choix, celui de maintenir le statut tout en l'adaptant. Les principes du statut sont préservés. L'avis du Conseil d'État souligne d'ailleurs que le droit à la participation ainsi que le principe général d'occupation des emplois permanents par des titulaires sont sauvegardés.

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