Intervention de David Lorion

Séance en hémicycle du mardi 30 octobre 2018 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2019 — Outre-mer

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDavid Lorion :

Comme vous le voyez, ce n'est pas votre raisonnement qui nous fait peur – il peut même séduire une partie d'entre nous – , mais la volatilité des mots et le manque d'encadrement de vos promesses. Les populations d'outre-mer bénéficieront-elles, en 2019, de plus nombreuses créations d'emploi ? La réponse est très incertaine !

Vous le savez, nos territoires souffrent d'un chômage chronique, structurel, élevé et, pour tout dire, insupportable. Dans beaucoup de quartiers, plus de six jeunes sur dix sont au chômage ! Cette situation doit s'améliorer rapidement car les collectivités, qui jouaient jusqu'à présent le rôle de l'État providence, ne peuvent plus le faire, tant votre gouvernement les étrangle en contractant la dotation globale de fonctionnement et en supprimant les contrats aidés. Vous reconnaissez le problème en consacrant 81 % de la masse du présent budget au soutien aux entreprises. Mais vos solutions sont-elles assez ciblées pour provoquer un choc de compétitivité en faveur de ces dernières ?

À l'évidence, quelques ajustements font encore défaut pour assurer la pleine efficacité de ces mesures. Par exemple, vous affirmez que la réforme se fait à périmètre constant. Eh bien non ! La transformation du CICE en baisse de charges sociales tire en effet le résultat fiscal à la hausse et diminue les bénéfices des entreprises, donc freine la création d'emplois.

D'autre part, les deux dispositifs que vous avez imaginés, de « compétitivité » – jusqu'à 1,3 SMIC – et de « compétitivité renforcée » – jusqu'à 1,4 SMIC – , ne répondent pas encore tout à fait à la demande des entreprises les plus exposées, car le recentrage des exonérations sur les bas salaires en excluent les entreprises agroalimentaires, informatiques ou touristiques, dont le salaire médian se situe légèrement au-dessus de vos seuils théoriques.

Toutes ces réformes ont été élaborées dans l'urgence, sans réelle étude d'impact, ou en tout cas sans aucune étude suffisamment approfondie. Vous entendez les tester directement sur les entreprises et y réintégrez certaines filières par voie d'amendement. Tout cela est un peu bricolé. Dans l'informatique, par exemple, les chefs d'entreprise ont poussé un cri d'alerte strident, notamment lors de votre déplacement à La Réunion. Ils ont été particulièrement déçus de l'écart entre la parole présidentielle, qui évoquait un « Singapour de l'océan indien », et l'absence de mesures spécifiques pour leur filière – n'est-ce pas contradictoire ?

Les paramètres, madame la ministre, vont encore évoluer : je le sais, et je sais aussi que vous y travaillez. Je reconnais volontiers votre capacité d'écoute et travail, davantage avec le monde économique, d'ailleurs, qu'avec les élus, ce qui me semble parfois dommage. Certaines mesures de financement de l'économie vont dans le bon sens, mais il en manque quelques-unes, on l'a rappelé, à commencer par le préfinancement des entreprises lorsqu'elles ne peuvent bénéficier tout de suite des exonérations fiscales.

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