Intervention de Sylvain Brial

Séance en hémicycle du mardi 30 octobre 2018 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2019 — Outre-mer

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSylvain Brial :

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, chers collègues, les outre-mer souffrent. Ils ont accumulé au fil des ans un retard incontestable. Ils souffrent d'une économie trop souvent remise en cause par les aléas naturels. Ils souffrent d'atteintes trop nombreuses à leur environnement. La société en est profondément marquée, profondément blessée. Ils souffrent de chômage, de sous-développement. Les assises des outre-mer, le Livre bleu des outre-mer, les plans de convergence en ont dressé le constat ; ils ont aussi éveillé l'espoir de reprendre le chemin de l'égalité réelle et du développement économique. Ils affirment la nécessité de lutter, suivant les territoires, contre le départ des forces vives ou, au contraire, contre une démographie et une émigration galopantes.

Le présent budget est le premier par lequel le Gouvernement peut marquer sa volonté d'agir au service des outre-mer. Il y affirme son souhait de substituer une logique de projet à une logique de guichet. Je lui en donne acte.

Vous n'avez, madame la ministre, pas ménagé votre peine. Les chiffres que vous présentez sont flatteurs, mais une étude attentive ne permet pas de vous délivrer un satisfecit, car il faut aussi considérer les redéploiements et les changements de périmètre. Nous devons toutefois reconnaître que vous avez réussi à conserver un budget stable, et nous vous en savons gré.

Ainsi, les grandes masses budgétaires sont conservées. Vous avez multiplié les présentations auprès des élus dans leur diversité géographique et politique ; aussi avons-nous tous pu vous faire part de nos remarques et de nos inquiétudes. Lorsque les allégements fiscaux sont transformés en apports budgétaires, le risque est grand que ceux-ci ne soient pas pérennisés ou qu'ils soient simplement gelés en fonction des aléas du moment. C'est donc nécessairement pour nous une source d'inquiétude et, à terme, un manque de visibilité budgétaire.

Cette inquiétude est partagée par les acteurs économiques de l'outre-mer : ils vous l'ont dit et ont beaucoup travaillé avec vous. Nous nous interrogeons notamment sur la disparition de la TVA NPR, sur le financement du logement social, sur les modifications apportées à la défiscalisation, avec de plus en plus de mesures restrictives, sur la restriction des exonérations de charges ou encore sur la suppression des ZRR et des ZFU en Guyane et à La Réunion.

À l'inverse, le renforcement de l'Agence française de développement, l'AFD, et de Bpifrance, ainsi que le rôle assigné à la Caisse des dépôts et consignations, sont des points positifs ; encore faut-il toutefois que ces différents organismes adaptent leur approche à chacun de nos territoires, ce qu'ils ne font pas aujourd'hui.

Même si je formule des réserves, madame la ministre, je me félicite du maintien du niveau budgétaire de la mission à hauteur d'environ 2,4 milliards d'euros. Nous regrettons néanmoins de n'en n'avoir qu'une vision parcellaire, puisque seul le dixième est soumis à notre réflexion. Le changement de périmètre, l'absence de projection concernant les nouveaux apports budgétaires ou encore l'inexistence, à cette heure, du « orange » – le document de politique transversale – sont autant de difficultés qui nous empêchent de nous faire une juste opinion du traitement réservé à chacun de nos territoires. Pas plus qu'il ne faut créer de tension entre les DOM et les TOM – je pense notamment à la TVA NPR – , il ne faut créer de jalousie, madame la ministre, entre les territoires d'outre-mer.

À ce stade, il m'est impossible de ne pas évoquer la situation du territoire dont je suis élu. Wallis et Futuna sont largement évoqués dans le bleu budgétaire, et le Gouvernement, en maintenant la situation de cette année, tient pour le moment ses engagements. Cela ne résout au demeurant aucun problème : le Gouvernement participe au financement du salaire des personnels de La Poste, mais aucune solution pérenne ne leur est proposée. Il en va de même pour les pompiers.

Le Gouvernement fait aussi le constat de l'enclavement aérien de Futuna et verse à ce titre une participation financière, mais n'apporte pas plus de solution d'avenir. Les contrats de plan et de développement sont financés, mais le rattrapage n'est que fictif. J'espère que vous viendrez bientôt le constater sur place.

Parce que vous êtes animée d'une véritable ambition pour les outre-mer et que je vous crois sincère, madame la ministre, je voterai pour ma part les crédits de la présente mission, et souhaite continuer d'approfondir le travail à vos côtés.

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