Intervention de Paul Christophe

Séance en hémicycle du jeudi 11 octobre 2018 à 22h00
Création d'un répertoire des maladies rares ou orphelines — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Christophe :

Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, chers collègues, la proposition de loi déposée par le groupe Les Républicains que nous examinons maintenant concerne la création d'un répertoire des maladies rares ou orphelines. Une maladie est considérée comme rare dès lors qu'elle touche une personne sur 2 000 dans une population donnée. On compte ainsi plus de 7 000 maladies rares, comme la fibrose kystique, la maladie de Huntington ou encore le syndrome de Marfan. Une maladie orpheline, pour sa part, est une maladie pour laquelle il n'existe pas de traitement autre que celui des symptômes, pas de traitement curatif, donc, mais uniquement des soins pour améliorer la qualité et la durée de vie.

Les personnes touchées par une maladie rare sont, dans leur majorité, des enfants. Les parents entrent alors dans une nouvelle vie jonchée d'obstacles, une nouvelle vie vers l'inconnu. L'inconnu, c'est la première des souffrances. Les malades sont tout d'abord confrontés à l'inconnu de la maladie. Il faut souvent de nombreux rendez-vous et plusieurs rencontres avec différents spécialistes pour qu'un diagnostic puisse enfin se dégager ; durant cette attente interminable, les hypothèses sont égrenées, sans qu'il ne soit possible d'être fixé sur l'ampleur de la maladie. Le diagnostic est long, parfois fastidieux, mais il est primordial pour comprendre la souffrance du malade ; sans diagnostic, il ne reste que l'espoir.

Mais cet espoir, il est difficile de l'entretenir compte tenu du peu d'informations disponibles. L'Observatoire des maladies rares produit certes des données objectives sur les problématiques liées à ces maladies. Il tente de donner une visibilité à ces malades par le biais de forums ou des réseaux sociaux, mais les sources d'information restent trop faibles. L'inconnu demeure donc, et il n'est possible de compter que sur soi.

L'inconnu provoque en outre l'isolement de ces familles, de ces malades. Car, même s'il existe des associations avec lesquelles partager et échanger à propos d'une maladie rare ou orpheline, qu'en est-il lorsqu'aucune maladie n'est diagnostiquée ? Vers qui se tourner ? Comment connaître le meilleur spécialiste à consulter pour traiter la maladie ? Où trouver l'information ?

L'inconnu empêche enfin l'administration d'un traitement car la rareté de la maladie et, disons-le, l'absence de perspectives de rentabilité, affectent l'effort de recherche. Ces maladies ne font en effet pas l'objet d'une recherche aussi poussée que d'autres car les laboratoires ne la jugent pas suffisamment rentable. Dans ce cas, c'est malheureusement la loi du marché qui prime.

L'ensemble de ces inconnus empêche la famille ou le malade lui-même de concentrer ses efforts dans une unique direction : vers le bien-être, vers des jours plus apaisés.

À toutes ces souffrances s'ajoutent les lourdeurs de l'administration. Dans certains cas, la réglementation affecte le malade, qui peut être en droit d'obtenir une dérogation. La durée avant l'obtention de cette dernière est cependant très variable : elle peut aller du simple au double, avec parfois de nombreux mois d'attente. Ces lenteurs entourant l'octroi d'une dérogation, sont incompréhensibles. C'est une souffrance supplémentaire qui pourrait être évitée ; la proposition de loi de notre collègue Pierre Vatin porte cette ambition. Ce texte va dans le bon sens en présentant un moyen d'accélérer le traitement de la demande par l'administration.

Cette souffrance s'accompagne aussi de difficultés d'insertion sociale, car toute démarche demande des efforts, d'insertion professionnelle, dans la mesure où il est bien souvent compliqué de trouver un emploi, et d'insertion citoyenne, du fait des difficultés rencontrées à exercer les libertés politiques. C'est une question de société. Est-ce à la personne atteinte d'une maladie rare de s'adapter au plus grand nombre ou est-ce à la société de s'adapter à ces souffrances particulières ? La réponse est évidente. Notre société, dirigée par des valeurs que nous partageons, se doit d'être guidée par la solidarité. Dans chaque politique publique, il nous appartient de penser l'inclusion des personnes en difficulté.

Pourtant, certains ici nous objecteront qu'il existe déjà Orphanet. C'est un outil précieux permettant d'améliorer la visibilité des maladies rares pour ce qui est du soin et de la recherche, de la mise à disposition et de la production d'informations pour un accès à la connaissance. Seulement, de l'aveu même d'Orphanet, les malades et les familles rencontrent tous des difficultés similaires : l'obtention d'informations, l'orientation vers les professionnels compétents, l'accès à des soins de qualité, la prise en charge globale sociale et médicale, la coordination des soins hospitaliers et de ville, l'autonomie et l'insertion sociale, professionnelle et citoyenne. Il est inconcevable que les personnes atteintes d'une maladie rare ou orpheline aient à payer les lenteurs de l'administration, qui devrait au contraire permettre d'inclure ces personnes et leur rendre la vie plus facile.

Je salue, madame la ministre, la volonté que vous venez d'exprimer d'améliorer la situation des victimes de ces affections graves et rares. D'ailleurs, je ne peux résister à l'envie de vous interpeller à nouveaux au sujet des victimes de fibromyalgie : quelque 2,5 millions de personnes en attente de reconnaissance de ce qui est une maladie, non un syndrome.

La proposition de loi ouvre le débat. Elle comporte des mesures allant dans le bon sens, qui ne doivent pas être écartées. Il est de notre responsabilité de permettre à ces malades, à ces familles, par tous les moyens, par toutes les bonnes volontés, de créer un environnement propice à leur bien-être.

Les débats en commission ont démontré qu'elle ne saurait faire l'unanimité. Nous ne pouvons cependant que saluer l'inspiration du rapporteur. Nous considérons d'un oeil favorable cette proposition de loi issue de l'expérience de terrain du rapporteur et des retours directs de nos concitoyens. C'est au législateur de se faire l'écho de leurs attentes. C'est pour cette raison que nous sommes favorables à la mise en place d'une expérimentation sur ce sujet.

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