Intervention de Guillaume Gouffier-Cha

Séance en hémicycle du lundi 25 septembre 2017 à 16h00
Sécurité intérieure et lutte contre le terrorisme — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuillaume Gouffier-Cha, rapporteur pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées :

Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, madame la ministre, mes chers collègues, préalablement à mon propos, je tiens à rendre hommage aux femmes et aux hommes, qu'ils soient militaires, policiers ou gendarmes, qui, au quotidien et bien souvent au risque de leur vie, assurent notre sécurité en France et en opération extérieure. Nous leur devons tant.

Aujourd'hui, la menace terroriste reste grave en France, les attaques survenues sur le territoire national et à l'étranger l'ont douloureusement démontré, ces derniers mois. C'est dans ce contexte que le Gouvernement a présenté, dès juin 2017, un projet de loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme.

Ce texte est nécessaire car il nous faut sortir de l'état d'urgence. Il est courageux car nous pourrions nous contenter de proroger indéfiniment ce régime en laissant penser qu'il est le seul rempart contre le terrorisme islamiste. Il est responsable car il va nous permettre de trouver le bon équilibre entre nos exigences en matière de libertés publiques et de sécurité.

Le temps étant compté, je ne reviendrai pas en détail sur les articles dont la commission de la défense s'est saisie pour avis, c'est-à-dire les articles 5 à 7 et 8 à 9 – nous en débattrons lors de la discussion. Je dirai tout de même quelques mots sur les techniques de renseignement concernées. Je ne présenterai pas ici ce que le texte prévoit ; je tiens en revanche à dire ce qu'il n'est pas.

Contrairement à ce que laissent penser certains arguments, il ne témoigne pas d'une volonté de surveillance généralisée. Il ne permettra pas aux services d'écouter davantage qu'auparavant. Il leur permettra de surveiller autant mais dans un cadre juridique renouvelé, conforme aux droits et libertés garantis par notre Constitution. Il sera plus protecteur des libertés publiques, du respect de la vie privée et du secret des correspondances. Il sera entouré de garanties inédites dans le domaine du hertzien public, ce qui est au demeurant parfaitement légitime.

En ce qui concerne le système API-PNR aérien – données d'enregistrement et d'embarquement, et données de réservation – , il s'agit de transposer une directive européenne. Nous y sommes tenus. Ce dispositif existe de manière expérimentale depuis notre dernière loi de programmation militaire et il a démontré toute son efficacité pour prévenir ou détecter les formes rares de criminalité, par exemple les actes terroristes, la traite d'êtres humains et le trafic d'armes.

De la même manière, la pérennisation d'un système PNR maritime me semble indispensable, la menace ne s'arrêtant pas aux quais de nos ports et le secteur maritime présentant des vulnérabilités auxquelles il est nécessaire de remédier. Je rappelle ici l'importance des flux en question : 32,5 millions de passagers par an pour la France.

Je souhaiterais maintenant replacer notre débat dans un cadre plus général. Certains s'opposent résolument aux outils de prévention que j'ai brièvement évoqués. C'est naturellement leur droit le plus strict mais je veux ici être clair : aucun politique ou opérationnel responsable ne prétendra jamais que de tels dispositifs permettent de déjouer à coup sûr tous les projets d'attentats, mais aucun politique ou opérationnel responsable ne renoncera à les utiliser. Ces outils ne sont certes pas infaillibles, pas suffisants en tant que tels, mais ils sont indispensables car ils confèrent aux services qui travaillent à la sécurité de nos concitoyens la palette la plus complète possible de leviers d'action.

Certains d'entre vous, chers collègues, soutiendront des amendements tendant à supprimer ces articles ou à les vider de leur substance, mais sans proposer d'alternative. Ne perdons pas de vue un fait : le niveau de menace reste très élevé et il le restera pendant plusieurs années encore ! Devrions-nous alors faire comme si nous vivions une période normale, apaisée ? Non, personnellement, je ne le pense pas.

Bien sûr, dans un monde idéal, de tels dispositifs ne devraient pas exister mais, dans un monde idéal, la violence fanatique et aveugle ne devrait pas exister non plus. Or elle est là, bien présente. Il est de notre responsabilité de le reconnaître et de tout mettre en oeuvre, dans le respect de nos valeurs démocratiques, pour prévenir au mieux les effets de cette violence et les réprimer lorsque c'est nécessaire. Dans ces domaines, je crois que nous devrions tous, quelles que soient nos appartenances politiques, faire preuve de beaucoup d'humilité et de responsabilité.

Cela passe aussi, et j'en terminerai par là, par le fait de prendre conscience que la lutte contre le terrorisme islamiste n'est pas uniquement une question de dispositifs de sécurité nationale. L'existence d'États faillis, de régimes violents, oppressifs, les inégalités et l'extrême pauvreté expliquent pour partie la radicalisation. Ces réalités dépassent le cadre de nos compétences strictement nationales mais nous devons les garder à l'esprit. Les causes de la radicalisation sont multiples. Il faut les déterminer précisément, les analyser, les expliquer, au sens scientifique du terme. Expliquer n'étant pas excuser, encore moins souscrire. Expliquer permettant de comprendre, et comprendre permettant de prévenir et de lutter, pour protéger ce que nous sommes, notre pays et nos valeurs.

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