Intervention de Nicolas Démoulin

Séance en hémicycle du jeudi 21 juin 2018 à 21h30
Défense du droit de propriété — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicolas Démoulin :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, chers collègues, depuis le début de cette discussion, j'entends parler du droit de propriété. Je voudrais profiter du temps qui m'est imparti pour évoquer le droit au logement.

En préambule, je souligne que je ne cherche pas à opposer les deux ni à faire primer l'un sur l'autre. Ce n'est pas notre philosophie, le projet de loi ELAN en atteste. En me faisant le porte-voix de personnes trop souvent inaudibles, je tiens simplement à rééquilibrer les termes du débat.

La loi DALO du 5 mars 2007, adoptée sous le gouvernement Villepin, permet aux personnes mal logées ou ayant attendu en vain un logement social, de faire valoir leur droit à un logement décent. Ce droit est opposable, c'est-à-dire que le citoyen dispose de voies de recours pour obtenir sa mise en oeuvre effective. L'État est garant de ce droit.

Les personnes éligibles à ce dispositif se trouvent dans l'une des situations suivantes : sans aucun logement, menacées d'expulsion, hébergées dans une structure d'accueil, logées dans des locaux insalubres ou suroccupés, ou encore demandeuses de logement social depuis un délai anormalement long, autant de situations humaines difficiles, desquelles notre regard ne peut se détourner.

Cette loi a permis, depuis 2008, de reloger près de 150 000 demandeurs. Malgré cette avancée, plus de 50 000 demandeurs restent à reloger, concentrés dans dix-huit départements, parmi lesquels figure l'Hérault, département où je suis élu. Elle est un symbole de solidarité : bien qu'imparfaite, elle a produit des résultats positifs, comme je viens de le rappeler, et notre groupe y tient.

Or votre proposition de loi la remet en cause, plus particulièrement, en son article 2, qui exclut du bénéfice du DALO les personnes ayant été condamnées pour avoir squatté un logement. Il s'agirait là d'une peine automatique, ce qui est par définition prohibé. En outre, cette mesure est, dans son esprit même, totalement régressive, car elle prive toute une catégorie de personnes d'un droit de valeur constitutionnelle.

Au-delà, cette mesure nous semble contre-productive. Le DALO a précisément pour objet de permettre aux personnes mal logées de faire valoir leur droit à un logement décent. En excluant de ce dispositif des personnes en ayant besoin, vous les poussez à reproduire indéfiniment les faits pour lesquels elles ont été condamnées ; vous les punissez sans apporter la moindre solution.

Je terminerai par un mot sur l'article 1er, par lequel vous visez les situations « d'occupation sans droit ni titre d'un bien immobilier ». Il dépasse largement le cas des logements squattés, que vous prétendez pourtant cibler. Je ne donnerai qu'un exemple. Après la résiliation d'un bail d'habitation, celui qui était locataire devient de fait occupant sans droit ni titre. Or les conditions de son expulsion sont strictement encadrées par le code des procédures civiles d'exécution, afin de préserver le droit au logement. Avec votre proposition de loi, c'en sera fini de la trêve hivernale et des autres mesures protectrices : vous donnez la possibilité aux propriétaires de faire expulser par voie administrative tout occupant, à tout moment.

Votre texte nous semble excessif : c'est pourquoi nous nous y opposerons – vous l'aurez compris – en votant pour la motion de rejet préalable.

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